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30/04/2024 | FRANCE | N°20/11591

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 30 avril 2024, 20/11591


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:





8ème chambre
1ère section


N° RG 20/11591 -
N° Portalis 352J-W-B7E-CTHQQ

N° MINUTE :




Assignation du :
19 Novembre 2020






JUGEMENT
rendu le 30 Avril 2024
DEMANDEUR

Monsieur [V] [P]
[Adresse 5]
[Localité 4]

représenté par Maître Philippe BOCQUILLON de l’AARPI 2BV AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1085


DÉFENDEURS

Syndicat des c

opropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2]), représenté par son syndic, la S.A. JEAN CHARPENTIER - SOPAGI
[Adresse 1]
[Localité 3]

représenté par Maître Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:

8ème chambre
1ère section


N° RG 20/11591 -
N° Portalis 352J-W-B7E-CTHQQ

N° MINUTE :

Assignation du :
19 Novembre 2020

JUGEMENT
rendu le 30 Avril 2024
DEMANDEUR

Monsieur [V] [P]
[Adresse 5]
[Localité 4]

représenté par Maître Philippe BOCQUILLON de l’AARPI 2BV AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1085

DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2]), représenté par son syndic, la S.A. JEAN CHARPENTIER - SOPAGI
[Adresse 1]
[Localité 3]

représenté par Maître Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ET ALAIN DE LANGLE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0208

S.A. JEAN CHARPENTIER - SOPAGI
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Christine MORIAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1202

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente, statuant en juge unique,

assistée de Madame Delphine PROVOST-GABORIEAU, Greffière lors des débats, et de Madame Justine EDIN, Greffière lors du prononcé.

DÉBATS

A l’audience du 07 février 2024
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

M. [V] [P] est propriétaire des lots n° 15, 16 et 21 au sein de l'immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 4], soumis au régime de la copropriété des immeubles bâtis.

Le syndicat des copropriétaires a décidé à l'unanimité des présents, lors de l'assemblée générale du 30 mars 2016, des travaux de création en sous-sol, de 2 caves sur parties communes, la fixation du budget travaux et des honoraires annexes, l'appel du budget de travaux ainsi que la désignation d'un géomètre expert pour établir les plans et le projet de modificatif au règlement de copropriété.

Lors de l'assemblée générale du 21 mars 2017, a été mis à l'ordre du jour, la vente de ces deux nouveaux lots.

Lors de l'assemblée générale du 21 mars 2017, dans le cadre du vote des résolutions 27 et 28, la copropriété a décidé de vendre ces deux caves, constituant les lots n°22 et 23, au profit de Mme [C] (lot n°22) et de M. [Y] (lot n°23).

La question de la vente du lot n°23 a de nouveau été soumise au vote lors de l'assemblée générale suivante du 26 mars 2018, laquelle a confirmé sa volonté de vendre le lot n°23 à M. [Y], aux mêmes conditions de prix.

Contestant la régularité de ces résolutions portant sur la vente du lot n°23, M. [P] a saisi la juridiction de céans qui, par jugement du 26 juin 2020, définitif, a annulé lesdites résolutions n°28 de l'assemblée générale du 21 mars 2017 et n°17 de l'assemblée générale du 26 mars 2018.

M. [P] a de nouveau soumis au vote sa proposition d'achat de ce lot lors de l'assemblée générale du 8 octobre 2020, ce qui lui a été refusé.

C'est dans ces conditions que, par acte d'huissier délivré le 19 novembre 2020, M. [P] a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble en cause ainsi que la SA Jean Charpentier, en sa qualité de syndic de l'immeuble, devant la juridiction de céans, afin d'obtenir l'annulation de la résolution n°16 de l'assemblée générale du 08 octobre 2020 ainsi que l'indemnisation de son préjudice.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 11 octobre 2022, M. [P] demande au tribunal de :
" Vu le jugement définitif du 26 juin 2020,
Vu l'assemblée générale des copropriétaires du 8 octobre 2020,
Vu les articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Vu l'article 1240 du code civil,
- Annuler pour abus de majorité, rupture d'égalité entre les copropriétaires ainsi que non-respect des droits acquis par les copropriétaires, la résolution n°16 de l'assemblée générale du 8 octobre 2020 s'opposant à la cession à M. [P] de la cave n°15 moyennant la somme de 12.500 euros .
- Annuler la résolution n°17 en tant que conséquence de la nullité de la résolution n°16 et comme revenant sur un droit acquis de M. [P] à se voir attribuer le lot n°23 à destination de cave tel que décidé par l'assemblée générale définitive du 30 mars 2016,
- Dire et juger le cabinet Charpentier responsable de manquements et fautes dans l'administration et la gestion de la copropriété comme n'ayant pas avisé les copropriétaires des risques encourus liés aux décisions d'assemblée générale des 21 mars 2017, du 26 mars 2018 et du 8 octobre 2020,
- Dire et juger que le cabinet Charpentier a volontairement, sciemment, et de façon délibérée entendu privilégier les intérêts d'un copropriétaire au détriment des intérêts d'un autre copropriétaire, en l'espèce M. [P],
- Condamner le cabinet Charpentier à payer à M. [P] une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en vertu de l'article 1240 du code civil,
- Condamner le syndicat des copropriétaires à payer à M. [P] in solidum avec le cabinet Charpentier une somme de 8.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,
- Dispenser M. [P] de toute participation à la dépense commune des frais et honoraires de la présente procédure en application de l'article 10-1 de loi du 10 juillet 1965,
- Ordonner l'exécution provisoire du jugement intervenir nonobstant appel et sans caution. "

Au soutien de sa demande principale en annulation de la résolution n°16, M. [P] se prévaut des termes du jugement du 26 juin 2020 et argue de ce que le refus à nouveau opposé par l'assemblée générale à sa proposition d'achat du lot litigieux faite aux mêmes conditions que celle précédente constitue, une nouvelle fois, un abus de majorité en ce qu'il estime avoir obtenu, de par la décision précitée, un droit acquis à l'achat de cette cave, d'une part, et que ne pas lui attribuer constitue une rupture d'égalité entre copropriétaires, d'autre part.

Il sollicite également l'annulation de la résolution n°17 au motif qu'elle est intrinsèquement liée à la résolution précédente, qui encourt l'annulation, outre qu'elle n'a été soumise au vote que dans l'unique but de l'empêcher d'acquérir le lot n°23.

Il se prévaut en outre de ce qu'elle avait pour objet de modifier l'affectation dudit lot en contravention avec les termes du règlement de copropriété qui le désigne comme étant " une cave " et sur quoi l'assemblée ne peut revenir, et n'était accompagnée d'aucune modification des tantièmes.

Il soulève enfin que cette résolution devait être soumise au vote qu'en cas de réponse négative à la résolution n°16, or celle-ci a été "ajournée" de sorte qu'elle ne peut être considérée comme un refus.

En réponse aux moyens adverses, M. [P] soutient que le principe de la vente des caves aux copropriétaires et le processus d'attribution arrêté lors de l'assemblée de 2016 constituent un " droit acquis " aux copropriétaires qui doit être respecté et s'imposer, s'agissant de la cession des caves querellées, leur vente ne pouvant être remise en cause sauf circonstances nouvelles, inexistantes en l'espèce.

Au soutien de sa demande additionnelle indemnitaire, M. [P] prétend que le syndic a manqué à ses obligations d'information et de conseil, envers le syndicat des copropriétaires, en n'attirant pas son attention sur les risques d'annulation des assemblées de 2017 et 2018, et sur les enjeux des termes du jugement du 26 juin 2020, et a manqué à son devoir de neutralité en agissant sciemment à son détriment.

Il en déduit être fondé à solliciter l'indemnisation de son préjudice, dès lors qu'il a été privé de la jouissance de la cave lui revenant depuis l'assemblée générale du 21 mars 2017 et a été obligé d'initier plusieurs actions en justice pour être rempli de ses droits.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 03 février 2023, le syndicat des copropriétaires demande au tribunal de :
" Vu l'article 1102 du code civil ;
Vu la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 ;
Vu la jurisprudence citée ;
Vu les pièces visées ;
- Débouter M. [V] [P] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Condamner la S.A. Jean Charpentier à garantir le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son égard,
- Condamner M. [V] [P] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens,
- Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir. "

Le syndicat des copropriétaires conteste le bien-fondé des demandes d'annulation des résolutions n°16 et 17 de M. [P], et souligne qu'elles ne reposent sur aucun fondement juridique, le demandeur se contentant de déduire de la décision du 26 juin 2020 que la cave n°15 devait lui revenir.

Le syndicat des copropriétaires soutient à l'inverse qu'il ne peut être déduit une telle conclusion des termes du jugement précité, et qu'à la suite de cette décision les résolutions portant sur la vente de la cave litigieuse ont été annulées de sorte qu'il a retrouvé sa liberté de ne pas la vendre ou de la vendre en fixant de nouvelles conditions de vente.

Il conteste tout abus de majorité, soulignant l'absence d'élément probant sur ce point et faisant valoir que le choix de l'assemblée générale de ne pas vendre la cave n'est pas contraire à la décision du 26 juin 2020, et que sa mise à disposition à titre de local à vélo ou d'une autre affectation n'est pas contraire à l'intérêt collectif.

Il conteste également toute situation de prétendue rupture d'égalité entre les copropriétaires, soulignant que tous les copropriétaires n'ont pas, chacun, une cave qui leur est attribuée, ainsi qu'un quelconque droit acquis de M. [P] à acquérir la cave querellée.

S'agissant de la résolution 17, le syndicat des copropriétaires conteste un quelconque lien avec la résolution n°16, et soutient que le choix fait par l'assemblée générale d'affecter la cave querellée comme local à vélo correspond à un besoin de la copropriété, et qu'elle était libre de décider ainsi que lors que ladite cave, non vendue, est une partie commune.

Il fait valoir que si la résolution n°16 a été " ajournée ", comme l'allègue le demandeur, cela n'avait pas pour conséquence une absence de vote de la résolution subséquente, le terme employé important peu, et soulignant au demeurant que M. [P] n'a pas été empêché de solliciter judiciairement l'annulation de ces deux résolutions.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 24 février 2022, la société Jean Charpentier demande au tribunal de :
" Débouter M. [P] de toutes ses demandes.
- Débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de garantie.
- Condamner M. [P] à payer à la SA Jean Charpentier SOPAGI la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Le condamner aux entiers dépens ".

En substance, la société Jean Charpentier conteste toute faute dans l'exercice de sa mission, et relève l'absence de production par le demandeur d'éléments la caractérisant, ainsi que le préjudice dont il sollicite réparation et le lien de causalité.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux termes de leurs dernières écritures susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 05 juin 2023.

L'affaire, appelée à l'audience du 07 février 2024, a été mise en délibéré au 23 avril 2024, prorogée au 30 avril suivant en raison de l'indisponibilité du magistrat signataire pour cause de participation aux assises.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes de " dire et juger "

Il n'y a pas lieu de statuer sur ces demandes, lesquelles ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile dès lors qu'elles sont la reprise des arguments développés dans les écritures des parties.

Sur la demande principale en annulation des résolutions n°16 et 17 de l'assemblée générale du 28 octobre 2020

Aux termes de l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, " Les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée sans ses annexes. "

Une décision se définit comme l'adoption d'une position définitive consacrée par un vote (CA Paris, 23ème ch.A, 17 avril 1996).

Une décision d'assemblée générale peut être annulée pour abus de majorité s'il est établi qu'elle est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires, ou qu'elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires, au détriment de ceux minoritaires.

Il appartient au copropriétaire qui demande la nullité d'une décision fondée sur l'abus de majorité de démontrer que celle-ci a été adoptée sans motif valable, et notamment dans un but autre que la préservation de l'intérêt collectif de l'ensemble des copropriétaires (Civ. 3ème, 8 février 1989, n° 87-14322) ou dans le seul but de favoriser les intérêts personnels de copropriétaires majoritaires au détriment des autres copropriétaires minoritaires (ex. : Civ. 3ème, 17 décembre 2014, n° 13-25.134).

Le tribunal ne peut être saisi d'une demande de contestation d'une décision d'assemblée générale pour le seul motif qu'elle serait inéquitable ou inopportune (CA Paris, 23è. Chb A, 27 janvier 1999).

L'article 17 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que les décisions du syndicat des copropriétaires sont prises en assemblée générale.

L'article 24 de la loi précitée du 10 juillet 1965 dispose notamment que " les décisions de l'assemblée générale sont prises à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, s'il n'en est autrement ordonné par la loi ".

Il résulte de ces dispositions que l'assemblée générale ne peut revenir sur une décision prise antérieurement qu'à la condition que la première décision n'ait pas été exécutée, et que cette " rétractation " ne porte pas atteinte aux droits, personnels, qu'elle a permis aux copropriétaires d'acquérir (Civ. 3ème, 07 juillet 2010, n°09-15.373).

Sur ce,

S'agissant de la résolution n°16

Aux termes du procès-verbal de l'assemblée générale du 28 octobre 2020, la résolution n°16 était intitulée " Cession partie commune ", et libellée " cession du lot n°23 (cave n°15) à la demande de M. [P]".

Elle était subdivisée en de résolutions 16.1 à 16.6, chacune portant sur des points précis du processus de vente (création du nouveau lot, cession, fixation du prix de cession, conditions de paiement, modalités de répartition du prix de vente et pouvoir au syndic de représentation pour régularisation des actes).

A la fin de chacune de ces résolutions, il est indiqué que " le quorum requis pour adopter valablement cette résolution n'étant pas atteint, cette décision est ajournée à l'unanimité ".

Compte tenu de ce que l'ensemble des résolutions 16 et suivantes ont été soumises au vote, et qu'à chaque fois la majorité requise n'a pas été atteinte, ces décisions doivent s'analyser comme des rejets, l'emploi du terme " ajourné " étant indifférent.

S'il est exact que, dans le cadre de la procédure antérieure ayant abouti au jugement du 26 juin 2020 ordonnant l'annulation des résolutions pour abus de majorité portant sur la vente de la cave querellée au profit d'un autre copropriétaire que M. [P], votées au cours des assemblées de 2017 et 2018, cet élément, de contexte, ne saurait être retenu utilement comme permettant de caractériser, concernant la résolution 16 de l'assemblée générale du 28 octobre 2020 objet de la présenté procédure, une nouvelle situation d'abus de majorité, les assemblées générales étant autonomes les unes par rapport aux autres, d'une part, et le tribunal n'étant pas lié par les termes d'un précédent jugement se rapportant à une assemblée générale distincte de celle dont il est présentement saisi, d'autre part.

M. [P] ne saurait davantage se prévaloir utilement d'une quelconque rupture d'égalité dès lors qu'il ne conteste pas que d'autres copropriétaires, comme lui, n'ont pas de cave attitrée au sein de l'immeuble, et retenant en outre qu'il n'est pas occupant dudit immeuble.

M. [P] n'établit par ailleurs par aucune des pièces qu'il communique en quoi le rejet de la résolution n°16 est intervenue dans un but autre que la préservation de l'intérêt collectif de l'ensemble des copropriétaires ou pour favoriser les intérêts personnels de copropriétaires majoritaires au détriment des autres copropriétaires minoritaires.

De même, ledit jugement précité ne saurait constituer, comme le prétend à tort M. [P], un droit acquis pour ce dernier d'acquérir la cave litigieuse.

Un tel droit acquis ne pourrait être constitué que par une décision d'une assemblée générale antérieure à celles attaquées de 2017 - 2018 et 2020 ayant voté en faveur de la vente du lot n°23 au profit de M. [P], dans des conditions déterminées, ce qui n'est pas le cas dès lors qu'au cours de l'assemblée générale du 30 mars 2016 a été soumise au vote uniquement la création de deux caves communes, avec désignation d'un géomètre et modification du règlement de copropriété, d'une part, et que les résolutions portant sur la vente du lot querellé en 2017 et 2018 ont été annulées, d'autre part.
Dans ces conditions, l'assemblée générale du 28 octobre 2020 a décidé souverainement de refuser l'offre d'achat de la cave n°15 faite par M. [P].

Faute pour celui-ci de se prévaloir d'autres moyens utiles au soutien de sa demande d'annulation de la résolution n°16 de l'assemblée générale du 28 octobre 2020, il doit en être débouté.

S'agissant de la résolution n°17

Aux termes du procès-verbal de l'assemblée générale du 28 octobre 2020, la résolution n°17 était rédigée ainsi :
" En cas de réponse négative à la question n°16, mise à disposition de la cave n°15 pour les résidents
Mise à disposition de la cave n°15 aux résidents pour y entreposer exclusivement des poussettes, vélos et caddies ".

Comme développé précédemment, la décision " d'ajournement " de la résolution n°16 doit s'analyser comme un rejet, de sorte que c'est à bon droit que la résolution n°17 a été abordée et soumise au vote des copropriétaires.

Dès lors que l'assemblée générale avait, souverainement, décidé de ne pas céder cette cave à M. [P], elle était libre de décider de son usage, ladite cave étant une partie commune.

S'il critique ce choix, M. [P] ne se prévaut ni ne justifie d'un quelconque moyen utile à sa demande d'annulation de la résolution querellée, sa divergence d'opinion avec la décision prise par la majorité des copropriétaires étant inopérante à faire aboutir sa demande.

Il sera par conséquent également débouté de sa demande d'annulation de la résolution n°17 de l'assemblée générale du 28 octobre 2020.

La demande de garantie formée par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société Charpentier devient dès lors sans objet et il n'y a pas lieu de l'examiner.

Sur la demande additionnelle indemnitaire

Aux termes de l'article 1240 du code civil, " tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. " Sur ce fondement, il incombe à la partie demanderesse, de rapporter la triple preuve de l'existence, d'une faute, d'un préjudice et d'un lien causal entre les deux.

L'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que le syndic est chargé "d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien et, en cas d'urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l'exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci".

Si le syndic engage sa responsabilité contractuelle à l'égard du syndicat des copropriétaires sur ce fondement, les copropriétaires qui subissent un préjudice personnel et direct sont fondés à mettre en cause la responsabilité délictuelle du syndic sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

Cette responsabilité suppose qu'une faute ayant causé un préjudice direct et personnel, dont la preuve incombe au copropriétaire demandeur, puisse être retenue à l'encontre du syndic.

Compte tenu de l'ampleur des tâches qui lui incombent et des difficultés pratiques auxquelles il est fréquemment confronté, le syndic est tenu d'une obligation de diligence et de vigilance, donc de moyens et non pas de résultat (ex. : Cour d'appel de Paris, 19 novembre 2014, n° RG 12/00684).
Son appréciation s'opère in abstracto par rapport au standard du bon père de famille et des diligences normales du professionnel averti (ex.: Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 10 septembre 2020, n° RG 18/11191).

Sur ce,

Compte tenu des développements précédents, M. [P] ne saurait se prévaloir utilement d'un quelconque préjudice de jouissance de la cave n°15, le refus de sa proposition d'achat n'étant pas abusif ni contraire à un éventuel droit acquis, non-caractérisé.

En outre, s’il estime avoir subi un préjudice moral du fait des procédures diligentées par ses soins, il ne verse au débat aucune pièce de nature à l'étayer.

Ses demandes indemnitaires doivent par conséquent être rejetées, sans qu'il y ait lieu d'examiner les griefs allégués à l'encontre de la société Charpentier en sa qualité de syndic.

Sur les demandes accessoires

Partie succombante au litige, M. [P] doit être condamné aux dépens ainsi qu'à verser aux parties défenderesses la somme de 3.000 euros, chacune, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera en outre débouté de sa demande de dispense formée en application de l'article 10-1 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965.

En application de l'article 514 modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Il n'y a pas lieu en l'espèce d'écarter l'exécution provisoire de droit.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,

DEBOUTE M. [V] [P] de l'ensemble de ses prétentions,

CONDAMNE M. [V] [P] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 4], représenté par son syndic en exercice, une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [V] [P] à payer à la SA Jean Charpentier une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [V] [P] aux dépens,

RAPPELLE que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 30 Avril 2024.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 20/11591
Date de la décision : 30/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-30;20.11591 ?
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