La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/1989 | FRANCE | N°86546

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 30 juin 1989, 86546


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE LA PRIVATISATION enregistré le 10 avril 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 janvier 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite du premier président de la Cour des comptes refusant à M. Jean-François X... communication du rapport établi par la Cour pour 1981 sur la gestion du centre national d'exposition et concours agricoles (CENECA) ;
2°) rejette la demande présentée par M. Jean-François

X... devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pi...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE LA PRIVATISATION enregistré le 10 avril 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 janvier 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite du premier président de la Cour des comptes refusant à M. Jean-François X... communication du rapport établi par la Cour pour 1981 sur la gestion du centre national d'exposition et concours agricoles (CENECA) ;
2°) rejette la demande présentée par M. Jean-François X... devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 67-483 du 22 juin 1967 modifiée par la loi n° 72-1147 du 23 décembre 1972, n° 76-539 du 27 juin 1976 et n° 82-594 du 10 juillet 1982 ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, modifiée par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Damien, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978, que sont des documents administratifs, au sens de cette loi, notamment "tous dossiers, rapports, études, comptes-rendus, procès-verbaux, statistiques" ..."revêtant la forme d'écrits" et qu'aux termes de l'article 2 de la même loi, "sous réserve des dispositions de l'article 6, les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande, qu'ils émanent des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent ils de droit privé, chargés de la gestion d'un service public" ; que le rapport sur la gestion du centre national d'exposition et concours agricoles (CENECA), société d'économie mixte à participations publiques majoritaires, établi en 1981 par la Cour des comptes dans l'exercice des pouvoirs de contrôle qui lui sont conférés par l'article 6 bis de la loi du 22 juin 1967 et dont M. Jean-François X... s'est vu refuser la communication, constitue un document administratif au sens des dispositions rappelées ci-dessus ;
Considérant que ce rapport a été établi dans les conditions définies à l'article 12 alinéa 2 de la loi du 22 juin 1967 qui prévoit qu'à la suite du contrôle d'une des entreprises visées à l'article 6 bis "la cour des comptes adresse aux ministres intéressés un rapport particulier dans lequel elle expose ses observations sur les comptes, l'activité, la gestion et les résultats de l'entreprise. Elle y exprime notamment son avis sur la qualité de la gestionde celle-ci ainsi que sur la régularité et la sincérité des comptes et propose, le cas échéant, les redressements qu'elle estime devoir leur être apportés" ; qu'à la date à laquelle M. Jean-François X... s'est vu refuser la communication du rapport concernant la gestion du CENECA, aucune disposition de la loi du 22 juin 1967 ni aucun autre texte législatif n'interdisaient, par exception aux dispositions de la loi du 17 juillet 1978, la communication des rapports particuliers de la Cour des Comptes aux personnes en faisant la demande ; que la circonstance qu'en application de l'article II de la loi du 22 juin 1967, la Cour des Comptes établisse un rapport annuel, publié au Journal Officiel concernant les services et organismes soumis à son contrôle, auquel sont jointes les réponses des ministres et des représentants des collectivités territoriales, des établissements, sociétés, groupements et organismes intéressés et que, dans ce rapport soient insérés des éléments de certains rapports particuliers, ne saurait être regardée comme faisant obstacle par elle-même à ce que ces rapports particuliers puissent être communiqués, suivant les modalités et sous les réserves prévues par la loi du 17 juillet 1978 ;

Considérant, il est vrai, que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE LA PRIVATISATION soutient que la communication de rapports particuliers se heurterait aux dispositions de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 aux termes duquel "les administrations mentionnées à l'article 2 peuvent refuser de laisser consulter ou de communiquer un document administratif dont la consultation ou la communication porterait atteinte au secret des délibérations du Gouvernement ou des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif, ... au déroulement des procédures engagées devant la juridiction ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente" et qu'en outre, le ministre soutient qu'au cas d'espèce, le rapport contient des informations nominatives concernant tant le personnel du centre que le responsable des services de tutelle ;
Considérant qu'il appartient au juge administratif de requérir des administrations compétentes, la production de tous les documents nécessaires à la solution des litiges qui lui sont soumis, à la seule exception de ceux qui sont couverts par un secret garanti par la loi ; que si le caractère contradictoire de la procédure exige la communication à chacune des parties de toutes les pièces produites en cours de l'instance, cette exigence est nécessairement exclue en ce qui concerne les documents dont le refus de communication constitue l'objet même du litige ;
Considérant que l'état de l'instruction ne permettant pas d'apprécier le bien-fondé du moyen ci-dessus énoncé, que le ministre est recevable à présenter pour la première fois devant le Conseil d'Etat, alors même qu'il n'aurait pas été soulevé devant la commission d'accès aux documents administratifs, il y a lieu d'ordonner, avant-dire-droit, tous droits et moyens des parties demeurant réservés à l'exception de ceux sur lesquels il est statué par la présente décision, la production du rapport dont s'agit à la sous-section de la section du contentieux chargée de l'instruction de l'affaire, sans que communication de ce rapport soit donnée à M. X..., pour être ensuite statué ce qu'il appartiendra sur les conclusions du recours du ministre ;
Article 1er : Est ordonnée, avant-dire-droit, la production par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET, à la cinquième sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat, dans les conditions précisées dans les motifs de la présente décision, du rapport établi en 1981 par la Cour des Comptes sur la gestion du centre national d'exposition et concours agricoles (CENECA). Cette production devra intervenir dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, à M. Jean-François X... et au premier président de la Cour des Comptes.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 86546
Date de la décision : 30/06/1989
Sens de l'arrêt : Avant-dire-droit production ordonnée
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS AU TITRE DE LA LOI DU 17 JUILLET 1978 - DROIT A LA COMMUNICATION - NOTION DE DOCUMENT ADMINISTRATIF - Existence - Documents administratifs émanant de personnes publiques - Rapport de la Cour des Comptes relatif à la gestion d'une société d'économie mixte à participations publiques majoritaires.

26-06-01-02-01, 26-06-01-02-02 A la date à laquelle M. Jean-François D. s'est vu refuser la communication du rapport concernant la gestion du centre national d'exposition et concours agricoles (CENECA), société d'économie mixte à participations publiques majoritaires, établi en 1981 par la Cour des comptes dans l'exercice des pouvoirs de contrôle qui lui sont conférés par l'article 6 bis de la loi du 22 juin 1967, aucune disposition de la loi du 22 juin 1967 ni aucun autre texte législatif n'interdisaient, par exception aux dispositions de la loi du 17 juillet 1978, la communication des rapports particuliers de la Cour des comptes aux personnes en faisant la demande.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS AU TITRE DE LA LOI DU 17 JUILLET 1978 - DROIT A LA COMMUNICATION - DOCUMENTS ADMINISTRATIFS COMMUNICABLES - Absence d'obstacles liés aux risque d'atteinte à divers intérêts publics ou privés - Autres secrets protégés par la loi - Absence de secret protégé par la loi - Rapports particuliers de la Cour des Comptes - Situation antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 5 janvier 1988.


Références :

. Loi 67-483 du 22 juin 1967 art. 6 bis
Décision implicite Premier président Cour des comptes décision attaquée
Loi 78-753 du 17 juillet 1978 art. 1, art. 2, art. 6


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 1989, n° 86546
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. Damien
Rapporteur public ?: M. Fornacciari

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:86546.19890630
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award