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11/05/2009 | FRANCE | N°04PA01115

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8éme chambre, 11 mai 2009, 04PA01115


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mars et 8 juillet 2004, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES, dont le siège est 141 Grande rue à Sèvres (92310), par Me Le Prado ; le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0017139 du 20 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a condamné à indemniser les conséquences de l'accident survenu le 19 novembre 1981 lors d'une opération chirurgicale pratiquée sur Sandra X ;

2°) de déclarer prescrite la

créance de la Société Nationale des Chemins de Fer (SNCF) ;

3°) de décider e...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mars et 8 juillet 2004, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES, dont le siège est 141 Grande rue à Sèvres (92310), par Me Le Prado ; le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0017139 du 20 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a condamné à indemniser les conséquences de l'accident survenu le 19 novembre 1981 lors d'une opération chirurgicale pratiquée sur Sandra X ;

2°) de déclarer prescrite la créance de la Société Nationale des Chemins de Fer (SNCF) ;

3°) de décider en toute hypothèse que l'indemnisation de Mlle X devra s'opérer sous forme de rente viagère, sur une fraction de laquelle devront s'imputer les frais de placement ou d'hospitalisation passés et à venir ;

4°) subsidiairement, de minorer les indemnités alloués ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mars 2009 :

- le rapport de M. Privesse, rapporteur,

- les conclusions de Mme Desticourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Demailly pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES et la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles et celles de Me Levitan pour Mlle X ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des rapports d'expertises, que Mlle Sandra X, qui présentait à sa naissance, le 5 mars 1981, une fente labio-palatine-bilatérale, a été opérée à trois reprises à l'hôpital de Sèvres ; qu'au cours de la troisième intervention, effectuée le 19 novembre 1981, l'oubli d'une compresse a provoqué une obstruction du pharynx à l'origine d'un arrêt cardio-respiratoire, ayant lui-même entraîné de graves complications neurologiques ; que, par un jugement en date du 20 janvier 2004, dont le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES fait régulièrement appel, le Tribunal administratif de Paris a estimé que les circonstances susvisées révélaient une faute de nature à engager la responsabilité de celui-ci et l'a condamné à réparer les conséquences de l'accident subi par Mlle X, ainsi qu'à lui rembourser les frais futurs liés à l'accident opératoire susmentionné au fur et à mesure de leur versement ; que l'appelant conteste ce jugement notamment au regard de la prescription affectant la créance de l'organisme social de la SNCF, ainsi que des modalités d'évaluation du préjudice et des frais futurs ;

Considérant que dans les conditions sus-décrites, il y a lieu de mettre hors de cause dans le présent contentieux, la Société Hospitalière d'Assurance Mutuelle, assureur du centre hospitalier requérant ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le Tribunal administratif de Paris a répondu aux conclusions et moyens présentés par le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES ; qu'au surplus, le moyen tiré du défaut de motivation, simplement énoncé dans la requête sommaire et non repris dans les mémoires postérieurs, n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant au juge d'en apprécier le bien fondé ; qu'il doit donc être écarté ;

Sur la prescription quadriennale :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis./ Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; Toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ; Toute émission de moyen de règlement, même si ce règlement ne couvre qu'une partie de la créance et si le créancier n'a pas été exactement désigné. Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ;

Considérant que le délai de quatre ans prévu par les dispositions précitées ne peut courir à l'encontre d'un créancier auquel une décision de justice revêtue de l'autorité de la chose jugée ou une décision d'effet équivalent fait interdiction d'agir pour faire reconnaître ses droits ; que par suite, ledit délai doit être regardé comme suspendu aussi longtemps qu'une telle décision a été en vigueur ;

Considérant que selon l'article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître ; qu'en vertu de l'article 2052 de ce code, un tel contrat de transaction a entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort ; qu'il est exécutoire de plein droit, sans qu'y fassent obstacle, notamment, les règles de la comptabilité publique ; qu'enfin dans le cadre de la subrogation légale instituée par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, les effets susceptibles de s'attacher, quant au cours de la prescription quadriennale, à un acte accompli par l'assuré social peuvent être valablement invoqués par la caisse de sécurité sociale ;

Considérant que le cours de la prescription de l'action ouverte à M. et Mme X, agissant pour le compte de leur fille mineure, afin d'obtenir la réparation de l'ensemble des préjudices subis par la jeune Sandra du fait de l'accident dont elle a été la victime lors de son hospitalisation du 19 novembre 1981 a été valablement interrompu par la conclusion le 23 avril 1985, dans le prolongement de l'action en référé expertise qu'ils avaient engagée le 25 octobre 1983, d'accords transactionnels avec l'assureur du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES, couvrant notamment la réparation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence de la jeune Sandra, y compris l'assistance de tierces personnes, et allouant aux époux X une rente annuelle de 80 000 F (quatre vingt mille francs) jusqu'à la majorité de leur fille ; que par cet accord, l'établissement hospitalier a entendu suspendre contractuellement l'intégralité des droits de Sandra X en les réservant jusqu'à l'âge de la majorité légale, à partir duquel pourraient être fixées les indemnités définitives qui lui sont dues, soit à l'amiable, soit par voie judiciaire ; que dès lors, les subrogeants étaient placés dans la situation de ne pouvoir présenter aucune action, ou réclamation devant quelque juridiction que ce soit, avant la majorité de leur fille, intervenue en mars 1999 ; que, par suite, le tribunal administratif a pu juger, sans erreur de droit, que l'action de la Société Nationale des Chemins de fer Français (SNCF) tendant au remboursement des dépenses de santé que sa caisse de prévoyance et de retraite a exposées avant la majorité de Sandra X et qui faisaient partie intégrante du préjudice de cette dernière, n'était pas prescrite aux dates de ses interventions, les 28 février et 20 mars 2001 dans l'instance en référé n° 0100794 puis dans l'instance au fond engagées par M. X et sa fille devant le Tribunal administratif de Paris en vue d'obtenir réparation de l'intégralité des préjudices subis en raison de la faute médicale commise par le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES ;

Sur la perte de chance et la fraction indemnisable des préjudices invoqués :

Considérant que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis des chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, les préjudices résultant directement de la faute commise et qui doivent être intégralement réparés ne sont pas les dommages de toute nature constatés, mais la perte de chance d'éviter que ces dommages soient advenus ; que dans cette hypothèse, la réparation qui incombe à l'hôpital doit être évaluée à une fraction des divers préjudices allégués résultant des dommages causés par la faute invoquée, déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; qu'en l'espèce, le tribunal administratif ne s'étant prononcé ni sur cette perte de chance, ni, en conséquence, sur la fraction des préjudices invoqués par Mlle X susceptibles de faire l'objet d'une indemnisation, il y a lieu pour la cour de procéder à cette détermination ;

Considérant qu'il résulte des rapports d'expertises, que Sandra X présentait à sa naissance une fente palatine, pour laquelle les interventions prévues dont la dernière, durant les premiers mois de sa vie, auraient dû permettre d'apporter les corrections nécessaires sans risques de séquelles ; qu'en outre, il apparaît que l'enfant ne présentait aucun antécédent médical, et avait un comportement et un développement psychomoteur tout à fait normaux ; que dans ces conditions, la part des préjudices invoqués, résultant de la faute dans l'organisation et le fonctionnement du service notamment révélée par la persistance d'un syndrome pyramidal des quatre membres, ne peut être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue par l'enfant, l'intégralité de ces préjudices devant dès lors être réparée par le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES ;

Sur l'évaluation des préjudices résultant du jugement attaqué :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006 portant financement de la sécurité sociale pour 2007, le juge, saisi d'un recours relatif aux dommages corporels de la victime et de recours subrogatoires des organismes de sécurité sociale ou de prévoyance doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient en outre de déterminer si l'indemnisation définitive du préjudice doit s'opérer sous forme de rente ou de capital, et dans chaque cas, le mode de réparation le plus approprié ;

Sur l'évaluation du préjudice de Mlle X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Sandra X a fait l'objet de placements dans des établissements spécialisés jusqu'à sa majorité, ses parents s'étant alors vus allouer, pour cette seule période, une rente annuelle de 80 000 F (soit 12 195, 92 euros (douze mille cent quatre-vingt-quinze euros et quatre-vingt-douze centimes)) à compter du 1er novembre 1983 et jusqu'au 4 mars 1999, conformément à la transaction indemnitaire susmentionnée conclue le 23 avril 1985 ; que cette période de placement s'est prolongée jusqu'à son 20e anniversaire, le 5 mars 2001, date à partir de laquelle elle a été prise en charge par ses parents ; qu'à cette fin, le juge des référés, à nouveau saisi, a accordé le 12 mars 2001 à Mlle X une provision de 5 000 F (soit 762, 25 euros (sept cent soixante-deux euros et vingt-cinq centimes)) par mois à compter de cette dernière date et jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur le présent litige, puis, le 20 juin suivant, une provision complémentaire de 150 000 F (soit 22 867, 35 euros (vingt-deux mille huit cent soixante-sept euros et trente-cinq centimes)) pour les frais nécessités par le recours à l'assistance constante d'une tierce personne ; qu'il résulte de l'expertise réalisée par le professeur Y faisant suite à l'ordonnance de référé du 2 août 1999, que l'état de Mlle X la rend totalement incapable d'accomplir un travail et nécessite la présence constante d'une tierce personne, justifiant ainsi une incapacité permanente d'au moins 95 % et un pretium doloris de 7 sur l'échelle de 0 à 7 ; qu'elle subit un préjudice d'agrément ne se distinguant cependant pas du pretium doloris, un préjudice sexuel, et un préjudice esthétique évalué à 5 sur la même échelle ;

Considérant en premier lieu que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature subis par Mlle X dans ses conditions d'existence en lui allouant la somme de 300 000 euros (trois cent mille euros) notamment représentative des souffrances dues à son handicap ; que Mlle X a également droit à l'indemnisation de ses préjudices personnels à hauteur d'une somme de 50 000 euros (cinquante mille euros), de son préjudice esthétique à raison d'une somme de 9 000 euros (neuf mille euros), ainsi qu'à l'indemnisation de ses préjudices sexuel et d'établissement à hauteur de 69 500 euros (soixante-neuf mille cinq cent euros) ; qu'au total, la réparation des préjudices à caractère personnel subis par Mlle X s'opérera sous la forme d'un capital de 128 500 euros (cent vingt-huit mille cinq cent euros), ainsi que d'une rente annuelle de 20 380 euros (vingt mille trois cent quatre-vingt euros) calculée sur le capital susmentionné de 300 000 euros (trois cent mille euros), servie à compter de sa majorité, le 5 mars 1999, indépendamment de la rente annuelle provisionnelle de 80 000 F (soit 12 195, 92 euros (douze mille cent quatre-vingt-quinze euros et quatre-vingt-douze centimes)) versée à compter du 1er novembre 1983 et jusqu'au 4 mars 1999, et résultant des accords déjà mentionnés conclus le 23 avril 1985 ; qu'il y a donc lieu de ramener à ces sommes, les indemnités qui ont été accordées à Mlle X par les premiers juges ;

Considérant en deuxième lieu, qu'il n'est pas contesté d'une part, que Mlle X a été prise en charge par ses parents depuis son 20e anniversaire, soit depuis le 5 mars 2001, et d'autre part, que son état nécessite en continu la présence de tierces personnes ; que dès lors, au titre de cette assistance et lorsque l'intéressée réside à son domicile familial, l'indemnité jusque-là versée d'un montant de 762, 25 euros (sept cent soixante-deux euros et vingt-cinq centimes) par mois, au titre de l'ordonnance de référé susmentionnée du 12 mars 2001, sera réévaluée pour atteindre un montant annuel de rente de 38 000 euros (trente-huit mille euros), soit un capital d'environ 560 000 euros (cinq cent soixante mille euros), en lieu et place de la précédente qui doit s'en déduire jusqu'à la date de lecture du présent arrêt, de même que la provision de 22 867, 35 euros (vingt-deux mille huit cent soixante-sept euros et trente-cinq centimes) résultant de l'autre ordonnance en référé du 20 juin 2001 ; que dans le cas d'un accueil complet et prolongé dans un établissement spécialisé, cette rente lui sera reversée, le temps nécessaire, afin de faire face aux dépenses correspondantes, dans la limite des justificatifs produits ; que sur le capital susmentionné représentatif de la rente, devra également s'imputer le montant des prestations déjà servies à Mlle X par la caisse de prévoyance de la SNCF, relatives aux frais de placement en institut spécialisé, durant la seule période postérieure à sa majorité, lesquelles ont fait l'objet de débours de sa part de manière aujourd'hui définitive, à savoir les montants de 6 975, 09 euros (six mille neuf cent soixante-quinze euros et neuf centimes) (du 1er/12/2000 au 28/02/2001), de 15 981, 50 euros ( quinze mille neuf cent quatre-vingt-un euros et cinquante centimes)(du 1er/09/2000 au 30/11/2000), et d'environ 58 500 euros (cinquante-huit mille cinq cent euros) (approximés entre la majorité et le 31/08/2000), soit un total arrondi de 81 500 euros (quatre-vingt-un mille cinq cent euros) ; que dans ces conditions, le capital restant après les déductions ainsi opérées, s'établit à la somme d'environ 380 900 euros (trois cent quatre-vingt mille neuf cent euros) correspondant à une rente annuelle de 25 900 euros (vingt-cinq mille neuf cent euros) ; que cette dernière rente, complétée par l'allocation adulte handicapé dont bénéficie Mlle X depuis le 1er avril 2001, est conforme aux préconisations de l'expert en son rapport, relatives à l'emploi d'au moins un salarié et demi par jour ;

Considérant en troisième lieu, qu'il est constant que l'aménagement d'un véhicule susceptible de permettre le transport, et diverses aides techniques telles que fauteuil roulant, chariot de douche, lit médicalisé, ont été rendus nécessaires à compter du 20e anniversaire de Mlle X, c'est-à-dire du 5 mars 2001, du fait de sa prise en charge par ses parents, en raison de l'absence de structures adaptées à son handicap à proximité de leur domicile, et de leur voeux de la garder auprès d'eux ; que le jugement attaqué doit être également réformé en ce qu'il n'a pas tenu compte de ces divers frais, dans leurs seuls montants qui n'ont pas été remboursés par les caisses de sécurité sociale et de prévoyance ; que cependant, ledit jugement doit être confirmé en ce qu'il n'a pas indemnisé les frais d'aménagement ou d'acquisition d'un logement adapté, lesquels restent en appel sans justification ; qu'ainsi, les frais indemnisables, comprenant également leur renouvellement futur, doivent être retenus à hauteur de la somme initialement demandée, à savoir 65 913, 69 euros (soixante-cinq mille neuf cent treize euros et soixante-neuf centimes), sous la forme d'une rente annuelle équivalente de 4 478 euros (quatre mille quatre cent soixante-dix-huit euros), à la charge de l'appelant à compter du 5 mars 2001 ; que dans le cas d'un accueil complet et prolongé dans un établissement spécialisé, cette rente lui serait reversée, le temps nécessaire, afin de faire face aux dépenses correspondantes et dans la limite des justificatifs produits ;

Sur les droits de la CPAM de la Haute-Vienne et de la SNCF :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du III de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 applicable aux évènements ayant occasionné des dommages survenus antérieurement à son entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une décision passée en force de la chose jugée : Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après. / Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. / Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ;

Considérant que la Société Nationale des Chemins de Fer (SNCF) demande, au titre de sa caisse de prévoyance et de retraite, la somme de 556 856, 93 euros (cinq cent cinquante-six mille huit cent cinquante-six euros et quatre-vingt-treize centimes), comprenant un montant de 31 588, 40 euros (trente et un mille cinq cent quatre-vingt-huit euros et quarante centimes) de frais de soins, et de 525 268, 53 euros (cinq cent vingt-cinq mille deux cent soixante-huit euros et cinquante-trois centimes) de frais de placement, dont la somme susmentionnée de 81 500 euros (quatre-vingt-un mille cinq cent euros) pour la période postérieure au 5 mars 1999 ayant déjà fait l'objet d'une affectation ; que par suite, la créance non encore satisfaite de la SNCF s'établit à hauteur de la différence, soit un montant de 475 357 euros (quatre cent soixante-quinze mille trois cent cinquante-sept euros) ; que la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Vienne déclare avoir exposé la somme non contestée de 11 671, 56 euros (onze mille six cent soixante et onze euros et cinquante-six centimes) ; que dès lors, le montant cumulé des débours de la SNCF au titre de sa caisse de prévoyance, et de la CPAM de la Haute-Vienne s'établit ainsi à la somme totale de 568 528, 50 euros (cinq cent soixante-huit mille cinq cent vingt-huit euros et cinquante centimes), dont 487 029 euros (quatre cent quatre-vingt-sept mille et vingt-neuf euros) non encore affectés, somme à laquelle les caisses ont droit au titre du remboursement intégral des prestations versées ;

Considérant par ailleurs que, notamment en cas de résidence de l'intéressée à son domicile familial, la CPAM de la Haute-Vienne est fondée à demander en outre au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES le remboursement des sommes qu'elle sera amenée à débourser, au titre des frais futurs, pour le renouvellement et l'entretien de l'appareillage nécessaire à Mlle X, au fur et à mesure de leur versement et sur justification de ceux-ci, dans la limite de la somme de 323 635, 95 euros (trois cent vingt-trois mille six cent trente-cinq euros et quatre-vingt-quinze centimes) résultant de l'étude prévisionnelle produite par la caisse dans son mémoire du 24 octobre 2003 devant le tribunal ;

Considérant enfin, que les frais futurs de séjour dans un établissement spécialisé, pris en charge par la caisse, s'imputeront au fur et à mesure de leur versement, sur la rente de 38 000 euros (trente-huit mille euros) précédemment allouée, s'agissant des frais de séjour, et sur la rente de 4 478 euros (quatre mille quatre cent soixante-dix-huit euros)en ce qui concerne les dépenses d'appareillages non remboursés ; qu'en outre, en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale susvisé, il y a lieu de confirmer le jugement en sa condamnation du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES à verser à la CPAM de la Haute-Vienne la somme de 760 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par ce texte ;

Considérant qu'il résulte ainsi de ce qui précède que, compte tenu du coût des équipements nécessités par l'état de santé de l'intéressée, et de l'assistance nécessaire d'une tierce personne de manière continue, les montants précédemment fixés par les premiers juges doivent être désormais portés, au total, à la somme de 1 865 079 euros (un million huit cent soixante-cinq mille soixante-dix-neuf euros) diminuée des débours déjà versés par les caisses au titre des différentes prestations susmentionnées, ainsi que des cumuls de rente et de provision précédemment ordonnées par le juge des référés, cette dernière somme faisant l'objet d'un versement en capital ou en rente suivant les modalités précédemment définies ;

Sur les intérêts et la revalorisation :

Considérant que les rentes ou leurs reliquats correspondant aux sommes de 300 000 (trois cent mille), 560 000 (cinq cent soixante mille) et 65 913, 69 euros (soixante-cinq mille neuf cent treize euros et soixante-neuf centimes), que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES est condamné à verser au représentant légal de Mlle X, seront assorties des coefficients de revalorisation prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ; que la somme de 128 500 euros (cent vingt-huit mille cinq cent euros) représentant le préjudice personnel de Mlle X portera intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2000, date de réception par le centre hospitalier de sa demande préalable ; qu'enfin, la somme de 556 856, 93 euros (cinq cent cinquante-six mille huit cent cinquante-six euros et quatre-vingt-treize centimes) qui constitue le montant total des débours demandés par la SNCF, portera intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2001 pour les débours antérieurs et à compter de la date de chaque versement pour les débours postérieurs exposés jusqu'au 28 septembre 2001 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES le versement au représentant légal de Mlle X d'une somme de 1 300 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que le versement d'une somme de 600 euros à la CPAM de la Haute-Vienne ;

D E C I D E :

Article 1er : Le montant du préjudice physique subi par Mlle X à compter de sa majorité est porté à la somme totale de 428 500 euros (quatre cent vingt-huit mille cinq cent euros), correspondant à un capital de 128 500 euros (cent vingt-huit mille cinq cent euros) et à une rente annuelle de 20 380 euros (vingt mille trois cent quatre-vingt euros), que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES est condamné à lui verser. Le capital de 128 500 euros (cent vingt-huit mille cinq cent euros) représentant le préjudice personnel de Mlle X, portera intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2000. La rente sera affectée des coefficients de revalorisation prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.

Article 2 : Il est mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES une indemnité représentée par un capital de 560 000 euros (cinq cent soixante mille euros) correspondant à une rente annuelle de 38 000 euros (trente-huit mille euros), à verser à compter du 5 mars 1999, au titre de l'assistance par une tierce personne au domicile familial de Mlle X. Seront déduit du capital représentatif de cette rente, le cumul de la rente de 5 000 F (soit 762, 25 euros) par mois, ordonnée par le juge des référés le 12 mars 2001, la somme de 150 000 F soit 22 867, 35 euros (vingt-deux mille huit cent soixante-sept euros et trente-cinq centimes) résultant de l'ordonnance du 20 juin 2001, ainsi que les prestations pour placement de la caisse de la SNCF à hauteur de 81 500 euros (quatre-vingt-un mille cinq cent euros). Le reliquat de rente, à savoir 25 900 euros (vingt-cinq mille neuf cent euros), sera assorti des coefficients de revalorisation prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. Dans le cas d'un accueil complet et prolongé dans un établissement spécialisé, cette rente lui sera alors reversée, le temps nécessaire, afin de faire face aux dépenses de frais de séjour, à due concurrence et à mesure de leur versement, en tant qu'assistance de tierce personne ;

Article 3 : Il est mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES une indemnité représentée par un capital de 65 913, 69 euros (soixante-cinq mille neuf cent treize euros et soixante-neuf centimes) correspondant à une rente annuelle de 4 478 euros (quatre mille quatre cent soixante dix huit euros), à verser à compter du 5 mars 1999, au titre des frais d'assistance technique et d'appareillages, non remboursés par les caisses de sécurité sociale, et rendus nécessaires par l'état de santé de Mlle X. Cette rente sera assorti des coefficients de revalorisation prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. Dans le cas d'un accueil complet et prolongé dans un établissement spécialisé, cette rente lui sera alors reversée, le temps nécessaire, afin de faire face aux dépenses correspondantes d'appareillages, non remboursées, à due concurrence et à mesure de leur versement ;

Article 4 : Il est mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES le remboursement du montant total des débours demandés par la CPAM de la Haute-Vienne, à savoir la somme de 11 671, 56 euros (onze mille six cent soixante et onze euros et cinquante-six centimes). Les frais futurs d'appareillages divers et de soins qui ont été chiffrés à une enveloppe de 323 635, 95 euros (trois cent vingt-trois mille six cent trente-cinq euros et quatre-vingt-quinze centimes) dans une étude prévisionnelle produite par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Vienne le 24 octobre 2003, seront mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES, au fur et à mesure de leur versement et sur justification.

Article 5 : Il est mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES le remboursement du montant total des débours demandés par la SNCF, à savoir la somme de 556 856, 93 euros (cinq cent cinquante-six mille huit cent cinquante-six euros et quatre-vingt-treize centimes), qui portera intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2001 pour les débours antérieurs et à compter de la date de chaque versement pour les débours postérieurs exposés jusqu'au 28 septembre 2001.

Article 6 : Le jugement nº 0017139/6 susmentionné du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 7 : Le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES versera à Mlle X la somme de 1 300 euros et à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Vienne la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 8 : Les surplus des conclusions de la requête du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE SEVRES, des conclusions incidentes de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Haute-Vienne et de la SNCF, et des conclusions incidentes de Mlle X, sont rejetés.

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N° 04PA01115


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8éme chambre
Numéro d'arrêt : 04PA01115
Date de la décision : 11/05/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

18-04-02-04 COMPTABILITÉ PUBLIQUE ET BUDGET. DETTES DES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES - PRESCRIPTION QUADRIENNALE. RÉGIME DE LA LOI DU 31 DÉCEMBRE 1968. POINT DE DÉPART DU DÉLAI. - RÉGIME ISSU DE LA LOI DU 31 DÉCEMBRE 1968 RELATIVE À LA PRESCRIPTION DES CRÉANCES SUR LES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES - CONTRAT DE TRANSACTION ENTRE LES PARENTS D'UNE VICTIME MINEURE ET LE TIERS RESPONSABLE PRÉVOYANT UNE INDEMNISATION PROVISOIRE, MAIS PARALYSANT TOUTE ACTION EN RÉPARATION DU PRÉJUDICE DÉFINITIF JUSQU'À LA MAJORITÉ DE L'ENFANT - EFFET SUSPENSIF DE LA PRESCRIPTION, MÊME À L'ÉGARD D'UNE CAISSE DE SÉCURITÉ SOCIALE SUBROGÉE DANS LES DROITS DE LA VICTIME POUR LES DÉPENSES DE SANTÉ.

18-04-02-04 Le délai de quatre ans prévu par les articles 1er et 2 de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ne peut courir à l'encontre d'un créancier auquel une décision de justice revêtue de l'autorité de la chose jugée ou une décision d'effet équivalent fait interdiction d'agir pour faire reconnaître ses droits. Ce délai doit être regardé comme suspendu aussi longtemps qu'une telle décision a été en vigueur. Il en va notamment ainsi lorsqu'un contrat de transaction, ayant entre les parties, en vertu de l'article 2052 du code civil, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort, est conclu entre un établissement public hospitalier et les parents d'une victime mineure d'une faute médicale, pour fixer les modalités de réparation des troubles dans les conditions d'existence de la jeune victime durant sa minorité, tout en réservant la fixation de l'intégralité de ses droits, soit par voie amiable, soit par voie judiciaire, jusqu'à l'âge de la majorité légale coïncidant, à dire d'expert, avec la date de consolidation des infirmités provoquées par la faute médicale. La caisse de sécurité sociale qui a pris en charge les dépenses de santé engagées pendant la période de validité du contrat de transaction est fondée à se prévaloir de ses effets sur le cours du délai de prescription.... ,,[RJ1].


Références :

[RJ1]

Cf. CE, Département du Var, 22 juillet 1992, n° 51446 ;

26 septembre 2008, Centre hospitalier de Flers et Caisse primaire d'assurance maladie de l'Orne, n°s 272690-272693, conclusions de Mme de Salins ;,,Cf. sur la distinction entre effet interruptif et suspensif : CE, Sect., avis du 22 juillet 1992, Commune de Marcilly-sur-Eure, n° 136332 ;

Campo, 28 juin 1989, n° 61483.


Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: Mme DESTICOURT
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-05-11;04pa01115 ?
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