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17/04/1991 | FRANCE | N°57267

France | France, Conseil d'État, 17 avril 1991, 57267


Vu 1°) sous le n° 57 267, le recours sommaire et le mémoire complémentaire du MINISTRE DES TRANSPORTS enregistrés le 23 février 1984 et le 22 juin 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat réforme un jugement du tribunal administratif de Poitiers, en date du 21 décembre 1983, en tant que ce jugement a déclaré l'Etat responsable pour moitié des conséquences dommageables de l'accident de la circulation survenu le 20 mai 1977 dont M. Régis X..., son épouse née Denise Bertin et leur fils Frédéric X... ont été victimes ;


Vu 2°) sous le n° 85 419, le recours du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU ...

Vu 1°) sous le n° 57 267, le recours sommaire et le mémoire complémentaire du MINISTRE DES TRANSPORTS enregistrés le 23 février 1984 et le 22 juin 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat réforme un jugement du tribunal administratif de Poitiers, en date du 21 décembre 1983, en tant que ce jugement a déclaré l'Etat responsable pour moitié des conséquences dommageables de l'accident de la circulation survenu le 20 mai 1977 dont M. Régis X..., son épouse née Denise Bertin et leur fils Frédéric X... ont été victimes ;

Vu 2°) sous le n° 85 419, le recours du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU LOGEMENT, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DES TRANSPORTS, enregistré le 27 février 1987 au secrétariat du Contentieux du conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat annule le jugement du 7 janvier 1987 du tribunal administratif de Poitiers, qui a condamné l'Etat à verser des indemnités aux victimes de l'accident de la circulation survenu le 20 mai 1977 sur la RN 151 et à titre subsidiaire que soient réduites les indemnités accordées ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Sanson, Maître des requêtes,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de Mme Régis X... et de M. Frédéric X... et de Me Garaud, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne,
- les conclusions de M. de Froment, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les recours du MINISTRE DES TRANSPORTS et du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU LOGEMENT, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DES TRANSPORTS sont relatifs aux conséquences d'un même accident ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant que le 20 mai 1977, M. Régis X... qui conduisait son véhicule automobile sur la route nationale 151, venant de Poitiers dans la direction de Saint-Savin (Vienne), a perdu, en pénétrant dans une nappe d'eau, le contrôle de son véhicule qui s'est écrasé contre un arbre situé sur le côté gauche de la route et est décédé des suites de cet accident ; que son épouse et leur fils Frédéric ont été blessés ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que de fortes pluies avaient entrainé, le 20 mai 1977, la constitution de nappes d'eau sur la chaussée de la route nationale n° 151 entre Poitiers et Saint-Savin ; que deux heures environ avant l'accident dontdevait être victime M. Régis X..., le service des ponts et chaussées avait, à la suite d'un premier accident, apposé des panneaux situés à 150 mètres de part et d'autre de l'obstacle, pour signaler le danger résultant de la présence d'une nappe d'eau d'une longueur de 40 mètres environ et d'une profondeur de 10 à 15 centimètres ; qu'il résulte des termes mêmes du procès-verbal de gendarmerie, qu'au moment où les gendarmes sont arrivés sur les lieux de l'accident, le panneau qui signalait l'obstacle dans le sens où roulait le véhicule de M. Régis X... était renversé et que postérieurement à l'accident, un conducteur principal des travaux publics et de l'équipement a fixé les panneaux au sol ; qu'ainsi le ministre n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de l'ouvrage public ; que, par suite, la responsabilité de l'Etat est engagée ;

Considérant toutefois qu'il résulte également de l'instruction et notamment du procès-verbal de gendarmerie que M. X..., qui ne pouvait ignorer les mauvaises conditions atmosphériques à la suite des pluies survenues le matin du 20 mai 1977, circulait à une vitesse excessive ; que cette imprudence est constitutive d'une faute de nature à exonérer l'Etat d'une partie de sa responsabilité ; que le tribunal administratif de Poitiers a fait une juste appréciation des circonstances en partageant par moitié entre l'Etat et le conducteur la responsabilité des conséquences dommageables de l'accident ; que, dès lors, ni le ministre, ni Mme X..., ni M. Frédéric X..., ne sont fondés à demander la réformation de ce jugement ;
Sur le préjudice :
Considérant que le ministre soutient que le tribunal administratif a fait une évaluation excessive du préjudice résultant des troubles dans leurs conditions d'existence et de la douleur physique éprouvés tant par Mme X... que par son fils Frédéric ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport des experts commis par le tribunal administratif de Poitiers que Mme X..., âgée de 47 ans au moment de l'accident, a été gravement blessée ; qu'elle a subi un traumatisme crânien important, des blessures et des fractures multiples ; qu'elle conserve un état dépressif et souffre de douleurs persistantes ; qu'elle est gênée pour marcher ; que la station debout lui est pénible ; que ces circonstances ne lui ont pas permis de reprendre les activités professionnelles qu'elle exerçait, en qualité de technicienne à l'université de Poitiers ; que les souffrances physiques qu'elle a endurées ont été qualifiées d'importantes par les experts ; que, dès lors, le tribunal administratif, en fonction du taux d'incapacité permanente partielle de 60 % dont elle est atteinte, n'a pas fait une estimation exagérée du préjudice en en fixant le montant à 450 000 F pour les troubles dans les conditions d'existence, dont 300 000 F au titre des troubles physiologiques, et à 30 000 F pour les souffrances physiques ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte également de l'instruction et notamment du rapport des experts que le jeune Frédéric X..., âgé de 11 ans et demi au moment de l'accident, a subi des traumatismes crânien et thoracique et des fractures multiples ; qu'il a fallu procéder à l'ablation d'un orteil ; qu'il conserve des séquelles du traumatisme crânien et demeure atteint d'un raccourcissement des membres inférieurs qui lui rend la marche difficile ; que les souffrances physiques qu'il a endurées sont qualifiées d'assez importantes par les experts ; que, dès lors, le tribunal administratif de Poitiers n'a pas, en fonction du taux d'incapacité permanente partielle de 20 % dont M. X... est atteint, fait une estimation exagérée du montant du préjudice en le fixant à 120 000 F pour l'ensemble des troubles ainsi apportés dans les conditions d'existence, dont 80 000 F au titre des troubles physiologiques et à 20 000 F pour les souffrances physiques ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à demander la réformation du jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 7 janvier 1987 ;
Article 1er : Les recours du MINISTRE DES TRANSPORTS et du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU LOGEMENT, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DES TRANSPORTS sont rejetés.
Article 2 : Les conclusions des recours incidents de Mme X... et de M. Frédéric X... sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., à M. Frédéric X... et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer.


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