Vu sous le numéro 7576, la requête présentée pour le sieur Y... Rolland , pharmacien, demeurant ... Alpes-Maritimes , ladite requête enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 20 mai 1977 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil 1. annuler un jugement en date du 25 mars 1977 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Nice a annulé trois arrêtés du préfet des Alpes-Maritimes, le premier en date du 23 mai 1975 qui autorisait le sieur Y... à ouvrir une officine de pharmacie à titre dérogatoire au n. 113 du boulevard de la Madeleine à Nice, le second en date du 23 mai 1975 qui rejetait la demande présentée par le sieur X... Jean , pharmacien, tendant à transférer son officine du n. 232 au n. 113 du même boulevard, le troisième en date du 5 décembre 1975 qui prorogeait de six mois la licence délivrée le 23 mai 1975 au sieur Y... ; 2. décider qu'il sera sursis à l'exécution dudit jugement ;
Vu sous le numéro n. 8298 le recours présenté par le ministre de la Santé et de la Sécurité sociale, ledit recours enregistré comme ci-dessus le 27 juin 1977 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler un jugement en date du 25 mars 1977 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Nice a annulé trois arrêtés du préfet des Alpes-Maritimes en date du 23 mai 1975 et du 5 décembre 1975 qui, d'une part, autorisaient le sieur Y... Rolland à ouvrir une officine de pharmacie ... et, d'autre part, rejetaient la demande présentée par le sieur X... Jean , pharmacien, tendant à transférer son officine du n. 232 au n. 113 du boulevard de la Madeleine ;
Vu le Code de la santé publique ; Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant que la requête susvisée du sieur Y... et le recours susvisé du ministre de la Santé sont dirigés contre le même jugement du Tribunal administratif de Nice et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sur la régularité du jugement attaqué : Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement que le tribunal administratif a suffisamment répondu à l'ensemble des moyens soulevés devant lui et qu'il n'a entâché son jugement d'aucune contradiction de motifs ;
Sur la légalité des arrêtés du préfet des Alpes-Maritimes en date du 23 mai 1975 et du 5 décembre 1975 : Considérant que, par un arrêté en date du 23 mai 1975, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté la demande présentée par le sieur X... tendant au transfert de son officine de pharmacie du n. 232 au n. ... ; que, par un arrêté du même jour, ledit préfet a accepté au sieur Y... l'autorisation d'ouverture d'une officine à titre dérogatoire dans un local sis au n. ... ; qu'après avoir suspendu ce dernier arrêté dans tous ses effets juridiques, ledit préfet a, par un arrêté en date du 5 décembre 1975, prorogé de six mois le délai de validité de la licence délivrée à titre dérogatoire au sieur Y... ; que, sur requête du sieur X..., le Tribunal administratif de Nice a annulé les deux arrêtés en date du 23 mai 1975 et, par voie de conséquence, l'arrêté en date du 5 décembre 1975 du préfet des Alpes-Maritimes. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces versées au dossier qu'eu égard à la configuration géographique des lieux et à l'implantation des immeubles à usage d'habitation édifiés de part et d'autre du boulevard de la Madeleine, le déplacement de trois cents mètres de l'officine du sieur X... aurait eu pour effet de nuire à l'approvisionnement régulier en produits pharmaceutiques d'une population importante ; que, dans ces conditions, le préfet a pu légalement pour rejeter le 23 mai 1975 la demande de transfert présentée par le sieur X..., relever que le transfert sollicité était contraire à l'intérêt de la santé publique ;
Considérant, d'autre part, que, d'après l'article L. 571 du Code de la santé publique, aucune création d'officine nouvelle ne peut être autorisée dans les villes où la licence a déjà été délivrée à un nombre d'officines déterminé en fonction du nombre d'habitants de la localité ; que, toutefois, aux termes du 7ème alinéa du même article : "Si les besoins de la population l'exigent, des dérogations à ces règles peuvent être accordées ... " ; Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que le secteur nord du boulevard de la Madeleine est un quartier en extension ; que le préfet a pu légalement, pour apprécier les besoins de la population, tenir compte non seulement de l'accroissement de la population dans le quartier même où la création de l'officine est autorisée, dès lors que cet accroissement de population est effectif ou certain dans un proche avenir, mais également de toute la population susceptible d'être desservie par cette officine ; que, dès lors, le préfet ne s'est pas fondé sur des faits inexacts et n'a commis aucune erreur de droit en estimant que les besoins de la population exigeaient la création d'une officine de pharmacie au n. 113 du boulevard de la Madeleine à Nice. Considérant qu'il résule de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé, d'une part, sur ce que le transfert sollicité par le sieur X... répondait à l'intérêt de la santé publique, d'autre part, sur ce que l'autorisation accordée au sieur Y... n'était pas destinée à satisfaire aux besoins de la santé publique pour annuler les arrêtés susvisés en date du 23 mai 1975 et, par voie de conséquence, l'arrêté en date du 5 décembre 1975 du préfet des Alpes-Maritimes ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le sieur X... devant le Tribunal administratif de Nice. Considérant que le sieur X..., contrairement à ce qu'il soutient, n'avait aucun droit acquis à obtenir l'autorisation de transfert de son officine. Considérant que la circonstance que l'enquêteur du conseil régional de l'Ordre des pharmaciens aurait antérieurement exercé des fonctions qui l'auraient mis en rapport avec le sieur Y... est sans influence sur la régularité de l'avis émis par ce conseil, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces versées au dossier que cet enquêteur ait manqué à son devoir d'impartialité ; Considérant que, contrairement à ce que soutient le sieur X..., l'article L. 571 du Code de la santé publique ne faisait pas obligation au préfet d'imposer une distance minimum entre son officine et celle du sieur Y.... Considérant que la circonstance que le sieur X... aurait formé un recours hiérarchique contre l'arrêté en date du 23 mai 1975 du préfet des Alpes-Maritimes est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 5 décembre 1975. Considérant que la circonstance que l'avis de l'inspecteur régional de la pharmacie n'a pas été signé par ce fonctionnaire en personne est sans influence sur la légalité des arrêtés attaqués ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le sieur Y... et le ministre de la Santé et de la Sécurité sociale sont fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nice a annulé les deux arrêtés en date du 23 mai 1975 et, eu égard aux moyens invoqués par le sieur X..., l'arrêté en date du 5 décembre 1975 du préfet des Alpes-Maritimes ;
DECIDE : Article 1er - Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nice en date du 25 mars 1977 est annulé en tant qu'il annule les arrêtés susvisés du préfet des Alpes-Maritimes en date du 23 mai 1975 et du 5 décembre 1975.
Article 2 - Les conclusions de la demande du sieur X... devant le Tribunal administratif de Nice dirigées contre ces trois arrêtés préfectoraux sont rejetées.