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24/10/2019 | FRANCE | N°18-21397

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 24 octobre 2019, 18-21397


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 783 et 910 du code de procédure civile ;

Attendu qu'après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée à peine d'irrecevabilité prononcée d'office ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 21 septembre 1995, M. V..., employé de la société Getelec Guadeloupe, a été électrocuté alors qu'il intervenait sur les installations électriques de distribution de la société EDF, détériorées à

la suite du passage de deux cyclones ; que la société EDF et son assureur, la société Axa Corporat...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 783 et 910 du code de procédure civile ;

Attendu qu'après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée à peine d'irrecevabilité prononcée d'office ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 21 septembre 1995, M. V..., employé de la société Getelec Guadeloupe, a été électrocuté alors qu'il intervenait sur les installations électriques de distribution de la société EDF, détériorées à la suite du passage de deux cyclones ; que la société EDF et son assureur, la société Axa Corporate solutions assurance, arguant du marché de travaux liant les parties et de la responsabilité partielle de la société Getelec Guadeloupe dans la survenue du dommage, l'ont assignée en responsabilité et indemnisation, au titre des sommes mises à leur charge par le jugement du 21 octobre 2010 du tribunal administratif de Basse-Terre et des sommes à devoir au titre des indemnités complémentaires sollicitées par la victime ;

Attendu que, pour rejeter les demandes, l'arrêt se prononce au visa des conclusions de la société Getelec Guadeloupe remises au greffe le 22 février 2018 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance de clôture avait été rendue le 6 novembre 2017, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;

Condamne la société Getelec Guadeloupe aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Axa Corporate solutions assurance et la société Electricité de France

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, au visa des conclusions d'appel de la Société GETELEC signifiées le 22 février 2018, débouté la SA Electricité de France et la SA AXA Corporate solutions insurance de leurs demandes ;

AUX MOTIFS QUE « vu les dernières conclusions remises au greffe le 22 février 2018 par lesquelles la SAS Getelec demande à la cour de : -déclarer irrecevable l'action judiciaire engagée par EDF et son assureur, la société AXA, à son encontre au titre de l'interdiction pour tous tiers d'engager une action contre l'employeur de la victime d'un accident du travail, -déclarer irrecevable l'action judiciaire engagée par EDF et son assureur, la société AXA, à son encontre, en raison de l'expiration du délai de prescription prévu par l'article L. 110-4 du code de commerce en vigueur au moment de la connaissance des manquements contractuels prétendus. A titre subsidiaire, -constater la responsabilité intégrale de la société EDF dans la survenance de l'accident du travail dont a été victime M. Z... V... conformément au jugement définitif rendu le 21 octobre 2010 du tribunal administratif de Basse-Terre, -débouter la société EDF et son assureur, la société AXA de l'ensemble de leurs demandes. La SAS Getelec reproche au jugement critiqué d'avoir sursis à statuer sans égard pour le moyen d'irrecevabilité de l'action de la société EDF soulevé devant le tribunal, alors que : 1°/ la société EDF, tiers étranger à l'entreprise Getelec, condamné à réparer l'entier dommage de M. V... victime d'un accident du travail, n'a pas de recours contre l'employeur ou ses préposés, en vertu des articles L.451-1 et 452-5 du code de la sécurité sociale. 2°/ le marché-cadre invoqué par la société EDF applicable du 1er septembre 1996 au 31 octobre 1997 est postérieur à l'accident du travail dont a été victime M. V... le 21 septembre 1995. 3°/ l'action en responsabilité contractuelle engagée par la société EDF est prescrite par application de l'article L.110-4 du code de commerce en vigueur jusqu'au 19 juin 2008. 4°/ l'exécution du marché en régie engage la responsabilité exclusive de EDF. Les moyens de la société Getelec sont plus amplement développés dans des dernières conclusions auxquelles il est expressément renvoyé » ;

ET QUE « selon l'article 1147 ancien du code civil devenu 1231-1 du même code, sur lequel s'appuie les intimées pour fonder leur action, que le débiteur est condamné s'il y a lieu à des dommages intérêts, soit en raison de l'inexécution de l'obligation, soit en raison du retard dans l'exécution toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne lui est pas imputable encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; que la société EDF et son assureur la société AXA entendent rechercher la responsabilité contractuelle de la société Getelec sans produire au débat la convention liant les parties et partant, sans mettre la cour en mesure de vérifier l'étendue de la faute commise au regard des clauses du contrat ; que le manquement imputé à la société Getelec par les intimées, à l'obligation d'assurer de la sécurité du personnel sur le chantier, si elle peut ressortir des relations entre l'employeur et ses salariés, ne constitue pas l'objet de la prestation attendue par la société EDF ; qu'à le supposer établi, le marché en dépenses contrôlées tendant à la fourniture de prestations déterminées par l'entrepreneur, ne peut engager la responsabilité contractuelle de la société Getelec qu'en présence d'une exécution défectueuse de l'objet du marché ; qu'en l'état des éléments fournis, il convient d'infirmer le jugement entrepris et de débouter les sociétés EDF et AXA Corporate Solutions Insurance de leurs demandes » ;

1. ALORS D'UNE PART QU'après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office ; qu'en statuant, en l'espèce, au vu de conclusions signifiées par la Société GETELEC le 22 février 2018, soit après l'ordonnance de clôture intervenue le 6 novembre 2017, la Cour d'appel a violé l'article 783 du Code de procédure civile ;

2. ET ALORS D'AUTRE PART QUE les sociétés EDF et AXA Corporate Solutions Insurance faisaient valoir, dans des conclusions d'incident, que les conclusions de la Société GETELEC, signifiées le 22 février 2018 quand la clôture était intervenue le 6 novembre 2017, devaient être déclarées irrecevables (production) ; qu'en statuant néanmoins au vu de conclusions signifiées par la Société GETELEC le 22 février 2018 sans répondre à ce moyen pourtant déterminant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la SA Electricité de France et la SA AXA Corporate solutions insurance de leurs demandes ;

AUX MOTIFS QUE « selon l'article 1147 ancien du code civil devenu 1231-1 du même code, sur lequel s'appuient les intimées pour fonder leur action, que le débiteur est condamné s'il y a lieu à des dommages intérêts, soit en raison de l'inexécution de l'obligation, soit en raison du retard dans l'exécution toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne lui est pas imputable encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; que la société EDF et son assureur la société AXA entendent rechercher la responsabilité contractuelle de la société Getelec sans produire au débat la convention liant les parties et partant, sans mettre la cour en mesure de vérifier l'étendue de la faute commise au regard des clauses du contrat ; que le manquement imputé à la société Getelec par les intimées, à l'obligation d'assurer de la sécurité du personnel sur le chantier, si elle peut ressortir des relations entre l'employeur et ses salariés, ne constitue pas l'objet de la prestation attendue par la société EDF ; qu'à le supposer établi, le marché en dépenses contrôlées tendant à la fourniture de prestations déterminées par l'entrepreneur, ne peut engager la responsabilité contractuelle de la société Getelec qu'en présence d'une exécution défectueuse de l'objet du marché ; qu'en l'état des éléments fournis, il convient d'infirmer le jugement entrepris et de débouter les sociétés EDF et AXA Corporate Solutions Insurance de leurs demandes » ;

1. ALORS QUE les Sociétés Axa et EDF versaient aux débats le « cahier des clauses et des spécifications particulières » édité en 1994 (production), qui constituait, selon les conclusions de la Société GETELEC elle-même, le contrat conclu entre la Société EDF et la Société GETELEC et énonçait précisément les obligations mises à la charge des entreprises ayant conclu un marché avec la Société EDF; qu'en retenant néanmoins, pour les débouter de leurs demandes, que « la société EDF et son assureur la société AXA entendent rechercher la responsabilité contractuelle de la société Getelec sans produire au débat la convention liant les parties et partant, sans mettre la cour en mesure de vérifier l'étendue de la faute commise au regard des clauses du contrat » (arrêt p. 4 alinéa 5), la Cour d'appel a dénaturé, par omission, le cahier des clauses produit, violant ainsi l'article 1103 nouveau du Code civil, anciennement 1134 du Code civil ;

2. ET ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE le cahier des charges, document contractuel, avait pour objet de déterminer les conditions, tant techniques qu'administratives, dans lesquelles le marché conclu entre la Société EDF et les entreprises titulaires d'un marché devait être exécuté ; que les Sociétés Axa et EDF se fondaient, pour démontrer l'étendue des obligations contractuelles pesant sur la Société GETELEC, sur le « cahier des clauses et des spécifications particulières » édité en 1994, qu'elles produisaient ; qu'en retenant néanmoins, pour les débouter de leurs demandes, que « la société EDF et son assureur la société AXA entendent rechercher la responsabilité contractuelle de la société Getelec sans produire au débat la convention liant les parties et partant, sans mettre la cour en mesure de vérifier l'étendue de la faute commise au regard des clauses du contrat » (arrêt p. 4 alinéa 5), sans expliquer en quoi le cahier des charges produit, qui énonçait précisément les droits et obligations des parties, et était reconnu par les deux parties comme étant le contrat les liant, « ne la mettait pas en mesure de vérifier l'étendue de la faute commise au regard des clauses du contrat », la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1231-1 et 1103 nouveaux du Code civil, anciennement 1147 et 1134 du Code civil ;

3. ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, observer et faire observer le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que l'obligation de sécurité ne constituait pas l'objet même du contrat pour en déduire que son inexécution ne pouvait pas engager la responsabilité contractuelle de la Société GETELEC, et débouter les Sociétés Axa et EDF de leurs demandes, sans préalablement inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile ;

4. ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que le « cahier des clauses et des spécifications particulières », qui constituait le corps du contrat conclu entre la Société EDF et la Société GETELEC, mettait à la charge du cocontractant de la Société EDF l'obligation de « prendre sous sa responsabilité et à ses frais, pendant toute la durée du chantier, les mesures nécessaires afin d'assurer la sécurité des personnes et des biens concourant à la réalisation des travaux » (production) ; qu'il en résultait que, par ce contrat, la Société GETELEC s'était engagée envers la Société EDF à assurer la sécurité des personnes travaillant sur le chantier ; que la Société EDF recherchait sa responsabilité pour manquement à cette obligation, manquement dont il était résulté un préjudice consistant, pour elle, en l'obligation de devoir indemniser, Monsieur V..., victime du manquement de la Société GETELEC à l'obligation contractée envers la Société EDF d'assurer sa sécurité pendant qu'il travaillait sur le chantier ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de la Société EDF, que « le manquement imputé à la société Getelec par les intimées, à l'obligation d'assurer de la sécurité du personnel sur le chantier, si elle peut ressortir des relations entre l'employeur et ses salariés, ne constitue pas l'objet de la prestation attendue par la société EDF ; qu'à le supposer établi, le marché en dépenses contrôlées tendant à la fourniture de prestations déterminées par l'entrepreneur, ne peut engager la responsabilité contractuelle de la société Getelec qu'en présence d'une exécution défectueuse de l'objet du marché » (arrêt p. 4 alinéa 5), quand tout manquement du cocontractant à ses obligations contractuelles, fussent-elles accessoires à son obligation principale, est de nature à engager sa responsabilité contractuelle, la Cour d'appel a violé l'article 1103 nouveau du Code civil, anciennement 1134 du Code civil ;

5. ALORS QUE la compagnie EDF et son assureur étaient fondés à rechercher la responsabilité de la société GETELEC à raison de tout manquement à ses obligations de nature à leur préjudicier ; qu'en se fondant, pour débouter la société EDF et AXA de leurs demandes dirigées contre la société GETELEC sur la circonstance que le manquement de cette dernière à son obligation d'assurer la sécurité du personnel sur le chantier ne constituait pas l'objet de la prestation attendue par la société EDF, la Cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant en violation de l'article 1103 du Code civil (anciennement 1134).


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-21397
Date de la décision : 24/10/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 11 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 24 oct. 2019, pourvoi n°18-21397


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.21397
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