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04/04/2024 | FRANCE | N°42400191

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 avril 2024, 42400191


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


MB






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 4 avril 2024








Cassation partielle




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 191 F-B


Pourvoi n° W 22-19.335








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________>



ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 AVRIL 2024


M. [P] [T], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 22-19.335 contre l'arrêt rendu le 10 mai 2022 par la cour d'appel de Mont...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

MB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 avril 2024

Cassation partielle

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 191 F-B

Pourvoi n° W 22-19.335

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 AVRIL 2024

M. [P] [T], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 22-19.335 contre l'arrêt rendu le 10 mai 2022 par la cour d'appel de Montpellier (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône domicilié [Adresse 3],

2°/ au directeur général des finances publiques, domicilé [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Thomas, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de M. [T], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône et du directeur général des finances publiques, après débats en l'audience publique du 13 février 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Thomas, conseiller rapporteur, M. Ponsot doyen, conseiller, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 10 mai 2022), le 28 novembre 2013, l'administration fiscale a demandé à M. [T] de déposer des déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) relatives aux années 2007 à 2013.

2. Le 12 mai 2014, l'administration fiscale lui a adressé une proposition de rectification portant sur l'ISF dû au titre des années 2010 à 2013.

3. Après rejet de sa réclamation contentieuse, M. [T] a assigné l'administration fiscale afin d'obtenir la décharge totale des impositions réclamées pour les années 2010 à 2012 et la décharge partielle de l'imposition réclamée pour l'année 2013.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [T] fait grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble de ses demandes relatives à l'ISF établi sur la base des déclarations qu'il a déposées au titre des années 2010 à 2013, de déclarer, en conséquence, régulier l'avis de mise en recouvrement du 25 août 2014, de déclarer fondées les impositions mises en recouvrement par cet avis et de confirmer la décision de rejet de sa réclamation formée au titre des années 2010 à 2013, alors « que le montant du patrimoine permettant de déterminer si une personne est soumise à l'impôt de solidarité sur la fortune et de fixer, le cas échéant, le montant des sommes dues, devait être déterminé après déduction des dettes certaines du contribuable, au 1er janvier de l'année d'imposition ; qu'une dette fiscale ne devient incertaine qu'à compter du moment où elle est contestée, de sorte qu'une dette fiscale contestée après le 1er janvier de l'année d'imposition devait être déduite du patrimoine du contribuable au titre de cette année ; qu'en l'espèce, M. [T] faisait valoir qu'au 1er janvier de chacune des années en cause, il était débiteur de dettes fiscales qui diminuaient le montant de son patrimoine ; qu'en se fondant, pour écarter cette argumentation et retenir que les redressements étaient fondés, sur le fait que M. [T] avait formé, en 2014 et 2017, des réclamations relatives à l'impôt sur le revenu, la taxe d'habitation, la taxe professionnelle et la TVA pour les années 2006 à 2015, soit avant le rejet de ses réclamations en matière d'impôt de solidarité sur la fortune, tandis que, à supposer l'existence de ces réclamations avérées, elles étaient sans incidence sur les sommes dues au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune pour les années 2010 à 2013 dès lors qu'elles étaient postérieures au 1er janvier des années d'impositions et ne pouvaient donc rendre les dettes fiscales de M. [T] à ces dates incertaines, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 885 A et suivants du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 1er janvier 2018, ensemble l'article 768 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 885 A, 885 D du code général des impôts, alors applicables, et l'article 768 du même code :

5. Il résulte du premier de ces textes que le seuil d'assujettissement à l'ISF porte sur la valeur nette des biens du redevable et s'apprécie au 1er janvier de chaque année d'imposition.

6. Il résulte des deux derniers que ce n'est qu'à compter du jour où elle est contestée qu'une dette établie à la suite d'une procédure de redressement peut être considérée comme incertaine et, par suite, ne peut figurer au passif déductible de l'assiette de l'ISF.

7. Dès lors, une dette, qui, au 1er janvier de l'année d'imposition, ne faisait l'objet d'aucune contestation, est déductible de l'assiette de l'ISF et doit également être prise en compte pour déterminer si la condition d'assujettissement à cet impôt tenant à la valeur minimale des biens du redevable est remplie, quand bien même cette dette ferait l'objet d'une contestation ultérieure.

8. Pour rejeter les demandes de décharge des impositions réclamées au titre des années 2010 à 2012 et de réduction de l'imposition réclamée au titre de l'année 2013, l'arrêt énonce qu'une dette devient incertaine à compter du jour de sa contestation, de sorte qu'elle n'est rétroactivement déductible qu'au terme de la contestation contentieuse qui la rend définitivement certaine.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il rejette la demande formée par M. [T] relative à l'ISF établi sur la base des déclarations qu'il a déposées au titre des années 2010 à 2013, déclare régulier l'avis de mise en recouvrement du 25 août 2014, déclare fondées les impositions mises en recouvrement par cet avis et confirme la décision de rejet de sa réclamation formée au titre des années 2010 à 2013, l'arrêt rendu le 10 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne le directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, et le directeur général des finances publiques aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, et le directeur général des finances publiques et les condamne à payer à M. [T] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400191
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Impôt de solidarité sur la fortune - Assiette - Déduction - Dette litigieuse (non) - Date à partir de laquelle la dette est considérée comme incertaine - Détermination - Jour de sa contestation

Selon l'article 885 A du code général des impôts, applicable à l'espèce, le seuil d'assujettissement à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) porte sur la valeur nette des biens du redevable et s'apprécie au 1er janvier de chaque année d'imposition. Il ressort de la combinaison des articles 885 D, alors applicable, et 768 du même code que ce n'est qu'à compter du jour où elle est contestée qu'une dette établie à la suite d'une procédure de redressement peut être considérée comme incertaine et par conséquent ne peut figurer au passif déductible de l'assiette de l'ISF. Il s'ensuit qu'une dette ne faisant l'objet d'aucune contestation au 1er janvier de l'année d'imposition est déductible de l'assiette de l'ISF, quand bien même elle ferait l'objet d'une contestation ultérieure, et doit être prise en compte pour déterminer si la condition d'assujettissement à cet impôt tenant à la valeur minimale des biens du redevable est remplie


Références :

Articles 885 A, 885 D, applicables à l'espèce, et 768 du code général des impôts.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 10 mai 2022

Com., 13 mars 2019, pourvoi n° 17-13305, Bull., (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 avr. 2024, pourvoi n°42400191


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau
Avocat(s) : SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400191
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