Vu le recours du ministre du budget enregistré le 29 avril 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 3 mars 1992 par lequel la cour administrative de Paris, annulant le jugement du 20 juin 1990 du tribunal administratif de Paris, a accordé à M. André Y... la décharge à la cotisation supplémentaire de l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1985 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et notamment l'article 151 septies ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bardou, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de M. André Y...,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 151 septies du code général des impôts : "Les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale par des contribuables dont les recettes n'excèdent pas la limite du forfait ou de l'évaluation administrative sont exonérées à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans et que le bien n'entre pas dans le champ d'application de l'article 691" ;
Considérant que M. Y... a exploité en société de fait du 15 juin 1979 au 15 avril 1982, un fonds de commerce de "cordonnerie-clé minute" à Asnières ; qu'il a ensuite exploité à titre individuel à compter du 31 mars 1982 un fonds de commerce identique en gare de Colombes ; qu'il a acquis le 1er septembre 1983 un autre fonds de même nature situé dans la galerie du centre commercial Montparnasse à Paris qu'il a cédé le 9 septembre 1985 dégageant une plus value de 900 000 F ; que la cour administrative d'appel de Paris, pour juger que M. Y... avait exercé son activité pendant au moins cinq ans à la date de la cession du fonds de commerce situé à Paris, de sorte qu'il était en droit de prétendre à l'exonération de la plus-value réalisée à cette occasion, s'est fondée notamment sur le motif que M. Y... devait être réputé avoir exercé son activité dès 1979, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre la période pendant laquelle il l'avait exercée en société de fait et celle durant laquelle il s'y était livré en tant qu'exploitant individuel ;
Considérant, en premier lieu, que pour apprécier la condition de durée d'au moins cinq ans pendant laquelle l'activité doit avoir été exercée, au sens de l'article 151 septies précité du code général des impôts, il convient de tenir compte de la période durant laquelle le contribuable a exercé son activité tant à titre d'exploitant individuel qu'en tant qu'associé d'une des sociétés visées à l'article 8 du code général des impôts et dont le régime d'imposition des bénéfices est, conformément à l'article 238 bis L du code, applicable aux sociétés de fait ; que, par suite, contrairement à ce que soutient le ministre du budget, ni la dissolution le 15 avril 1982 de la société de fait dont M. Y... était associé depuis 1979, ni, à l'occasion de la création du fonds de commerce de Colombes, la nouvelle immatriculation de l'intéressé auprès de la chambre des métiers en tant qu'exploitant individuel avec effet à date de la dissolution, ne sont de nature à établir que le contribuable aurait changé d'activité le 15 avril 1982 ;
Considérant, en second lieu, que la cour a exactement apprécié la portée de la réponse ministérielle du 11 août 1980 à M. X..., député, en estimant qu'elle excluait, pour l'application de l'article 151 septies précité du code général des impôts, la prise en compte de la durée pendant laquelle le bien cédé avait été détenu, et que cette interprétation était opposable à l'administration par le contribuable qui l'invoquait sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il suit de là que le ministre du budget n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 3 mars 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a accordé à M. André Y... la décharge à la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1985 ;
Article 1er : La requête du ministre du budget est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre du budget et à M. André Y....