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29/03/1989 | FRANCE | N°67789;83488

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 29 mars 1989, 67789 et 83488


Vu 1°) sous le n° 67 789 la requête enregistrée le 12 avril 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. et Mme X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 7 février 1985, par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté divers moyens invoqués à l'appui de leur requête dirigée contre la décision de la commission départementale d'aménagement foncier d'Ille-et-Vilaine du 7 mars 1984 relative au remembrement de leurs biens situés sur le territoire de la commune de Retiers ;
2°) annule pour e

xcès de pouvoir cette décision ;
Vu 2°), la requête enregistrée le 3 déc...

Vu 1°) sous le n° 67 789 la requête enregistrée le 12 avril 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. et Mme X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 7 février 1985, par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté divers moyens invoqués à l'appui de leur requête dirigée contre la décision de la commission départementale d'aménagement foncier d'Ille-et-Vilaine du 7 mars 1984 relative au remembrement de leurs biens situés sur le territoire de la commune de Retiers ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu 2°), la requête enregistrée le 3 décembre 1986 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 83 488 présentée pour M. et Mme X... et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 30 octobre 1986, par lequel le tribunal administratif de Rennes, d'une part a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 7 mars 1984 de la commission de remembrement et de réorganisation foncière d'Ille-et-Vilaine relative aux opérations de remembrement de la commune de Retiers et, d'autre part, a mis à leur charge les frais d'expertise ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision ;

Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Daguet, Auditeur,
- les observations de Me Odent, avocat de M. et Mme X...,
- les conclusions de Mme de Clausade, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 67 789 et 83 488 de M. et Mme X... sont dirigées contre deux jugements relatifs à une même décision ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur le moyen tiré de l'illégalité des décisions de la commission départementale en date des 25 juin 1976 et 20 octobre 1978 :
Considérant qu'aux termes de l'article 21 du code rural : "chaque propriétaire doit recevoir par la nouvelle distribution, une superficie globale équivalente, en valeur de productivité réelle, à celle des terrains qu'il a apportés, déduction faite de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs ... Sauf accord express des intéressés, l'équivalence en valeur de productivité réelle doit, en outre, être assurée par la commission communale dans chacune des natures de culture qu'elle aura déterminées. Il peut toutefois être dérogé, dans les limites qu'aura fixées la commission départementale pour chaque région agricole du département, à l'obligation d'assurer l'équivalence par nature de culture. La commission départementale détermine, à cet effet : 1° après avis de la chambre d'agriculture les tolérances exprimées en pourcentage des apports de chaque propriétaire dans les différentes natures de culture et ne pouvant excéder 20 % de la valeur des apports d'un même propriétaire dans chacune d'elles" ;
Considérant que la chambre d'agriculture d'Ille et Vilaine, consultée conformément aux dispositions précitées, s'est prononcée le 13 mai 1976 pour l'application dans l'ensemble du département du pourcentage maximum de tolérance, soit 20 % ; qu'aucune disposition n'imposait que l'avis de la chambre d'agriculture fût donné distinctement pour chaque région agricole ;

Considérant que la délibération en date du 25 juin 1976 par laquelle la commission départementale s'est déclarée "favorable à l'application du pourcentage maximum", et a manifesté son intention de ne pas "fixer ce pourcentage de façon générale et définitive", et de "l'adapter à chaque commune et suivant les natures de culture, à l'issue de l'enquête sur le classement", présentait le caractère d'une décision préparatoire qui n'avait pas à être publiée ni notifiée ;
Considérant que par délibération en date du 20 octobre 1978, la commission départementale a décidé "après examen des plans de classement des terres de Martigné Ferchaud et Rétiers" d'appliquer dans ces communes le pourcentage maximum de 20 % ; que rien n'imposait à la commission de consulter à nouveau la chambre d'agriculture ; qu'aucune disposition ne lui interdisait d'admettre que lesdites communes constituaient des régions agricoles au sens de l'article 21 précité, ni de statuer comme elle l'a fait après enquête sur le classement des terres ; que sa délibération présentait le caractère d'une décision réglementaire et n'avait pas à être motivée ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, cette délibération n'était entachée d'aucune illégalité ;
Sur les moyens relatifs à la parcelle YD 11 :
Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la commission départementale a expressément et suffisamment répondu au moyen que l'intéressé avait invoqué dans sa réclamation et tiré de l'éloignement de ladite parcelle ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le remembrement a eu pour effet d'améliorer les conditions d'exploitation des terres attribuées au compte n° 709, relatif aux biens propres de M. X..., où est incluse la parcelle litigieuse ; que le moyen tiré de ce que cette parcelle ne serait pas desservie par un chemin d'exploitation manque en fait ;
Sur le moyen relatif à la parcelle YD 11 :
Considérant que la parcelle cadastrée YD 11 a été réattribuée à M. X... au titre du compte n° 709 relatif aux biens propres de ce dernier ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la décision de la commission départementale statuant sur leur réclamation concernant cette parcelle est suffisamment motivée ;
Sur le moyen tiré du défaut de réponse de la commission départementale aux réclamations des requérants relatives aux parcelles cadastrées F 56, 57, 58 :
Considérant que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme X..., la commission départementale a, dans la décision attaquée, répondu à l'ensemble des moyens dont elle était saisie concernant ces parcelles ;
Sur le moyen tiré de la violation de la règle de l'équivalence en ce qui concerne le compte n° 708 (communauté des Epoux X...) et n° 709 (biens propres de M. X...) :
Sans qu'il soit besoin de répondre au moyen relatif à la parcelle F 100 :
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 21 du code rural que la loi ne garantit aux propriétaires ni une égalité absolue entre la surface qui leur est attribuée et celle de leurs apports, ni une équivalence parcelle par parcelle ou classe par classe entre ces terres ; que les commissions d'aménagement foncier sont seulement tenues d'attribuer des lots équivalents, en valeur de productivité réelle, aux apports de chaque propriétaire dans chacune des natures de culture, après déduction de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif, qu'en ce qui concerne le compte n° 708, pour un montant d'apports réduits de 97 473 points, les attributions s'élèvent à 86 474 points ; qu'en ce qui concerne le compte n° 709, pour un montant d'apports réduits de 195 529 points, les attributions s'élèvent à 194 001 points ; que, s'agissant du compte n° 708, l'écart constaté présente une importance telle que la règle de l'équivalence posée par l'article 21 du code rural ne peut être regardée comme ayant été respectée ; que s'agissant du compte n° 709, l'écart constaté n'est pas d'une importance telle que la règle d'équivalence puisse être regardée comme n'ayant pas été respectée ; que les requérants sont donc fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande dirigée contre la décision de la commission départementale en tant qu'elle concerne les biens de la communauté des Epoux X... ;
Sur le moyen tiré de l'absence de prise en compte par la commission départementale de la donation-partage des parcelles anciennement cadastrées D. 443, 444, 469, 475, relative au compte n° 709 bis (biens propres de Mme X...) :

Considérant que l'article 34 du code rural dispose que : " ... 2° à dater de l'arrêté préfectoral prévu à l'article 3, tout projet de mutation entre vifs doit être porté à la connaissance de la commission communale. Si la commission communale estime que la mutation envisagée est susceptible d'entraver la réalisation du nouveau lotissement, la demande de mutation doit être soumise pour décision à la commission départementale" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la donation-partage par laquelle, postérieurement à l'arrêté préfectoral en date du 4 novembre 1975 fixant le périmètre de remembrement de la commune de Retiers, Mme X... est devenue propriétaire des parcelles susmentionnées a été portée à la connaissance de la commission départementale le 26 mai 1980 sans que son projet ait été préalablement soumis à la commission communale ; qu'ainsi la commission départementale, pour l'application de l'article 19 du code rural, aux termes duquel "le nouveau lotissement doit rapprocher des bâtiments d'exploitation les terres qui constituent l'exploitation rurale", a pu légalement ne pas tenir compte de cette mutation ; qu'il suit de là que M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 7 mars 1984 de la commission de remembrement et de réorganisation foncière d'Ille-et-Vilaine relative aux opérations de remembrement de Retiers en tant qu'elles concernent le compte n° 709 bis des biens propres de Mme X... ;
Sur les frais d'expertise :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les frais de l'expertise ordonnée avant dire droit par le tribunal administratif de Rennes que le tribunal administratif avait mis à la charge de M. et Mme X... doivent être mis à la charge de l'Etat ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 30 octobre 1986 est annulé en tant qu'il rejette la demande de M. et Mme X... dirigée contre la décision du 7 mars 1984 de la commission départementale d'aménagement foncier d'Ille et Vilaine, en tant que cette décision porte sur les biens de la communauté des Epoux X... (compte n° 708). La décision du 7 mars 1984 de la commission départementale d'aménagement foncier d'Ille et Vilaine est annulée en tant qu'elle porte sur les biens de la communauté des Epoux X... (compte n° 708).
Article 2 : Les frais de l'expertise ordonnée par les premiers juges sont mis à la charge de l'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme X... et au ministre de l'agriculture et de la forêt.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 67789;83488
Date de la décision : 29/03/1989
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

AGRICULTURE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE - COMMISSIONS DE REMEMBREMENT - COMMISSION COMMUNALE - Pouvoirs de la commission - Soumission des projets de mutations entre vifs aux commissions communale et départementale (article 34-2° du code rural) - Impossibilité de soumettre directement le projet à la commission départementale.

03-04-03-01, 03-04-03-02-04 L'article 34 du code rural dispose que : "... 2°) à dater de l'arrêté préfectoral prévu à l'article 3, tout projet de mutation entre vifs doit être porté à la connaissance de la commission communale. Si la commission communale estime que la mutation envisagée est susceptible d'entraver la réalisation du nouveau lotissement, la demande de mutation doit être soumise pour décision à la commission départementale". Il ressort des pièces du dossier que la donation-partage par laquelle, postérieurement à l'arrêté préfectoral en date du 4 novembre 1975 fixant le périmètre de remembrement de la commune de Retiers, Mme P. est devenue propriétaire des parcelles susmentionnées a été portée à la connaissance de la commission départementale le 26 mai 1980 sans que son projet ait été préalablement soumis à la commission communale. Ainsi la commission départementale, pour l'application de l'article 19 du code rural, aux termes duquel : "Le nouveau lotissement doit rapprocher des bâtiments d'exploitation les terres qui constituent l'exploitation rurale", a pu légalement ne pas tenir compte de cette mutation.

AGRICULTURE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE - COMMISSIONS DE REMEMBREMENT - COMMISSION DEPARTEMENTALE - POUVOIRS - Soumission des projets de mutations entre vifs aux commissions communale et départementale (article 34-2° du code rural) - Absence de soumission à la commission communale - Conséquence.


Références :

Code rural 19, 21, 34


Publications
Proposition de citation : CE, 29 mar. 1989, n° 67789;83488
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Daguet
Rapporteur public ?: Mme de Clausade

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:67789.19890329
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