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11/03/1991 | FRANCE | N°92396

France | France, Conseil d'État, 11 mars 1991, 92396


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 novembre 1987 et 3 mars 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Roland X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 20 février 1987 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant : 1) la première à l'annulation des arrêtés du président du conseil de Paris en date des 29 août, 24 décembre 1985 et 16 janvier 1986 prononçant sa suspension, sa rétrogradation, sa mutation provisoire du centre de for

mation professionnelle de Villepreux à celui de Montévrain et sa mise...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 novembre 1987 et 3 mars 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Roland X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 20 février 1987 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant : 1) la première à l'annulation des arrêtés du président du conseil de Paris en date des 29 août, 24 décembre 1985 et 16 janvier 1986 prononçant sa suspension, sa rétrogradation, sa mutation provisoire du centre de formation professionnelle de Villepreux à celui de Montévrain et sa mise en congé sans traitement, de l'avis du conseil de discipline du 29 novembre 1985 et du refus de prendre en compte son congé de maladie du 13 au 27 janvier 1986 ; 2) la seconde tendant à l'annulation de l'arrêté du président du conseil de Paris en date du 27 mars 1986 portant confirmation de sa mutation d'office au centre de formation professionnelle d' Alembert à Montévrain ; 3) la troisième tendant à l'annulation de l'arrêté du président du conseil de Paris en date du 18 avril 1986 le radiant des cadres pour abandon de poste à compter du 13 janvier 1986 ; 4) la quatrième enfin tendant à ce que soit ordonné le sursis à l'exécution les arrêtés du 16 janvier 1986 et du 18 avril 1986 ;
2°) lui accorde le bénéfice de ses conclusions de première instance avec toutes conséquences de droit ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 88-828 du 20 juillet 1988 portant amnistie ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de la santé publique - Livre IX ;
Vu la loi du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;Après avoir entendu :
- le rapport de M. Labarre, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Vuitton, avocat de M. Roland X... et de Me Foussard, avocat de la ville de Paris,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général du 29 août 1985 suspendant M. X... de ses fonctions :
Considérant qu'à la date de la décision attaquée, M. X..., éducateur chef au centre de formation professionnelle de Villepreux, établissement relevant des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance, était un fonctionnaire qui relevait du livre IX du code de la santé publique ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que les dispositions de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, et notamment son article 30, ne lui étaient pas applicables, dès lors que l'article 2 de ladite loi prévoit expressément que son champ d'application s'étend aux fonctionnaires civils des établissements mentionnés à l'article L. 792 du code de la santé publique au nombre desquels figurent les centres de formation professionnelle ;
Considérant qu'aux termes de l'article 30 de la loi susrappelée du 13 juillet 1983 : "En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline ..." ;
Considérant, d'une part, que la mesure suspendant un fonctionnaire de ses fonctions est une mesure conservatoire prise dans l'intérêt du service et non une sanction disciplinaire ; qu'elle n'est donc pas au nombre des décisions qui doivent être motivées par application des dispositions du premier alinéa de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que le moyen tiré de ce que cette décision aurait dû être motivée doit être rejeté ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que les fautes professionnelles reprochées à M. X... ont pu paraître d'une gravité suffisante à l'administration pour que soit légalement prononcée la suspension de l'intéressé ; que les conclusions ci-dessus analysées ne peuvent donc être accueillies ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 24 décembre 1985 par lequel le président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général a rétrogradé M. X... du grade d'éducateur chef à celui d'éducateur spécialisé :
Sur la légalité externe de la mesure attaquée :
Considérant, en premier lieu, que le délai d'un mois imparti, en application de l'article L. 837 du code de la santé publique, au conseil de discipline pour rendre son avis, n'est pas prévu à peine de nullité ; que le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que, le conseil de discipline ayant rendu son avis plus d'un mois après sa saisine, la procédure aurait été irrégulière ;
Considérant, en second lieu, qu'il n'est pas établi que les éléments du dossier aient été dénaturés et que le conseil de discipline ait donné son avis à partir notamment d'éléments d'appréciation sur sa manière de servir au cours de l'année 1985 qui reposeraient sur des faits matériellement inexacts ;
Considérant, enfin, que la circonstance que le conseil de discipline se soit prononcé sur le cas de M. X... après avoir relevé que la dégradation du centre de Villepreux était également imputable à son directeur n'entache pas son avis d'irrégularité ;
Sur la légalité interne :

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article 15 du décret du 14 septembre 1972 portant modification du décret du 3 octobre 1962 modifié relatif au recrutement et à l'avancement du personnel des établissements relevant des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance, qu'eu égard aux conditions dans lesquelles les éducateurs spécialisés ayant atteint le troisième échelon de leur grade et inscrits sur une liste d'aptitude après avoir subi avec succès les épreuves d'un examen professionnel, ont accès au grade d'éducateur chef, la nomination des intéressés à ce grade ne peut être regardée comme comportant pour eux un changement de corps ; que, par suite, la rétrogradation du second au premier grade ne saurait être regardée comme ayant pour résultat l'éviction d'un corps et peut donc être légalement prononcée ;
Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité investie du pouvoir disciplinaire se soit fondée pour infliger la sanction de rétrogradation sur des faits matériellement inexacts ou une appréciation manifestement erronée des fautes reprochées à l'intéressé ; que, par suite, les conclusions ci-dessus analysées doivent être rejetées ;
Sur les conclusions dirigées, d'une part, contre l'arrêté du 24 décembre 1985 mutant d'office M. X... au centre de formation professionnelle d'Alembert à Montévrain et, d'autre part, contre l'arrêté du 27 mars 1986 confirmant cette mutation :
Considérant qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier que l'arrêté du 24 décembre 1985 par lequel le président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général a prononcé la mutation d'office de M. X... au centre de formation professionnelle d'Alembert à Montévrain a été pris dans l'intérêt du service à la suite des difficultés qu'avait connues le centre de Villepreux ; que cette mesure ne présente pas le caractère de sanction disciplinaire et constitue une simple mutation dans l'intérêt du service ; qu'aucune disposition n'obligeait l'administration à consulter préalablement la commission administrative paritaire ; que si, par suite, l'administration a recueilli l'avis de cet organisme, ce qu'elle a fait dans des conditions régulières et sans pour autant s'estimer liée par cet avis, la décision qui est intervenue le 27 mars 1986 ne saurait être regardée, en tout état de cause, que comme une décision confirmative de celle qui a été régulièrement prise le 24 décembre 1985 ; que les conclusions susanalysées ne peuvent donc qu'être rejetées ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 16 janvier 1986 par laquelle le président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général a placé M. X... en position de congé sans traitement :

Considérant qu'en vertu de l'article L. 859 du code de la santé publique, les agents des établissements mentionnés à l'article L. 792 du même code qui s'absentent ou qui prolongent leur absence sans autorisation "sont immédiatement placés dans la position de congé sans traitement, à moins de justification présentée dans les 48 heures et reconnue valable par l'administration" ; que la décision plaçant un agent dans cette position ne présente pas le caractère d'une radiation des cadres et peut légalement intervenir sans mise en demeure préalable ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de sa mutation au centre de formation professionnelle d'Alembert, à Montévrain, M. X..., malgré une mise en demeure de rejoindre sa nouvelle affectation, a refusé d'y déférer et n'a présenté aucune justification dans le temps imparti par la disposition ci-dessus rappelée ; qu'en plaçant le requérant dans la position de congé sans traitement, l'autorité compétente a fait une exacte application de l'article L. 859 du code de la santé publique ; que c'est dès lors, à bon droit que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté les conclusions ci-dessus analysées ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 20 janvier 1986 par laquelle l'autorité administrative compétente a refusé à M. X... de le placer en congé de maladie :
Considérant, d'une part, qu'en ne faisant parvenir au directeur du centre de formation professionnelle d'Alembert un avis d'arrêt de travail qu'à la date du 14 janvier 1986, M. X... n'a pas respecté le délai de 48 heures qui lui était imparti par l'article L. 859 précité du code de la santé publique, pour justifier son absence, et qu'il n'était donc plus, à cette date, en situation d'activité ;

Considérant, d'autre part, que les fonctionnaires placés dans la position de congé sans traitement ne peuvent bénéficier d'un congé de maladie ; que, dès lors, la décision du 20 janvier 1986 n'est pas entachée d'illégalité ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 18 avril 1986 par lequel le président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général a radié des cadres M. X... :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a refusé de déférer aux mises en demeure qui lui ont été adressées de rejoindre sa nouvelle affectation au centre de formation professionnelle d'Alembert ; que son comportement doit être regardé comme ayant eu le caractère d'un abandon de poste de nature à rompre le lien qui l'unissait au service ; que le seul moyen qu'il invoque et qui tiendrait aux irrégularités dont étaient entachées les précédentes décisions prises à son encontre est inopérant ; qu'il ne peut donc soutenir que la décision qui a prononcé sa radiation des cadres est illégale et à en demander l'annulation ;
Considérant que tout ce qui précède, il résulte que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes ;
Article 1er : La requête de M. Roland X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Roland X..., au maire de Paris, président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général et au ministre des affaires sociales et de la solidarité.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 92396
Date de la décision : 11/03/1991
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME - QUESTIONS GENERALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - ABSENCE.

DEPARTEMENT - AGENTS DEPARTEMENTAUX - DISCIPLINE.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - POSITIONS - AFFECTATION ET MUTATION - MUTATION.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISCIPLINE - CARACTERE DISCIPLINAIRE D'UNE MESURE - MESURE NE PRESENTANT PAS CE CARACTERE.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CESSATION DE FONCTIONS - ABANDON DE POSTE.


Références :

Code de la santé publique L792, L837, L859
Décret 62-1198 du 03 octobre 1962
Décret 72-903 du 14 septembre 1972 art. 15
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1 al. 1
Loi 83-634 du 13 juillet 1983 art. 30, art. 2


Publications
Proposition de citation : CE, 11 mar. 1991, n° 92396
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Labarre
Rapporteur public ?: Pochard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:92396.19910311
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