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31/01/1990 | FRANCE | N°109512

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 31 janvier 1990, 109512


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 1er août 1989, présentée par M. Roland Y..., demeurant Route du Touring Hôtel, Trois-Bassins à La Réunion ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 28 juin 1989, par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa protestation contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 19 mars 1989 dans la commune de Trois-Bassins ;
2°) annule ces opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;r> Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 1er août 1989, présentée par M. Roland Y..., demeurant Route du Touring Hôtel, Trois-Bassins à La Réunion ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 28 juin 1989, par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa protestation contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 19 mars 1989 dans la commune de Trois-Bassins ;
2°) annule ces opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Liébert-Champagne, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article R.144 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans le cas où l'enquête a lieu à l'audience publique, le secrétaire-greffier dresse procès-verbal de l'audition des témoins. Ce procès-verbal est visé par le président et annexé à la minute du jugement" ;
Considérant que, par jugement du 31 mai 1989, le tribunal administratif de Saint-Denis-de-la-Réunion a ordonné une enquête à la barre pour établir l'authenticité d'attestations de corruption d'électeurs produites par M. Y... à l'appui de la protestation qu'il avait formée contre les opérations électorales auxquelles il a été procédé le 19 mars 1989 à Trois Bassins (Réunion), pour la désignation des membres du conseil municipal ; que l'enquête ainsi ordonnée a eu lieu lors de l'audience du tribunal du 14 juin 1989 ; que les procès-verbaux des auditions individuelles des témoins n'ont pas été visés par le président du tribunal, ni annexés à la minute du jugement prononcé le 28 juin 1989 ; qu'ayant été rendu à la suite d'une procédure d'enquête irrégulière, ce jugement doit, être annulé ;
Considérant que le délai imparti au tribunal administratif par l'article R.120 du code électoral pour statuer sur la protestation de M. Y... est expiré ; que, dès lors, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de statuer sur cette protestation ;
Sur le grief tiré d'actes de pressions sur les électeurs :
Considérant, d'une part, qu'il n'est pas établi que des électeurs aient fait l'objet de la part de propriétaires de terres dont ils sont fermiers, de pressions en vue de les inciter à voter en faveur de la liste conduite par M. X..., maire sortant ;

Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. X... ait fait procéder, dans les jours précédant le scrutin, à des distributions de vivres et de "bons" pour des matériaux de construction à des électeurs en vue de capter leurs suffrages ;
Considérant, enfin, que les attestations écrites et confirmées sous serment qui figurent au dossier et selon lesquelles des dons en argent auraient été faits à des électeurs par des partisans du maire sortant ne sont qu'au nombre de 10 et sont démentis, sous serment, par les personnes qu'elles accusent ; qu'à supposer même établie la réalité des actes de corruption invoqués, ceux-ci, eu égard à l'écart de 161 voix séparant les deux listes en présence, n'ont pas été de nature à altérer les résultats du scrutin ;
Sur les griefs relatifs à la propagande électorale :
Considérant que les allégations de M. Y... selon lesquelles la station de radio qu'il utilisait pour les besoins de sa campagne électorale a été saccagée, quelques jours avant le scrutin, par des partisans de la liste de son concurrent, qui l'auraient lui-même agressé à cette occasion, ne peuvent être tenues pour établies ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que l'usage par le maire sortant d'une radio locale aurait outrepassé les limites tolérables de la discussion électorale ;
Sur les griefs tirés d'actes commis la veille et le jour du scrutin :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que, la veille et le jour du scrutin, des partisans de M. X... auraient procédé à des "distributions massives" de bulletins de votes, ni que M. X... aurait abusivement utilisé le car municipal pour transporter des électeurs le jour du vote en les incitant à voter en sa faveur ou aurait fait procéder au "racolage" d'électeurs par des voitures particulières ; qu'il n'est pas non plus établi que les présidents des bureaux de vote, en faisant ramasser au milieu de la journée du 19 mars 1989 des bulletins de vote, non utilisés, dans les isoloirs, aient entendu se livrer à une manoeuvre au détriment des membres de la liste conduite par M. Y... ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la protestation de M. Y... ne peut être accueillie ;
Article 1er : Le jugement du 28 juin 1989 du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion est annulé.
Article 2 : La protestation présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à M. X... et au ministre des départements et territoires d'outre-mer.


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 109512
Date de la décision : 31/01/1990
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-02-01 PROCEDURE - INSTRUCTION - MOYENS D'INVESTIGATION - ENQUETES -Irrégularité d'une procédure d'enquête à la barre - Moyen d'ordre public.

54-04-02-01 Le tribunal administratif a ordonné une enquête à la barre. Les procès-verbaux des auditions individuelles des témoins n'ont pas été visés par le président du tribunal, ni annexés à la minute du jugement contrairement aux prescriptions de l'article R.144 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel. Ayant été rendu à la suite d'une procédure d'enquête irrégulière, ce jugement doit être annulé. Le juge d'appel soulève d'office cette irrégularité (sol. impl.).


Références :

Code des tribunaux administratifs R144
Code électoral R120


Publications
Proposition de citation : CE, 31 jan. 1990, n° 109512
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Dulong
Rapporteur public ?: Mme Liébert-Champagne

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:109512.19900131
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