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18/11/2003 | FRANCE | N°03/00765

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre sociale, 18 novembre 2003, 03/00765


ARRET N°R.G : 03/00765 Conseil de prud'hommes sete31 mars 2003CommerceSA BRAKE FRANCE SERVICEC/GONZALESJPM/AP COUR D'APPEL DE MONTPELLIER CHAMBRE SOCIALE ARRET DU 18 NOVEMBRE 2003 APPELANTE :SA BRAKE FRANCE SERVICE prise en la personne de son représentant légal 13, rue Jean Jacques Rousseau Hall B Z.A. Les Radars 91354 GRIGNY CEDEX Représentant : la SCP FROMONT BRIENS etamp; ASSOCIES (avocats au barreau de LYON) INTIME :Monsieur José X... Cité Bellevue Rue Y... 34110 FRONTIGNAN Représentant : Me Daniel D' ACUNTO (avocat au barreau de MONTPELLIER) COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS E

T DU DELIBERE :M. Louis GERBET, Président; M. Jean-Pie...

ARRET N°R.G : 03/00765 Conseil de prud'hommes sete31 mars 2003CommerceSA BRAKE FRANCE SERVICEC/GONZALESJPM/AP COUR D'APPEL DE MONTPELLIER CHAMBRE SOCIALE ARRET DU 18 NOVEMBRE 2003 APPELANTE :SA BRAKE FRANCE SERVICE prise en la personne de son représentant légal 13, rue Jean Jacques Rousseau Hall B Z.A. Les Radars 91354 GRIGNY CEDEX Représentant : la SCP FROMONT BRIENS etamp; ASSOCIES (avocats au barreau de LYON) INTIME :Monsieur José X... Cité Bellevue Rue Y... 34110 FRONTIGNAN Représentant : Me Daniel D' ACUNTO (avocat au barreau de MONTPELLIER) COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :M. Louis GERBET, Président; M. Jean-Pierre MASIA, Conseiller; Mme Christine DEZANDRE, Conseiller; GREFFIER :Mme Andrée Z..., Greffier,DEBATS :A l'audience publique du 20 Octobre 2003, où l'affaire a été mise en délibéré au18 Novembre 2003ARRET :

Contradictoire, prononcé et signé par M. Louis GERBET, Président, à l'audience publique du 18 Novembre 2003, date indiquée à l'issue des débats assisté de Mme Andrée Z..., Greffier, qui a signé le présent arrêt.

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur X... a été embauché le 23 mai 1978 par la société CREMIERE NANTAISE en qualité de chauffeur-livreur au coefficient 155.

Le 1er juin 1998, le contrat de travail a été transféré, en application de l'article L.122-12 du Code du Travail, à la SA BRAKE FRANCE SERVICE.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 octobre 1999, l'employeur a proposé, sur le fondement de l'article L.321-1-2 du Code du Travail, une modification du contrat au salarié lequel l'a refusée.

Convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 novembre 1999 à un entretien préalable en vue de son licenciement, le salarié a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 décembre 1999 ainsi rédigée :

etlt;etlt;Par courrier en date du 30 novembre 1999, nous vous avons convoqué à un entretien préalable sur le projet de licenciement économique vous concernant. Vous vous êtes présenté à cet entretien le jeudi 9 décembre 1999, au cours duquel nous vous avons indiqué les motifs économiques de la décision que nous envisagions de prendre à votre égard.

Par la présente, nous avons le regret de vous signifier votre licenciement pour motif économique. Nous vous rappelons que les motifs de cette décision qui ont été exposés aux Représentants du Personnel concernent votre refus d'accepter les modifications de votre contrat de travail( à savoir le nouveau lieu de travail avec cependant maintien de votre rémunération).

Ces modifications sont consécutives à la volonté de Brake France de regrouper l'ensemble des moyens et personnes sur Béziers et de fermer le site de Sète permettant ainsi d'optimiser et de réorganiser les tournées de livraison à partir de Béziers avec l'arrêt des navettes sur Sète, d'améliorer la communication sur le même lieu de travail et de renforcer l'encadrement et les structures. Cela permet aussi de faire l'économie de location de l'agence de Sète.

Cette modification du contrat de travail et plus précisément du lieu de travail vous concerne en qualité de votre emploi de chauffeur livreur. Les autres termes de votre contrat et de ses avenants

demeuraient inchangés.

Nous vous avons également proposer d'autres solutions de reclassement sur les postes disponibles au sein du groupe Brake France, propositions que vous avez malheureusement déclinées.

Comme nous vous l'avons précisé lors de notre entretien préalable le 9 décembre 1999, vous avez la possibilité d'adhérer à une Convention de Conversion et nous vous avons remis à cet effet la documentation afférente. Vous disposez pour prendre votre décision, d'un délai de réflexion venant à expiration le 30 décembre 1999 au soir. Si vous manifestez votre accord pendant ce délai, votre contrat de travail prendra fin le 30 décembre 1999 au soir. Nous verserons alors à l'ASSEDIC compétente, le montant d'une indemnité de préavis égale à deux mois de rémunération. Vous voudrez bien nous retourner, dans les meilleurs délais, le dossier d'adhésion à la Convention de Conversion dûment rempli et signé, que nous avons remis le 9 décembre 1999.

En revanche, en cas de refus express d'adhésion ou d'absence de réponse au terme de ce délai de réflexion, la présente vaudra notification de votre licenciement pour motif économique.

Dans ce cas, le lendemain de la date de première présentation de cette lettre fixe le point de départ de votre préavis de deux mois.

Nous vous dispensons toutefois d'exécuter votre préavis à compter du 15 janvier 1999.

Le jour de votre départ, il vous sera remis votre certificat de travail ainsi que votre solde de tout compte qui inclura vos indemnités de congés payés et de licenciement.

Nous vous précisons que vous pouvez bénéficier d'une priorité de réembauchage durant un délai d'un an à compter de la rupture de votre contrat. Toutefois, ce droit ne deviendra effectif que si vous nous informez dans un délai maximal de quatre mois de votre décision d'user de cette priorité.

Si vous acquérez une autre qualification, vous voudrez bien nous en informer afin que nous puissions vous proposer les postes devenus disponibles et correspondant à vos nouvelles compétences.

Vous remerciant pour le travail que vous avez effectué au sein de l'Agence de Sète et en vous réitérant nos regrets.etgt;etgt;

Contestant son licenciement et réclamant le paiement d'heures supplémentaires, le salarié a saisi le Conseil de Prud'hommes de SETE, lequel, par jugement de départage du 31 mars 2003, a condamné l'employeur au paiement des sommes suivantes:

[*16000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

*]9295,58 eurosau titre des heures supplémentaires

[*929,57 euros au titre des congés payés s'y rapportant

*]1524,49 eurossur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La SA BRAKE FRANCE SERVICE a interjeté appel.

MOYENS PRETENTIONS DES PARTIES

La SA BRAKE FRANCE SERVICE demande à la Cour de:

-infirmer le jugement

-d'ordonner le remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire

-débouter le salarié de toutes ses prétentions

-condamner l'intimé à lui payer la somme de 763 sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle soutient qu'elle a dû procéder à la réorganisation de ses tournées et procéder à la fermeture de l'établissement de SETE ce qui a constitué une cause réelle et sérieuse justifiant les propositions de modification des postes de travail. Le salarié ayant refusé cette modification ainsi que les offres de reclassement, le licenciement est fondé sur un motif économique.

Elle conteste devoir des heures supplémentaires et invoque la règle de la prescription quinquennale.

Monsieur X... demande à la Cour de :

-au principal, confirmer le jugement sur la rupture et sur les heures supplémentaires mais condamner la société appelante à lui payer la somme de 30489,80 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-au subsidiaire, confirmer le jugement en toutes ses dispositions

-en tout état de cause, condamner la société appelante à lui payer la somme de 1600 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il conteste la réalité du motif économique au sens de l'article L.321-1 du Code du Travail et notamment la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise. Il maintient avoir effectué chaque samedi d'avril à octobre, et pendant 5 ans, 8 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été réglées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

La réorganisation de l'entreprise ne peut constituer un motif économique que si elle est effectuée pour sauvegarder sa compétitivité.

En l'espèce, la société BRAKE FRANCE SERVICE ne produit aucun document comptable, financier ou commercial démontrant que sa compétitivité aurait été en péril et que la réorganisation, consistant à regrouper les sites de BEZIERS et de SETE sur le seul site de BEZIERS, aurait été nécessaire à assurer la sauvegarde de cette compétitivité. Les pièces produites par la société BRAKE FRANCE SERVICE, notamment les lettres adressées par elle au salarié et le

procès verbal d'information et consultation du Comité d'entreprise du 11 octobre 1999, démontrent qu'en réalité cette réorganisation a été motivée par le seul souci d'une meilleure gestion. Un tel motif ne peut constituer un motif économique de licenciement au sens de l'article L.321-1 du Code du Travail.

Il y a lieu, par conséquent, de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de confirmer le jugement.

Sur les dommages et intérêts

Au jour de la rupture, le salarié avait une ancienneté de 21 ans dans une entreprise de plus de 11 salariés. Son salaire moyen était de 1500 euros. Il est né en 1954. Il justifie de sa situation de demandeur d'emploi après le licenciement.

Dès lors, il y a lieu de réformer le jugement sur le montant des dommages et intérêts et, tenant compte de ces éléments, ajoutés aux circonstances de la rupture, d'allouer au salarié la somme de 30 000 eoros à titre de dommages et intérêts.

Sur les heures supplémentaires

Hormis les disques chronotachygraphes pour les années1996-1997, l'employeur ne produit strictement aucun des éléments relatifs à la durée du travail que les articles D.212-17 et suivants du Code du Travail lui font l'obligation de tenir.

Les affirmations du salarié sont, quant à elles, confirmées par plusieurs éléments matériels. En effet, les disques des années 1996-1997 démontrent que le salarié a travaillé à plusieurs reprises le samedi. Par ailleurs, plusieurs des bulletins de salaires pour les années 1996-1997-1998 mentionnent l'existence d'une prime dite etlt;etlt;prime de samedietgt;etgt; laquelle ne peut valoir paiement d'heures supplémentaires mais confirme la réalité du travail le samedi. Aucun planning ou agenda de travail de l'employeur ne vient démontrer que le samedi aurait été pris en compte dans le calcul de

la durée hebdomadaire de travail . Enfin, les bulletins de salaires mentionnent que des heures supplémentaires ont été effectuées et payées sans que l'employeur ne produise le moindre élément relatif à ces heures supplémentaires en sorte qu'il ne démontre pas s'être acquitté du paiement intégral de sa dette de ce chef.

Faute par l'employeur de produire les éléments sur la durée du travail de son salarié, et qui aurait été de nature à combattre les éléments produits par le salarié, il sera fait droit à la demande en paiement des heures supplémentaires.

En appliquant le taux horaire en vigueur pour chaque période, en retenant l'existence de 8 heures supplémentaires par semaine et en excluant la période antérieure au 30 juillet 1996 qui est prescrite, le montant du rappel de salaires s'élève à la somme de 6334,71 en sorte que le jugement sera réformé sur le quantum. L'indemnité compensatrice de congés payés s'y rapportant s'élève à la somme de 633,4 euros.

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

L'équité commande d'allouer au salarié la somme de 500 sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Reçoit la SA BRAKE FRANCE SERVICE en son appel,

Réforme le jugement sur les dommages et intérêts et sur les heures supplémentaires,

Statuant à nouveau,

Condamne ladite SA à payer à Monsieur X... les sommes de :

*30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

*6334,71 euros à titre d'heures supplémentaires du 31 juillet 1996 au 31 octobre 1999

*633,47 euros à titre d'indemnité de congés payés s'y rapportant,

Confirme le jugement pour le surplus,

Condamne ladite SA à payer à Monsieur X... la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.

LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03/00765
Date de la décision : 18/11/2003
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique

La société BRAKE France Service ne produit aucun document comptable, financier ou commercial démontrant la mise en péril de sa compétitivité et la nécessité, afin de la sauvegarder, de se réorganiser en fermant un établissement et en regroupant ses activités sur un autre site ; des pièces produites démontrent qu'en réalité cette réorganisation a été motivée par le seul souci d'une meilleure gestion, or un tel motif ne peut constituer un motif de licenciement économique au sens de l'art. L.321-1 du Code du Travail, qui est par conséquent sans cause réelle et sérieuse. Faute par l'employeur de produire les éléments sur la durée de travail de son salarié, que les art. D.212-17 et s. du Code du Travail lui font l'obligation de tenir, et qui auraient été de nature à combattre les éléments produits par le salarié qui confirment la réalité du travail le samedi, il sera fait droit à la demande en paiement des heures supplémentaires.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2003-11-18;03.00765 ?
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