Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 août 1988 et 12 septembre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le préfet du département de la Corse du Sud, et tendant à ce que le Conseil d'Etat réforme le jugement du 20 juillet 1988 par lequel le tribunal administratif de Bastia s'est déclaré incompétent pour statuer sur sa requête tendant à procéder à la radiation de M. X... de la liste électorale de la commune de Bonifacio et a rejeté les conclusions tendant à ce que le tribunal administratif renvoie la question de compétence au tribunal des conflits ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le décret du 25 juillet 1960 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Richer, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Frydman, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 déterminant les formes de procéder du tribunal des conflits, abrogé et remplacé par l'article 6 du décret du 25 juillet 1960 portant réforme de la procédure des conflits d'attribution : "Lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif a, par une décision qui n'est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l'ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l'autre ordre, saisie du même litige, si elle estime que ledit litige ressortit à l'ordre de juridictions primitivement saisi, doit, par un jugement motivé qui n'est susceptible d'aucun recours même en cassation, renvoyer au tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu'à la décision de ce tribunal" ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision prise par le deuxième bureau de vote de Bonifacio d'inscrire M. X... sur la liste d'émargement lors du deuxième tour de l'élection du président de la République du 8 mai 1988 :
Considérant que le tribunal d'instance de Sartene, par un jugement en date du 4 juin 1988, puis le tribunal administratif de Bastia, par un jugement en date du 20 juillet 1988, saisis successivement par le Préfet de la Corse du Sud des conclusions susanalysées, se sont déclarés incompétents pour en connaître ; que le tribunal administratif de Bastia a rejeté, en outre, les conclusions qui lui étaient présentées tendant à ce que l'affaire fût renvoyée au tribunal des conflits en application des dispositions précitées de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient le préfet de la Corse du Sud, la décision prise par le deuxième bureau de vote de Bonifacio d'ajouter, lors du scrutin pour le deuxième tour de l'élection du président de la République, un électeur qui n'y figurait pas sur la liste d'émargement, ne saurait avoir eu pour effet de modifier la liste électorale arrêtée par la commission administrative compétente ; que la décision en cause n'était susceptible éventuellement que de constituer une irrégularité du scrutin qui pouvait être invoquée devant le juge de l'élection, c'est à dire devant le Conseil Constitutionnel ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Bastia s'est déclaré incompétent pour en connaître tout en estimant que le litige ne ressortissait pas non plus à la juridiction judiciaire et qu'il n'y avait par suite pas lieu à renvoyer l'affaire devant le tribunal des conflits ; que les conclusions susanalysées doivent par suite être rejetées ;
Sur les conclusions subsidiaires tendant à la radiation de M. X... de la liste électorale :
Considérant que c'est à bon droit que le tribunal administratif de Bastia s'est déclaré incompétent pour connaître de telles conclusions qui ressortissent à la juridiction judiciaire ; que, le tribunal d'instance de Sartene ne s'étant pas prononcé à leur sujet dans son jugement du 4 juin 1988, c'est également à bon droit que le tribunal administratif de Bastia a estimé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer leur examen au tribunal des conflits ; que ces conclusions subsidiaires doivent également être rejetées ;
Article 1er : La requête du Préfet de la Corse du Sud est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au Préfet de la Corse du Sud et ministre de l'intérieur.