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18/11/2010 | FRANCE | N°10/00498

France | France, Cour d'appel de chambéry, Chambre sociale, 18 novembre 2010, 10/00498


COUR D'APPELDE CHAMBERY

CHAMBRE SOCIALE

AFFAIRE N : 10/00498 AG/MFMM. Aziz X... C/ Association COMITE DAUPHINOIS D'ACTIONS SOCIO EDUCATIVE (CODASE)
ARRÊT RENDU LE DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX
APPELANT :
Monsieur Aziz X......38100 GRENOBLEComparant en personne assisté de Maître CLEMENT CUZIN, de la SCP CLEMENT-CUZIN LONG et LEYRAUD (avocat au barreau de GRENOBLE)
INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE :
ASSOCIATION COMITE DAUPHINOIS D'ACTIONS SOCIO EDUCATIVE (CODASE)21 Rue Anatole France38100 GRENOBLEReprésentant : Maître BALLY, du CABINET BALLY (avocat au barreau

de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, ...

COUR D'APPELDE CHAMBERY

CHAMBRE SOCIALE

AFFAIRE N : 10/00498 AG/MFMM. Aziz X... C/ Association COMITE DAUPHINOIS D'ACTIONS SOCIO EDUCATIVE (CODASE)
ARRÊT RENDU LE DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX
APPELANT :
Monsieur Aziz X......38100 GRENOBLEComparant en personne assisté de Maître CLEMENT CUZIN, de la SCP CLEMENT-CUZIN LONG et LEYRAUD (avocat au barreau de GRENOBLE)
INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE :
ASSOCIATION COMITE DAUPHINOIS D'ACTIONS SOCIO EDUCATIVE (CODASE)21 Rue Anatole France38100 GRENOBLEReprésentant : Maître BALLY, du CABINET BALLY (avocat au barreau de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue le 14 Octobre 2010 avec l'assistance de Madame ALESSANDRINI, Greffier, et lors du délibéré :
Monsieur GREINER, Conseiller faisant fonctions de Président, qui s'est chargé du rapport,Monsieur GROZINGER, ConseillerMadame CAULLIREAU-FOREL, Conseiller

Par un jugement en date du 12 juillet 2007, le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE a :
- dit que le licenciement de Monsieur Aziz X... est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
- condamné l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative à lui verser avec intérêts de droit à compter du 17 mars 2006 les sommes de :
. 11 015,24 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
. 33 045,75 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
et avec intérêts de droit à compter de la présente décision la somme de :
. 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative de sa demande reconventionnelle.
Par un arrêt en date du 29 octobre 2008, la Cour d'Appel de GRENOBLE a :
- infirmé le jugement déféré,
- débouté Monsieur X... de toutes ses demandes,
- rejeté la demande de l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par un arrêt en date du 27 janvier 2010, la Cour de Cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 29 octobre 2008, entre les parties, par la Cour d'Appel de GRENOBLE.
Monsieur X... expose que l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative est une association créée au début des années 50 dans le but d'apporter un soutien éducatif à des jeunes désocialisés ou en difficultés personnelles.
Son premier engagement professionnel au sein de l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative aura lieu de juillet à septembre 1977 en qualité d'éducateur.
Par la suite, il effectuera parallèlement à sa formation d'éducateur spécialisé plusieurs remplacements.
Il sera recruté le 18 juillet 1983 afin d'assumer ses fonctions au sein du foyer Haxo.
Il accomplira un très important travail éducatif dans les années qui suivront et sera nommé conseiller technique au début des années 1990.
Il sera au surplus élu de la Ville de GRENOBLE et adjoint au Maire de mars 1989 à juin 1995.
Il va se trouver en arrêt maladie à compter du 24 avril 2004.
Le 14 décembre 2005, il est témoin, depuis la fenêtre de son domicile, d'une altercation opposant un de ses voisins à une personne qu'il ne connaît pas.
Il sera pris à partie et perdra malheureusement son sang-froid.
Des armes à feu seront trouvées à son domicile dont celle avec laquelle il aurait menacé son adversaire.
Il était condamné par le Tribunal Correctionnel de Grenoble le 13 février 2006 à une peine de 18 mois d'emprisonnement avec sursis et d'une interdiction des droits civiques et de famille pour une durée de deux ans pour des faits de violence avec arme sans incapacité de travail et détention d'armes de 4ème catégorie.
Il était licencié pour faute grave le 7 mars 2006.

Par un arrêt du 8 novembre 2007, la Cour d'Appel de Grenoble réduisait sa peine à 10 mois d'emprisonnement avec sursis outre 1 000 € d'amende et confiscation des scellés.
Monsieur X... conteste la légitimité de son licenciement en soutenant qu'un comportement du salarié relevant de sa vie personnelle ne peut pas être érigé en faute par l'employeur.
Une condamnation pénale ne constituerait pas en soi un motif de licenciement pour faute.
Le licenciement était en toute hypothèse fondé sur une faute qui doit être établie.
Aucun trouble n'aurait été causé à l'entreprise dont le nom n'a pas été cité dans le cadre de la procédure pénale.
Monsieur X... conclut ainsi au caractère non fondé de son licenciement.
Il précise avoir été licencié à 54 ans pour des motifs totalement étrangers à son activité professionnelle. Il se trouve sans emploi et sans activité.
Il sollicite les sommes suivantes :
- 11 015,24 € à titre d'indemnité de préavis,
- 1 101 € à titre de congés payés afférents,
- 33 045,72 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 71 600 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative fait valoir en réponse que le comportement de Monsieur X... était gravement en contradiction avec les fonctions qu'il exerçait ainsi qu'avec la finalité propre de l'association.
L'objet social et les missions d'intérêt public dévolues à l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative ne peuvent permettre qu'un membre de son encadrement détienne illégalement plusieurs armes à feu et soit poursuivi pour avoir menacé avec une arme un jeune automobiliste qui s'était mal garé sur le parking de la résidence.
Monsieur X... avait en charge l'encadrement et le conseil des équipes d'éducateurs spécialisés à l'égard desquels il devait avoir autorité et légitimité.
La sur médiatisation de Monsieur X... constituait un élément aggravant sur le retentissement de son comportement.
En toute hypothèse, il serait incontestable que sur la région grenobloise, le nom de Monsieur X... est nécessairement attaché à celui de l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative et que les agissements de ce salarié ont gravement altéré l'image de l'association.
Le licenciement pour faute grave était ainsi largement justifié.

Subsidiairement, les indemnités journalières perçues doivent être déduites de l'indemnité compensatrice de préavis.
L'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative conclut principalement au débouté de Monsieur X... et subsidiairement à la déduction du montant des indemnités journalières reçues.
Il réclame un montant de 5 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'arrêt a été mis en délibéré au 18 novembre 2010.
SUR CE
Attendu que Monsieur X... s'est vu notifier son licenciement pour faute grave le 7 mars 2006 ; qu'il lui était reproché que lors d'une perquisition à son domicile, la police découvrait plusieurs armes à feu, toutes chargées et un grand nombre de munitions, dont la détention était illégale ; qu'il aurait au surplus menacé un élu de lui casser les jambes à coups de batte de base-ball et que des voisins avaient déposé des mains courantes pour des menaces, parfois avec un coup de poing américain ;
Attendu que l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative précisait que les faits en question ne pouvaient pas s'accommoder d'une poursuite du contrat de travail ; que le licenciement était prononcé en raison du trouble caractérisé que cette situation créée au préjudice de l'association ; que la crédibilité et le sérieux de l'association et de ses travailleurs sociaux sont très sérieusement remis en cause, tant au regard des jeunes que des partenaires institutionnels habituels ;
Attendu qu'il était mentionné que le comportement de Monsieur X... était particulièrement préjudiciable aux intérêts de l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative, comme en totale contradiction avec son objet et son but, et de surcroît privait l'association de l'impérieuse confiance qu'il est nécessaire d'avoir à l'égard de l'ensemble du personnel et des conseillers ;
Attendu qu'il est constant que Monsieur X... est en arrêt-maladie depuis le mois d'avril 2004 ;
Attendu que Monsieur X... a été poursuivi devant le Tribunal Correctionnel pour des faits s'étant déroulés en décembre 2005 dans sa résidence et à son domicile ; qu'il est ainsi constant que son comportement était étranger à l'exécution de ses prestations contractuelles envers l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative et qu'au surplus, son contrat de travail était suspendu ;
Attendu que les articles de presse relatant l'affaire en date des 17 janvier et 14 janvier 2006 mentionnent que Monsieur X... était éducateur spécialisé, engagé dans les actions de prévention de la délinquance et qu'il était ancien adjoint à la Mairie de Grenoble ; qu'il convient de constater que l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative n'est pas citée ni les fonctions tenues par Monsieur X... auprès de cette dernière en qualité de conseiller technique ;

Attendu que nonobstant le caractère regrettable et pénalement sanctionable des actes commis par Monsieur X... en décembre 2005, il y a lieu de relever que ces actes se sont déroulés dans un cadre privé et en dehors de tout lien avec l'exécution du contrat de travail ; que cependant l'employeur allègue d'un retentissement sur sa réputation et d'une dégradation de son crédit auprès des jeunes et des organismes institutionnels ;
Attendu qu'aucune des pièces présentées ne vient étayer ces dires ; que les activités multiples de Monsieur X... au début des années 2000 et avant son arrêt maladie en 2004 ne peuvent pas être utilisées en 2006 pour stigmatiser un comportement privé et se plaçant en dehors de tout lien avec l'association ou de toute mise en cause de l'employeur ;
Attendu qu'ainsi, ce dernier n'établit pas en quoi les agissements reprochés à Monsieur X... auraient effectivement porté atteinte à sa réputation et dégradé ses relations avec ses interlocuteurs dans le cadre de ses missions ; que notamment, il n'est pas justifié de reproches ou d'interpellations liés aux faits commis par Monsieur X... ; que le potentiel de nuisance ou l'éventualité d'un discrédit ne sont pas des éléments suffisants pour mettre à néant le contrat de travail d'un salarié qui avait une présence d'une durée supérieure à vingt années et dont de nombreuses attestations louent les qualités d'engagement et de sérieux auprès des jeunes en difficulté ; que les faits invoqués ne seront donc pas retenus comme constituant une faute du salarié nécessitant la rupture du contrat de travail ;
Attendu que les autres griefs invoqués relatifs à des menaces envers un élu et des voisins ne sont aucunement établis au vu des documents produits aux débats ; qu'en tout état de cause, des répercussions sur la réputation et le crédit de l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative engendrées par ces comportements éventuels ne sont pas démontrées ; qu'aucune pièce n'est produite sur ce point permettant d'étayer les motifs de licenciements mentionnés par l'employeur ;
Attendu qu'en conséquence, il convient de déclarer que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... n'est pas fondée ; que le jugement déféré sera infirmé ;
Attendu que Monsieur X... est âgé de 54 ans ; qu'il a travaillé pendant 23 ans pour le même employeur ; que de nombreuses attestations mettent en exergue son engagement et sa volonté d'exercer au mieux ses missions contractuelles ; qu'il a été privé illégitimement de son emploi ; que ses perspectives professionnelles sont limitées au regard de son état de santé et de son âge ; que la somme de 71 600 € réclamée à titre de dommages et intérêts lui sera en conséquence allouée ;
Attendu que l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative devra lui verser la somme de 33 045,72 € au titre de son indemnité conventionnelle de licenciement ;
Attendu qu'il est constant que Monsieur X... était en arrêt maladie au moment de la rupture contractuelle ; qu'il percevait à ce titre des indemnités journalières ; que ces indemnités ne peuvent pas se cumuler avec une indemnité compensatrice de préavis ; qu'en toute hypothèse, le salarié était dans l'incapacité d'effectuer celui-ci ; qu'en conséquence, sa demande au titre de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents sera rejetée ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de condamner l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative à verser à Monsieur X... la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare l'appel recevable en la forme,
Au fond,
Confirme le jugement du Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE en date du 12 juillet 2007 en ce qu'il a condamné l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative à payer à Monsieur Aziz X... une somme au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement outre 1 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
L'infirme sur le quantum de l'indemnité conventionnelle de licenciement et pour le surplus et statuant à nouveau,
Dit et juge que Monsieur Aziz X... a été licencié sans cause réelle et sérieuse,
Condamne l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative à payer à Monsieur Aziz X... la somme de 33 045,72 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
Condamne l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative à verser à Monsieur Aziz X... la somme de 71 600 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Ordonne en application de l'article L. 1235-4 du Code du Travail le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnité de chômage perçues par Monsieur Aziz X... dans la limite de six mois,
Condamne l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative à payer à Monsieur Aziz X... la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne l'association Comité Dauphinois d'Actions Socio-Educative aux dépens.
Ainsi prononcé publiquement le 18 Novembre 2010 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur GROZINGER, Conseiller, en remplacement du Président régulièrement empêché, et Madame ALESSANDRINI, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00498
Date de la décision : 18/11/2010
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2010-11-18;10.00498 ?
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