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31/03/2021 | FRANCE | N°19-24541

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 mars 2021, 19-24541


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 mars 2021

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 395 F-D

Pourvoi n° T 19-24.541

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 31 MARS 2021

Mme I... U..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi

n° T 19-24.541 contre l'arrêt rendu le 19 septembre 2019 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. O... M..., ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 mars 2021

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 395 F-D

Pourvoi n° T 19-24.541

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 31 MARS 2021

Mme I... U..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° T 19-24.541 contre l'arrêt rendu le 19 septembre 2019 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. O... M..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme U..., de la SCP Boulloche, avocat de M. M..., après débats en l'audience publique du 9 février 2021 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Barincou, conseiller rapporteur, Mme Mariette, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 19 septembre 2019), Mme U... a été engagée le 11 mars 2013, en qualité de collaboratrice, par M. M..., mandataire judiciaire.

2. La salariée a été destinataire d'une lettre de rappel à l'ordre du 28 septembre 2015.

3. Elle a été licenciée pour faute grave le 16 novembre 2015.

4. Elle a saisi la juridiction prud'homale pour faire constater des faits de harcèlement moral dont elle aurait été victime et contester son licenciement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral et, en conséquence, de l'intégralité de ses prétentions au titre de la rupture du contrat de travail, dont sa demande de nullité du licenciement et les demandes afférentes, alors :

« 1°/ que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, à charge pour l'employeur, le cas échéant, de prouver que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que, pour débouter la salariée de ses demandes au titre du harcèlement moral, la cour d'appel a énoncé - après constaté que la salariée invoquait une absence de travail fourni à son retour d'arrêt de travail - que, « si la salariée justifie par son annexe 49 « document chronologique » du listing des documents établis dans des dossiers dont elle était titulaire pour faire remarquer que du 14 septembre au 29 septembre, date d'édition de ce document, elle a cessé de travailler sur ces dossiers, il convient de constater, d'une part, que l'on ne sait pas ce qu'il en est des autres dossiers que ceux mentionnés, soit 2 dossiers parmi d'autres, d'autre part, que l'on ne connaît pas les raisons exactes qui ont empêché la salariée de travailler sur ces dossiers, qu'enfin, elle ne soutient nullement avoir été empêchée de travailler » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il appartenait à l'employeur de justifier objectivement avoir donné à la salariée un travail à exécuter à son retour d'arrêt de travail, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve, violant l'article L. 1154-1 du code du travail ;

2°/ subsidiairement, que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les prétentions des parties sans analyser l'ensemble des pièces produites à l'appui de ces prétentions ; qu'en l'espèce, la salariée - qui faisait valoir et offrait de prouver qu'à son retour d'arrêt de travail, l'employeur ne lui avait confié aucun travail à exécuter, et ce, pendant plusieurs jours - versait notamment aux débats un courriel du 14 septembre 2015 qu'elle avait adressé à son employeur selon lequel « G... O..., je suis de retour ce matin, N... n'étant pas là, merci de m'indiquer quels sont les dossiers qui m'ont été attribués et sur lesquels je dois travailler » et auquel l'intéressé avait répondu « les dossiers de la semaine dernière ont été répartis entre N... et moi, nous verrons mercredi » ; qu'en s'abstenant d'examiner cette pièce dont il résultait que la salariée avait été effectivement privée de travail dans l'attente du retour de l'employeur, soit du lundi 14 septembre 2015 au mercredi suivant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de preuve et de fait dont elle a, sans méconnaître les règles spécifiques de preuve et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, déduit tant l'existence de faits précis permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral que la justification par l'employeur d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement pour faute grave est justifié et, en conséquence, de la débouter de l'intégralité de ses prétentions au titre de la rupture du contrat de travail, alors :

« 1°/ que nul ne peut être sanctionné deux fois pour les mêmes faits ; que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ; qu'en l'espèce, la salariée faisait valoir et offrait de prouver que l'employeur, avant de prononcer son licenciement pour motif disciplinaire, lui avait reproché, par un courrier du 28 septembre 2015 valant avertissement, les mêmes manquements que ceux invoqués dans la lettre de licenciement, de sorte que son congédiement contrevenait au principe non bis in idem ; que le courrier du 28 septembre 2015 énonce notamment qu'« il m'a été permis d'apprendre par avocats et débiteurs gersois que dans un certain nombre de procédures, votre comportement agressif et brutal vis-à-vis de dirigeants de sociétés ou débiteurs a fortement choqué ceux-ci, ce qui de même est en opposition totale avec la façon de travailler qui vous a été imposée et crée là encore un énorme préjudice à mon étude auscitaine en termes d'image » ; que pour juger le licenciement fondé sur une faute grave et débouter la salariée de ses demandes, la cour d'appel a énoncé que, « concernant le courrier daté du 28 septembre 2015 (annexe 38 de la salariée) adressé par l'employeur à propos duquel les parties s'opposent sur le point de savoir s'il y a pour objet de notifier ou non une sanction disciplinaire empêchant de nouvelles poursuites pour des faits identiques (application du principe non bis in idem), il convient de relever que la tentative de corruption ne fait pas partie des agissements reprochés à la salariée dans le courrier précité de sorte que cette discussion est sans emport sur le litige » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, au-delà des termes employés dans la lettre du 28 septembre 2015, la tentative de corruption imputée à la salariée n'était pas comprise dans le grief tiré d'un prétendu « comportement agressif et brutal de la salariée vis-à-vis de dirigeants de société ou débiteurs », dont l'employeur avait eu connaissance par « avocats et débiteurs gersois », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code travail, ensemble les textes susvisés et le principe non bis in idem ;

2°/ subsidiairement, que l'employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si la lettre du 28 septembre 2015 ne constituait pas une sanction et, le cas échéant, si, à la date de cet avertissement, l'employeur n'avait pas connaissance des faits de tentative de corruption visés par la lettre de licenciement dont elle a estimé qu'ils étaient établis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail en leur rédaction applicable au litige ;

3°/ plus subsidiairement, que ne constitue pas une tentative de corruption, le fait de préciser à un tiers que, dans l'éventualité d'une faute de gestion de sa part, un règlement à l'amiable pourrait être envisagé ; qu'en retenant que le grief tiré d'une tentative de corruption était établi et qu'il présentait un degré de gravité justifiant la rupture immédiate du contrat de travail, cependant qu'elle constatait que la salariée, sans solliciter la remise effective de fonds à son bénéfice ou au bénéfice d'un tiers, avait indiqué à Mme D... que si jamais elle venait à commettre une faute de gestion au cours de la procédure collective, elle encourrait une sanction, mais que dans cette hypothèse, « avec 10 000 euros, tout pouvait s'arranger », la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'une tentative avérée de corruption, violant les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail en leur rédaction applicable au litige, ensemble les articles 445-1 et 445-2 du code pénal ;

4°/ très subsidiairement, que la faute grave est celle qui, au vu de la personnalité du salarié et des circonstances de fait dans lesquelles sont survenus les manquements qui lui sont imputés à faute, rend impossible son maintien dans l'entreprise ; qu'il s'ensuit qu'une tentative de corruption ne constitue pas nécessairement une faute grave ; qu'en affirmant dès lors péremptoirement que « la preuve d'une tentative de corruption est suffisamment rapportée de sorte que le licenciement pour faute grave de la salariée est justifié, la faute commise présentant un degré de gravité suffisant pour justifier la rupture immédiate des relations de travail », sans faire ressortir concrètement en quoi ce manquement isolé et ancien rendait effectivement impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise, au regard notamment de ses qualités professionnelles, reconnues expressément par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail en leur rédaction applicable au litige, ensemble les articles 445-1 et 445-2 du code pénal. »

Réponse de la Cour

9. D'abord, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de faits et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a, d'une part, estimé qu'il était établi que la salariée avait commis une tentative de corruption, sans avoir pour cela à caractériser la réunion des éléments constitutifs de l'une des infractions prévues par les articles 445-1 et 445-2 du code pénal, et, d'autre part, retenu que cette faute n'avait pas été déjà sanctionnée par un précédent courrier de l'employeur.

10. Ensuite, la cour d'appel a pu en déduire que cette faute rendait impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise et constituait une faute grave.

11. Le moyen, contraire à la thèse soutenue devant les juges du fond et partant irrecevable en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme U... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme U...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR débouté Mme I... U... de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et d'AVOIR, en conséquence, débouté la salariée de l'intégralité de ses prétentions au titre de la rupture du contrat de travail, dont sa demande de nullité du licenciement et les demandes afférentes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur le harcèlement moral : selon l'article L. 1154-1 du code du travail « Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4 (harcèlement moral) le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu' au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles » ; que Mme U... soutient avoir été victime de harcèlement moral de la part de son employeur. ; qu'elle expose qu'à la fin du mois d'août, Maître M... a décidé de rompre sa liaison avec elle et de l'inciter à quitter l'étude ; que suite à cette situation, elle a fait l'objet d'une dépression qui a justifié qu'elle soit placée en arrêt de travail du 1er au 11 septembre 2015 puis du 20 octobre au 17 novembre ; que cependant, elle souligne que la rupture sentimentale avec Maître M... n'est pas la seule cause de son état dépressif. Lors de son retour le 14 septembre, elle a constaté que ses attributions avaient été vidées de leur substance et qu'elle faisait l'objet d'une placardisation ; que de même, à compter du 22 septembre, Maître M... lui a demandé de lui transmettre en copie tous les e-mails de sa boîte ; que Mme U... estime que les agissements de Maître M... sont constitutifs de harcèlement moral, qu'ils visaient à la faire démissionner et qu'ils ont eu un impact sur son état de santé ; que les faits, tels qu'ils sont décrits par Mme U... sont de nature, s'ils venaient à être établis, à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que de son côté, Maître M... produit aux débats, pour contrecarrer les allégations de Mme U... un relevé des dossiers ouverts et confiés aux deux collaboratrices, effectué du 1er mars 2014 au 12 octobre 2015 ; qu'il soutient, également que les dossiers, dits importants, étaient équitablement répartis, que les deux salariées pouvaient signer les requêtes déposées au tribunal de commerce et que 4 rendez-vous avaient été fixés à Mme U... pour le 2 octobre 2015 ; qu'enfin, il estime que le ton adopté par lui dans le cadre de l'échange de mails n'a pas changé et qu'il était normal qu'en l'absence de la salariée, ses dossiers soient répartis entre Mme E... et lui-même ; que concernant le transfert des mails rédigés par Mme U..., il expose que celle-ci, durant son arrêt maladie avait pris le soin d'effacer tous les mails contenus dans sa messagerie de sorte que pour garantir la continuité du service, il lui a effectivement demandé de lui transférer ses mails ; qu'en l'espèce, seul le grief relatif à la demande de transfert des mails est reconnu par l'employeur qui justifie sa demande par le comportement de Mme U..., se fondant sur l'attestation délivrée par Mme E..., autre collaboratrice, et rédigée en ces termes : « Suite à l'arrêt maladie de ma collègue, Mme U..., nous avons été contraints, Maître M... et moi-même d'ouvrir sa boîte mail outlook, afin de récupérer les informations et documents indispensables à la bonne marche de l'étude. Nous avons constaté que l'accès à cette boîte mail était verrouillé par un mot de passe que nous ne connaissions pas. Finalement, à la demande de Maître M..., Mme U... nous a transmis par sms son mot de passe : TITOU. Après ouverture de la boîte mail grâce à ce mot de passe, nous avons constaté que l'intégralité des fichiers avait été vidée, il n'apparaissait donc que les mails postérieurs à l'arrêt maladie. En effet, les dossiers de classement (boîte de réception, boîte d'envoi, éléments envoyés, supprimés) étaient tous vides, interdisant la lecture historique de la boîte mail. Nous avons été étonnés de ce fait » ; qu'il n'est pas sérieusement contestable qu'au regard de cette attestation, la mesure prise par l'employeur était justifiée ; que concernant le second grief (placardisation, attributions vidées de leur substance), l'employeur les conteste et précise que sur le relevé produit aux débats, il apparaît que durant la période du 1er mars 2014 au 12 octobre 2015, Mme U... s'est vue confier 76 dossiers, Mme E... 90 dossiers ; que sur ces dossiers, Mme U... en gérait 76 hors plan de redressement, Mme E..., 78 ; que de même, concernant les dossiers importants (plus de 5 salariés, et plus de 400.000 euros de chiffre d'affaires), Mme U... en gérait 12 et Mme E..., 15 ; qu'enfin, 4 rendez-vous ont été fixés le 2 octobre 2015 à Mme U... afin de rencontrer les gérants des nouveaux dossiers pour lesquels l'étude avait été désignée ; que Mme U... soutient que sa placardisation aurait commencé le 14 septembre 2015 lors de son retour d'arrêt maladie ; que cependant, il résulte de l'annexe 18 produite par Maître M... « liste des mandats entre le 1er mars 2014 et le 12 octobre 2015 » qu'à compter du 15 septembre Mme U... s'est vu confier 4 mandats le 2 octobre 2015 contre 5 mandats pour sa collègue datés respectivement du 23 septembre et du 2 octobre ; que le fait que les rendez-vous pris pour Mme U... aient été fixés au 9 octobre et non au 2 octobre comme précisé par Maître M... est sans importance ; que de même, si Mme U... justifie par son annexe 49 « document chronologique » du listing des documents établis dans des dossiers dont elle était titulaire pour faire remarquer que du 14 septembre au 29 septembre, date d'édition de ce document, elle a cessé de travailler sur ces dossiers, il convient de constater, d'une part, que l'on ne sait pas ce qu'il en est des autres dossiers que ceux mentionnés, soit 2 dossiers parmi d'autres, d'autre part, que l'on ne connaît pas les raisons exactes qui ont empêché la salariée de travailler sur ces dossiers, qu'enfin, elle ne soutient nullement avoir été empêchée de travailler ; que concernant les échanges de mails entre les parties, il est constant que Maître M... a adopté, à compter de la rupture entre les parties, un ton froid et distant, qui peut être critiquable, notamment, au regard de l'état de santé de Mme U..., provoqué par la rupture ; que néanmoins, cette situation s'explique aisément par l'évolution des relations entre les parties, les propos tenus restant, si ce n'est courtois, du moins polis et dépourvus de toute agressivité ou de caractère outrageants ; qu'il en résulte que les faits dénoncés par la salariée au soutien de ses demandes au titre du harcèlement moral ne sont pas constitués, certains faits étant justifiés par des circonstances étrangères à tout harcèlement moral, d'autres étant inexistants ; que Mme U... sera déboutée de ses prétentions au titre de harcèlement moral par confirmation du jugement déféré ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, vu l'article L. 1152-1 du code du travail ; que Mme U... I... a fait l'objet d'une lettre recommandée avec avis de réception datée du 28 septembre 2015, reprochant des agissements fautifs non conformes aux usages et obligations et porteraient un préjudice à l'étude O... M... ; qu'un arrêt de travail postérieur à cette lettre du 20 octobre au 17 novembre 2015, date du licenciement avec mise à pied à titre conservatoire, il n'est pas démontré des agissements répétés de harcèlement moral qui aurait dégradé ses conditions de travail et porté atteinte à ses droits et à sa dignité ; qu'en conséquence, Mme U... I... ne peut prétendre de ce chef à une indemnisation distincte de celle déjà indemnisée au titre de l'article L. 1235-3 ;

1°) ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, à charge pour l'employeur, le cas échéant, de prouver que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que, pour débouter Mme U... de ses demandes au titre du harcèlement moral, la cour d'appel a énoncé - après constaté que la salariée invoquait une absence de travail fourni à son retour d'arrêt de travail - que, « si Mme U... justifie par son annexe 49 « document chronologique » du listing des documents établis dans des dossiers dont elle était titulaire pour faire remarquer que du 14 septembre au 29 septembre, date d'édition de ce document, elle a cessé de travailler sur ces dossiers, il convient de constater, d'une part, que l'on ne sait pas ce qu'il en est des autres dossiers que ceux mentionnés, soit 2 dossiers parmi d'autres, d'autre part, que l'on ne connaît pas les raisons exactes qui ont empêché la salariée de travailler sur ces dossiers, qu'enfin, elle ne soutient nullement avoir été empêchée de travailler » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il appartenait à l'employeur de justifier objectivement avoir donné à la salariée un travail à exécuter à son retour d'arrêt de travail, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve, violant l'article L. 1154-1 du code du travail ;

2°) ET ALORS, subsidiairement, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les prétentions des parties sans analyser l'ensemble des pièces produites à l'appui de ces prétentions ; qu'en l'espèce, Mme U... - qui faisait valoir et offrait de prouver qu'à son retour d'arrêt de travail, l'employeur ne lui avait confié aucun travail à exécuter, et ce, pendant plusieurs jours - versait notamment aux débats un courriel du 14 septembre 2015 qu'elle avait adressé à M. M... selon lequel « G... O..., je suis de retour ce matin, N... n'étant pas là, merci de m'indiquer quels sont les dossiers qui m'ont été attribués et sur lesquels je dois travailler » et auquel l'intéressé avait répondu « les dossiers de la semaine dernière ont été répartis entre N... et moi, nous verrons mercredi » (cf. production) ; qu'en s'abstenant d'examiner cette pièce dont il résultait que la salariée avait été effectivement privée de travail dans l'attente du retour de M. M..., soit du lundi 14 septembre 2015 au mercredi suivant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué infirmatif de ce chef, d'AVOIR dit que le licenciement de Mme U... pour faute grave est justifié et d'AVOIR, en conséquence, débouté la salariée de l'intégralité de ses prétentions au titre de la rupture du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE, sur le bien-fondé du licenciement de Mme U... : aux termes de l'article L. 1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse ; que la faute grave dont la preuve appartient à l'employeur se définit comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que pour qualifier la faute grave il incombe donc au juge de relever le ou les faits constituant pour le salarié licencié une violation des obligations découlant de son contrat de travail ou des relations de travail susceptible d'être retenue, puis d'apprécier si ledit fait était de nature à exiger le départ immédiat du salarié ; que la lettre de licenciement sert de cadre strict au contrôle du juge et délimite les termes du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 16 novembre 2015 est ainsi motivée : « à la suite de notre entretien du 5 novembre 2015, je vous informe que j'ai décidé de vous licencier pour faute grave. Les faits qui vous sont reprochés mettent en effet en cause la bonne marche et l'image de mon étude d'Auch et pire encore ma réputation professionnelle. Les explications recueillies auprès de vous lors de notre entretien n'ont pas permis de modifier cette appréciation. En effet, les griefs justifiant cette mesure sont d'une particulière gravité, à savoir : 1° Lors de votre arrêt maladie du 1er au 11 septembre 2015, j'ai pu constater avec une collaboratrice que vous aviez précédemment procédé à la suppression de l'ensemble des mails et dossiers contenus dans la boîte mail outlook de l'étude ouverte à votre nom. Un tel comportement incompréhensible et inadmissible a paralysé le traitement des dossiers en cours en votre absence. 2° Le 8 septembre, Maître S..., avocat au barreau du Gers vous a adressé le mail suivant : « J... Madame, Je me suis laissé dire par un client commun que mon cabinet ne serait pas en odeur de sainteté au bureau de O... M... à Auch. J'en suis surpris, car je pensais avoir des relations amicales avec O... depuis des années. Mon client m'indique encore que le bureau aurait préféré le voir travailler avec le cabinet Prim Thomas, ce qu'il a refusé. J'en suis encore surpris, car j'ignore l'origine d'une telle discrimination. J'aurais aimé avoir des explications avant. Ma déception est immense et je tenais à vous l'exprimer ». Vous ne m'avez pas informé de cet incident concernant le dossier R.... J'ai dû contacter Maître S... afin de recueillir des explications et de m'excuser de votre comportement. Il ne vous a jamais été demandé de faire la publicité de tel cabinet d'avocat local lors des interventions de mon étude en qualité de mandataire de justice. Bien au contraire, il a toujours été donné comme instruction à l'ensemble de mes collaborateurs de maintenir la mission de l'avocat en place lors de l'ouverture d'une procédure pour plus d'efficacité afin d'optimiser la gestion du dossier et maintenir les bonnes relations entretenues avec le barreau local. Ces directives connues de l'ensemble des collaborateurs de mes trois études sont scrupuleusement respectées par ceux-ci. Un tel comportement nuit donc fortement aux relations entre le barreau et mon étude auscitaine, ce qui est inacceptable, et ce d'autant plus que nous avons déjà eu à aborder votre tendance à autorité inutile et inappropriée, témoignée à l'égard de certains avocats du barreau ou à certains débiteurs. 3° Enfin dans le cadre du dossier de la SCEA de Begorre, j'ai eu connaissance de faits qui vous sont imputables d'une extrême gravité. Le 24 septembre 2015, la gérante de la SCEA m'a alerté sur la proposition que vous lui avez faite lors d'un entretien en mon étude, en ces termes : « (
) Je suis très émotive et je suis dans la hantise de commettre une faute dans l'exercice de mes fonctions de gérante. Votre collaboratrice, Mme U... s'en est rendue compte et elle m'a indiqué que si jamais je venais à commettre une faute de gestion au cours de la procédure collective, j'encourais une sanction. Elle m'a néanmoins, rassurée en rajoutant qu'elle contrôlait l'ensemble de la procédure et que si elle décelait une faute, avec 10.000 euros, tout pouvait s'arranger. Elle a précisé que cela n'irait pas plus loin. Elle me proposait donc clairement de m'éviter toute procédure en responsabilité personnelle en contrepartie du paiement de la somme de 10.000 euros à son unique profit et non au profit de l'étude ou de Maître M... ». J'ai interrogé plusieurs fois la gérante de la SCEA de Begorre sur les faits reprochés tout en l'informant des conséquences pénales en cas de fausses déclarations d'une telle gravité. Suite à mon enquête, j'ai dû me rendre à l'évidence. Vous ne pouvez ignorer que mon statut de mandataire judiciaire, profession réglementée, m'impose une discipline, une rigueur, une droiture et une probité sans faille. Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien au sein de mon entreprise s'avère impossible ; le licenciement prend donc effet immédiatement à la date du 16 novembre 2015, sans indemnité de préavis ni de licenciement
» ; qu'il est constant, à la lecture de cette lettre de licenciement, que plusieurs griefs sont formulés à l'encontre de la salariée, à savoir : - suppression des mails et dossiers contenus dans la boîte e-mail ; - mauvaises relations avec les partenaires de l'étude ; - tentative de corruption ; que ce dernier fait, étant indéniablement, le plus grave et suffisant à lui seul à justifier la mesure de licenciement pour faute grave en cas d'établissement de son existence, la charge de la preuve en incombant à l'employeur ; qu'à cet effet, Maître M... invoque, essentiellement, les attestations établies par les époux D... ; que Mme D... témoigne le 1er octobre 2015 en ces termes : « Maître, je fais suite à notre entretien du jeudi 24 septembre 2015. J'ai le regret de vous confirmer comme je vous l'ai indiqué oralement, que je suis très émotive et je suis dans la hantise de commettre une faute dans l'exercice de mes fonctions de gérante. Votre collaboratrice, Mme U... s'en est rendue compte et elle m'a indiqué que si jamais je venais à commettre une faute de gestion au cours de la procédure collective, j'encourais une sanction. Elle m'a, néanmoins, rassurée en rajoutant qu'elle contrôlait l'ensemble de la procédure et que si elle décelait une faute, avec 10.000 euros, tout pouvait s'arranger. Elle a précisé que cela n'irait pas plus loin. Elle me proposait donc clairement de m'éviter toute procédure en responsabilité personnelle en contrepartie du paiement de la somme de 10.000 euros à son unique profit et non au profit de l'étude ou de Maître M.... J'ai été particulièrement interloquée par cette conversation ainsi que mon époux, T... D... qui m'accompagnait
» ; que de son côté, M. T... D... témoigne, également, par attestation rédigée le même jour que celle de son épouse et dans des termes quasi identiques ; que dans le cadre de l'enquête préliminaire diligentée par les services de la gendarmerie d'Agen, suite à la plainte déposée par Mme U... contre les époux D... pour faux témoignage, les époux D... ont été entendus par les services enquêteurs et ont confirmé leurs attestations ; Audition de Mme D... : « C'est bien moi qui ai rédigé l'attestation CERFA n° 1152702 datée du 1er octobre 2015 que vous me présentez. J'ai rédigé cette attestation à mon domicile. Je ne me rappelle pas comment j'ai obtenu ce document vierge où qui me l'a fourni. Il me semble que j'avais écrit une lettre sur papier libre à Maître M... pour exposer la situation que nous avions vécue avec mon mari et je pense qu'ensuite Maître M... nous a fait passer les documents officiels que nous avons remplis tous les deux à la maison. Question : Est-il exact que Mme U... vous a demandé 10.000 euros pour « s'arranger » et vous éviter une sanction, en tant que gérante de la SCEA de Begorre ? Réponse : Oui, je vous l'assure. C'était au cours d'un rendez-vous à l'étude de Maître M... à Auch. Lors de cette entrevue, il y avait Mme U... et mon mari D... T.... Il me semble que cela devait être en début d'année 2015. Mme U... m'a donc expliqué au début ce qu'elle avait à nous dire concernant la société puis au cours de la discussion, elle m'a dit que si je commettais une faute de gestion, il y avait toujours moyen de « s'arranger » à l'amiable. Il suffirait que je lui donne 10.000 euros et que tout s'arrêterait-là. Sur le coup, je n'ai pas réagi, j'étais clouée sur place. Je n'ai pas osé regarder mon mari qui était assis à côté de moi. Je n'ai pas demandé plus de détails à Mme U..., j'étais interloquée. Cela s'est passé sur la fin de l'entretien, elle a ensuite parlé un peu de la société et nous sommes partis. J'ai attendu d'être sortie du bâtiment sur la voie publique, et là, j'ai demandé à mon mari s'il avait bien entendu la même chose que moi. Il m'a confirmé lui aussi ce que Mme U... nous avait proposé. Nous n'avons parlé de cela à personne dans l'immédiat. Je me souviens que la première personne à qui j'en ai parlé, c'est l'associé de Maître S..., Maître Y... à Auch
J'ai refusé qu'elle mette Maître M... au courant de la situation car j'avais peur que cela nous retombe dessus et que cela porte tort à la société
Nous avons rencontré Maître M... qui nous a demandé des détails sur l'arrangement proposé par Mme U.... Il nous a dit que c'était grave... Je ne suis pas en mesure de dater cet entretien
Question : Comment avez-vous rédigé ces deux attestations ? Réponse : Nous avons plus ou moins fait un copié-collé avec mon mari. J'ai dû lui dire : « tu recopies ce que j'ai mis
» Pour ma part, je suis très émotive, donc lorsque je relis l'attestation, ce sont bien mes propos
Question : Comment était Mme U... lors de vos entretiens ? Réponse : Elle paraissait très autoritaire, directive
». Audition de M. T... D... : «
C'est bien moi qui ai rédigé l'attestation CERFA n° 1152702 datée du 1er octobre 2015 que vous me présentez. J'ai rédigé cette attestation à mon domicile. J'ai fait un copié-collé des propos que ma femme D... A... a rédigé sur son attestation. Question : Est-il exact que Mme U... a demandé à votre épouse au cours d'un entretien à Auch, 10.000 euros pour « s'arranger » et lui éviter une sanction, en tant que gérante de la SCEA de Begorre ? Réponse : Oui, je vous l'assure. C'était bien au cours d'un rendez-vous à l'étude de Maître M... à Auch. Lors de cette entrevue, il y avait Mme U..., mon épouse Mme D... A.... Il me semble que cela devait être en début d'année 2015. Nous avons attendu la fin de l'entrevue avec mon épouse et d'être sortis à l'extérieur de l'étude pour reparler de ce que Mme U... avait proposé comme « arrangement » s'il y avait une faute de gestion de la gérante. J'avais compris, comme mon épouse, que Mme U... nous demandait de l'argent en échange d'un arrangement amiable. Je ne peux pas vous donner les dates exactes des différents entretiens
Question : Comment était Mme U... lors de vos entretiens ? Réponse : C'était une femme qui avait du caractère, je pense qu'il ne fallait pas trop la contrarier. Elle paraissait autoritaire
» ; que Mme U... conteste l'ensemble de ces attestations et auditions et soutient ne jamais avoir fait la moindre proposition à Mme D... quant à un quelconque arrangement moyennant rémunération ; que les attestations litigieuses, dont la force probante est contestée par Mme U..., sont circonstanciées, précises et concordantes ; qu'elles sont confortées par les auditions respectives des témoins ; que ceux-ci ont été informés des conséquences d'une fausse déposition et ont, néanmoins, maintenu leurs dires ; que de plus, Mme U... n'avance aucun motif susceptible d'expliquer la dénonciation prétendument mensongère des époux D... à son encontre ; qu'enfin, aucune collusion frauduleuse avec Maître M... ne saurait être retenue dans la mesure où il résulte, expressément des éléments du dossier que celui-ci n'a rencontré les époux D... qu'à la suite de la dénonciation des faits par Maître S... et Maître Y... ; qu'ainsi, la dénonciation de faits inexistants ne pourrait résulter que d'une collusion frauduleuse entre les différents protagonistes de l'affaire, soit les époux D..., les avocats concernés et Maître M..., dont la preuve n'est pas rapportée ; qu'il y a donc lieu de considérer que la preuve d'une tentative de corruption est suffisamment rapportée de sorte que le licenciement pour faute grave de Mme U... est justifié, la faute commise présentant un degré de gravité suffisant pour justifier la rupture immédiate des relations de travail ; que concernant le courrier daté du 28 septembre 2015 (annexe 38 de la salariée) adressé par Maître M... à propos duquel les parties s'opposent sur le point de savoir s'il y a pour objet de notifier ou non une sanction disciplinaire empêchant de nouvelles poursuites pour des faits identiques (application du principe non bis in idem), il convient de relever que la tentative de corruption ne fait pas partie des agissements reprochés à Mme U... dans le courrier précité de sorte que cette discussion est sans emport sur le litige ; que Mme U... sera, ainsi, déboutée de l'intégralité de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail par infirmation du jugement déféré ;

1°) ALORS QUE nul ne peut être sanctionné deux fois pour les mêmes faits ; que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ; qu'en l'espèce, Mme U... faisait valoir et offrait de prouver que l'employeur, avant de prononcer son licenciement pour motif disciplinaire, lui avait reproché, par un courrier du 28 septembre 2015 valant avertissement, les mêmes manquements que ceux invoqués dans la lettre de licenciement, de sorte que son congédiement contrevenait au principe non bis in idem (conclusions d'appel pp. 15 et 16) ; que le courrier du 28 septembre 2015 énonce notamment qu'« il m'a été permis d'apprendre par avocats et débiteurs gersois que dans un certain nombre de procédures, votre comportement agressif et brutal vis-à-vis de dirigeants de sociétés ou débiteurs a fortement choqué ceux-ci, ce qui de même est en opposition totale avec la façon de travailler qui vous a été imposée et crée là encore un énorme préjudice à mon étude auscitaine en termes d'image » ; que pour juger le licenciement fondé sur une faute grave et débouter Mme U... de ses demandes, la cour d'appel a énoncé que, « concernant le courrier daté du 28 septembre 2015 (annexe 38 de la salariée) adressé par Me M... à propos duquel les parties s'opposent sur le point de savoir s'il y a pour objet de notifier ou non une sanction disciplinaire empêchant de nouvelles poursuites pour des faits identiques (application du principe non bis in idem), il convient de relever que la tentative de corruption ne fait pas partie des agissements reprochés à Mme U... dans le courrier précité de sorte que cette discussion est sans emport sur le litige » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, au-delà des termes employés dans la lettre du 28 septembre 2015, la tentative de corruption imputée à Mme U... n'était pas comprise dans le grief tiré d'un prétendu « comportement agressif et brutal de la salariée vis-à-vis de dirigeants de société ou débiteurs », dont l'employeur avait eu connaissance par « avocats et débiteurs gersois », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code travail, ensemble les textes susvisés et le principe non bis in idem ;

2°) ALORS, subsidiairement, QUE l'employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si la lettre du 28 septembre 2015 ne constituait pas une sanction et, le cas échéant, si, à la date de cet avertissement, l'employeur n'avait pas connaissance des faits de tentative de corruption visés par la lettre de licenciement dont elle a estimé qu'ils étaient établis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail en leur rédaction applicable au litige ;

3°) ALORS, plus subsidiairement, QUE ne constitue pas une tentative de corruption, le fait de préciser à un tiers que, dans l'éventualité d'une faute de gestion de sa part, un règlement à l'amiable pourrait être envisagé ; qu'en retenant que le grief tiré d'une tentative de corruption était établi et qu'il présentait un degré de gravité justifiant la rupture immédiate du contrat de travail, cependant qu'elle constatait que Mme U..., sans solliciter la remise effective de fonds à son bénéfice ou au bénéfice d'un tiers, avait indiqué à Mme D... que si jamais elle venait à commettre une faute de gestion au cours de la procédure collective, elle encourrait une sanction, mais que dans cette hypothèse, « avec 10.000 euros, tout pouvait s'arranger », la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'une tentative avérée de corruption, violant les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail en leur rédaction applicable au litige, ensemble les articles 445-1 et 445-2 du code pénal ;

4°) ET ALORS, très subsidiairement, QUE la faute grave est celle qui, au vu de la personnalité du salarié et des circonstances de fait dans lesquelles sont survenus les manquements qui lui sont imputés à faute, rend impossible son maintien dans l'entreprise ; qu'il s'ensuit qu'une tentative de corruption ne constitue pas nécessairement une faute grave ; qu'en affirmant dès lors péremptoirement que « la preuve d'une tentative de corruption est suffisamment rapportée de sorte que le licenciement pour faute grave de Mme U... est justifié, la faute commise présentant un degré de gravité suffisant pour justifier la rupture immédiate des relations de travail », sans faire ressortir concrètement en quoi ce manquement isolé et ancien rendait effectivement impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise, au regard notamment de ses qualités professionnelles, reconnues expressément par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail en leur rédaction applicable au litige, ensemble les articles 445-1 et 445-2 du code pénal.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-24541
Date de la décision : 31/03/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 19 septembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 mar. 2021, pourvoi n°19-24541


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.24541
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