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14/10/2008 | FRANCE | N°06BX02518

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 14 octobre 2008, 06BX02518


Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la cour les 12 et 15 décembre 2006, présentés pour la SOCIETE OTH SUD OUEST, dont le siège est situé Immeuble Le Fugon, Rue Cardinal Richaud à Bordeaux (33000), par Me Malnoy, avocat au barreau de Paris ;

La SOCIETE OTH SUD OUEST demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 12 octobre 2006, en tant qu'il l'a condamnée à garantir l'Etat des condamnations mises à charge à hauteur de 93 659,79 € ;

2°) de condamner l'Etat ou, à défaut,

la société Soletanche, à lui payer une somme de 3 500 € en application de l'article L. ...

Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la cour les 12 et 15 décembre 2006, présentés pour la SOCIETE OTH SUD OUEST, dont le siège est situé Immeuble Le Fugon, Rue Cardinal Richaud à Bordeaux (33000), par Me Malnoy, avocat au barreau de Paris ;

La SOCIETE OTH SUD OUEST demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 12 octobre 2006, en tant qu'il l'a condamnée à garantir l'Etat des condamnations mises à charge à hauteur de 93 659,79 € ;

2°) de condamner l'Etat ou, à défaut, la société Soletanche, à lui payer une somme de 3 500 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 septembre 2008 :

- le rapport de M. Dronneau, président-assesseur ;

- les observations de Me Jacquet-Lemahieu, avocat de la SOCIETE IOSIS SUD OUEST, venant aux droits de la SOCIETE OTH SUD OUEST ;

- les observations de Me Tendeiro, avocat de la société Solétanche Bachy France ;

- et les conclusions de M. Gosselin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'Etat a lancé, en 1993, un programme de travaux ayant pour objet la réalisation du tribunal de grande instance de Bordeaux, l'extension de l'Ecole nationale de la magistrature, la création d'un laboratoire de recherche et la création de locaux communs ; que, par acte d'engagement du 2 avril 1993, la maîtrise d'oeuvre de ce programme a été confiée à un groupement constitué de la société Richard Rogers Architects LTD, mandataire commun du groupement, de la SOCIETE OTH SUD OUEST et de la société Ove Arup et Partners international LTD ; que la direction départementale de l'équipement de la Gironde a été désignée comme conducteur d'opération ; qu'à la suite d'une procédure d'appel d'offres, les lots n° 1-1 (travaux de parois moulées et de terrassement) et 1-2 (mise à disposition des matériels pour les archéologues) ont été attribués au groupement d'entreprises Soletanche-Quelin-Fayat, dont l'entreprise Soletanche était le mandataire commun ; qu'à la demande de cette dernière, introduite le 18 juin 2001 - alors qu'ayant transmis au maître d'oeuvre son projet de décompte final le 31 août 1998, elle n'était pas encore destinataire du décompte général - le tribunal administratif de Bordeaux, par jugement en date du 12 octobre 2006, a condamné l'Etat à payer à la société Soletanche Bachy France la somme de 239 725,77 €, augmentée des intérêts, mis à la charge de l'Etat les frais d'expertise et condamné le bureau d'études OTH SUD OUEST à garantir l'Etat des condamnations mises à sa charge à hauteur de 93 659,79 € ; que la SOCIETE IOSIS SUD OUEST, venant aux droits de la SOCIETE OTH SUD OUEST, relève appel de ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à garantir l'Etat à hauteur de cette somme ;

Considérant que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve et qu'elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ; que si elle interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation, elle ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure ; qu'ainsi la réception demeure, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations financiers nés de l'exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, dont la détermination intervient définitivement lors de l'établissement du solde du décompte définitif ; que seule l'intervention du décompte général et définitif du marché a pour conséquence d'interdire au maître de l'ouvrage toute réclamation à cet égard ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société Soletanche Bachy France a saisi le tribunal administratif d'un litige l'opposant à l'Etat, maître de l'ouvrage, dans le cadre de l'établissement du décompte général, qui ne concernait pas la réparation de désordres mais la détermination des droits et obligations financiers nés de l'exécution du marché en vue de l'établissement du solde du décompte définitif ; que si un décompte général a été notifié par le maître de l'ouvrage le 25 avril 2002, la société Soletanche a formulé des réserves le 5 juin 2002, soit dans le délai de 45 jours prévu par l'article 13.44 du CCAG travaux, sans que le maître de l'ouvrage ne prenne de décision sur cette réclamation dans le délai de trois mois qui lui était imparti pour le faire ; qu'en l'absence de décompte général et définitif, la SOCIETE IOSIS SUD OUEST ne saurait faire valoir utilement que la réception sans réserve du 22 juillet 1998 aurait mis fin aux relations contractuelles la liant au maître de l'ouvrage ; que la circonstance que le projet de décompte final de la société Soletanche Bachy France ne lui a pas été transmis est sans incidence sur la recevabilité de l'action de la société Soletanche ; qu'au demeurant la solidarité du groupement dont elle faisait partie n'est présumée prendre fin, qu'avec l'expiration des relations contractuelles la liant au maître de l'ouvrage ; que, par suite, la SOCIETE IOSIS SUD OUEST n'est pas fondée à soutenir que ce serait à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a écarté sa fin de non-recevoir tirée de la réception sans réserve des travaux ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que la société Soletanche n'ait pas mis en cause la SOCIETE OTH SUD OUEST en qualité de maître d'oeuvre, dans le cadre du litige l'opposant au maître de l'ouvrage, ne fait pas obstacle à ce que ce dernier - qui à raison du jugement attaqué a été condamné à indemniser l'entreprise Soletanche - appelle le maître d'oeuvre des travaux dont s'agit en garantie ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise sur lequel le tribunal a pu à juste titre se fonder, que la modification du niveau d'arase des parois moulées, prévu au marché du groupement d'entreprises chargées du lot n° 1-1, a été décidée par la SOCIETE OTH SUD OUEST en cours d'exécution des travaux, générant, pour la société Soletanche Bachy France un surcoût de 36 754 F HT, soit 5 603,11 € ; que la société Soletanche Bachy France a dû réaliser des voiles provisoires de bouchage des trémies en béton différents de ceux qui étaient prévus à son propre marché en raison des modifications apportées par la SOCIETE OTH SUD OUEST aux trémies en cours de réalisation des travaux, générant un surcoût de 171 992 F HT, soit 26 220 € ; que la démolition des voiles provisoires de bouchage des trémies ne relevait pas du lot n° 1-1 (travaux de parois moulées et de terrassement) mais du lot n° 2 (gros-oeuvre) de sorte que le surcoût de démolition, chiffré à 380 051 F HT soit 57 938,40 €, résultant, ainsi qu'il vient d'être dit, de la modification apportée par la SOCIETE OTH SUD OUEST aux trémies, ne pouvait incomber à la société Soletanche Bachy France ; qu'enfin, le coût des études supplémentaires liées au chantier de gros oeuvre du fait d'un changement de programme décidé par la SOCIETE OTH SUD OUEST s'est élevé à la somme de 25 571 F HT, soit 3 898,27 € ; que ces travaux et études supplémentaires, mis à la charge de l'Etat par le jugement attaqué, révèlent une carence du maître d'oeuvre dans l'accomplissement de sa mission, chargé notamment de la définition des spécifications techniques détaillées, du dossier de consultation des entreprises et de l'assistance marché de travaux ; qu'à raison de ces éléments, le tribunal administratif de Bordeaux a donc pu, par le jugement attaqué, condamner la SOCIETE OTH SUD OUEST à garantir l'Etat à hauteur de la somme globale de 614 368 F HT, soit 93 659,79 € HT ;

Considérant, en troisième lieu, que la SOCIETE IOSIS SUD OUEST, venant aux droits de la SOCIETE OTH SUD OUEST, ne saurait utilement invoquer, pour se soustraire en tout ou en partie à ces obligations, les stipulations de l'article 30 du CCAG travaux pour soutenir que le surcoût, généré par la réalisation de parois provisoires en coulis de 80 cm d'épaisseur au lieu de voiles provisoires de béton projeté de 20 cm pour le bouchage des trémies, incomberait à la société Soletanche Bachy France, dès lors que la modification des trémies a été décidée par la maîtrise d'oeuvre, que cette dernière a été informée des modifications apportées en conséquence par l'entreprise au bouchage provisoire de ces trémies et qu'elle ne s'y est pas opposée ; que si, par directive du 16 septembre 1994, la SOCIETE OTH SUD OUEST a demandé à la société Soletanche de démolir la paroi moulée sur 60 cm d'épaisseur à l'emplacement des trémies, elle a failli à sa mission de maître d'oeuvre en laissant réaliser une telle paroi ; qu'elle ne saurait davantage se prévaloir de ce que ce surcoût resterait dans la limite du taux de tolérance sur le coût d'objectif défini au cahier des clauses administratives particulières du marché la liant au maître de l'ouvrage, dès lors qu'il résulte de ce document que cette notion est destinée à déterminer sa propre rémunération et non pas à préciser les conditions de prise en charge des travaux supplémentaires effectués par les entreprises dans le cadre de leurs marchés ; qu'enfin, si la SOCIETE IOSIS SUD OUEST soutient que le maître de l'ouvrage avait connaissance des modifications apportées aux travaux de réalisation des voiles de rebouchage des trémies et qu'il se serait abstenu à tort d'intervenir auprès de la société Soletanche Bachy France, il ne résulte pas de l'instruction que les travaux entrepris par la société Soletanche Bachy France aient nécessité une intervention du maître de l'ouvrage au titre de son pouvoir de contrôle et de direction du marché ; que, par suite, en l'absence de faute du maître de l'ouvrage, le tribunal administratif a pu condamner la société requérante à garantir l'Etat du paiement de la totalité de la somme susmentionnée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE IOSIS SUD OUEST, venant aux droits de la SOCIETE OTH SUD OUEST, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée à garantir l'Etat à hauteur de la somme de 93 659,79 € HT ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat et la société Soletanche Bachy France, qui ne sont pas, dans la présente instance les parties perdantes, soient condamnés à payer à la SOCIETE IOSIS SUD OUEST la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de condamner la SOCIETE IOSIS SUD OUEST à payer à la société Soletanche Bachy France une somme de 1 300 € au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE IOSIS SUD OUEST, venant aux droits de la SOCIETE OTH SUD OUEST, est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE IOSIS SUD OUEST versera une somme de 1 300 € à la société Solétanche Bachy France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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No 06BX02518


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 06BX02518
Date de la décision : 14/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ZAPATA
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : MALNOY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-10-14;06bx02518 ?
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