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03/12/2009 | FRANCE | N°08NT02576

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 03 décembre 2009, 08NT02576


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 septembre 2008 et 5 novembre 2009, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE (CHU) DE TOURS, dont le siège est 2, boulevard Tonnelé à Tours (37044) par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; Le CHU DE TOURS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-1764 du 3 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans l'a condamné à verser à M. Yannick X la somme de 19 000 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Indre-et-Loire la somme de 30 88

8,66 euros, en réparation des suites dommageables d'une infection nosoc...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 septembre 2008 et 5 novembre 2009, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE (CHU) DE TOURS, dont le siège est 2, boulevard Tonnelé à Tours (37044) par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; Le CHU DE TOURS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-1764 du 3 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans l'a condamné à verser à M. Yannick X la somme de 19 000 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Indre-et-Loire la somme de 30 888,66 euros, en réparation des suites dommageables d'une infection nosocomiale contractée lors d'une intervention chirurgicale pratiquée le 19 novembre 2002 ;

2°) de rejeter les demandes de M. X et de la CPAM d'Indre-et-Loire ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2009 :

- le rapport de Mme Dorion, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Geffray, rapporteur public ;

Considérant que M. X a été opéré le 19 novembre 2002 d'un hallux valgus au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE (CHU) DE TOURS ; que, suite à cette opération, il a présenté une nécrose cutanée et une infection ayant nécessité trois nouvelles interventions chirurgicales et des arrêts de travail qui ont perduré jusqu'au 29 juin 2003 ; que le CHU DE TOURS relève appel du jugement du 3 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans l'a condamné à réparer les conséquences dommageables de l'infection nosocomiale dont a été victime M. X ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : Les jugements sont motivés ; que le CHU DE TOURS fait valoir, dans sa requête sommaire, que le jugement n'est pas suffisamment motivé au regard des conclusions dont les premiers juges étaient saisis ; que ce moyen, dépourvu des précisions nécessaires pour en apprécier la portée, ne peut qu'être écarté ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l'article 98 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des conclusions de l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal de grande instance de Tours, que M. X, qui ne présentait aucun problème infectieux avant l'intervention qu'il a subie le 19 novembre 2002 au CHU DE TOURS, a présenté dans les suites de cette opération une infection à escherichia coli et staphylocoque doré ayant nécessité deux reprises chirurgicales pour nettoyage et parage de la plaie réalisées les 10 et 12 janvier 2003 et le 17 février 2003, ainsi que l'administration d'un traitement antibiotique jusqu'au 7 avril 2003 ; qu'il est constant que cette infection a été contractée dans les suites de l'opération chirurgicale réalisée le 19 novembre 2002, l'expert ayant relevé que les premiers symptômes infectieux étaient présents dès avant la sortie du patient du centre hospitalier, le 23 novembre 2002 ; qu'ainsi, alors même que les germes responsables de ces complications infectieuses seraient des germes polysensibles de nature endogène, l'infection dont a été victime M. X présente les caractéristiques d'une infection nosocomiale dont la responsabilité incombe au centre hospitalier, en vertu des dispositions susrappelées de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, sauf s'il rapporte la preuve d'une cause étrangère ; que, ni la circonstance que l'infection en cause serait secondaire à une nécrose cutanée, ni la preuve, à la supposer rapportée, de l'absence de défaut d'asepsie, ne sont de nature à établir l'existence d'une cause étrangère de nature à exonérer le centre hospitalier de sa responsabilité ; que, les premiers symptômes inflammatoires étant présents chez le patient dès avant sa sortie de l'établissement hospitalier, rien ne permet d'incriminer les soins infirmiers dispensés à domicile ; que, par suite, c'est à bon droit que le Tribunal administratif d'Orléans a déclaré le CHU DE TOURS responsable des conséquences dommageables de l'infection nosocomiale dont a été victime M. X ;

Sur les préjudices subis par M. X et sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Indre-et-Loire :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a été hospitalisé, pour le traitement de l'infection qu'il avait contractée, du 9 au 31 janvier 2003, du 17 au 19 février 2003, du 22 février au 5 mars 2003, puis en hospitalisation de jour le 7 avril 2003 ; qu'il a subi trois interventions chirurgicales les 10 janvier, 12 janvier et 17 février 2003 et a été astreint à un traitement antibiotique jusqu'au 7 avril 2003 ; que, selon les conclusions de l'expert, l'incapacité temporaire totale de travail a couru du 19 février au 29 juin 2003 ; que l'état de santé de l'intéressé peut être considéré comme consolidé au 6 janvier 2005 avec un taux d'incapacité permanente partielle de 6 % ;

Considérant que la CPAM d'Indre-et-Loire exerce sur les réparations dues au titre du préjudice subi par M. X, le recours subrogatoire prévu à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu de statuer poste par poste sur ce préjudice et sur les droits respectifs de la victime et de la caisse ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

Quant aux dépenses de santé :

Considérant que la CPAM d'Indre-et-Loire justifie avoir exposé pour son assuré des débours, au titre des hospitalisations nécessitées par l'infection nosocomiale, d'un montant total de 22 367,98 euros, ainsi que des frais médicaux et pharmaceutiques, soins infirmiers, frais de transport et soins de kinésithérapie, tous postérieurs au 23 novembre 2002, pour un montant de 4 518,73 euros ; que la caisse primaire peut prétendre au remboursement de ces sommes ;

Quant aux pertes de revenus :

Considérant que les pertes de revenu subies par M. X ont été intégralement compensées par les indemnités journalières qui lui ont été servies par la CPAM d'Indre-et-Loire ; que ladite caisse a droit au remboursement de la somme de 3 060,92 euros à ce titre ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

Considérant que les troubles dans ses conditions d'existence subis par M. X du fait de l'incapacité temporaire totale puis partielle subie jusqu'à la date de consolidation de son état de santé, fixée au 6 janvier 2005, peuvent être évalués à 3 000 euros ; qu'eu égard à son âge, au taux d'incapacité permanente de 6 % et au préjudice d'agrément consécutif à l'impossibilité ou à la difficulté de pratiquer certains de ses loisirs habituels, il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence de la victime liés à son déficit fonctionnel permanent en les évaluant à 6 000 euros ; que le préjudice esthétique, évalué à 1,5 sur une échelle de 7 par l'expert, et le préjudice résultant des souffrances endurées, chiffrées à 4 sur la même échelle, peuvent être évalués à 6 000 euros ;

Sur la détermination définitive des droits de la victime et de la CPAM :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CHU DE TOURS doit être condamné à verser à M. X une somme de 15 000 euros et à la CPAM d'Indre-et-Loire une somme de 29 947,63 euros ;

Sur l'indemnité forfaitaire due à la CPAM d'Indre-et-Loire :

Considérant que la CPAM d'Indre-et-Loire a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 955 euros auquel elle a été fixée par l'arrêté interministériel du 11 décembre 2008 ; que cette caisse est, par suite, fondée à demander, par la voie de l'appel incident, que l'indemnité de 941 euros qui lui a été allouée à ce titre par le jugement attaqué soit portée à ce montant ;

Considérant que le préjudice subi par M. X s'élevant à la somme de 15 000 euros, le CHU DE TOURS est fondé à demander la réformation du jugement attaqué dans cette mesure ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le CHU DE TOURS, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X et à la CPAM d'Indre-et-Loire les sommes que ceux-ci demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que le CHU DE TOURS est condamné à verser à M. X par l'article 1er du jugement du 3 juillet 2008 du Tribunal administratif d'Orléans est réduite à 15 000 euros (quinze mille euros).

Article 2 : La somme que le CHU DE TOURS est condamné à verser à la CPAM d'Indre-et-Loire, au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, est portée à 955 euros (neuf cent cinquante-cinq euros).

Article 3 : Le jugement du 3 juillet 2008 du Tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au CHU DE TOURS, à M. Yannick X et à la CPAM d'Indre-et-Loire.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 08NT02576
Date de la décision : 03/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. GEFFRAY
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2009-12-03;08nt02576 ?
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