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17/05/1989 | FRANCE | N°34380

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 17 mai 1989, 34380


Vu le recours du MINISTRE DU BUDGET enregistré le 21 mai 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 8 janvier 1981 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à la société anonyme Procofrance la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle avait été assujettie au titre des années 1969, 1970, 1971 et 1972 ;
2°) remette intégralement les impositions contestées à la charge de la société anonyme Procofrance ;

3°) mette à la charge de la société anonyme Procofrance les frais de l'expertise ...

Vu le recours du MINISTRE DU BUDGET enregistré le 21 mai 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 8 janvier 1981 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à la société anonyme Procofrance la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle avait été assujettie au titre des années 1969, 1970, 1971 et 1972 ;
2°) remette intégralement les impositions contestées à la charge de la société anonyme Procofrance ;
3°) mette à la charge de la société anonyme Procofrance les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif ;
4°) rejette le surplus des conclusions présentées par la société anonyme Procofrance devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Liébert-Champagne, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte des dispositions du 1 de l'article 209 du code général des impôts qu'en l'absence de convention liant la France et le pays étranger concerné, doivent être soumis à l'impôt sur les sociétés les bénéfices provenant d'opérations qui sont réalisées en France, à l'exclusion de celles comportant l'exécution des prestations dans ledit pays étranger ;
Considérant que la société anonyme Procofrance, dont le siège et les bureaux d'études sont en France et qui a pour objet principal la fourniture à l'étranger d'usines de traitement de produits pétroliers et chimiques, a passé en 1967 avec la société "Thai Oil Rafinary Company Ltd" un contrat portant sur la livraison en Thaïlande d'une raffinerie de pétrole et selon lequel la société Procofrance devait assurer les travaux d'étude et d'ingénierie pour la conception de l'ensemble, la fourniture des matériels, le montage et la mise en service de l'usine ; que les bénéfices apparus en 1969, 1970, 1971 et 1972 du fait de la réalisation de ce marché n'ont été compris par la société Procofrance que pour 65 % de leurs montants dans les bases des impôts acquittés par elle au titre desdites années ; qu'en l'absence de convention existant, à cette époque, entre la France et la Thaïlande, l'administration a réintégré le surplus dans le bénéfice imposable en le considérant comme ayant été réalisé dans une activité industrielle exercée en France ; que, par le jugement attaqué, rendu après expertise, le tribunal administratif de Paris a déclaré que la part des bénéfices réalisés par la société à l'occasion de ce marché pouvant ête regardée comme ne provenant pas d'une activité exercée en France au sens de l'article 209-1 du code ne saurait être inférieure à 35 % du total et a, en conséquence, déchargé la société, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les bénéfices des sociétés auxquelles elle avait été assujettie ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la société Procofrance :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, en particulier des rapports des experts commis en première instance, que, bien que la société Procofrance ait été secondée sur place par la société "Thai industrial constructor Ltd" et quelle qu'ait été l'imposition éventuelle de la requérante en Thaïlande, doit être regardé comme constituant une activité exercée à l'étranger par elle l'ensemble des opérations effectivement réalisées dans le pays d'implantation de la raffinerie, telles que la passation et le suivi des contrats entre la "Thai industrial constructor Ltd" et des sociétés locales, la mise en place de l'infrastructure de chantier, les études d'ingénierie complémentaires exigées sur le site par des modifications au contrat initial et ne s'intégrant pas aux études préliminaires de conception, les modifications des installations en résultant ou décidées à la suite de défaillances du matériel, la direction, la supervision et le contrôle du déroulement des opérations de construction, les opérations de mise en service, les essais de performance et le maintien sur place d'une équipe réduite pendant la période de garantie ainsi que, ce que ne conteste pas le ministre, d'une part, l'étude et les négociations du financement de l'ensemble du marché, d'autre part, les opérations relatives à l'exportation des matériels nécessaires ;
Considérant, en second lieu, que si le ministre allègue que tant la méthode suivie par la société pour déterminer la part de bénéfices applicable aux opérations réalisées à l'étranger que celle proposée par les experts de première instance induisent une marge bénéficiaire uniforme sur l'ensemble des opérations du marché, il ressort du rapport d'expertise que les experts ont procédé à la répartitition des coûts du marché par nature de dépense pour déterminer en fonction de leur lieu de rattachement les dépenses affectables aux études réalisées en France et celles engagées pour la réalisation des installations sur le site, avant de rapporter les bénéfices réalisés proportionnellement à chaque nature de dépense ; qu'il en résulte que la part de bénéfices qui se rattache aux opérations exécutées en Thaïlande atteint 37,69 % et que, par suite, en ne retenant que 35 %, la société contribuable a mesuré par défaut les résultats ainsi dégagés hors de France et non imposables ; que le ministre qui n'indique pas en quoi la méthode des experts aboutirait à une sous-évaluation des résultats imposables ne propose aucune autre méthode susceptible de conduire à des évaluations plus précises ni ne chiffre les taux de marge bénéficiaire qui auraient dû, selon lui, affecter les opérations d'ingénierie et de négoce ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a déchargé la société Procofrance des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle avait été assujettie ;
Article 1er : Le recours du ministre du budget est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget et à la société anonyme Procofrance.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 34380
Date de la décision : 17/05/1989
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-01-02,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - PERSONNES ET ACTIVITES IMPOSABLES - NOTION D'ENTREPRISE EXPLOITEE EN FRANCE -Entreprise française ayant pour objet la fourniture à l'étranger d'"usines clés en main" - Entreprise française secondée sur place par une société étrangère (1).

19-04-02-01-01-02 La société dont le siège et les bureaux d'études sont en France et qui a pour objet principal la fourniture à l'étranger d'usines de traitement de produits pétroliers et chimiques, a passé avec une société thaïlandaise un contrat portant sur la livraison en Thaïlande d'une raffinerie de pétrole et selon lequel la société française devait assurer les travaux d'étude et d'ingénierie pour la conception de l'ensemble, la fourniture des matériels, le montage et la mise en service de l'usine. Les bénéficiaires apparus du fait de la réalisation de ce marché n'ont été compris par la société que pour 65 % de leurs montants dans les bases des impôts acquittés par elle. En l'absence de convention existant, à cette époque, entre la France et la Thaïlande, l'administration a réintégré le surplus dans le bénéfice imposable en le considérant comme ayant été réalisé dans le cadred d'une activité industrielle exercée en France. Il résulte de l'instruction, en particulier des rapports des experts que, bien que la société française ait été secondée sur place par la société thaïlandaise et qu'elle qu'ait été l'imposition éventuelle de la société française en Thaïlande, doit être regardé comme constituant une activité exercée à l'étranger par elle l'ensemble des opérations effectivement réalisées dans le pays d'implantation de la raffinerie telles que la passation et le suivi des contrats entre la société thaïlandaise et des sociétés locales, la mise en place de l'infrastructure de chantier, les études d'ingénierie complémentaires exigées sur le site par des modifications au contrat initial et ne s'intégrant pas aux études préliminaires de conception, les modifications des installations en résultant ou décidées à la suite de défaillances du matériel, la direction, la supervision et le contrôle du déroulement des opérations de construction, les opérations de mise en service, les essais de performance et le maintien sur place d'une équipe réduite pendant la période de garantie ainsi que, d'une part, l'étude et les négociations du financement de l'ensemble du marché, d'autre part, les opérations relatives à l'exportation des matériels nécessaires. Si le ministre allègue que tant la méthode suivie par la société pour déterminer la part de bénéfices applicable aux opérations réalisées à l'étranger que celle proposée par les experts induisent une marge bénéficiaire uniforme sur l'ensemble des opérations du marché, il ressort du rapport d'expertise que les experts ont procédé à la répartition des coûts du marché par nature de dépenses pour déterminer en fonction de leur lieu de rattachement les dépenses affectables aux études réalisées en France et celles engagées pour la réalisation des installations sur le site, avant de rapporter les bénéfices réalisés proportionnellement à chaque nature de dépense.


Références :

CGI 209 1

1.

Cf. Section, 1978-06-23, p. 272


Publications
Proposition de citation : CE, 17 mai. 1989, n° 34380
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Dulong
Rapporteur public ?: Mme Liébert-Champagne

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:34380.19890517
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