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10/11/2016 | FRANCE | N°16/01061

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 10 novembre 2016, 16/01061


R.G : 16/01061









Ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse du 04 février 2016



chambre civile



RG : 14/02978

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 10 Novembre 2016





APPELANTS :



[U] [W]

né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1] (INDRE-ET-LOIRE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]>


représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON





[X] [U] épouse [W]

née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 3] (THAÏLANDE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]



représen...

R.G : 16/01061

Ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse du 04 février 2016

chambre civile

RG : 14/02978

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 10 Novembre 2016

APPELANTS :

[U] [W]

né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1] (INDRE-ET-LOIRE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

[X] [U] épouse [W]

née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 3] (THAÏLANDE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

SCEA 'VAL DE SAONE'

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

INTIME :

M. Le PREFET DE L'AIN

Préfecture de l'Ain

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par la SELARL CABINET PHILIPPE PETIT ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 12 Juillet 2016

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 Septembre 2016

Date de mise à disposition : 10 Novembre 2016

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Louis BERNAUD, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, Vincent NICOLAS a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Louis BERNAUD, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

La SCEA VAL DE SAONE a obtenu, le 20 juin 2003, un permis de construire pour la réalisation d'une habitation et d'un bâtiment d'exploitation pour l'élevage d'escargots sur une parcelle cadastrée ZA n° [Cadastre 1] et [Cadastre 2], chemin du Bicheron, sur le territoire de la commune de [Localité 2].

Le terrain d'assiette du permis de construire a été classé en zone non constructible du POS, à l'exception des constructions à usage d'habitation directement liés et nécessaires à l'activité de l'exploitation agricole.

Au terme du délai de validité du permis de construire, le maire de [Localité 2] a constaté que [U] [W], gérant de la société VAL DE SAONE, avait édifié le bâtiment d'habitation dans lequel il résidait, mais non le bâtiment d'élevage dont la réalisation conditionnait celle du bâtiment d'habitation.

Aussi, la société VAL DE SAONE a été citée à comparaître devant le tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse, pour avoir exécuté des travaux ou utilisé le sol en méconnaissance des obligations imposées par le permis de construire et en méconnaissance du POS.

Par jugement du 7 février 2007, le tribunal correctionnel a, sur l'action publique, ordonné la démolition de l'ouvrage d'habitation irrégulier et condamné la société VAL DE SAONE à une amende, et sur l'action civile, celle-ci a été condamnée à remettre en état les lieux.

Par arrêt du 12 mars 2008, la cour d'appel de Lyon a confirmé cette décision, et le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté par la cour de cassation, par arrêt du 18 novembre 2008.

Par acte d'huissier du 13 août 2014, le préfet de l'Ain a fait assigner les époux [U] [W] et la société VAL DE SAONE devant le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse afin de voir ordonner l'expulsion de ces derniers de l'immeuble d'habitation qu'ils occupent, [Adresse 1], à [Localité 2], sur la parcelle cadastrée ZA n° [Cadastre 1] et [Cadastre 2].

Par conclusions d'incident, les époux [U] [W] et la société VAL DE SAONE ont saisi le juge de la mise en état, en lui demandant de :

- ordonner la communication du rapport de la DDE du 12 septembre 2006, le rapport du Directeur départemental des territoires du 28 juin 2011 dans son intégralité, la délégation ministérielle du préfet l'habilitant à ester en justice au nom de l'Etat, ainsi que le rapport juridique de la Direction départementale de l'équipement transmis au parquet le 13 octobre 1986 ;

- annuler l'assignation, faute de délégation du préfet pour agir en justice au nom de l'Etat, et à défaut, renvoyer l'affaire à la formation collégiale pour décider de la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité ;

- déclarer le tribunal de grande instance incompétent pour statuer sur le litige, la matière relevant de la compétence du juge de l'expropriation ;

- déclarer l'assignation irrecevable ;

- ordonner le sursis à statuer jusqu'à la révision de l'arrêt prononcé le 12 mars 2008 par la cour d'appel de Lyon, et jusqu'à la justification de l'annulation du permis de construire par le juge administratif ;

- condamner le préfet de l'Ain à leur payer à chacun 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 4 février 2016, le juge de la mise en état a :

- débouté la société VAL DE SAONE et les époux [U] [W] de leur demande de communication de pièces et de leur demande d'annulation de l'assignation ;

- dit n'y avoir lieu à transmission à la cour de cassation de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les défendeurs ;

- déclaré irrecevable la demande tendant à voir déclarer irrecevable l'assignation ;

- dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer ;

- dit n'y avoir lieu à déclarer l'assignation fautive ;

- condamné les époux [U] [W] et la société VAL DE SAONE, chacun, à payer à l'Etat Français la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- renvoyé l'affaire à une audience de la mise en état.

Par déclaration transmise au greffe le 11 février 2016 , les époux [U] [W] et la SCEA VAL DE SAONE ont interjeté appel de cette décision.

Vu les conclusions du 8 juillet 2016 des époux [U] [W] et de la société VAL DE SAONE, déposées et notifiées, par lesquelles ils demandent à la cour de :

- ordonner au demandeur à l'instance de communiquer sans délai et sous astreinte le rapport de la DDE du 12 septembre 2006 dans son intégralité, le rapport du directeur départemental des territoires du 28 juin 2011 dans son intégralité, le rapport juridique de la DDE transmis au parquet le 13 octobre 2006 ;

- relever d'office la nullité de l'assignation et dire que les conclusions présentées au nom du préfet sont irrecevables ;

- transmettre à la cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité posée dans un mémoire séparé ;

- subsidiairement, dire que le litige relève de la compétence du juge de l'expropriation ;

- ordonner le sursis à statuer pour le temps nécessaire à l'agent judiciaire de l'Etat pour faire réviser les décisions par la commission de révision des condamnations pénales

- condamner le préfet de l'Ain à leur payer à chacun la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions du 1er juillet 2016 du préfet de l'Ain, déposées et notifiées, par lesquelles il demande à la cour de confirmer l'ordonnance du 4 février 2016 et de condamner les appelants, chacun, à payer à l'Etat Français 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI, LA COUR :

Sur la demande de communication de pièces :

Attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le juge de la mise en état a rejeté cette demande, précédemment rejetée par le même juge dans son ordonnance du 22 octobre 2015, et au soutien de laquelle les appelants ne produisent aucun élément nouveau ;

Sur la demande de nullité de l'assignation et la question prioritaire de constitutionnalité

Attendu que les appelant, au soutien de cette demande de nullité, font valoir :

- d'une part que l'assignation est nulle pour irrégularité de forme en l'absence de mention de l'adresse exacte de l'Hôtel de préfecture du département de l'Ain ;

- d'autre part qu'elle est nulle pour irrégularité de fond, motifs pris de ce qu'elle est délivrée au nom du préfet, et non au nom de l'Etat alors que le préfet ne peut justifier d'aucun intérêt personnel, qu'il ne justifie pas d'une délégation pour agir au nom de l'Etat et que l'article R.480-4 du code l'urbanisme ne lui donne pas une telle délégation ;

Attendu enfin qu'ils soulèvent une question prioritaire de constitutionnalité aux motifs que

la considération selon laquelle l'article R.480-4 du code de l'urbanisme contiendrait une délégation expresse donnée au préfet pour assigner des tiers en justice au nom de l'Etat porte atteinte aux droits protégés par le préambule de la constitution, la jurisprudence du conseil d'Etat et le protocole additionnel à la convention européenne des Droits de l'Homme ; que dans leur mémoire séparé, ils soutiennent que les articles L.480-9 et R.480-4 du code de l'urbanisme ne contiennent pas de délégation expresse permettant au préfet d'agir en justice au nom de l'Etat, qu'une telle délégation ne se présume pas et ne peut résulter d'une interprétation de ces articles, et qu'à supposer que l'article R.480-4 contiennent une délégation explicite donnée au préfet pour agir en justice au nom de l'Etat, une telle disposition instaurant une possibilité de partialité structurelle porte atteinte au droit à un procès équitable, au regard de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme et au droit de propriété, au regard de l'article 1 du protocole additionnel à cette convention ;

Mais attendu, et en premier lieu, que les appelants ne démontrent pas en quoi l'erreur qui affecterait l'adresse du préfet leur cause un grief, alors que l'assignation leur a été signifiée et qu'ils ont pu faire valoir leurs moyens de défense ; qu'ensuite ,selon l'alinéa 1 de l'article L.480-9 du code de l'urbanisme, si, à l'expiration du délai fixé par le jugement, la démolition ou la remise en état ordonnée n'est pas complètement achevée, le fonctionnaire compétent peut faire procéder d'office à tous travaux nécessaires à l'exécution de la décision de justice ; que selon l'alinéa 2 de cet article, au cas où les travaux porteraient atteinte à des droits acquis par des tiers sur les lieux ou ouvrages visés, le fonctionnaire compétent ne pourra faire procéder aux travaux mentionnés par l'alinéa 1 qu'après décision du tribunal de grande instance ordonnant, le cas échéant l'expulsion de tous occupants ; que selon l'article R.480-4 du code de l'urbanisme, l'autorité administrative habilitée à exercer les attributions définies à l'article L.480-9 du même code est le préfet ; que ces dispositions désignent clairement le préfet comme l'autorité administrative compétente pour agir en justice en matière d'expulsion d'occupants d'une construction illégalement édifiée, sans avoir à solliciter au préalable une autorisation ministérielle ou une quelconque délégation ; qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état en ce qu'elle déboute les appelants de leur demande d'annulation de l'assignation ;

Attendu en second lieu qu'au regard des articles L.480-9 et R.480-4 du code de l'urbanisme, le préfet est clairement désigné pour agir au nom de l'Etat devant le tribunal de grande instance en vue de l'expulsion de tous occupants de lieux ou ouvrages, dont la démolition, la mise en conformité ou la remise en état a été ordonnée ; qu'en outre, et ainsi que le relève à bon droit le premier juge, l'action exercée par le préfet de l'Ain n'a pas pour objet de remettre en cause un droit de propriété, mais d'obtenir l'expulsion d'occupants d'une construction irrégulièrement édifiées ; que dans ces conditions, la question prioritaire de constitutionnalité étant dépourvue de caractère sérieux, il n'y a pas lieu de la transmettre à la cour de cassation ;

Sur l'exception d'incompétence :

Attendu que les appelants soutiennent que le juge de l'expropriation est seul compétent pour connaître de la demande du préfet, motifs pris de ce que :

- il n'est justifié d'aucune décision exécutoire pour requérir l'expulsion des époux [W] ; - - l'assignation se réfère à l'arrêt du 12 mars 2008 qui n'est pas opposable à ces derniers ;

- le siège de leur exploitation agricole été régulièrement édifié en vertu d'un permis de construire qui n'a pas été annulé par la juridiction administrative ;

- la demande tendant à leur expulsion revient donc à solliciter leur expropriation ;

Attendu cependant que la demande du préfet a pour objet l'expulsion, et non l'expropriation, des époux [W], en tant qu'occupants des lieux du chef de la société VAL DE SAONE, peu important que l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 12 mars 2008 ne les vise pas personnellement ; qu'il y a donc lieu de rejeter cette exception d'incompétence ;

Sur la demande de sursis à statuer :

Attendu que pour en justifier, les appelants font valoir que l'arrêt du 12 mars 2008 n'est pas 'exécutable' contre la société VAL DE SAONE, qu'il n'est pas opposable aux époux [W], que la démolition ne peut pas intervenir sans l'annulation préalable du permis de construire par la juridiction administrative et qu' enfin, le suris s'impose en application de l'article 110 du code de procédure civile, dès lors que la commission de révision a été saisie d'un recours en révision de l'arrêt du 12 mars 2008 ;

Attendu cependant, et ainsi que le relève à juste titre le premier juge, les appelants ne justifient pas de l'introduction d'un recours en révision, ni de la saisine d'une juridiction administrative en vue de l'annulation du permis de construire délivré le 20 juin 2003 ; qu'en outre, à supposer même qu'un recours en révision ait été introduit, il n'a pas de caractère suspensif, et il n'apparaît pas opportun de suspendre l'instance en raison d'un tel recours ; que dans ces conditions, la demande de sursis à statuer doit être rejetée ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance en date du 4 février 2016 du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse ;

Y ajoutant,

Dit que les conclusions présentées au nom du préfet de l'Ain sont recevables ;

Rejette l'exception d'incompétence soulevée par la SCEA VAL DE SAONE, [U] [W] et son épouse [X] [U] ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCEA VAL DE SAONE, de [U] [W] et de son épouse [X] [U] et les condamne à payer au préfet de l'Ain, ès qualités de représentant de l'Etat Français, la somme de 2.000 € ;

Les condamne aux dépens d'appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Joëlle POITOUXJean-Louis BERNAUD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 16/01061
Date de la décision : 10/11/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°16/01061 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-10;16.01061 ?
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