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06/04/2010 | FRANCE | N°09BX02242

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 06 avril 2010, 09BX02242


Vu le recours enregistré au greffe de la Cour le 17 septembre 2009, sous le n°09BX02242 présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS ;

Le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS demande à la Cour de réformer le jugement n°0601756 du 21 juillet 2009 en tant que le Tribunal administratif de Pau a condamné l'Etat à payer à la SNC Pharmacie Vitalis et à M. et Mme X associés et gérants de la société une somme excédant 5 000 euros en réparation des conséquences dommageables de l'illégalité fautive de l'autorisation de transfert d'officine de pharmacie délivrée par arrê

té du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 7 octobre 2002 ;

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Vu le recours enregistré au greffe de la Cour le 17 septembre 2009, sous le n°09BX02242 présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS ;

Le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS demande à la Cour de réformer le jugement n°0601756 du 21 juillet 2009 en tant que le Tribunal administratif de Pau a condamné l'Etat à payer à la SNC Pharmacie Vitalis et à M. et Mme X associés et gérants de la société une somme excédant 5 000 euros en réparation des conséquences dommageables de l'illégalité fautive de l'autorisation de transfert d'officine de pharmacie délivrée par arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 7 octobre 2002 ;

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Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mars 2010,

le rapport de M. Cristille, premier conseiller ;

les observations de M. X ;

les conclusions de Mme Fabien, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 mars 2010, présentée pour la SNC Pharmacie Vitalis ;

Considérant qu'après avoir obtenu par un arrêté en date du 7 octobre 2002 du préfet des Pyrénées-Atlantiques l'autorisation de transférer leur pharmacie du centre-ville de Pau à la périphérie de cette commune, M. et Mme X ont fait usage de cette autorisation et exploité leur officine sous forme de société en nom collectif, la SNC Pharmacie Vitalis, à compter du mois de février 2003 ; que, toutefois, le Tribunal administratif de Pau a par jugement du 24 mai 2005, confirmé par la Cour administrative d'appel de Bordeaux le 8 novembre 2005, annulé cette autorisation au motif que la condition de desserte optimale de la population du quartier d'accueil, exigée par l'article L. 5125-3 du code de la santé publique n'était pas respectée ; que M. et Mme X ont cessé l'exploitation de leur pharmacie le 31 décembre 2005 ; que, par le jugement attaqué du 21 juillet 2009, le Tribunal administratif de Pau a fait droit aux conclusions de M. et Mme X et de la SNC Pharmacie Vitalis et a condamné l'Etat à leur payer la somme de 623 612,08 euros, augmentée des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation de tous les préjudices qu'ils ont subis du fait de l'illégalité fautive de la licence qui leur a été accordée ; que le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS, sans plus contester le principe de la responsabilité de l'Etat, demande à la Cour de réformer ce jugement en tant qu'il a condamné l'Etat à payer à M. et Mme X et à la SNC Pharmacie Vitalis une indemnité supérieure à 5 000 euros ; que M. et Mme X et la SNC Pharmacie Vitalis font appel incident du même jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à leurs conclusions et demandent à la Cour de porter le montant de l'indemnité que l'Etat a été condamné à leur payer à la somme de 848 020, 08 euros ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement attaqué a été produit par le ministre à l'appui de son recours ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par M. et Mme X et la SNC Pharmacie Vitalis tirée du non respect de l'article R. 412-1 du code de justice administrative applicable à la procédure d'appel en vertu de l'article R. 811-13 du même code, doit être écartée ;

Sur les préjudices :

Considérant que l'indemnité susceptible d'être allouée à la victime d'un dommage causé par la faute de l'administration a pour seule vocation de replacer la victime, autant que faire se peut, dans la situation qui aurait été la sienne si le dommage ne s'était pas produit, c'est-à-dire lorsque la faute résulte d'une décision illégale, si celle-ci n'était pas intervenue ;

En ce qui concerne la perte du fonds de commerce de la pharmacie située rue Valéry Meunier à Pau :

Considérant que M. et Mme X ont été contraints le 31 décembre 2005, de cesser d'exploiter leur officine de pharmacie transférée ; que, toutefois, l'annulation de l'autorisation de transfert n'a pas entraîné la caducité de la licence dont ils disposaient mais a seulement subordonné l'exploitation du fonds à sa localisation, de nouveau, dans le secteur initial au centre ville de Pau, rue Valéry Meunier ; qu'il résulte de l'instruction que l'impossibilité de reprendre l'activité dans le local d'origine n'est imputable qu'à l'imprudence que M. et Mme X ont commise en cédant leur droit au bail dans ce local sans attendre l'issue de l'instance contentieuse engagée par un pharmacien concurrent et dans laquelle ils ont été appelés comme observateurs ; qu'en outre, M. et Mme X n'établissent pas qu'ils auraient été dans l'impossibilité définitive d'exploiter le fonds dans le quartier d'origine ; qu'à cet égard, ils n'apportent aucun élément de nature à démontrer qu'ils auraient effectivement cédé leur droit au bail dans le local d'origine avant l'annulation de l'autorisation de transfert, que ce local aurait été indisponible à la date de l'annulation et qu'ils auraient entrepris en vain des démarches en vue d'y obtenir un nouveau bail ; que, de la même manière, les intéressés ne justifient pas avoir entrepris des démarches pour retrouver un nouveau local dans le quartier d'origine en vue d'y solliciter un transfert de la licence initiale ; qu'ainsi, en l'absence de lien de causalité direct et certain entre la cessation de l'exploitation du fonds et la délivrance illégale de l'autorisation de transfert, c'est à tort que le tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à la SNC Pharmacie Vitalis et à M. et Mme X une indemnité de 545 288 euros au titre de la perte de valeur du fonds de commerce initial ;

En ce qui concerne les dettes sociales et fiscales et les dettes à l'égard des fournisseurs :

Considérant que les seules dépenses susceptibles de donner lieu à indemnisation sont celles engagées en vue de l'exploitation de la pharmacie et qui ont été exposées en pure perte du fait de l'annulation de l'autorisation ; que, contrairement à ce que les premiers juges ont estimé, ne sont pas au nombre de ces dépenses, les dettes sociales et fiscales à hauteur de 17 000 euros et les dettes envers les fournisseurs évaluées à 168 000 euros dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction, notamment des éléments relatifs aux résultats de l'exploitation de l'officine transférée que ces frais, au demeurant non justifiés, seraient supérieurs aux bénéfices que la SNC Pharmacie Vitalis ainsi que M. et Mme X ont retirés de 2003 à 2005 de l'exploitation illégale de l'officine que l'expert évalue à 309 362 euros ; que, par suite, le ministre appelant est fondé à demander la réformation du jugement contesté sur ce point ;

En ce qui concerne la décôte des médicaments :

Considérant que la SNC Pharmacie Vitalis et M. et Mme X ne peuvent se prévaloir d'une perte réelle résultant de la reprise à un prix inférieur au prix d'achat des médicaments stockés dès lors qu'ils n'établissent pas, par les pièces produites, que la revente de ces médicaments aurait abouti à une moins-value ; que la SNC Pharmacie et M. et Mme X ne sont pas fondés à se plaindre de ce que le tribunal a rejeté les prétentions indemnitaires qu'ils ont présentés à ce titre ;

En ce qui concerne les frais exposés lors du déroulement des procès intentés devant le juge administratif :

Considérant que de tels frais ne constituent pas un chef de préjudice indemnisable distinct des dépens et des frais exposés au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'il s'ensuit que le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif l'a condamné à verser à la SNC Pharmacie Vitalis et à M. et Mme X une indemnité de 26 102,08 euros à ce titre ;

En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence :

Considérant que les conditions dans lesquelles est intervenue l'annulation de l'autorisation d'exploiter leur officine transférée ont causé à M. et à Mme X des troubles dans leurs conditions d'existence et un préjudice moral, directement liés à la faute commise par le préfet des Pyrénées-Atlantiques en prenant l'arrêté illégal et qui doivent être réparés par l'Etat; qu'en fixant, toutefois, à 20 000 euros, pour chacun, le montant de cette réparation le tribunal administratif de Pau a fait, dans les circonstances de l'espèce, une évaluation excessive ; qu'il sera fait une juste appréciation de ces préjudices en allouant à chacun une indemnité 10 000 euros; qu'il y a lieu dans cette mesure de faire droit à la demande du ministre tendant à la réduction de l'indemnité octroyée, à ce titre, par le tribunal administratif ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que compte tenu de l'indemnité non contestée de 12 283 euros allouée par le tribunal administratif au titre des frais de recrutement et de licenciement de personnel le montant de l'indemnité que l'Etat devra verser à la SNC Pharmacie Vitalis et à M. et Mme X est ramené de 623 612,08 euros à 32 282 euros, provision incluse ; qu'il y a lieu de réformer dans cette mesure le jugement entrepris ; que, par suite, le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Pau a condamné l'Etat à payer à la SNC Pharmacie Vitalis et à M. et Mme X une somme supérieure à 5 000 euros ; que la SNC Pharmacie Vitalis et M. et Mme X ne sont pas fondés à demander que l'indemnité que le Tribunal administratif de Pau a condamné l'Etat à leur payer soit portée à la somme de 848 020,08 euros ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante la somme que demandent la SNC Pharmacie Vitalis et M. et Mme X au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le montant de l'indemnité que l'Etat est condamné à verser à la SNC Pharmacie Vitalis et à M. et Mme X est ramené de 623 612,08 euros à 32 282 euros, provision incluse.

Article 2 : Le jugement n°0601756 du Tribunal administratif de Pau en date du 21 juillet 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus du recours du MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la SNC Pharmacie Vitalis et de M. et Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les conclusions de leur appel incident sont rejetées.

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09BX02242


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX02242
Date de la décision : 06/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: Mme FABIEN
Avocat(s) : SCP FALLOURD SAPONE BLAESI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-04-06;09bx02242 ?
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