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10/05/2010 | FRANCE | N°07MA03673

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 10 mai 2010, 07MA03673


Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2007, présentée pour la COMMUNE DE LA CIOTAT, représentée par son maire, par Me Fleurentdidier ;

La COMMUNE DE LA CIOTAT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0406385 en date du 29 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1997 à 1999 ainsi que des intérêts de retard qui ont assorti ces impositions ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de m

ettre à la charge de l'Etat des frais irrépétibles en application de l'article L.761-1 du code ...

Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2007, présentée pour la COMMUNE DE LA CIOTAT, représentée par son maire, par Me Fleurentdidier ;

La COMMUNE DE LA CIOTAT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0406385 en date du 29 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1997 à 1999 ainsi que des intérêts de retard qui ont assorti ces impositions ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat des frais irrépétibles en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

.................................................

Vu le jugement attaqué ;

.................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2010 :

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant que la COMMUNE DE LA CIOTAT, qui exploite un port de plaisance dans le cadre d'une régie, a été assujettie à des cotisations d'impôt sur les sociétés au titre des années 1997 à 1999 ; que la commune demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 29 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge de ces impositions ainsi que des intérêts de retard qui les ont assorties ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que la requérante reproche aux premiers juges d'avoir entaché leur jugement d'une contradiction de motifs en relevant, après avoir retenu que la gestion de la régie ne revêtait pas un caractère désintéressé, qu'il ne résultait pas de l'instruction que la commune aurait exercé cette activité dans des conditions différentes de celles d'une entreprise privée, nonobstant la circonstance qu'aucune entreprise similaire n'existe effectivement dans sa zone géographique d'attraction ; que, dès lors que le tribunal avait relevé que la gestion de la régie ne revêtait pas un caractère désintéressé et que le motif de son jugement relatif à la concurrence entre la régie et les entreprises privées était de ce fait surabondant, l'éventuel vice affectant la formulation adoptée pour énoncer ce second motif demeure sans incidence sur la régularité du jugement ;

Sur le principe de l'assujettissement de la commune à l'impôt sur les sociétés à raison de l'exploitation du port de plaisance :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

S'agissant du champ d'application de l'impôt sur les sociétés :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 206 du code général des impôts : ( ...) sont passibles de l'impôt sur les sociétés (...) les établissements publics, les organismes de l'Etat jouissant de l'autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif ; qu'aux termes de l'article 1654 du même code : Les établissements publics, les exploitations industrielles et commerciales de l'Etat ou des collectivités locales (...) doivent (...) acquitter, dans les conditions de droit commun, les impôts et taxes de toute nature auxquels seraient assujetties des entreprises privées effectuant les mêmes opérations ; qu'enfin, aux termes du I de l'article 165 de l'annexe IV au même code : 1. Nonobstant toutes dispositions contraires les établissements publics ayant un caractère industriel ou commercial sont passibles de tous les impôts directs et taxes assimilées applicables aux entreprises privées similaires. Le même régime est appliqué à tous les organismes de l'Etat des départements ou des communes ayant un caractère industriel ou commercial, s'ils bénéficient de l'autonomie financière, à l'exception, en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, des régies de services publics des départements, communes et syndicats de communes qui sont exonérées de cet impôt ;

Considérant que, pour apprécier le caractère lucratif exigé par les dispositions précitées de l'article 206 du code général des impôts, il appartient au juge de l'impôt de rechercher si la gestion de la personne morale qui conteste son assujettissement à l'impôt sur les sociétés présente un caractère désintéressé et, si tel est le cas, si les services qu'elle rend ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ; que, toutefois, même dans le cas où cette personne morale intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, elle reste exclue du champ de l'impôt sur les sociétés si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et à tout le moins des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'elle offre ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années 1997 à 1999, l'exploitation du port de plaisance de La Ciotat était assurée dans le cadre d'une régie dotée de l'autonomie financière ; que cette régie a dégagé d'importants résultats d'exploitation pour 3 709 154 francs en 1997, 3 757 970 francs en 1998 et 3 185 914 francs en 1999 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les excédents ainsi dégagés seraient affectés à la seule exploitation du port de plaisance ; qu'une telle exploitation ne peut être regardée comme revêtant un caractère désintéressé ; que cette constatation suffit à faire entrer l'exploitation en régie dans le champ de l'impôt sur les sociétés ;

S'agissant de l'exonération prévue au 6° du 1 de l'article 207 du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 207 du même code : Sont exonérés de l'impôt sur les sociétés : (...) 6° Les régions et les ententes interrégionales, les départements et les ententes interdépartementales, les communes, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, syndicats de communes et syndicats mixtes constitués exclusivement de collectivités territoriales ou de groupements de ces collectivités, ainsi que leurs régies de services publics ; que peuvent seules bénéficier de l'exonération ainsi instituée les régies locales qui ont pour objet l'exploitation ou l'exécution d'un service indispensable à la satisfaction des besoins collectifs des habitants de la collectivité considérée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, alors même que la commune exerçait concurremment avec son exploitation en régie non désintéressée du port autonome une mission de service public administratif portant notamment sur les modalités d'utilisation ou d'occupation du domaine public maritime et que l'ensemble des habitants de la commune pouvait trouver intérêt au bon fonctionnement des équipements et au développement du tourisme de plaisance, la régie dotée de l'autonomie financière mise en place par la commune ne peut être regardée comme ayant pour objet l'exploitation ou l'exécution d'un service indispensable à la satisfaction des besoins collectifs des habitants de la collectivité considérée ; que, par suite, elle ne peut prétendre à l'exonération prévue au 6° du I de l'article 207 du code général des impôts ; qu'en outre, il n'y a pas lieu de procéder à une ventilation entre les activités de la commune relevant de l'impôt sur les sociétés, suffisamment différenciées dans le budget annexe de la régie, et les activités de service public administratif ;

Considérant que, dans ces conditions, la commune a été à bon droit assujettie à l'impôt sur les sociétés à raison de l'exploitation en régie de son port de plaisance au regard de loi fiscale ; qu'en outre, cet assujettissement résultant de l'application même des dispositions de la loi fiscale, doit être écarté le moyen de la commune selon lequel l'administration l'aurait fondé à tort sur sa propre doctrine exprimée par l'instruction 4 H-9-86 du 8 octobre 1986 et les documentations administratives de base référencées 4 H-1351 du 1er mars 1995 et 4 L-611 du 30 août 1997, qui selon la requérante ajouteraient à la loi et seraient illégales ;

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :

Considérant que la réponse ministérielle faite à M. Le Fur, député, publiée au Journal Officiel de l'Assemblée Nationale du 10 novembre 2003 ne comporte pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il a été fait application et dont la commune pourrait se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;que la commune n'est pas davantage fondée à se prévaloir des termes de la documentation administrative de base référencée 4 H-1352 dans les prévisions de laquelle elle n'entre pas à raison de l'exploitation de son port de plaisance puisque cette doctrine est relative aux municipalités concessionnaires d'outillage public propriété de l'Etat dans les ports maritimes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : Sont taxés d'office : (...) 2° A l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L 68 ; qu'aux termes de l'article L. 68 du même livre dans sa rédaction alors applicable : La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure ;

Considérant qu'il est constant que la COMMUNE DE LA CIOTAT, qui, comme il vient d'être dit, est assujettie à l'impôt sur les sociétés à raison de l'exploitation de son port de plaisance, n'a pas déféré aux mises en demeure que lui a adressées l'administration fiscale le 7 septembre 2000 tendant à ce qu'elle souscrive ses déclarations annuelles de résultats au titre des années 1997 à 1999 ; que l'administration n'était pas tenue de préciser dans sa mise en demeure les motifs de droit ou de fait pour lesquels elle estimait que la commune était imposable à l'impôt sur les sociétés ; que, dans ces conditions, la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions précitées de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales a été mise en oeuvre à bon droit ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a adressé à la commune une notification de redressement datée du 24 octobre 2000 portant à sa connaissance les bases de l'impôt sur les sociétés déterminées à partir des déclarations de chiffre d'affaires déposées par l'intéressée en matière de taxe sur la valeur ajoutée et des charges évaluées par le service et, par là-même, suffisamment motivée ; que les impositions ont été finalement établies à partir des déclarations de résultat souscrites par la commune après l'expiration du délai imparti par les mises en demeure en retenant des bases inférieures à celles initialement notifiées ; que, dans ces conditions, la commune qui a été imposée conformément aux déclarations qu'elle avait elle-même souscrites et sans rehaussement des bases initialement notifiées, n'est pas fondée à soutenir que le service aurait dû l'informer des nouvelles bases d'imposition qu'il retenait ;

Sur le montant des impositions :

Considérant que la commune a été régulièrement taxée d'office sur le fondement de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, elle supporte la charge de prouver l'exagération des impositions en application de l'article L. 193 du même livre ; qu'elle ne fait état d'aucun élément de nature à apporter cette preuve ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE LA CIOTAT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions, au demeurant non chiffrées, tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE LA CIOTAT est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE LA CIOTAT et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

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N° 07MA03673


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA03673
Date de la décision : 10/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : CABINET FLEURENTDIDIER SALASCA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-05-10;07ma03673 ?
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