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30/05/1986 | FRANCE | N°51898

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 30 mai 1986, 51898


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 juillet 1983 et 26 août 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant ... armée française à Toul 54200 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 5 mai 1983 par lequel le tribunal administratif de Nancy a déclaré légale la décision tacite par laquelle le directeur départemental du travail et de l'emploi de Meurthe-et-Moselle a autorisé la société anonyme Caloriver à licencier M. X... pour motif économique ;
2° déclare

illégale ladite décision ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du t...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 juillet 1983 et 26 août 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant ... armée française à Toul 54200 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 5 mai 1983 par lequel le tribunal administratif de Nancy a déclaré légale la décision tacite par laquelle le directeur départemental du travail et de l'emploi de Meurthe-et-Moselle a autorisé la société anonyme Caloriver à licencier M. X... pour motif économique ;
2° déclare illégale ladite décision ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Pepy, Auditeur,
- les observations de Me Choucroy, avocat de M. Henri X... et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat de la société Caloriver,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du 3ème alinéa de l'article L. 511-1 ajouté au code du travail par la loi du 18 janvier 1979 et modifié par la loi du 6 mai 1982 : "les litiges relatifs au licenciement mentionnés au 2ème alinéa de l'article L. 321-9 relèvent de la compétence du conseil de prud'hommes. Toutefois lorsque l'issue du litige dépend de l'appréciation de la légalité de la décision administrative, expresse ou tacite, le conseil de prud'hommes surseoit à statuer et saisit le tribunal administratif compétent. Celui-ci statue dans le délai de trois mois. Si à l'issue de ce délai il ne s'est pas prononcé, ce litige est porté devant le Conseil d'Etat, qui statue selon la procédure d'urgence" ;
Considérant que par une décision en date du 26 janvier 1983, le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Nancy a, dans l'exercice de ses attributions de caractère juridictionnel, sursis à statuer sur l'instance pendante entre M. X... et la société Caloriver et a saisi le tribunal administratif de Nancy de la question de l'appréciation du caractère économique du motif qui a fondé la décision implicite par laquelle le directeur départemental du travail et de l'emploi de Meurthe-et-Moselle a autorisé la société à licencier M. X... ; que cette décision de renvoi a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nancy le 31 janvier 1983 ; que par suite le jugement en date du 5 mai 1983 par lequel le tribunal administratif a statué sur cette question préjudicielle est intervenu postérieurement à l'expiration du délai de trois mois fixé par les dispositions précitées de l'article L.511-1 du code du travail ; que dès lors ce jugement doit être annulé ;

Considérant cependant que le tribunal administratif se trouve dessaisi par l'expiration du délai précité et qu'il y a lieu de statuer sur la question préjudicielle renvoyée par le conseil de prud'hommes au tribunal administratif de Nancy ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-9 du code du travail, pour ls demandes de licenciement dont le nombre est inférieur à 10 dans une même période de 30 jours, "l'autorité administrative dispose d'un délai de 7 jours renouvelable une fois pour vérifier la réalité du motif économique invoqué et pour faire connaître soit son accord, soit son refus d'autorisation" ; que ces dispositions imposent au directeur départemental du travail lorsqu'il est saisi d'une demande de licenciement pour cause économique portant sur moins de dix salariés dans une même période de trente jours, de vérifier que le motif allégué par le chef d'entreprise à l'appui de sa demande d'autorisation du licenciement constitue un motif économique pouvant servir de base au licenciement des salariés ;
Considérant que pour demander, le 8 mars 1982, à la direction départementale du travail et de l'emploi de Meurthe-et-Moselle l'autorisation de licencier pour motif économique quatre salariés, dont M. X..., employé depuis 1980 comme chef d'équipe de production, la société Caloriver a invoqué "une chute très importante" de son activité, ainsi que "une réduction considérable des marges bénéficiaires" ; que la société a également soutenu que ces difficultés la conduisaient à réduire la charge salariale et qu'aucune reprise n'était envisageable à court terme ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les difficultés invoquées par la société à la veille de sa demande de licenciement aient été le signe d'une réduction véritable de son activité ; qu'en outre les résultats d'exploitation de l'exercice 1981, dont la société avait indiqué par lettre du 18 mars 1982 qu'il serait au mieux équilibrés", ont fait apparaître un bénéfice qui, en baisse par rapport à 1980, restait cependant supérieur à 2 % du chiffre d'affaires ; que dès lors, en autorisant tacitement lesdits licenciements, l'autorité administrative a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la réalité du motif économique allégué par la société ; qu'ainsi l'exception d'illégalité soumise par le conseil de prud'hommes de Nancy et relative à l'appréciation du caractère économique du motif du licenciement de M. X... doit être déclarée fondée ;
Article 1er : Le jugement en date du 5 mai 1983 du tribunal administratif de Nancy est annulé.

Article 2 : L'exception d'illégalité soumise par le conseil de prud'hommes de Nancy et relative à l'appréciation du caractère économique du motif du licenciement de M. X... est déclarée fondée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à la société Caloriver, au greffier en chef du conseil de prud'hommes de Nancy et au ministre des affaires sociales et de l'emploi.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 51898
Date de la décision : 30/05/1986
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-02 TRAVAIL - LICENCIEMENT - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE


Publications
Proposition de citation : CE, 30 mai. 1986, n° 51898
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Pepy
Rapporteur public ?: Daël

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:51898.19860530
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