Vu le recours enregistré le 18 mai 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 réforme le jugement en date du 25 février 1983 par lequel le tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat à verser aux consorts X... la somme de 78 347,60 F en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait du retard apporté par l'administration à leur accorder le concours de la force publique pour procéder à l'expulsion des occupants de baraquements édifiés sur des terrains leur appartenant ;
°2 ramène la somme de 78 347,60 F mise à la charge de l'Etat à 40 000 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Girault, Auditeur,
- les observations de Me Roger, avocat des Consorts X...,
- les conclusions de M. de la Verpillière, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que par une décision en date du 19 mars 1976, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a jugé que le retard mis par l'administration à accorder à M. X... le concours de la force publique pour assurer l'exécution de la décision judiciaire ordonnant l'expulsion des occupants de baraquements construits sans titre sur son terrain était de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
Considérant que les ayants-droit de M. X... sont fondés à soutenir que l'autorité de chose jugée qui s'attache à cette décision s'oppose à ce que le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION invoque à l'appui de son recours la faute de la victime en atténuation du dommage subi par elle ;
Considérant qu'il appartenait aux héritiers de M. X... d'établir que le préjudice subi par leur auteur du fait du versement d'astreintes auquel celui-ci avait été condamné par un jugement du tribunal de grande instance de Versailles du 14 octobre 1965 avait un caractère certain ; que, par un arrêt en date du 6 janvier 1978 confirmé par un arrêt du 17 janvier 1979 de la Cour de Cassation, la Cour d'appel de Paris a ordonné, en application des dispositions de l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme alors en vigueur, le reversement aux héritiers X... de la somme de 40 000 F sur un total de 120 400 F versé au titre des astreintes ; qu'ainsi le montant du préjudice indemnisable est égal à 80 400 F ; que, dès lors, le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, par lequel le tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat à payer une indemnité de 78 347,60 F aux consorts X... ;
Considérant que par la voie du recours incident les consorts Danel demandent le remboursement de la totalité des astreintes laissées à leur charge par l'arrêt susmentionné de la our d'appel de Paris ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la somme de 78 347,60 F mise à la charge de l'Etat doit être portée à 80 400 F ; que si, en outre, les consorts X... réclament d'une part 5 209 F pour "les frais taxables" et 20 000 F pour les frais engagés à raison du refus du concours de la force publique et d'autre part une indemnité pour "troubles dans les conditions d'existence dus à l'atteinte causée à leurs ressources par l'obligation de versement des astreintes" qu'ils chiffrent à 30 000 F ainsi qu'une indemnité de 20 000 F pour préjudice moral, ces prétentions ne sont appuyées d'aucune justification ;
Considérant que les consorts X... ont droit aux intérêts de la somme de 80 400 F à compter du 5 juillet 1979 date de la réception par le ministre de leur demande ;
Considérant que les consorts X... ont demandé le 9 janvier 1984 la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité qui leur est due ; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : La somme de 78 347,60 F que l'Etat a étécondamné par le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 25 février 1983 à payer aux consorts X... est portée à 80 400 F.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 25 février 1983 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : La somme de 80 400 F portera intérêts au taux légal à compter du 5 juillet 1979. Les intérêts échus le 9 janvier 1984 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION et le surplus des conclusions du recours incident des consorts X... sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée aux consorts X... et au ministre de l'intérieur.