La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/03/1988 | FRANCE | N°46846

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 11 mars 1988, 46846


Vu le recours du MINISTRE DELEGUE CHARGE DU BUDGET enregistré le 18 novembre 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement en date du 8 juillet 1982 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à la société anonyme Ascinter-Otis une réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle cette société a été assujettie, au titre de l'année 1977, dans les rôles de la ville de Paris,
°2 remette intégralement l'imposition contestée à la charge de la société Ascin

ter-Otis,

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
...

Vu le recours du MINISTRE DELEGUE CHARGE DU BUDGET enregistré le 18 novembre 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement en date du 8 juillet 1982 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à la société anonyme Ascinter-Otis une réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle cette société a été assujettie, au titre de l'année 1977, dans les rôles de la ville de Paris,
°2 remette intégralement l'imposition contestée à la charge de la société Ascinter-Otis,

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Hagelsteen, Maître des requêtes,
- les observations de Me Ryziger, avocat de la société anonyme Ascinter-Otis,
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés" ; qu'il résulte de ces dispositions que tous les événements qui affectent la valeur des éléments de l'actif entre l'ouverture et la clôture de l'exercice doivent être pris en compte pour la détermination du bénéfice imposable, sous la seule réserve que ces éléments aient été régulièrement inscrits à l'actif ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société anonyme "Ascinter-Otis" a décidé de renoncer définitivement aux créances qu'elle détenait sur la société à responsabilité limitée "Nouvelle Société Française de Télécommunications", ci-après "N.S.F.T.", dont elle possède 95 % du capital, et a déduit la somme correspondante soit au total 3 300 000 F, de ses bénéfices imposables de l'exercice clos le 30 septembre 1977 ; que l'administration ne conteste pas que les écritures comptables traduisant cette décision ont été portées en temps utile au bilan dudit exercice ; que, dès lors, la circonstance que cette opération n'a été approuvée que par une délibération du conseil d'administration intervenue le 24 octobre 1977, après la date de clôture de l'exercice, ne peut, par elle-même, faire obstacle à la prise en compte des écritures dont s'agit pour la détermination des résultats de l'exercice clos le 30 septembre 1977 ;

Considérant que le ministre soutient que la socété "Ascinter-Otis", pour venir en aide à sa filiale, aurait dû procéder par la voie d'un apport en capital et non, comme elle l'a fait, par la rénonciation définitive à une valeur d'actif ; que, toutefois, la société "Ascinter-Otis" justifie que la N.S.F.T. se trouvait, au moment où est intervenu l'abandon de créances, dans une situation financière difficile qui pouvait conduire à la cessation d'activité et que la société "Ascinter-Otis" a cherché à éviter le dépôt de bilan de sa filiale, lequel aurait risqué de porter atteinte à son renom et, surtout, aurait eu une incidence défavorable sur la diversification de ses activités qu'elle venait d'entreprendre dans le secteur des télécommunications ; que, compte tenu de l'ensemble des éléments d'appréciation dont elle fait état, la société "Ascinter-Otis" a pu estimer à juste titre qu'il était conforme à son propre intérêt d'assainir la situation financière de sa filiale ; qu'elle doit, dès lors, être regardée, alors même qu'elle aurait pu recourir à d'autres mesures pour parvenir aux mêmes fins, en particulier souscrire à une augmentation de capital de sa filiale, précédée ou non d'une réduction de capital, comme ayant agi dans le cadre d'une gestion normale en consentant l'abandon de créance dont s'agit ;
Considérant qu'au 30 septembre 1977, les pertes cumulées de la société "N.S.F.T.", d'un montant de 3 413 133 F, étaient telles que les créances des tiers, d'un montant de 5 402 585 F, dont 3 983 364 F au profit de la société "Ascinter-Otis", étaient supérieures à la valeur de réalisation de l'actif social de la première de ces sociétés, estimée à la somme de 2 223 159 F ; qu'ainsi l'abandon de créance de 3 300 000 F n'a pas eu pour effet de rendre positif l'actif net de la société "N.S.F.T." et n'a pu, par suite, en tout état de cause, accroître la valeur des titres de cette société détenus par la société "Ascinter-Otis" ; qu'il suit de là que cet abandon de créances, qui relève d'une gestion normale et n'a pas entraîné une augmentation de la valeur de l'actif de la société "N.S.F.T.", était déductible, en vertu des dispositions précitées de l'article 38 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et du budget n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à la société "Ascinter-Otis" la décharge de l'imposition contestée ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget et à la société "Ascinter-Otis".


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 46846
Date de la décision : 11/03/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-04-083 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - RELATIONS ENTRE SOCIETES D'UN MEME GROUPE -Abandon de créance - Charge de la preuve de l'existence d'un intérêt commercial - Société.

19-04-02-01-04-083 Une société, qui a renoncé définitivement aux créances qu'elle détenait sur sa filiale française, a la charge de prouver que cet abandon de créances a été fait pour des raisons commerciales.


Références :

CGI 38 2, 209


Publications
Proposition de citation : CE, 11 mar. 1988, n° 46846
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Ducamin
Rapporteur ?: Mme Hagelsteen
Rapporteur public ?: Mme de Saint-Pulgent

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:46846.19880311
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award