Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU MORBIHAN ; le PREFET DU MORBIHAN demande au Président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 juin 1991 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté en date du 15 avril 1991 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Esme X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989 et la loi du 10 janvier 1990 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il est constant que Mlle X..., à qui la qualité de réfugié a été refusée sur une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée par la commission des recours des réfugiés et qui s'est maintenue en France pendant plus d'un mois après que lui ait été notifiée une décision de refus de séjour, se trouvait dans l'un des cas où, en application de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le PREFET peut décider de faire reconduire un étranger à la frontière ;
Considérant que la circonstance que des mineurs de 18 ans ne puissent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ne fait pas obstacle à ce que les parents d'enfants mineurs fassent l'objet d'une telle mesure ; que si Mlle X... soutient qu'elle ne peut revenir avec son enfant en Turquie où elle n'aurait plus aucune attache familiale, il ne résulte pas des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, et en l'absence de toute circonstance mettant l'intéressée dans l'impossibilité d'emmener son enfant avec elle, le PREFET DU MORBIHAN a commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de la mesure de reconduite sur la situation de Mlle X... ; que le PREFET est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur une telle erreur pour annuler l'arrêté attaqué ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au juge d'appel saisi par l'effet dévolutif d'examiner les autres moyens soulevés par la requérante ;
Considérant que si Mlle X... invoque les risques que comporterait pour elle son retour dans son pays d'origine, ce moyen qui n'est d'ailleurs assorti d'aucune justification, est inopérant à l'égard de l'arrêté attaqué qui ne précise pas le pays vers lequel Mlle X... doit être reconduite ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU MORBIHAN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté attaqué ;
Article 1er : Le jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rennes en date du 14 juin 1991 est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Rennes par Mlle X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU MORBIHAN, à Mlle X... et au ministre de l'intérieur.