Requête de la société anonyme Affichage niçois, et de la société anonyme Affichage Giraudy, tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 30 octobre 1979 du tribunal administratif de Nice rejetant leurs demandes tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre des affaires culturelles, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et le préfet des Alpes-Maritimes sur leur demande tendant au versement d'une indemnité en réparation du préjudice qui leur a été causé par les mesures de restriction et de discrimination concernant l'affichage publicitaire dans le département des Alpes-Maritimes et à la condamnation conjointe et solidaire de l'Etat et du département au versement d'une indemnité de 700 000 F avec les intérêts de droit à compter du 3 juin 1975, ainsi que d'une indemnité de 2 700 F par mois à la société anonyme Affichage Giraudy et d'une indemnité de 100 000 F par mois, ainsi que des sommes de 110 890 F et 272 880 F à la société anonyme Affichage niçois ;
2° condamne l'Etat et le département des Alpes-Maritimes à leur verser à chacune, outre une indemnité de 2 700 F par mois, la somme de 700 000 F, avec les intérêts à compter du 3 juin 1975, et, en sus, à verser à la société anonyme Affichage niçois, les sommes de 110 890 F et 272 880 F, hors taxes ;
Requête de la société anonyme Affichage Giraudy, tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 30 octobre 1979 du tribunal administratif de Nice rejetant ses demandes tendant : a à l'annulation de la décision contenue dans la lettre du préfet des Alpes-Maritimes du 14 septembre 1976, en tant qu'elle constitue un refus de mettre fin à une situation discriminatoire, et, en tant que de besoin, en tant qu'elle pourrait être regardée comme constituant une décision de rejet d'une demande d'indemnité ; b à la condamnation de l'Etat au versement d'une indemnité de 2 700 F par mois à compter du mois de juillet 1976 jusqu'à la cessation de la discrimination ; c à la condamnation du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et du secrétaire d'Etat à la culture au versement de ladite somme, avec les intérêts de droit ;
2° condamne l'Etat à lui verser une indemnité de 2 700 F par mois à compter de juillet 1976 jusqu'à la cessation de la situation discriminatoire invoquée, avec les intérêts et les intérêts des intérêts ;
Vu la loi du 2 mai 1930 ; la loi du 12 avril 1943 ; le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant ... jonction ; . .
Sur la régularité des jugements attaqués : Cons. que les jugements attaqués ont suffisamment analysé les moyens invoqués par les sociétés requérantes et y ont répondu ; qu'en relevant que la société Affichage niçois n'avait " pas répondu " au supplément d'instruction par lui ordonné, le tribunal administratif, qui a entendu par là porter une appréciation sur la pertinence des éléments de fait articulés par ladite société dans le mémoire qu'elle a produit après ce supplément d'instruction, n'a pas entaché, de ce chef, son jugement d'irrégularité ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision du préfet des Alpes-Maritimes, en date du 14 septembre 1976 : Cons. qu'en réponse à une lettre par laquelle l'avocat de la société Affichage Giraudy lui communiquait une copie de la demande d'indemnités qu'il adressait aux ministres compétents, à raison de la méconnaissance par certaines entreprises de la législation interdisant l'affichage dans les sites classés ou inscrits des Alpes-Maritimes, et lui demandait quelles dispositions il entendait prendre pour mettre fin à cette situation, le préfet de ce département a indiqué à son correspondant que, compte tenu des possibilités matérielles dont il disposait, l'action répressive n'avait pu, pour l'instant, être engagée que sur certains axes urbains, mais qu'elle serait ultérieurement étendue ; que cette lettre se borne à exposer les intentions de l'administration préfectorale, et ne comporte aucune décision susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir ; que la société Affichage Giraudy n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions dirigées contre ladite lettre ;
Sur les conclusions dirigées contre le département des Alpes-Maritimes : Cons. que les attributions que le préfet tient de la loi du 12 avril 1943, pour assurer le respect des règles posées par ladite loi en matière d'affichage et de publicité, sont exercées au nom de l'Etat ; que c'est, dès lors à bon droit que le tribunal administratif de Nice a rejeté comme mal dirigées, les conclusions des sociétés requérantes tendant à la condamnation du département des Alpes-Maritimes ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement d'indemnités aux sociétés requérantes : Cons. qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 12 avril 1943, " Toute publicité est interdite ... 2° sur les monuments naturels et dans les sites classés, inscrits ou protégés par application de la loi du 2 mai 1930 " ; que des arrêtés interministériels en date des 30 juin 1972, 20 mars 1973 et 10 octobre 1974 ont classé ou inscrit parmi les sites pittoresques des Alpes-Maritimes une partie importante du littoral de ce département, rendant ainsi applicable dans les zones concernées l'interdiction édictée par les dispositions précitées de la loi du 12 avril 1943 ;
Cons. qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir délimité à l'intérieur des zones susmentionnées, sans aucun fondement légal, des secteurs où la publicité serait " tolérée ", le préfet des Alpes-Maritimes s'est borné à aviser les maires intéressés de l'irrégularité du maintien de dispositifs publicitaires dans les autres secteurs, et à demander aux services de police et de gendarmerie de relever, dans ces derniers secteurs, les infractions aux règles d'interdiction de la publicité ; que ces instructions n'ont été que très partiellement respectées ; qu'en particulier, si quelques mesures ponctuelles ont été prises à l'encontre de l'affichage traditionnel, aucune tentative sérieuse de répression n'a été faite à l'endroit du mobilier urbain supportant des affiches publicitaires ; que, dans les circonstances de l'espèce, cette carence et cette inégalité systématiques dans l'application de la loi, qui ne sauraient être justifiées par les caractéristiques différentes des deux types de publicité, ont constitué, malgré les difficultés de la tâche incombant aux services compétents, une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat :
Cons., toutefois, que les sociétés requérantes ne justifient d'aucun préjudice imputable directement à cette faute ; qu'en particulier il ne résulte pas de l'instruction qu'un détournement appréciable de clientèle se soit produit à leur détriment et au profit de la société qui exploite la publicité sur le matériel urbain, compte tenu notamment de ce que les sociétés requérantes reconnaissent avoir repris elles-mêmes assez rapidement leur activité dans les secteurs interdits ; que les seules pertes de recettes dont elles font état avec précision ne se rattachent pas au prétendu détournement de clientèle dont elles demandent l'indemnisation ;
Cons. qu'il résulte de tout ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes d'indemnité ;
rejet .