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21/09/2022 | FRANCE | N°21-16821

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2022, 21-16821


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 septembre 2022

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 986 FS-B

Pourvoi n° T 21-16.821

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 SEPTEMBRE 2022

La société Ipsos Observer, dont le siège est [Adresse 2], a form

é le pourvoi n° T 21-16.821 contre l'arrêt rendu le 17 mars 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant à ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 septembre 2022

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 986 FS-B

Pourvoi n° T 21-16.821

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 SEPTEMBRE 2022

La société Ipsos Observer, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-16.821 contre l'arrêt rendu le 17 mars 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant à Mme [C] [L], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Ipsos Observer, et l'avis de M. Desplan, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 juin 2022 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Rouchayrole, Flores, Mme Lecaplain-Morel, conseillers, Mmes Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, M. Desplan, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 mars 2021), Mme [L] a été engagée à compter du 4 novembre 2004 par la société Ipsos observer en qualité d'enquêteur vacataire par plusieurs contrats à durée déterminée d'usage. A compter du 1er janvier 2011, elle a été engagée par contrat à durée indéterminée intermittent.

2. La relation de travail était soumise à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil du 15 décembre 1987, dite Syntec.

3. Le 7 janvier 2013, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à ce que la relation contractuelle soit requalifiée en contrat à durée indéterminée à temps complet et que lui soient versées des sommes afférentes à ces requalifications.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches et le second moyen, pris en ses six premières branches, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la première branche du premier moyen qui est irrecevable et sur les autres griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser une certaine somme à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013, outre congés payés afférents, alors « que la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail ; que réciproquement, la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée de travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat ; qu'en conséquence, il appartient au salarié qui prétend au paiement de rappels de salaire pour les périodes interstitielles séparant deux contrats à durée déterminée d'établir qu'il s'était tenu à la disposition de l'employeur en vue d'effectuer un travail pendant ces périodes ; qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande de rappel de salaire sur la base d'un temps complet pour la période du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013 formée par Mme [L], la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, compte tenu de la requalification du contrat de travail à durée indéterminée en contrat de travail à temps plein, il n'y avait pas lieu de déduire du décompte établi par Mme [L], les jours d'indisponibilité ou les congés sans solde résultant selon elle d'un choix de la salariée, étant par ailleurs souligné que la salariée indique avoir été contrainte de déposer des demandes de jours de congés à certaines dates ; qu'en statuant par de tels motifs sans rechercher si Mme [L] rapportait la preuve qui lui incombait qu'elle s'était tenue de la société Ipsos pendant les périodes d'indisponibilité et de congés sans solde, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1245-1 et L. 3123-14 en sa rédaction alors applicable du code du travail, ensemble des articles 1134 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et 1315, devenu 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1245-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et l'article L. 1245-2 du même code :

6. En application de ces textes, la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée du travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat, réciproquement, la requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail.

7. Il en résulte que le salarié, engagé par plusieurs contrats à durée déterminée et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée, ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat que s'il établit qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail.

8. Pour condamner l'employeur à une certaine somme au titre d'un rappel de salaire outre congés payés afférents, l'arrêt, après avoir requalifié les contrats à durée déterminée d'usage en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet pour la période antérieure au 1er janvier 2011, relève que, pour s'opposer à la demande de rappel de salaire sur la base d'un temps plein, l'employeur opère une déduction des périodes d'absence de la salariée en indiquant que celle-ci s'était déclarée indisponible ou en congés sans solde. L'arrêt retient que, compte tenu de la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein, il n'y a pas lieu de déduire du décompte établi par la salariée les jours d'indisponibilité ou les congés sans solde.

9. En se déterminant ainsi, sans rechercher si, au cours des périodes d'indisponibilité ou de congés sans solde, la salariée rapportait la preuve qu'elle s'était tenue à la disposition de l'employeur en vue d'effectuer un travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Et sur le second moyen, pris en sa septième branche

Enoncé du moyen

10. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors « que lorsqu'un salarié ne fournit pas la prestation inhérente à son contrat de travail, l'employeur ne peut être tenu de lui verser un salaire que si une disposition légale, conventionnelle ou contractuelle lui en fait obligation ; qu'en l'espèce, la société Ipsos Observer faisait valoir que les jours d'indisponibilité et les congés sans solde posés par Mme [L] ne pouvaient donner lieu au paiement d'un rappel de salaire puisque ces jours d'indisponibilité et de congés sans solde correspondaient à des périodes pendant lesquelles la salariée avait expressément manifesté sa volonté de ne pas travailler et ne se maintenait pas à la disposition de la société ; qu'en retenant néanmoins que, compte tenu de la requalification du contrat de travail à durée indéterminée en contrat de travail à temps plein, il n'y avait pas lieu de déduire du décompte établi par Mme [L] les jours d'indisponibilité ou les congés sans solde sans rechercher si la salariée ne s'était pas délibérément abstenue de fournir la prestation inhérente à son contrat de travail pendant ces périodes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1221-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1315 devenu l'article 1353 du code civil :

11. L'employeur est tenu de fournir un travail et de payer sa rémunération au salarié qui se tient à sa disposition.

12. Pour condamner l'employeur à une certaine somme à titre d'un rappel de salaire outre congés payés afférents, l'arrêt, après avoir requalifié le contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet pour la période postérieure au 1er janvier 2011, relève que, pour s'opposer à la demande de rappel de salaire sur la base d'un temps plein, l'employeur opère une déduction des périodes d'absence de la salariée en indiquant que celle-ci s'était déclarée indisponible ou en congés sans solde. L'arrêt retient que, compte tenu de la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein, il n'y a pas lieu de déduire du décompte établi par la salariée les jours d'indisponibilité ou les congés sans solde.

13. En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'employeur démontrait avoir rempli l'obligation de fournir un travail dont il était débiteur du fait de la requalification du contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet et si la salariée avait, en se déclarant indisponible ou en congés sans solde, refusé d'exécuter son travail ou de se tenir à sa disposition, la cour d'appel, a privé sa décision de base légale.

Portée et conséquences de la cassation

14. La cassation prononcée sur les premier et second moyens n'entraîne pas la cassation des chefs de dispositif qui condamnent l'employeur au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter la charge des entiers dépens, justifiés par d'autres condamnations non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Ipsos Observer à verser à Mme [L] la somme de 37 040,32 euros au titre d'un rappel de salaire du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013 outre congés payés afférents, l'arrêt rendu le 17 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne Mme [L] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Ipsos Observer ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Schamber, conseiller doyen en ayant délibéré, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du président empêché, en l'audience publique du vingt et un septembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Ipsos Observer

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

(relatif à la période d'emploi sous contrats à durée déterminée)

La société IPSOS OBSERVER fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à Madame [L] une somme de 37 040,32 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013 et une somme de 3 704 euros au titre des congés payés afférents ;

ALORS en premier lieu QUE le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit ; que ce contrat doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en l'absence d'écrit comportant ces mentions, l'emploi est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, en considérant que la relation de travail antérieure à la signature du contrat à durée indéterminée intermittent devait être requalifiée en un contrat à temps complet et en allouant à Madame [L] un rappel de salaire de ce chef au seul motif que la Cour n'était pas en mesure de vérifier que la société IPSOS avait respecté l'obligation de faire figurer les mentions susvisées dans les contrats de la salariée quand cette circonstance faisait seulement naître une présomption simple de travail à temps complet que l'employeur avait la faculté de renverser, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3123-14 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

ALORS en deuxième et en toute hypothèse lieu QUE le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit ; que ce contrat doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en l'absence d'écrit comportant ces mentions, l'emploi est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, afin d'établir que Madame [L] avait connaissance de ses périodes et heures de travail et n'était donc pas contrainte de se tenir en permanence à la disposition de son employeur, la société IPSOS OBSERVER versait aux débats les plannings établis mensuellement par la société et communiqués à la salariée ; que pour considérer que l'employeur ne versait aucun élément permettant d'établir que la salariée était en mesure de connaître à l'avance ses périodes d'activité et son rythme de travail et requalifier la relation de travail en un contrat à temps complet, le Conseil de prud'hommes a relevé que Madame [L] faisait valoir que les plannings qui lui étaient remis mensuellement n'avaient pas de valeur contractuelle et pouvaient être modifiés à tout moment ; qu'à supposer ces motifs adoptés, en se fondant sur cette circonstance pour requalifier la relation de travail en un contrat à temps complet et allouer à la salariée un rappel de salaire de ce chef, sans rechercher si les plannings mensuels remis à Madame [L] sur la période en cause avaient effectivement fait l'objet de modifications, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 3123-14 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

ALORS en troisième lieu QUE la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail ; que réciproquement, la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée de travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat ; qu'en conséquence, il appartient au salarié qui prétend au paiement de rappels de salaire pour les périodes interstitielles séparant deux contrats à durée déterminée d'établir qu'il s'était tenu à la disposition de l'employeur en vue d'effectuer un travail pendant ces périodes ; qu'en faisant droit, en l'espèce, à la demande formée par Madame [L] à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps plein pour la période du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013, sans rechercher si la salariée rapportait la preuve qui lui incombait qu'elle s'était tenue à la disposition de la société IPSOS OBSERVER en vue d'effectuer un travail pendant l'ensemble des périodes interstitielles séparant deux contrats, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1245-1 et L.. 3123-14 en sa rédaction alors applicable du Code du travail, ensemble des articles 1134 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et 1315, devenu 1353 du Code civil ;

ALORS en quatrième lieu et en toute hypothèse QUE la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail ; que réciproquement, la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée de travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat ; qu'en conséquence, il appartient au salarié qui prétend au paiement de rappels de salaire pour les périodes interstitielles séparant deux contrats à durée déterminée d'établir qu'il s'était tenu à la disposition de l'employeur en vue d'effectuer un travail pendant ces périodes ; qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande de rappel de salaire sur la base d'un temps complet pour la période du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013 formée par Madame [L], la Cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, compte tenu de la requalification du contrat de travail à durée indéterminée en contrat de travail à temps plein, il n'y avait pas lieu de déduire du décompte établi par Madame [L], les jours d'indisponibilité ou les congés sans solde résultant selon elle d'un choix de la salariée, étant par ailleurs souligné que la salariée indique avoir été contrainte de déposer des demandes de jours de congés à certaines dates ; qu'en statuant par de tels motifs sans rechercher si Madame [L] rapportait la preuve qui lui incombait qu'elle s'était tenue de la société IPSOS pendant les périodes d'indisponibilité et de congés sans solde, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1245-1 et L. 3123-14 en sa rédaction alors applicable du Code du travail, ensemble des articles 1134 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et 1315, devenu 1353 du Code civil ;

ALORS en cinquième lieu et en toute hypothèse QUE la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail ; que réciproquement, la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée de travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat ; qu'en conséquence, il appartient au salarié qui prétend au paiement de rappels de salaire pour les périodes interstitielles séparant deux contrats à durée déterminée d'établir qu'il s'était tenu à la disposition de l'employeur en vue d'effectuer un travail pendant ces périodes ; que dans ce cadre, il lui appartient de justifier qu'il n'était pas à la disposition d'un autre employeur pendant les périodes litigieuses ; qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande de rappel de salaire sur la base d'un temps complet pour la période du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013 formée par Madame [L], la Cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que la rémunération que la salariée avait pu percevoir par ailleurs auprès d'autres employeurs ne pouvait affecter la rémunération à laquelle elle avait droit du fait de la requalification ; qu'en statuant par de tels motifs alors qu'il se déduisait de la perception d'autres revenus par la salariée que cette dernière ne s'était pas tenue à la disposition de la société IPSOS pendant tout ou partie des périodes interstitielles et qu'elle ne pouvait donc prétendre au paiement d'un rappel de salaire pour ses périodes, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1245-1 et L. 3123-14 en sa rédaction alors applicable du Code du travail, ensemble des articles 1134 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et 1315, devenu 1353 du Code civil.

ALORS en sixième lieu et en toute hypothèse QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; qu'en l'espèce, la société ISPOS OBSERVER faisait valoir, s'agissant de la somme réclamée par Madame [L] à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps complet, que, lorsqu'elle était employée sous contrat à durée déterminée, la salariée avait toujours bénéficié de congés payés sous la forme d'une indemnité compensatrice de congés payés équivalente à 10% de sa rémunération et que la salariée ne pouvait en conséquence solliciter un rappel de salaire pour les périodes correspondant aux congés payés qui lui avaient, en réalité, été déjà rémunérées par avance ; qu'en laissant sans réponse ce moyen déterminant des conclusions de la société exposante, la Cour d'appel a méconnu les exigences découlant de l'article 455 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

(relatif à la période d'emploi sous contrat à durée indéterminée intermittent)

La société IPSOS OBSERVER fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à Madame [L] une somme de 37 040,32 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013 et une somme de 3 704 euros au titre des congés payés afférents ;

ALORS en premier lieu QUE le contrat de travail intermittent est un contrat écrit qui comporte notamment la durée annuelle minimale de travail du salarié, les périodes de travail, la répartition des heures de travail à l'intérieur de ces périodes ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 3123-14 du Code du travail, qui prévoient que le contrat de travail à temps partiel précise la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue ainsi que la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, ne sont pas applicables au contrat de travail intermittent ; qu'au cas présent, pour requalifier en contrat de travail à temps complet le contrat intermittent conclu par Madame [L] avec la société IPSOS OBSERVER, la Cour d'appel a relevé que les pièces versées aux débats ne mentionnaient pas les horaires de travail et leur répartition et que la société employeur ne renversait pas la présomption de travail à temps complet ; qu'en faisant ainsi application de dispositions relatives au contrat de travail à temps partiel à un contrat intermittent, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 3123-14 et L. 3123-33 du Code du travail dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

ALORS en deuxième lieu QU'il résulte de l'article préambule de l'annexe enquêteurs du 16 décembre 1991 à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dont les dispositions ont été maintenues en vigueur par l'article 43 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, que les chargés d'enquête intermittents à garantie annuelle (CEIGA) exercent leur activité dans le cadre du travail intermittent tel qu'il est défini aux articles L. 212-4-8 et suivants du code du travail, dans leur rédaction alors applicable ; que selon l'article L. 212-4-9 du Code du travail alors en vigueur, auquel renvoie l'accord collectif, le contrat de travail intermittent doit faire mention des périodes pendant lesquelles le salarié travaille et, dans le cas où la nature de l'activité ne permet pas de fixer avec précision les périodes de travail et la répartition des heures de travail au sein de ces périodes, la convention collective ou l'accord étendu détermine les adaptations nécessaires ; qu'en application de ces dispositions, l'article 3 de l'annexe précitée dispose que la nature des activités d'enquête et de sondage ne permet pas de connaître avec précision les périodes de travail et la répartition des heures de travail au sein de ces périodes et que, les périodes de travail n'étant pas définies au contrat, l'employeur devra respecter un délai de prévenance de trois jours ouvrables ; que l'article 8 de cette même annexe prévoit que l'engagement d'un chargé d'enquête intermittent à garantie annuelle doit être constaté par un écrit faisant référence aux dispositions de la présente convention et précisant notamment la qualification du salarié, les éléments de sa rémunération, le montant de sa garantie annuelle, le délai de prévenance de trois jours ouvrables prévus à l'article 3 de la présente annexe ; qu'il en résulte que les contrats de travail intermittent conclus en application de cet accord collectif n'ont pas à mentionner les périodes travaillées ; qu'en l'espèce, pour requalifier le contrat de travail intermittent conclu par Madame [L] en application des dispositions de l'annexe susvisée en contrat à temps complet, après avoir rappelé que l'article L. 3123-33 du Code du travail énonçait les mentions devant figurer obligatoirement sur le contrat de travail intermittent, au nombre desquelles, les périodes de travail et la répartition des heures de travail à l'intérieur de ces période, la Cour d'appel, à supposer qu'elle ait adopté les motifs des premiers juges, a considéré qu'à défaut de comporter ces mentions légales, le contrat de la salariée était présumé à temps complet et que la société IPSOS OBSERVER ne renversait pas la présomption pesant sur elle ; qu'en statuant par de tels motifs, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 212-4-8 et L. 212-4-9 du Code du travail dans leur version applicable au litige ensemble celles de l'article 43 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, de l'article L. 3123-33 du code du travail dans sa version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, de l'article préambule de l'annexe enquêteurs du 16 décembre 1991 à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 et des articles 3 et 8 de l'annexe 4-2 se rapportant aux chargés d'enquête intermittents à garantie annuelle ;

ALORS en troisième lieu et en toute hypothèse QUE le juge est tenu de ne pas dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, pour juger qu'en l'absence des mentions édictées à l'article L. 3123-33, le contrat de travail intermittent de Madame [L] était présumé à temps plein puis requalifier ce contrat en contrat à temps complet faute pour la société IPSOS OBSERVER de renverser cette présomption, le Conseil de prud'hommes a considéré qu'il n'y avait pas lieu d'examiner l'argumentation de la société IPSOS OBSERVER sur les exceptions prévues à l'article D. 3123-4 actuel du Code du travail, l'activité de l'entreprise ne relevant pas du secteur du spectacle vivant et enregistré ; qu'à les supposer adoptés, en statuant par de tels motifs alors que dans ses conclusions d'appel, la société IPSOS OSBERVER ne se prévalait nullement de l'application de l'article D. 3123-4 du Code du travail mais faisait valoir que, compte tenu des règles d'application dans le temps des lois relatives au travail intermittent, le contrat intermittent de Madame [L] conclu en application de l'annexe « Enquêteurs » à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques et cabines d'ingénieurs conseils du 16 décembre 1991 n'était pas assujetti au respect des dispositions des articles L. 3123-33 et L. 3123-35 du Code du travail mais relevait des dispositions en vigueur à la date de la conclusion et de l'extension de l'annexe susvisée et en particulier de l'article L. 212-4-9 du Code du travail lequel permettait alors aux partenaires sociaux des branches professionnelles, sans aucune limitation tenant au secteur d'activité, d'adapter les mentions devant figurer dans le contrat intermittent « dans le cas où la nature de l'activité ne permet pas de fixer avec précision les périodes de travail et la répartition des heures de travail au sein de ces périodes », la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des dispositions des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

ALORS en quatrième lieu QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; qu'en l'espèce, pour conclure à la régularité du contrat de travail intermittent conclu avec Madame [L], la société IPSOS OBSERVER faisait valoir que la détermination d'une rémunération annuelle garantie au salarié dans le cadre du contrat intermittent CEIGA valait nécessairement détermination d'une durée annuelle minimale de travail du salarié corrélative à cette rémunération annuelle conformément aux dispositions de l'article L. 3123-33 3° du Code du travail ; qu'en considérant en l'espèce, par motifs adoptés, que le contrat intermittent de Madame [L] ne comportait pas les mentions requises par l'article L. 3123-33 du Code du travail au nombre desquelles la durée annuelle minimale de travail du salarié sans répondre au moyen susvisé soulevé par la société IPSOS OBSERVER de ce chef, la Cour d'appel a méconnu les exigences découlant de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en cinquième lieu et en toute hypothèse QUE le contrat de travail intermittent est un contrat écrit qui doit notamment mentionner la durée annuelle minimale de travail du salarié ; qu'il en résulte qu'en l'absence de cette mention dans le contrat, ce dernier est présumé à temps plein ; qu'il appartient alors à l'employeur qui soutient que le contrat n'est pas à temps plein d'établir la durée annuelle minimale convenue et que le salarié connaissait les jours auxquels il devait travailler et selon quels horaires, et qu'il n'était pas obligé de se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, pour considérer que l'employeur ne renversait pas la présomption selon laquelle le salarié se trouve à sa disposition permanente et requalifier en conséquence le contrat intermittent de Madame [L] en contrat à temps complet, la Cour d'appel a relevé que, pour renverser cette présomption, la société IPSOS OBSERVER versait aux débats des tableaux mentionnant que Madame [L] ne travaillait pas le matin mais qu'elle ne mentionnait cependant pas d'écrit de la salariée selon lequel celle-ci ne désirait pas travailler le matin et ne souhaitait travailler que pour un mi-temps l'après-midi et que, selon les documents relatifs aux consignes données aux enquêteurs, lorsque ceux-ci sont planifiés l'après-midi, ils débutent leur travail à midi ce qui permet la réalisation d'une journée complète de travail ; qu'en statuant par ces motifs inopérants sans rechercher si, ainsi que le faisait valoir la société IPSOS OBSERVER, les plannings établis mensuellement par la société et communiqués à la salariée ne permettaient pas à cette dernière d'avoir connaissance de ses périodes et heures de travail et, par voie de conséquence, de ne pas être contrainte de se tenir en permanence à la disposition de son employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 212-4-9 du Code du travail dans leur version applicable au litige ;

ALORS en sixième lieu et en toute hypothèse QUE le contrat de travail intermittent est un contrat écrit qui doit notamment mentionner la durée annuelle minimale de travail du salarié ; qu'il en résulte qu'en l'absence de cette mention dans le contrat, ce dernier est présumé à temps plein ; qu'il appartient alors à l'employeur qui soutient que le contrat n'est pas à temps plein d'établir la durée annuelle minimale convenue et que le salarié connaissait les jours auxquels il devait travailler et selon quels horaires, et qu'il n'était pas obligé de se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, afin d'établir que Madame [L] avait connaissance de ses périodes et heures de travail et n'était donc pas contrainte de se tenir en permanence à la disposition de son employeur, la société IPSOS OBSERVER versait aux débats les plannings établis mensuellement par la société et communiqués à la salariée ; que pour considérer que l'employeur ne versait aucun élément permettant d'établir que la salariée était en mesure de connaître à l'avance ses périodes d'activité et son rythme de travail et requalifier la relation de travail en un contrat à temps complet, le Conseil de prud'hommes a relevé que Madame [L] faisait valoir que les plannings qui lui étaient remis mensuellement n'avaient pas de valeur contractuelle et pouvaient être modifiés à tout moment ; qu'à supposer ces motifs adoptés, en se fondant sur cette circonstance pour requalifier le contrat intermittent en contrat à temps plein sans rechercher si les plannings mensuels remis à Madame [L] sur la période en cause avaient effectivement fait l'objet de modifications, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 212-4-9 du Code du travail dans leur version applicable au litige ;

ALORS en septième lieu et en toute hypothèse QUE lorsqu'un salarié ne fournit pas la prestation inhérente à son contrat de travail, l'employeur ne peut être tenu de lui verser un salaire que si une disposition légale, conventionnelle ou contractuelle lui en fait obligation ; qu'en l'espèce, la société IPSOS POBSERVER faisait valoir que les jours d'indisponibilité et les congés sans solde posés par Madame [L] ne pouvaient donner lieu au paiement d'un rappel de salaire puisque ces jours d'indisponibilité et de congés sans solde correspondaient à des périodes pendant lesquelles la salariée avait expressément manifesté sa volonté de ne pas travailler et ne se maintenait pas à la disposition de la société ; qu'en retenant néanmoins que, compte tenu de la requalification du contrat de travail à durée indéterminée en contrat de travail à temps plein, il n'y avait pas lieu de déduire du décompte établi par Madame [L] les jours d'indisponibilité ou les congés sans solde sans rechercher si la salarié ne s'était pas délibérément abstenue de fournir la prestation inhérente à son contrat de travail pendant ces périodes, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1221-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-16821
Date de la décision : 21/09/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Emploi intermittent - Contrat de travail intermittent - Qualification donnée au contrat - Requalification en contrat de travail à temps complet - Effets - Obligation pour l'employeur de fournir un travail - Preuve - Charge - Détermination - Portée

TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION - Salaire - Cause - Travail du salarié - Salarié se tenant à la disposition de l'employeur - Preuve - Nécessité - Cas - Requalification d'un contrat intermittent en contrat à temps complet - Portée PREUVE - Règles générales - Charge - Applications diverses - Contrat de travail - Travail du salarié - Salarié se tenant à la disposition de l'employeur

L'employeur est tenu de fournir un travail et de payer sa rémunération au salarié qui se tient à sa disposition. Prive sa décision de base légale l'arrêt qui, après avoir requalifié un contrat intermittent en contrat à temps complet retient, pour le calcul de la créance de rappel de salaire dû en suite de la requalification, que compte tenu de la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein, il n'y a pas lieu de déduire du décompte établi par la salariée les jours d'indisponibilité ou les congés sans solde, sans rechercher si l'employeur démontrait avoir rempli l'obligation de fournir un travail dont il était débiteur du fait de la requalification du contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet et si la salariée avait, en se déclarant indisponible ou en congés sans solde, refusé d'exécuter son travail ou de se tenir à la disposition de l'employeur


Références :

Article L. 1221-1 du code du travail

article 1315, devenu 1353, du code civil.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 mars 2021

Sur la charge de la preuve de la fourniture de travail et de la tenue à disposition du salarié, à rapprocher : Soc., 23 octobre 2013, pourvoi n° 12-14237, Bull. 2013, V, n° 248 (cassation partielle) ;

Soc., 21 septembre 2022, pourvoi n° 20-17627, Bull., (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2022, pourvoi n°21-16821, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Cathala
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.16821
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