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10/10/2019 | FRANCE | N°18-20936

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 octobre 2019, 18-20936


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, qui est recevable :

Vu l'article D. 213-1-2 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon ce texte, qu'en application du pouvoir de coordination prévu par l'article L. 225-1-1 et pour des missions de contrôle spécifiques, le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale peut, à son initiative ou sur demande émise par une union, demander à une union de recouvrement de déléguer, sous la forme d'une convention de réciprocité spécifique, ses com

pétences en matière de contrôle à une autre union de recouvrement ; que ce texte n...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, qui est recevable :

Vu l'article D. 213-1-2 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon ce texte, qu'en application du pouvoir de coordination prévu par l'article L. 225-1-1 et pour des missions de contrôle spécifiques, le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale peut, à son initiative ou sur demande émise par une union, demander à une union de recouvrement de déléguer, sous la forme d'une convention de réciprocité spécifique, ses compétences en matière de contrôle à une autre union de recouvrement ; que ce texte n'a pas pour objet ni pour effet de subordonner la régularité d'un contrôle concerté à l'existence préalable d'une convention de réciprocité spécifique, mais uniquement d'étendre la compétence des organismes chargés d'y procéder ; qu'une délégation spécifique de compétence n'est pas nécessaire lorsque ceux-ci bénéficient déjà d'une délégation de compétence prenant la forme d'une convention générale de réciprocité consentie en application de l'article L. 213-1 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir procédé, pour les années 2010 et 2011, au contrôle des établissements de la société Sacer Paris Nord Est, aux droits de laquelle vient la société Colas Nord-Est, implantés dans le département du Doubs, l'URSSAF de Paris et de la région parisienne lui a adressé une lettre d'observations mentionnant plusieurs chefs de redressement ; qu'une mise en demeure lui ayant été adressée par l'URSSAF de Besançon, aux droits de laquelle vient l'URSSAF de Franche-Comté, la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour annuler le redressement, l'arrêt retient que le contrôle a été opéré dans le cadre d'un contrôle concerté et que la convention générale de réciprocité dont disposait l'URSSAF de Paris et de la région parisienne ne pouvait suppléer l'absence de délégation spécifique ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les deux URSSAF ayant procédé aux opérations de contrôle et de recouvrement avaient adhéré à une convention générale de réciprocité, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette l'exception d'irrecevabilité de la demande d'annulation de l'avis de la commission de recours amiable et déboute la société Colas Nord-Est de cette demande, l'arrêt rendu le 8 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;

Condamne la société Colas Nord-Est aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Colas Nord-Est et la condamne à payer à l'URSSAF de Franche-Comté la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF de Franche-Comté.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit fondé le recours de la société Colas Nord Est, précédemment dénommée Colas Est, venant aux droits de la société Sacer Paris Nord Est, à l'encontre de la décision de la commission de recours amiable de l'Urssaf de Franche Comté du 20 septembre 2013, annulé le contrôle diligenté par l'Urssaf de Paris et Région parisienne dans les quatre établissements de la société Sacer Paris Nord Est situés dans le département du Doubs à Velesme les Essarts, Evillers, Dannemarie sur Crete et Vuillecin et dit que l'annulation du contrôle entraînait l'annulation des redressements et des rappels de droits subséquents ainsi que de la mise en demeure correspondante et D'AVOIR condamné l'Urssaf aux dépens et au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les conventions de réciprocité ; que le tribunal des affaires de la sécurité sociale, après avoir relevé que le contrôle s'est effectué dans le cadre d'une action concertée de contrôle au niveau national, a jugé que dans un tel cas la convention générale de réciprocité ne permet pas à un autre organisme d'effectuer des contrôles pour lesquels une délégation spécifique est nécessaire, et que celle-ci étant inexistante en l'espèce, le contrôle effectué sur les quatre établissements du département du Doubs est entaché de nullité ; que l'URSSAF conteste s'être trouvée dans le cadre d'une action concertée de contrôle, et soutient au contraire qu'elle a effectué les contrôles litigieux dans le cadre d'une convention générale de réciprocité portant délégation de compétence en matière de contrôle ; que la SAS Colas Nord Est pour sa part soutient que le contrôle s'est bien effectué dans le cadre d'une action concertée de contrôle, ce qui n'était pas contesté en première instance, de sorte qu'une délégation spécifique était bien nécessaire ; que l'article R 243-6 du code de la sécurité sociale pose un principe de compétence territoriale des URSSAF ; que cependant l'article L 213-l du même code permet en matière de recouvrement, de contrôle, et de contentieux à une union de recouvrement de déléguer à une autre union ses compétences dans les conditions fixées par l'article D 213-1-l du même code, et ce dans le cadre d'une convention générale de réciprocité ; que par ailleurs en matière de contrôle concerté décidé par l'ACOSS dans le cadre des pouvoirs propres qui lui sont conférés par l'article L 225-1-1 3 du code de la sécurité sociale, une délégation de compétence peut être accordée à une autre URSSAF sous la forme d'une convention spécifique de réciprocité prévue par l'article D 213-l-2 ; qu'i1 résulte des pièces produites que M. Q... directeur de l'ACCOS signait le 24 octobre 2011 un « Plan des actions nationales de contrôle » 2012 qui, en page 9, mentionne « Colas (autres entreprises du groupe) »; que par courrier du 3 février 2012 dont l'objet est « Lancement du contrôle concerté national du groupe Colas » I'ACCOS adresse un certains nombre de recommandations pour la mise en oeuvre du contrôle au directeur de l'Urssaf du pays de Loire, et que la page 2 de l'annexe mentionne bien parmi les sociétés à contrôler la société Sacer Paris Nord Est travaux publics, aux droits de laquelle vient la SAS Colas Nord Est ; qu'il doit être relevé que ces deux documents n'ont pu être obtenus que suite à une ordonnance sur requête du 9juin 2016 rendue le président du tribunal de grande instance de Bobigny ; qu'il résulte de ces deux documents que le contrôle des quatre établissements de la société Colas Nord Est a été opéré dans le cadre d'un contrôle concerté, et que la lettre de lancement du contrôle concerté du 3 février 2012, comprenant des règles d'harmonisation des pratiques, et d'équité de traitement du cotisant se situe très précisément dans le cadre des missions de l'ACOSS ; que dans ces conditions que c'est vainement que l'URSSAF de Franche-Comté soutient que le contrôle des quatre établissements litigieux ne fait pas partie du contrôle concerté, mais aurait été organisé par ailleurs dans le cadre d'une convention générale de réciprocité au profit de I'URRSAF de Paris, alors que le plan d'action nationale de 2012 mentionne le groupe Colas, et que plus précisément le lancement du contrôle concerté national du groupe Colas vise dans son annexe la société Sacer Paris Nord Est travaux publics, aux droits de laquelle vient la SAS Colas Nord Est ; qu'il est surabondamment relevé qu'il serait peu compréhensible que les recommandations. de l'ACOSS s'agissant de l'harmonie des pratiques et l'équité du traitement du cotisant, en l'espèce le groupe Colas, ne profitent pas à l'ensemble des sociétés du groupe faisant l'objet d'un contrôle au plan national, mais uniquement à certaines d'entre elles ; qu'il convient dans ces conditions de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'il annule le contrôle diligenté par l'URSSAF de Paris et région parisienne dans les quatre établissements litigieux, dès lors que cet URSSAF ne dispose que d'une convention générale de réciprocité qui ne peut suppléer à l'absence de délégation spécifique nécessaire dans le cadre d'un contrôle d'action concertée ; que sur la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, que l'équité commande de condamner l'URSSAF de Franche-Comté à payer à la SAS Colas Nord Est une somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il ressort expressément des dispositions de l'article L 225-1-1 3° quinquies du code de la sécurité sociale que l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) initie et coordonne les actions concertées de contrôle menées par les organismes de recouvrement ; que les conclusions de l'Urssaf Franche Comté précisent que les quatre établissements situés dans le département du Doubs ont fait l'objet d'un contrôle concerté ; que de même, la lettre des services de l'ACOSS en date du 03/02/12 rappelle à l'Urssaf des Pays de la Loire que l'ensemble des directeurs ont été informés le 24/10/11 que le groupe Colas ferait l'objet d'un contrôle national concerté en 2012 ; qu'il résulte de ces éléments et des modalités du contrôle litigieux qu'il a été conduit à l'initiative et sous la coordination de l'ACOSS dans le cadre des dispositions de l'article D 213-1-2 qui exige que l'organisme contrôleur ait reçu délégation de compétence de l'union d'affiliation sous la forme d'une convention de réciprocité spécifique ;qu'or il est de principe, depuis l‘entrée en vigueur du texte précité qu'une convention générale de réciprocité ne donne compétence à un autre organisme que pour effectuer des contrôles ponctuels et que les actions concertées doivent être conduites par un organisme disposant d'une délégation spécifique ; qu'en conséquence, la convention générale alléguée entre l'Urssaf du Doubs et celle de Paris et Région parisienne ne peut suppléer à l'absence de délégation spécifique audit contrôle ; qu'il résulte de cette absence de délégation spécifique que le contrôle diligenté dans les quatre établissements du département du Doubs est entaché de nullité, l'Urssaf de Paris et Région parisienne n'ayant pas reçu compétence pour y procéder ; que cette nullité s'étend à tous les actes subséquents à la vérification et notamment aux redressements d'assiette et aux rappels de cotisations qui en sont résultés, ainsi qu'à la mise en demeure qui les met en recouvrement.

ALORS QUE dans le cas où le contrôle diligenté intervient dans le cadre d'un contrôle d'action concertée prévu par l'article L 225-1-1 du code de la sécurité sociale, une délégation spécifique de compétence n'est pas nécessaire lorsque les organismes de recouvrement chargés de procéder au contrôle bénéficient déjà d'une délégation de compétence prenant la forme d'une convention générale de réciprocité consentie en application de l'article L 213-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en l'espèce, l'Urssaf de Franche Comté, auparavant dénommée Urssaf de Besançon, a, comme l'Urssaf de Paris Région parisienne, adhéré à une convention générale de réciprocité signée le 13 mars 2002 (prod. n° 5) ; que l'Urssaf de Paris Région parisienne était donc compétente pour procéder à un contrôle dans les quatre établissements situés dans le Doubs de la société Sacer Paris Nord Est, aux droits de laquelle vient la société Colas Nord Est, peu important, que le contrôle aurait été effectué dans le cadre d'un contrôle concerté au niveau national, et qu'il n'y ait pas eu de convention de réciprocité spécifique ; qu'en retenant au contraire que la convention générale de réciprocité dont disposait l'Urssaf de Paris Région parisienne ne pouvait suppléer l'absence de délégation spécifique qui aurait été nécessaire dans le cadre d'un contrôle d'action concertée, la cour d'appel a violé les articles L 213-1, L 225-1-1, D 213-1-1 et D 213-1-2 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-20936
Date de la décision : 10/10/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 08 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 oct. 2019, pourvoi n°18-20936


Composition du Tribunal
Président : M. Prétot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.20936
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