La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/05/1989 | FRANCE | N°64629

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 24 mai 1989, 64629


Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Benjamin X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 9 octobre 1984 par lequel le tribunal administratif d' Amiens a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1975 dans les rôles de la commune de Saint-Quentin ;
2°) lui accorde la décharge de l'imposition contestée ;

Vu les autres pièces du dossier

;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et ...

Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Benjamin X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 9 octobre 1984 par lequel le tribunal administratif d' Amiens a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1975 dans les rôles de la commune de Saint-Quentin ;
2°) lui accorde la décharge de l'imposition contestée ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Girault, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Lesourd, Baudin, avocat de M. Jean-Benjamin X...,
- les conclusions de M. Y.... Martin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X..., qui exploite une officine de pharmacie dont les résultats sont imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux suivant le régime du bénéfice réel, a étalé la charge représentée par ses frais de premier établissement de 63 149,70 F, exposés en juillet 1972, sur les trois exercices clos les 30 juin 1973, 1974 et 1975 à raison de 3 149,70 F pour le premier, 15 000 F pour le second et le solde de 45 000 F pour le troisième ; qu'elle a en conséquence inscrit lesdits frais à ses immobilisations pour leur valeur résiduelle à la fin de chaque exercice, soit 45 000 F au 30 juin 1974 et une valeur nulle au 30 juin 1975 ; qu'à la suite d'une vérification de la comptabilité de l'officine ayant porté notamment sur l'exercice 1975, premier exercice non couvert par la prescription, l'administration, estimant que l'exploitante n'aurait été en droit de déduire des résultats de chacun des trois exercices que le tiers des frais d'établissement de 63 149,70 F, soit 21 050 F, a réintégré dans le bénéfice imposable de l'exercice 1975 la somme de 23 950 F, différence entre les sommes de 45 000 F et 21 050 F ci-dessus ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : "1 - ... le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises ... 2 - Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt ... L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés" ; qu'ax termes du 1 de l'article 39 du même code : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : 1°) Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre ..." ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées que les frais de premier établissement, qui n'ont pas pour contrepartie l'acquisition d'un élément d'actif, ne peuvent bénéficier des dispositions relatives aux amortissements, mais constituent une charge déductible des seuls résultats de l'exercice au cours duquel ils ont été exposés ou de ceux des exercices suivants ; que l'imputation de cette charge, qui peut être opérée, comme en l'espèce, par une inscription au compte d'immobilisations dont sont déduites les parts affectées à chacun des exercices sur lesquels elle est étalée, doit être effectuée le plus tôt possible et être terminée dans un délai qui, ainsi que le prévoit le plan comptable général, ne saurait excéder cinq années ; que, dès lors, Mme X... était en droit, ainsi que le reconnaît l'administration, d'étaler ses frais d'établissement sur trois exercices ; qu'il suit de là que Mme X... a à bon droit inscrit ses frais d'établissement aux immobilisations du bilan de clôture du troisième exercice 1975 pour une valeur nulle ;
Considérant, en second lieu, que, d'une part, dans l'hypothèse où les bénéfices imposables d'un exercice ont été déterminés en application des dispositions précitées de l'article 38 du code général des impôts et où leur montant a servi de base à une imposition qui est devenue définitive en raison de l'expiration du délai de répétition ouvert à l'administration par l'article 1966 du même code, applicable en l'espèce, la valeur de l'actif net ressortant du bilan de clôture de cet exercice, telle qu'elle a été retenue pour l'assiette de l'impôt, doit elle-même être regardée comme définitive, et, par suite, si ce bilan comporte des erreurs qui ont entraîné une sous-estimation ou une surestimation de l'actif net de l'entreprise, ces erreurs ne peuvent plus être réparées dans ce bilan ; que, d'autre part, la valeur de l'actif net à l'ouverture d'un exercice n'est autre que la valeur de l'actif net à la clôture de l'exercice précédent, de sorte que, si l'entreprise entend établir un bilan d'ouverture qui diffère du bilan de clôture de l'exercice précédent, elle ne peut le faire que par des opérations ou écritures qui doivent être réputées faites au titre du nouvel exercice ; qu'ainsi, dans l'hypothèse susmentionnée et durant toute la période qui suit la clôture du dernier exercice prescrit, les erreurs qui entachent un bilan et qui entraînent une sous-estimation ou une surestimation de l'actif net de l'entreprise peuvent, à l'initiative du contribuable ou à celle de l'administration à la suite d'une vérification de comptabilité, être corrigées dans les bilans de clôture des exercices non couverts par la prescription et, par suite, dans les bilans d'ouverture de ces exercices à l'exception du premier ;

Considérant, dès lors, qu'en admettant, ainsi que le soutient l'administration, que Mme X... n'aurait été en droit d'étaler ses frais d'établissement qu'au moyen d'une dotation constante de 21 050 F à chaque exercice, en sorte que la valeur résiduelle de 45 000 F inscrite en immobilisations au bilan de clôture de l'exercice prescrit 1974, lequel ne saurait différer du bilan d'ouverture de l'exercice 1975, premier exercice non prescrit, dût être estimée excessive, la prétention de l'administration de réduire de 23 950 F le montant de cette inscription se heurte à l'intangibilité de ce dernier bilan ;
Considérant, par suite, que la valeur de l'immobilisation représentée par l'inscription des frais d'établissement de Mme
X...
ayant ainsi diminué, au cours de l'exercice 1975, de 45 000 F, l'exploitante était en droit, en tout état de cause, de déduire ladite somme de son bénéfice de cet exercice ; que le redressement de 23 950 F contesté n'est, en conséquence, pas justifié ; que, dans ces conditions, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a, par le jugement susvisé, rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1975 à raison du redressement dont s'agit ;
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif d'Amiens, en date du 9 octobre 1984, est annulé.
Article 2 : Il est accordé à M. X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle et des pénalités correspondantes auxquellesil a été assujetti au titre de l'année 1975.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 64629
Date de la décision : 24/05/1989
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 38, 39, 1966


Publications
Proposition de citation : CE, 24 mai. 1989, n° 64629
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Girault
Rapporteur public ?: Ph. Martin

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:64629.19890524
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award