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17/05/2023 | FRANCE | N°21-24273

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mai 2023, 21-24273


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 mai 2023

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 554 F-D

Pourvoi n° T 21-24.273

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 17 MAI 2023

La société Colloquium, société p

ar actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-24.273 contre l'arrêt rendu le 16 septembre 2021 par la cour d'app...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 mai 2023

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 554 F-D

Pourvoi n° T 21-24.273

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 17 MAI 2023

La société Colloquium, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-24.273 contre l'arrêt rendu le 16 septembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [Z] [W], domiciliée [Adresse 3],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Colloquium, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme [W], après débats en l'audience publique du 4 avril 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 septembre 2021), Mme [W] a été engagée le 15 octobre 2003 par la société Colloquium (la société), en qualité de chef de projet. Elle exerçait en dernier lieu les fonctions de directrice du développement communication et responsable Marketing congrès.

2. La salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique, au cours duquel un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) lui a été proposé. Son contrat de travail a été rompu, le 16 août 2016, à l'issue du délai de réflexion dont elle disposait après son adhésion au dispositif.

3. Contestant le motif économique de son licenciement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de fixer le salaire de la salariée à une certaine somme et de la condamner à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire pour le variable 2016, outre les congés payés afférents, alors :

« 1°/ que l'article 2.2 de l'avenant au contrat de travail daté du 1er octobre 2011 stipule que le salarié peut, chaque année civile, bénéficier d'une rémunération variable complémentaire, déterminée en fonction de la réalisation d'objectifs convenus entre les parties au plus tard le 31 décembre de l'année précédente, précision faite que "cette rémunération variable complémentaire ne sera due au titre de l'année N qu'à condition de la présence continue du salarié dans la société au titre de cette même année N" ; que pour condamner l'employeur à verser à Mme [W] une somme 4 585 euros à titre de rappel de salaire pour le variable 2016, l'arrêt attaqué retient que la part variable étant partie intégrante de la rémunération, elle doit être fixée au prorata temporis de la présence ; qu'en statuant ainsi quand la salariée, licenciée à compter du 16 août 2016, ne pouvait prétendre au versement de la rémunération variable complémentaire subordonné à la présence continue du salarié dans la société au titre de l'année de référence, la cour d'appel a violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;

2°/ qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle était invitée à le faire, si le paiement au prorata temporis de la prime annuelle d'objectifs au salarié qui a quitté la société au cours de l'année, avant la date de son versement, était prévu par une disposition conventionnelle ou contractuelle ou par un usage d'entreprise, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 devenu 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, d'une part, que si l'ouverture du droit à un élément de rémunération afférent à une période travaillée peut être soumise à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération, qui est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée, ne peut être soumis à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement, d'autre part, que lorsque le paiement de la rémunération variable du salarié résulte du contrat de travail et qu'aucun accord entre l'employeur et le salarié n'a pu avoir lieu sur le montant de cette rémunération, il appartient au juge de déterminer celui-ci en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes.

6. La cour d'appel a constaté, d'abord, que selon l'avenant au contrat de travail du 1er octobre 2011, la salariée bénéficiait d'une rémunération variable complémentaire sur objectifs convenus au plus tard le 31 décembre de l'année précédente, sous condition de présence continue sur l'année et, ensuite, qu'aucun objectif n'avait été fixé à la salariée pour l'année 2016.

7. De ces constatations et énonciations, dont il résultait que la prime litigieuse constituait la partie variable de la rémunération versée à la salariée en contrepartie de son activité de sorte qu'elle s'acquérait au fur et à mesure au cours de l'exercice, la cour d'appel a exactement déduit que la salariée pouvait prétendre au paiement de la part variable de sa rémunération, dont elle a souverainement apprécié le montant en l'absence d'objectifs convenus entre les parties.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

9. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer à la salariée diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse nets de CSG/CRDS et de charges sociales, de dommages-intérêts pour préjudice distinct nets de CSG/CRDS et de charges sociales et de lui ordonner de rembourser à Pôle emploi les indemnités versées à la salariée dans la limite de six mois, alors « que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt attaqué retient que la société Colloquium ne produit aucun élément comptable, financier et fiscal détaillé et complet des entités de son groupe formant son secteur d'activité, la seule attestation générale du commissaire au compte portant sur la seule activité communication pour les exercices 2014 et 2015 de la société Colloquium ne permet pas d'analyser et de justifier la perte de compétitivité et les difficultés économiques au niveau du groupe ; qu'en statuant ainsi sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier des comptes sociaux 2015-2016 de la société Colloquium (pièce n° 24) et de la société Colloquium Brussels (pièce n° 29), lesquelles constituent le secteur d'activité organisation de congrès du groupe, pièces qui figuraient au bordereau annexé aux conclusions de l'employeur et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

10. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

11. Pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la société ne produit aucun élément comptable, financier et fiscal détaillé et complet des entités de son groupe formant le secteur d'activité de Colloquium, objet de ladite réorganisation. Il ajoute que la seule attestation générale du commissaire aux comptes, portant sur la seule activité « communication » pour les exercices 2014 et 2015 de la société Colloquium ne permet pas en effet d'analyser et de justifier la perte de compétivité du groupe.

12. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur l'absence au dossier des comptes sociaux 2015-2016 de la société Colloquium et ceux de la société Colloquium Brussels qui figuraient au bordereau annexé aux conclusions de l'employeur et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

13. L'employeur fait grief à l'arrêt de lui ordonner de rembourser à Pôle emploi les indemnités versées à la salariée dans la limite de six mois, alors « qu'en l'absence de motif économique, le contrat de sécurisation professionnelle devenant sans cause, l'employeur est tenu de rembourser les indemnités de chômage éventuellement versées au salarié, sous déduction de la contribution prévue à l'article L. 1233-69 du code du travail ; qu'après avoir jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a ordonné le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois sans tenir compte de la contribution susvisée ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-69 et L. 1235-4 du code de travail, le premier, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 et le second, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1233-69 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, et l'article L. 1235-4 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

14. En l'absence de motif économique, le contrat de sécurisation professionnelle devenant sans cause, l'employeur est tenu de rembourser les indemnités de chômage éventuellement versées au salarié, sous déduction de la contribution prévue à l'article L. 1233-69 du code du travail.

15. Après avoir jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a ordonné le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois.

16. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

17. La cassation des chefs de dispositif disant le licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamnant l'employeur au paiement des sommes afférentes à la rupture du contrat de travail et le condamnant à rembourser à Pôle emploi les indemnités versées à la salariée dans la limite de six mois, n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt le condamnant à des dommages-intérêts pour préjudice distinct subi au titre du harcèlement moral, aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamne la société Colloquium à payer à Mme [W] les sommes de 18 750 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 875 euros à tire de congés payés afférents, 75 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse nets de CSG/CRDS et de charges sociales et ordonne à la société Colloquium de rembourser à Pôle emploi les indemnités versées à Mme [W] dans la limite de six mois, l'arrêt rendu le 16 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne Mme [W] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-24273
Date de la décision : 17/05/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 septembre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mai. 2023, pourvoi n°21-24273


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.24273
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