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11/04/2024 | FRANCE | N°23/56926

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 11 avril 2024, 23/56926


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 23/56926 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2VWW

N° : 10

Assignation du :
08 Septembre 2023

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le :


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 avril 2024



par François VARICHON, Vice-président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assisté de Larissa FERELLOC, Greffier.
DEMANDEURS

Madame [O] [BL]
[Adresse 5]
[Localité 4]

Monsieur [A] [S]
[A

dresse 6]
[Localité 3] BELGIQUE

Madame [N] [G] Epouse [S]
[Adresse 6]
[Localité 3] BELGIQUE

Madame [B] [MA]
[Adresse 1]
[Localité 7]

Madame [H] [I]
[Adresse 1]
[Localité 7]

tous ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 23/56926 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2VWW

N° : 10

Assignation du :
08 Septembre 2023

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le :

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 avril 2024

par François VARICHON, Vice-président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assisté de Larissa FERELLOC, Greffier.
DEMANDEURS

Madame [O] [BL]
[Adresse 5]
[Localité 4]

Monsieur [A] [S]
[Adresse 6]
[Localité 3] BELGIQUE

Madame [N] [G] Epouse [S]
[Adresse 6]
[Localité 3] BELGIQUE

Madame [B] [MA]
[Adresse 1]
[Localité 7]

Madame [H] [I]
[Adresse 1]
[Localité 7]

tous représentés par Maître Maud LETELLIER, avocat au barreau de PARIS - #P0294 avocat posulant)
et Maître Géraldine SORATO, avocat au barreau de LILLE (avocat plaidant)

DEFENDEUR

Monsieur [HY] [K]
[Adresse 1]
[Localité 7]

représenté par Maître Lionel BUSSON de la SELARL CABINET SABBAH & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0466

INTERVENANTE VOLONTAIRE

La S.C.I. CLEMART, représentée Madame [O] [BL] en sa qualité de gérante
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Maud LETELLIER, avocat au barreau de PARIS - #P0294 avocat posulant)
et Maître Géraldine SORATO, avocat au barreau de LILLE (avocat plaidant)

DÉBATS

A l’audience du 07 Mars 2024, tenue publiquement, présidée par François VARICHON, Vice-président, assisté de Larissa FERELLOC, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

EXPOSE DU LITIGE

M. [A] [S] et Mme [N] [S] (ci-après dénommés “les époux [S]”) sont propriétaires non occupants d’un appartement situé au 6ème étage d’un immeuble édifié [Adresse 1] à [Localité 7].

Mme [B] [MA] et Mme [H] [I] sont les actuelles locataires des époux [S].

La société CLEMART, dont la gérante est Mme [O] [BL], est propriétaire non occupante d’un studio situé au 5ème étage de l’immeuble.

M. [HY] [K] est propriétaire occupant d’un appartement situé au 6ème étage.

L’immeuble est régi par les dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Le règlement de copropriété de l’immeuble a été établi par acte notarié dressé le 21 octobre 1975.

A compter de l’année 2019, M. [K] s’est plaint auprès de Mme [BL] et des époux [S] de bruits provenant de leurs lots. De leur côté, Mme [BL] et les époux [S] ont contesté les nuisances alléguées et ont reproché à M. [K] de les “harceler” ainsi que les occupants de leurs biens.

Par acte du 8 septembre 2023, Mme [BL], les époux [S], Mme [B] [MA] et Mme [H] [I] ont fait assigner M. [K] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de condamnation du défendeur à cesser les troubles occasionnés par son voisinage et à les indemniser à titre provisionnel de leurs préjudices.

Lors de l’audience du 12 octobre 2023, le juge a enjoint aux parties de rencontrer un médiateur en application de l’article 127-1 du code de procédure civile. Aucune médiation n’a toutefois été engagée par les parties à la suite de cette réunion.

Aux termes de leurs conclusions déposées et développées oralement à l’audience, les demandeurs demandent au juge de:

“ Vu l’article 330 du Code de procédure civile,
Vu la théorie du trouble anormal du voisinage,
Vu l’article 835 du Code de procédure civile,
Vu l’article 700 du Code de procédure civile,

JUGER que Monsieur [HY] [K] trouble la tranquillité des demandeurs par un tapage diurne et nocturne constitué notamment par des coups au sol et aux murs, des hurlements sur les occupants, des espionnages et intrusions à l’intérieur des appartements, qui dépassent le niveau normal de nuisances sonores de voisinage et ce avec une intention délibérée de nuire et que ces troubles sont indépendants de la qualité d’isolation phonique de l’immeuble construit en 1975 ;

CONSTATER que la médiation a échoué ;

Par conséquent,

RECEVOIR la SCI CLEMART en son intervention volontaire ;

ENJOINDRE à Monsieur [HY] [K] de cesser les troubles occasionnés sur son voisinage, dès la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 2.000 euros par trouble constaté par tous moyens ;

CONDAMNER Monsieur [HY] [K] à payer la somme provisionnelle de 13.910 euros à la SCI CLEMART dont la gérante est Madame [O] [BL], au titre de la perte de loyers ;

CONDAMNER Monsieur [HY] [K] à payer la somme provisionnelle de 2.000 euros à Madame [O] [BL], au titre des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

CONDAMNER Monsieur [HY] [K] à payer la somme provisionnelle de 1.200 euros à Madame [N] [G] et Monsieur [A] [S], au titre des dommages et intérêts en réparation de leur préjudice financier ;

CONDAMNER Monsieur [HY] [K] à payer la somme provisionnelle de 2.000 euros à Madame [N] [G] et Monsieur [A] [S], au titre des dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral ;

CONDAMNER Monsieur [HY] [K] à payer la somme provisionnelle de 5.000 euros à Madame [B] [MA], au titre des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

CONDAMNER Monsieur [HY] [K] à payer la somme provisionnelle de 5.000 euros à Madame [H] [I], au titre des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.

CONDAMNER Monsieur [HY] [K] à payer à la SCI CLEMART, Madame [O] [BL], Madame [N] [G], Monsieur [A] [S], Madame [B] [MA] et Madame [H] [I] la somme de 4.000 euros chacun, sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, et à supporter le coût des frais et dépens de la présente instance.

DEBOUTER Monsieur [HY] [K] de l’intégralité de ses demandes ;

JUGER qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans l’ordonnance à intervenir, l’exécution forcée devant être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier, le montant des sommes retenues par le commissaire de justice en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n° 96/1080, devra être supporté par Monsieur [HY] [K].”

Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience, M. [K] demande au juge de:

“Vu les articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965,
Vu le Règlement de copropriété,
Vu les articles 32, 122, 700 et 835 du Code de procédure civile,
Vu la théorie des troubles anormaux de voisinage,

DECLARER irrecevable Madame [O] [BL] en l’ensemble de ses demandes.

CONSTATER l’existence de contestations sérieuses s’opposant aux demandes formulées par la SCI CLEMART, Madame [BL], Monsieur et Madame [S], Madame [MA] et Madame [I].

En conséquence,

A titre principal,

DEBOUTER la SCI CLEMART, Madame [BL], Monsieur et Madame [S], Madame [MA] et Madame [I] de l’ensemble de leurs demandes.

A titre reconventionnel,

CONDAMNER les époux [S] et la SCI CLEMART à rétablir le revêtement d’origine de leur logement respectif, ou à défaut, les condamner à effectuer des travaux d’insonorisation sous la direction de l’Architecte de l’immeuble sous astreinte de 500 Euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir.

CONDAMNER in solidum la SCI CLEMART, Monsieur et Madame [S], Madame [MA] et Madame [I] à payer à Monsieur [K] la somme provisionnelle de 20.000 Euros pour trouble anormal de voisinage.

CONDAMNER in solidum la SCI CLEMART, Madame [BL], Monsieur et Madame [S], Madame [MA] et Madame [I], à payer à Monsieur [K] la somme de 6.500 Euros, conformément aux dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Les CONDAMNER in solidum aux entiers dépens de l’instance.”

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, à l'assignation introductive d’instance et aux écritures déposées par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’intervention volontaire de la société CLEMART

Aux termes de l’article 329 du code de procédure civile, l'intervention est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. Elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention.

En l’espèce, il convient de dire la société CLEMART revevable en son intervention volontaire.

Sur la fin de non-recevoir fondée sur le défaut de qualité à agir de Mme [BL]

M. [K] fait valoir que dans la mesure où Mme [BL] n’est pas la propriétaire du local, qui appartient à la société CLEMART, elle est irrecevable à solliciter la réparation d’un préjudice moral personnel et distinct, qui au demeurant n’est pas justifié.

Aux termes de l’article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

La réserve envisagée par cette disposition renvoie aux actions dites “attitrées”, que seules certaines personnes spécialement habilitées par la loi ont qualité pour engager.

En l’espèce, la demande d’indemnisation de son préjudice moral formée par Mme [BL] ne requiert pas une qualité particulière à agir dont elle serait dépourvue. Par ailleurs, dans la mesure où Mme [BL] se prétend titulaire d’une créance indemnitaire à l’égard de M. [K], elle justifie d’un intérêt légitime à agir en paiement à son encontre, et ce quel que soit le bien fondé de cette prétention. En effet, l’existence du droit invoqué par un demandeur n’est pas une condition de recevabilité de son action mais de son succès.

M. [K] sera donc débouté de sa fin de non-recevoir.

Sur les demandes de condamnation de M. [K] à cesser les troubles occasionnés par son voisinage

A l’appui de leur demande, la société CLEMART, Mme [BL], les époux [S], Mme [MA] et Mme [I] exposent:

- que depuis plusieurs années, les occupants des logements appartenant à la société CLEMART et aux époux [S] subissent les comportements harcelants et agressifs de M. [K]; qu’ainsi, ce dernier se livre à un tapage diurne et nocturne, constitué notamment par des coups au sol et aux murs, hurle sur les locataires, les espionne et s’introduit à l’intérieur de leur appartement, et ce avec l’intention délibérée de nuire;
- qu’aucune démarche en vue d’un règlement amiable de cette situation n’a pu aboutir;
- qu’il apparaît que M. [K] ne supporte pas le moindre bruit dans l’immeuble; qu’il ne peut pourtant ignorer que le bâtiment, construit en 1975, n’est pas bien insonorisé;
- que les faits commis par M. [K] constituent un trouble anormal de voisinage ainsi qu’une violation des stipulations de l’article 7, 12, du règlement de copropriété relatif au maintien de la tranquillité de l’immeuble; qu’un trouble manifestement illicite est ainsi caractérisé.

M. [K] réplique :

- qu’à la suite de la pose d’un parquet dans les appartements de la société CLEMART et des époux [S], dans des conditions non conformes aux règles de l’art et sans avoir sollicité l’autorisation du syndic, il subit des nuisances sonores causées par des bruits de pas sur le sol;
- qu’en outre, il subit également le comportement bruyant des locataires de la société CLEMART et des époux [S];
- que ces nuisances excèdent les bruits de la vie courante et constituent un trouble anormal de voisinage;
- que dans ces conditions, les demandeurs ne peuvent solliciter sa condamnation pour trouble anormal de voisinage.

Aux termes de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

Il est de principe que nul ne peut causer à autrui un trouble anormal du voisinage.

Constitue un trouble anormal de voisinage le dommage continu ou répété causé à un voisin (bruit, odeurs, etc.) qui excède les inconvénients ordinaires du voisinage.

En l’espèce, à l’appui de leur affirmation selon laquelle M. [K] se livre, par son comportement, à un trouble anormal de voisinage, les demandeurs versent notamment aux débats:

- le tableau récapitulatif des faits imputés à M. [K] par Mme [MA] et Mme [I]. Ce document mentionne 35 événements survenus pendant la période courant du 5 septembre 2020 au 18 janvier 2021, de jour comme de nuit, constitués notamment par des visites de M. [K], parfois en colère, pour se plaindre du bruit, de multiples coups portés par M. [K] sur le mur, des cris, et une tentative d’intrusion dans l’appartement.

- la main courante déposée le 8 novembre 2020 par Mme [MA] en raison des coups violents portés sur le mur de son appartement par M. [K].

- la main courante déposée pour le même motif le 13 novembre 2020 par Mme [I].

- le courriel adressé le 5 janvier 2021 à M. [S] par Mme [MA] pour relater les faits suivants: “[E] [Mme [I]] était seule à la maison à travailler sur son ordinateur sur le canapé, quand Mr [K] s’est mis à cogner comme d’habitude très fort à répétition sur le mur (...). (...) Mr [K] est sorti de chez lui en cognant en sonnant à la porte comme à son habitude dans une certaine violence, [E] refuse de lui ouvrir il continu ce harcèlement, elle fini par décider de lui ouvrir face à son insistance (...), Mr [K] a donc hurlé à [E] comme quoi elle sautait dans l’appartement (pour rappel nous ne sommes pas gymnastes, nous ne faisons que marcher de surcroît en chaussons) (...). [E] m’a ensuite appelé, j’ai quitté mon travail pour rentrer car, il nous fait peur en plus de nous harceler à travers les murs (...)”.

- le courriel adressé le 6 septembre 2022 à M. [S] par Mme [MA] pour relater les faits suivants: “Nous venons à l’instant d’avoir une altercation plutôt violente avec Mr [K], entre autres mots doux, il nous as insulté d’idiotes, de personnes stupides, et nous emmerde, tout ça en nous donnant l’ordre de ne plus marcher chez nous. (...) N’ayant plus personne à harceler en dessous cela revient sur nous avec une violence augmentée, tout ça en écoutant “d’où vient le bruit” donc à notre porte à chaque fois qu’il fait une ronde pour descendre au 5/4ème. Au delà de la gêne qu’impose ses coups - du harcèlement - il nous espionne. Encore une fois, nous sommes un peu plus démunies, apeurées et fatiguées”.

- le courriel adressé le 12 septembre 2022 à M. [S] par Mme [MA] pour relater les faits suivants: “Hier soir il a encore frappé pendant au moins 1h de 23h à plus de minuit. Et encore ce matin vers 8h30. Ses excès reprennent de plus belle et le miroir accroché sur le mur mitoyen tremble, j’ai peur qu’un jour il tombe suite à ces coups (pour vous donner une idée de la violence de ces actions”). J’ai pris le reflex d’enregistrer mes sorties et mes rentrées dans l’appartement de peur qu’il m’interpelle violemment. Il descend encore aux étages inférieurs et écoute à notre porte en remontant. (...)”.

Les demandeurs produisent par ailleurs des correspondances et attestations émanant de tiers à la présente instance. Il convient de mentionner, entre autres, les pièces suivantes:

- le courriel adressé le 13 novembre 2020 à Mme [BL] par Mme [X] [C], alors locataire de la société CLEMART, pour relater les faits suivants: “Depuis des mois j’entends un bruit à dire le moins bizarre - comme si quelqu’un donnait des coups avec un marteau sur une surface en bois. Le bruit est tellement fort et les coups s’enchaînent parfois durant toute la journée, parfois dans des différentes parties de la journée (souvent après minuit). (...) C’est que le 18 octobre que le monsieur responsable pour le bruit est venu me rapidement reprocher que je marchais d’une façon qui, selon lui, apparemment produisait beaucoup de bruit dans son appartement. J’étais assez surprise alors que personne dans l’immeuble ne m’a jamais reproché de faire aucun bruit et surtout pas en marchant. (...).
Le 11 novembre le monsieur est revenu en me reprochant la même chose. (...) A cette reprise il m’avait dit qu’il donnait des coups car il m’entendait marcher et courir dans l’appartement toute la journée tandis que moi, étant en télétravail, j’ai passé la plupart de la journée assise devant mon ordinateur. (...)
J’aimerais souligner que les coups et le bruit que ça produisait pendant des mois m’ont gêné jusqu’au point de me faire peur et de créer en moi un sentiment d’insécurité qui ne peut qu’exacerber dans le nouveau confinement nous obligeant de rester constamment à la maison. Cela et aussi l’absence d’une raison apparente (à part les affirmations de M. [K] d’entendre un bruit insupportable, qui ne semble être corroboré par aucun élément objectif) pour les coups me permet de conclure que son comportement frôle le harcèlement. Les voisines de dessus ont posé une main courante et j’entends faire la même chose. ».

- la main courante déposée le 16 novembre 2020 par Mme [C] en raison du bruit causé par des coups donnés par M. [K].

- la main courante déposée le 15 novembre 2021 et les plaintes déposées le 13 janvier et 30 mars 2022 par Mme [J] [D], alors locataire de la société CLEMART, en raison du bruit causé par des coups donnés sur le sol par M. [K], auquel il est par ailleurs reproché d’avoir “ce matin encore (...) frappé à ma porte environ 5 ou 6 fois en 15 minutes. Il a mis un réveil pour me réveiller à 06h00". Aux termes du procès-verbal du 30 mars 2022, Mme [J] [D] indique que “Cette situation est invivable, j’ai vraiment peur de lui car il me fait peur et me hurle dessus”.

- la capture d’écran du SMS adressé à Mme [BL] par Mme [J] [D] relatant les faits suivants: “(...) mon cher voisin est venu sonner à 23h car je parlais avec deux amies depuis 19h. Il avait son portable dans la main, avec lequel il a activé l’enregistrement audio qu’il a fait démarrer quand j’ai ouvert la porte, bien sûr pas quand il frappait comme un malade juste avant. Je suis restée très calme, lui ai demandé pourquoi il enregistrait, “pour avoir des exemples de ce qu’il se passe ici” je cite. (...) Il est maintenant 6h du matin et il vient de venir à la porte me réveiller, j’ai décider de ne pas ouvrir. Il persiste. C’est vraiment invivable, je suis de plus en plus angoissée par tout cela (...)”.

- le document daté du 22 juillet 2022 établi à l’attention de Mme [BL] par Mme [J] [D], qui indique quitter l’appartement dont elle était locataire “pour la simple et bonne raison que Mr [K] me harcèle depuis mon arrivée. Il me fait peur, je n’ose plus entrer dans mon appartement, son intimidation a fini par fonctionner, je suis suivie par une psychologue car cela affecte énormément mon quotidien, mon travail, mes nuits”.

- le document établi le 17 mai 2022 par Mme [Y], psychologue clinicienne, qui atteste du fait que le comportement de M. [K], tel que rapporté par sa patiente Mme [J] [D], “ressemble fortement à du “harcèlement” ” et affecte négativement son état psychologique.

- le document établi le 6 octobre 2022 par Mme [T], psychologue clinicienne, qui atteste du fait que le comportement de M. [K], tel que rapporté par sa patiente Mme [MA], a eu un impact négatif sur son humeur, caractérisé notamment par des troubles du sommeil;

- l’attestation établie le 20 septembre 2023 par M. [M] [V] et Mme [F] [L], actuels locataires de la société CLEMART, qui relatent les faits suivants: “Dans les alentours de 7h30, le mardi 19 septembre 2023, notre sonnette sonne. Le son me faisant penser à l’interphone de la porte d’entrée en bas, nous n’ouvrons pas. Les sonneries se répètent, j’observe à travers l’œilleton de notre porte. Je vois un homme avec son téléphone portable face à notre porte. Nous n’avons jamais vu cet homme, supposant que ce soit notre voisin du dessus.
Juste réveillés, nous nous préparons, laissant les sonneries de sonnette se répétées. Cet homme parle à travers la porte. Puis il part du palier. Nous sortons de notre appartement vers 7h30. Ce monsieur sort de la cage d’escaliers. Toujours accompagné de son portable, nous filmant à notre insu. Cet individu nous demande pourquoi on ne lui a pas ouvert à 7h30 du matin. Mon conjoint lui demande ce qu’il se passe. Il veut savoir ce qu’il se passe car notre propriétaire lui a indiqué que ce logement n’était jamais loué. N’arrêtant pas de nous filmer, nous le prévenons que nous allons appeler la police.”

- l’attestation établie le 23 janvier 2024 par Mme [Z] [S], fille de M. [A] [S], qui relate les faits suivants: “Durant plus de 7 ans, j’ai vécu dans l’appartement voisin de Monsieur [K]. Celui-ci a emménagé quelque temps après moi, il me semble 1 an et demi environ après. Rapidement, il a commencé à me dire qu’il entendait les portes grincer alors que je n’avais que 2 portes, qui ne grinçaient pas du tout. A cette occasion il a voulu rentrer chez moi afin de mettre du produit à graisser. Ce qu’il a finalement fait. (...) C’est arrivé également que la voisine d’en face se fasse engueuler par Monsieur [K] car elle avait tiré la chasse de ses toilettes le soir et ça l’avait dérangé. Au moindre petit bruit, c’était devenu une obsession et ça empirait. Jusqu’au bout ça aura été un enfer d’habiter à côté de lui. Pour cette raison, j’ai donc décidé de déménager. (...). Il y a des moments où j’étais vraiment terrifiée !! J’ai vraiment de très mauvais souvenirs de cette période, ça m’a vraiment marqué !!”.

- l’attestation établie le 23 janvier 2024 par Mme [YS] [S], fille de M. [A] [S], qui relate les faits suivants au sujet de M. [K] : “J’ai moi même observé son comportement agressif: un jour [Z] était sortie faire une course et j’étais restée seule quand il a commencé à nouveau à taper avec le bâton sur le mur et est venue me crier dessus, il est rentré sans frapper à la porte. J’ai eu très peur, il est ensuite venu mettre un grand tapis dans le mini living. Je n’ai rien osé dire et l’ai laissé faire. (...) La situation a continué à s’aggraver et ma soeur avait de plus en plus peur. Elle n’osait plus tirer la chasse non plus (...)”.

- l’attestation établie le 22 janvier 2024 par M. [ON] [P], qui relate les faits suivants: “Je me souviens que les premières fois où elle [[Z] [S]] m’a reçu à son domicile, elle m’a demandé de retirer mes chaussures et de faire attention à ma façon de marcher car elle avait des problèmes avec le voisin qui apparemment était très sensible aux bruits. J’ai pu m’en rendre compte assez vite car il passait son temps à taper sur le mur alors que le niveau sonore n’était par particulièrement élevé”.

- l’attestation établie le 22 janvier 2024 par Mme [ED] [W], qui relate les fait suivants: “Je (...) atteste avoir assisté à plusieurs reprises entre 2011 et 2018 lors de déjeuner chez Mademoiselle [S] [Z] (...) un déferlement de coups de poings (ou autres objets) sur le mur adjacent l’appartement par (Monsieur [K] le voisin de palier). Nos moments de partages de convivialités devenaient incongru et inconfortable. Nous étions dans l’obligation de chuchoter, et de limiter nos déplacements dans l’appartement avec ou sans chaussures. (...) Mademoiselle [Z] [S] n’à fait que subir les agissements de ce Monsieur [K] afin de ne jamais envenimer les choses, il était inimaginable et inconcevable d’organiser un dîner sur un fond de musique à son domicile”.

- l’attestation établie le 26 janvier 2024 par Mme [R] [U], qui relate les faits suivants: “Je (...) atteste m’être rendue à son domicile [de Mme [Z] [S]] entre 2011 et 2018. (...) Nous avons toujours veillé à respecter le voisinage de Madame [S]. (...) Je me souviens que Monsieur [K] s’est présenté à plusieurs reprises au domicile de Madame [S] à des heures diverses et variées en stipulant que nous faisions trop de bruit. J’étais pour ma part dans une incompréhension totale car nous étions parfois en plein après-midi, nous n’écoutions ni musique, et nous parlions de manière calme et posée. Madame [S] a sans cesse tenté d’ouvrir le dialogue. Quant à moi, elle me demandait de parler encore plus bas, de ne surtout pas allumer de musique et de retirer mes chaussures si ces dernières étaient à talons”.

- l’attestation établie le 17 janvier 2024 par Mme [GR] [ZK], qui relate les faits suivants (traduction de la langue anglaise en langue française effectuée par les demandeurs): “Depuis que j'ai rencontré [E] [Mme [I]] en 2023, elle m'a expliqué les problèmes avec son voisin, M. [K], qui lui fait peur et elle est souvent frustrée, tendue et anxieuse dans son logement à cause de M. [K]. Elle refuse de déménager parce qu'elle aime son appartement et son jardin, mais M. [K] est une source constante d'anxiété. Ayant une relation personnelle étroite avec [E], je passe beaucoup de temps chez elle et j'ai moi aussi connu ce stress et cette anxiété.
(...) M. [K] me voit arriver à la maison d'[E] et c'est lorsque je suis là qu'il tape le plus souvent et le plus fort sur les murs. J'ai peur d'attendre seul sur le pas de sa porte et je lui demande souvent de m'attendre à la porte lorsque j'arrive. Je lui ai également demandé de m'accompagner jusqu'à l'ascenseur, car un jour, alors que je partais, M. [K] est sorti avec son téléphone et a commencé à nous crier dessus. Je me suis tenue derrière [E] car j'ai très peur de lui et il parlait fort et de manière menaçante.
(...) Elle [Mme [I]] demande également aux invités de porter des pantoufles et fait très attention au degré de mouvement, au volume de la voix des invités, à la fermeture des portes, etc.
Août 2023 : M. [K] a frappé et sonné à la porte d'[E], [Adresse 1], à plusieurs reprises après minuit.(...).
Le 12 septembre 2023 : Je travaillais chez [E], où je restais quelques jours avant de partir pour un long voyage aux États-Unis. (…) J'ai ignoré les deux fois où il a frappé, car j'avais déjà peur de M. [K], d'autant plus que j'étais seule (...). J'ai répondu et il a commencé à me demander qui j'étais d'une voix extrêmement énervée, m'accusant de faire du bruit, alors que j'étais assise au téléphone avec des écouteurs. J'ai eu très peur (...).
Septembre 2023 : [E] et moi partions travailler un matin lorsque M. [K] est sorti de son appartement et a commencé à l'engueuler pour avoir fait du bruit très tard la veille alors que nous nous étions endormis tôt. Il l'a filmée et n'a pas écouté ses explications. Il était très en colère et nous sommes partis au travail dans une ambiance tendue et effrayée, tellement secouée qu'[E] a pleuré sur le chemin du travail.
2 décembre 2023 : (…) M. [K] est venu frapper deux fois alors que nous étions assis par terre en train de peindre, nous ne pouvions pas bouger ou faire du bruit, nous ne nous parlions pas, nous nous concentrions sur la peinture et écoutions de la musique classique calme.
3 janvier 2024 : [E] était très malade, (…) quand M. [K] est venu frapper à la porte et lui a demandé avec colère ce qu'elle faisait, si elle allait continuer à faire du bruit toute la nuit. Elle a répondu qu'elle avait peur et qu'elle appellerait la police. Elle a expliqué qu'elle était malade et qu'elle s'était allongée sur le canapé, mais il est revenu pour sonner et frapper à la porte à
plusieurs reprises, et a crié à l'extérieur "Je vous entends parler"”.

Ces nombreux témoignages émanant de différentes personnes sont parfaitement concordants quant aux nuisances qu’ils imputent à M. [K] et établissent ainsi la matérialité des faits qui lui sont reprochés.

Les faits de tapage nocturne et diurne répétés de la part de M. [K], ses interventions multiples et intrusives au domicile des locataires des époux [S] et de la société CLEMART, son comportement irascible à leur égard, caractérisé notamment par des cris et des propos peu amènes, voire des insultes, et le fait de les filmer et de les enregistrer sans solliciter leur accord, constituent un trouble anormal de voisinage.

L’existence du trouble anormal de voisinage allégué par M. [K], serait-elle caractérisée, ne saurait l’autoriser à commettre les faits qui lui sont reprochés par les demandeurs. Il lui appartient en effet d’agir par voie de droit afin de faire constater l’existence du trouble dont il s’estime la victime et de le faire cesser le cas échéant.

En outre, le comportement de M. [K] constitue de surcroît un manquement à l’article 12.7 du règlement de copropriété, intitulé “Tranquillité”, libellé comme suit: “ Les occupants, quels qu’ils soient, des locaux privatifs ne pourront porter en rien atteinte à la tranquillité des autres copropriétaires. (...) Tout bruit, tapage nocturne et diurne, de quelque nature que ce soit, susceptible de troubler la tranquillité des occupants est formellement interdit, alors même qu’il y aurait lieu à l’intérieur des appartements et autres locaux.”

La commission d’un trouble anormal de voisinage et la violation du règlement de copropriété constituent un trouble manifestement illicite.

Il sera donc enjoint à M. [K] de cesser sans délai les faits de tapage nocturne et diurne et plus généralement de s’abstenir, à l’égard des occupants des lots de la société CLEMART et des époux [S], de tout fait constituant un manquement aux stipulations précitées du règlement de copropriété.

La nécessité d’une astreinte n’étant pas démontrée, il n’y a pas lieu de l’ordonner.

Sur les demandes de condamnation de M. [K] au paiement de provisions sur dommages et intérêts

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le montant de la provision allouée en référé n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée. Le juge des référés fixe discrétionnairement à l’intérieur de cette limite la somme qu’il convient d’allouer au requérant.

a) Sur la demande indemnitaire de la société CLEMART pour perte de loyers

La société CLEMART expose qu’en raison des départs successifs de ses locataires du fait des nuisances imputables à M. [K], elle n’a pu louer son bien durant treize mois, subissant ainsi un préjudice financier de 13.910 €.

Toutefois, la société CLEMART ne verse aux débats aucune pièce de nature à démontrer que son logement est demeuré vacant durant treize mois. L’obligation de paiement dont elle se prévaut à l’égard de M. [K] étant de ce fait sérieusement contestable, il convient de dire n’y avoir lieu à référé sur sa demande.

b) Sur la demande indemnitaire des époux [S] pour préjudice financier

Les époux [S] sollicitent l’allocation provisionnelle de la somme de 1.200 € correspondant à la réduction de loyer qu’ils ont été contraints de consentir à leur locataire du fait des nuisances imputables à M. [K].

Toutefois, il n’est produit aucune pièce émanant du locataire des époux [S] confirmant l’existence de cet abattement et de son lien avec le comportement de M. [K]. L’obligation de paiement dont les époux [S] se prévalent à l’égard de M. [K] étant de ce fait sérieusement contestable, il convient de dire n’y avoir lieu à référé sur leur demande indemnitaire.

c) Sur les demandes indemnitaires pour préjudice moral

Mme [MA] et Mme [I] exposent que les tapages répétés de M. [K], de jour comme de nuit, ont généré une angoisse importante et permanente, une peur de recevoir chez elles des amis, des troubles du sommeil et une atteinte psychologique.

L’existence du préjudice moral invoqué par les demanderesses n’apparaît pas sérieusement contestable au vu du comportement adopté par M. [K] depuis plusieurs années, tel qu’il est établi par les témoignages concordants précités. Les déclarations des demanderesses sont par ailleurs corroborées par l’attestation établie le 6 octobre 2022 par Mme [T], psychologue clinicienne.

Au regard de l’ancienneté du trouble anormal de voisinage, subi par Mme [MA] et Mme [I] depuis le mois de septembre 2020, il convient d’allouer à chacun d’entre elles une provision de 2.000 € à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice.

Mme [BL] et les époux [S] font valoir qu’ils ont subi un préjudice moral du fait de la nécessité de prendre en charge les doléances de leurs locataires causées par le comportement de M. [K] et de l’anxiété générée par cette situation.

L’existence du préjudice moral alléguée n’est toutefois pas démontrée avec l’évidence requise en référé. Il convient donc de dire n’y avoir lieu à référé sur leurs demandes indemnitaires.

Sur la demande reconventionnelle de condamnation des époux [S] et de la société CLEMART à rétablir le revêtement d’origine de leur logement respectif ou à effectuer des travaux d’insonorisation

A l’appui de sa demande, M. [K] expose:

- que les époux [S] et la société CLEMART ont fait poser dans leurs lots un parquet, dans des conditions non conformes aux règles de l’art et sans avoir sollicité l’autorisation du syndic requise par l’article 12 du règlement de copropriété; que ces agissements contreviennent aux articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965;
- que ce changement de revêtement de sol, mal réalisé, a augmenté excessivement les nuisances phoniques qu’il subit.

Les époux [S] et la société CLEMAR répliquent:

- que les époux [S] n’ont procédé à aucun changement du revêtement de sol de leur lot;
- que s’agissant de la société CLEMART, celle-ci a fait remplacer l’ancien parquet vétuste existant lors de l’achat de son lot par un nouveau parquet, plus isolant; que dans ces conditions, il n’y avait pas lieu de solliciter l’autorisation du syndic.

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile sur lequel M. [K] fonde ses demandes, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En l’espèce, l’article 12.7 du règlement de copropriété, intitulé “Tranquillité”, stipule ce qui suit: “« Le revêtement des sols ne pourra être modifié qu’après autorisation du syndic ayant pris l’avis de l’architecte de la copropriété et sous la condition expresse que le procédé utilisé et les nouveaux matériaux employés présentent des caractéristiques d’isolation phonique au moins égales à celles des procédés et des matériaux d’origine et ne soient pas susceptibles de répercussions sur l’équilibre du chauffage collectif ».

En ce qui concerne le lot des époux [S], M. [K], au vu des seules pièces versées aux débats, ne rapporte pas la preuve que les intéressés ont fait procéder au remplacement du parquet, ainsi qu’il l’affirme. La demande formée à leur encontre ne saurait donc prospérer.

S’agissant de la société CLEMART, celle-ci verse aux débats le rapport que M. [GT] [AO], architecte du syndicat, a rédigé le 24 février 2020 après achèvement des travaux de remplacement du parquet réalisés dans son lot par la demanderesse. L’architecte y indique ce qui suit:

“Le syndic de copropriété m’a missionné pour vérifier que les travaux réalisés par la SCI CLEMART dans le studio sis 5ème étage au [Adresse 1] à [Localité 7] n’ont pas concouru à modifier la nature du revêtement de sols du studio. (...)
L’entreprise en charge des travaux a fourni les caractéristiques de la sous-couche utilisée et du parquet posé. Il s’agit d’une sous-couche en polyéthylène de marque DIALL, épaisseur 2 mm, assurant une absorption acoustique de 19dB (MP : le minimum requis est de 17 dB). Le parquet stratifié posé est de marque Art Home « Silence » de 8 mm d’épaisseur + 2 mm de sous-couche isolante intégrée. J’ai pu en constater la pose définitive de ce nouveau revêtement de sol lors de ma visite en date du 07/02/2020. (...).
Je soussignée, [GT] [AO] – Architecte D.P.L.G. – atteste que les travaux réalisés par
la SCI CLEMART de décembre 2019 à janvier 2020 dans le studio sis 5 ème étage au [Adresse 1]
[Adresse 1] à [Localité 7] n’ont pas concouru à modifier des revêtements de sol du studio.”

Au vu de ce rapport établi par l’architecte du syndicat des copropriétaires, tiers à l’égard de la société CLEMART, l’existence d’un trouble manifestement illicite résultant de la violation de la clause précitée du règlement de copropriété ou des articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 n’est pas établie.

Il convient donc de dire n’y avoir lieu à référé sur les demandes de M. [K] relatives au parquet posé dans son lot par la société CLEMART.

Sur la demande reconventionnelle de condamnation des époux [S], de la société CLEMART, de Mme [MA] et de Mme [I] au paiement d’une provision sur dommages et intérêts

M. [K] explique:

- que du fait de la pose d’un parquet dans des conditions non conformes aux règles de l’art dans les appartements de la société CLEMART et des époux [S], il subit des nuisances sonores causées par des bruits de pas sur le sol;
- qu’en outre, il subit également le comportement bruyant des locataires de la société CLEMART et des époux [S];
- que ces nuisances excèdent les bruits de la vie courante et constituent un trouble anormal de voisinage;
- que le préjudice subi de ce fait justifie l’allocation de la somme de 20.000 € à titre provisionnel.

Les demandeurs répliquent:

- que la vie en collectivité dans un immeuble construit en 1975 implique naturellement d’entendre des bruits émis par les voisins;
- que pour autant, M. [K] ne rapporte pas la preuve d’un trouble anormal de voisinage qui leur soit imputable.

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il est de principe que nul ne peut causer à autrui un trouble anormal du voisinage.

En l’espèce, ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, M. [K] ne rapporte pas la preuve que les époux [S] ont fait poser un nouveau parquet dans leur lot, ce que les intéressés contestent.

S’agissant de la société CLEMART, M. [K] ne verse aux débats aucun relevé de mesures acoustiques de nature à accréditer son affirmation selon laquelle les nuisances sonores se seraient accrues depuis le remplacement de son parquet par la demanderesse. Une étude réalisée par un professionnel apparaît pourtant d’autant plus nécessaire que le défendeur n’explique d’aucune façon comment le simple fait de marcher sur un revêtement de sol posé au 5ème étage de l’immeuble peut être la source de nuisances sonores perçues au 6ème étage dudit immeuble.

Par ailleurs, M. [K] ne conteste pas que l’immeuble, du fait de sa conception, est particulièrement exposé aux nuisances acoustiques (cf. page 16 de ses conclusions: “Monsieur [K] n’a eu de cesse d’alerter les demandeurs sur la particulière sensibilité de l’immeuble aux bruits solidiens et aériens dans l’immeuble du fait même de sa construction, qui remonte aux années 70").

Dans ce contexte particulier, M. [K] ne démontre pas, au vu des seules attestations qu’il verse aux débats, que les bruits résultant de l’occupation des lots des époux [S] et de la société CLEMART présentent, par leur intensité et leur fréquence, les caractéristiques d’un trouble anormal de voisinage imputable à leurs locataires.

Par voie de conséquence, l’obligation des demandeurs de l’indemniser du préjudice dont il fait état est sérieusement contestable. Il convient donc de dire n’y avoir lieu à référé sur cette demande.

Sur les demandes accessoires

M. [K] sera condamné aux dépens. La prétention des demandeurs fondée sur le décret n°96-1080 ne saurait prospérer puisque ses dispositions ne sont plus en vigueur pour avoir été abrogées par le décret n°2016-230 du 26 février 2016.

L’équité commande de condamner M. [K] à payer à la société CLEMART, aux époux [S], à Mme [MA] et à Mme [I] la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, soit la somme totale de 3.200 €. Mme [BL], dont la demande formée à titre personnel a été rejetée par le juge, sera déboutée de sa demande de paiement des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Disons la société CLEMART recevable en son intervention volontaire,

Déboutons M. [HY] [K] de sa demande aux fins de voir dire Mme [O] [BL] irrecevable en ses demandes,

Ordonnons à M. [HY] [K] de cesser sans délai les faits de tapage nocturne et diurne et plus généralement de s’abstenir, à l’égard des occupants des lots de la société CLEMART et de M. [A] [S] et Mme [N] [S], de tout fait constituant un manquement aux stipulations de l’article 12.7 du règlement de copropriété de l’immeuble situé [Adresse 1] à [Localité 7] relatives à la tranquillité due aux occupants du bâtiment,

Disons n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte,

Condamnons M. [HY] [K] à payer à Mme [B] [MA] la somme de 2.000 € à valoir sur l’indemnisation de son préjudice moral,

Condamnons M. [HY] [K] à payer à Mme [H] [I] la somme de 2.000 € à valoir sur l’indemnisation de son préjudice moral,

Disons n’y avoir lieu à référé à référé sur les demandes de condamnations provisionnelles formées par la société CLEMART, Mme [O] [BL], M. [A] [S] et Mme [N] [S],

Disons n’y avoir lieu à référé sur l’ensemble des demandes de M. [HY] [K],

Condamnons M. [HY] [K] à payer à la société CLEMART la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamnons M. [HY] [K] à payer à M. [A] [S] et Mme [N] [S] la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamnons M. [HY] [K] à payer à Mme [B] [MA] la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamnons M. [HY] [K] à payer à Mme [H] [I] la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamons M. [HY] [K] aux dépens de l’instance.

Fait à Paris le 11 avril 2024

Le Greffier, Le Président,

Larissa FERELLOC François VARICHON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 23/56926
Date de la décision : 11/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-11;23.56926 ?
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