LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° D 23-84.022 F-D
N° 00449
SL2
23 AVRIL 2024
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 23 AVRIL 2024
La société [1] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 17 mars 2023, qui, pour infraction au code de la santé publique, l'a condamnée à 1 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Coirre, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de La société [1], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 mars 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Coirre, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Une villa appartenant à la société [1] (la société), offerte à la location pour des événements divers, a été utilisée pour un mariage dans la nuit du samedi 9 au dimanche 10 octobre 2021.
3. La société a été citée par le ministère public devant le tribunal de police pour complicité, par aide ou assistance, d'émission de bruit portant atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme, visant des faits relevés le 10 octobre 2021 à 2 heures.
4. Cette juridiction l'a déclarée coupable, condamnée à 1 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.
5. La société et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses deuxième à cinquième branches
6. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné la société [1] pour nuisance sonores à une amende de 1 500 euros et l'a condamnée à indemniser les parties civiles, alors :
« 1°/ que les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis, à moins que le prévenu n'accepte expressément d'être jugé sur des faits distincts de ceux visés à la prévention ; que la citation devant le tribunal de police portait sur des nuisances sonores commises le 10 octobre 2021, se contentant de préciser que de telles nuisances perduraient depuis août 2019 ; qu'en déclarant la prévenue coupable de nuisances sonores, outre le 10 octobre 2021, le 29 mai 2021, le 4 juin 2021, 5 juin 2021, le 1er juin 2021, le 26 juin 2021, le 3 août 2021, le 17 septembre 2021, le 26 septembre 2021, la cour d'appel a violé les articles 388 et 531 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 388 du code de procédure pénale :
8. Selon ce texte, les juges ne peuvent légalement statuer que sur les faits dont ils sont saisis.
9. Il résulte de l'arrêt attaqué que la cour d'appel a déclaré la prévenue coupable de faits commis les 29 mai 2021, 4, 5, 11, 26 juin 2021, 3 août 2021, 17, 26 septembre 2021 et 10 octobre 2021, alors que la citation délivrée à la personne morale prévenue ne visait que des nuisances sonores constatées le 10 octobre 2021 et précisait que celles-ci perduraient depuis août 2019.
10. En statuant ainsi, la cour d'appel, excédant sa saisine, a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
11. En effet, le visa, dans la prévention, d'une période antérieure à la date des faits constatés, s'il permet d'établir le caractère répétitif du bruit ainsi relevé, n'a pas pour conséquence d'étendre la saisine de la juridiction de jugement à d'autres épisodes sonores que celui expressément retenu par la citation.
12. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 17 mars 2023, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois avril deux mille vingt-quatre.