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05/05/1993 | FRANCE | N°86666

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 05 mai 1993, 86666


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 13 avril 1987 et 13 août 1987, présentés pour la COMMUNE de MONTROUGE, (Hauts-de-Seine) ; la COMMUNE de MONTROUGE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement, en date du 5 janvier 1987, par lequel le tribunal administratif de Paris a déchargé la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) de la somme de 11 275,40 F, et a condamné la ville à lui rembourser cette somme, avec intérêts au taux légal ;
2°) rejette la deman

de présentée par la société pour la construction en accession et locatio...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 13 avril 1987 et 13 août 1987, présentés pour la COMMUNE de MONTROUGE, (Hauts-de-Seine) ; la COMMUNE de MONTROUGE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement, en date du 5 janvier 1987, par lequel le tribunal administratif de Paris a déchargé la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) de la somme de 11 275,40 F, et a condamné la ville à lui rembourser cette somme, avec intérêts au taux légal ;
2°) rejette la demande présentée par la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'édit royal du 16 décembre 1607 ;
Vu l'ordonnance n° 59-108 du 7 janvier 1959 ; la loi du 31 décembre 1973 ;
Vu le décret n° 64-262 du 14 mars 1964 ;
Vu le code des communes ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lerche, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de la COMMUNE de MONTROUGE et de la SCP Defrénois, Lévis, avocat de la S.A. société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.),
- les conclusions de M. du Marais, Commissaire du gouvernement ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que les droits de voirie réclamés par la COMMUNE de MONTROUGE à la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) se fondent sur les dispositions de l'article L.231-6 du code des communes, relatif aux recettes non fiscales de la section de fonctionnement du budget communal ; qu'il suit de là que ces droits ne sauraient être assimilés, comme le prétend l'appelante, à des contributions indirectes mais se rattachent à des actes et opérations de la puissance publique, relevant à ce titre de la compétence de la juridiction administrative ; que c'est, dès lors, à bon droit que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a reconnu la juridiction administrative compétente pour connaître de la demande de la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) tendant à obtenir le remboursement des sommes payées de ce chef à la COMMUNE de MONTROUGE ;
Sur la recevabilité de la demande de la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) :
Considérant que, sur la base d'un titre de recettes rendu exécutoire par le maire, la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) a reçu le 14 novembre 1985 un commandement émis par le trésorier principal de Montrouge ; que, contestant l'existence et la quotité de sa dette, la société a saisi de sa réclamation, le 18 décembre 1985, le trésorier-payeur général des Hauts-de-Seine ; que, s'agissant d'une réclamation qui concernait le recouvrement de créances non fiscales de la commune, il appartenait au trésorier-payeur général de transmettre cette réclamation au maire de Montrouge, seul compétent pour se prononcer ; qu'en tout état de cause, la demande adressée le 27 février 1986 au tribunal administratif par la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.), qui relevait de la procédure de plein contentieux, n'était pas entachée d'irrecevabilité pour tardiveté ;
Sur le bien-fondé de la créance invoquée par la COMMUNE de MONTROUGE :

Considérant qu'aux termes de l'article L.131-5 du code des communes "le maire peut, moyennant le paiement de droits fixés par un tarif dûment établi, donner des permis de stationnement ou de dépôt temporaire sur la voie publique ..." ; qu'aux termes de l'article L.231-6 précité du même code, "les recettes non fiscales de la section de fonctionnement peuvent comprendre : ... 9° Le produit des permis de stationnement et de location sur la voie publique ... 10° Le produit des droits de voirie et autres droits légalement établis" ;
Considérant que les droits contestés, s'élevant à 10 947,40 F, constituent des droits de voirie concernant des façades, baies et balcons de l'immeuble construit par la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.), rue Jules Guesde à Montrouge, en 1982-1983 ; que les façades et baies n'empiétent pas sur la voie publique ; qu'en admettant que les balcons forment saillie sur celle-ci, ils ne sauraient être regardés comme constituant un stationnement, un dépôt temporaire ou une location sur la voie publique, au sens des dispositions ci-dessus reproduites ; qu'ainsi celles-ci ne forment pas la base légale des droits litigieux, dont le tarif a été établi par une délibération du 10 décembre 1982 du conseil municipal de Montrouge ;
Considérant, il est vrai, que la commune soutient que la base légale des droits litigieux se trouve dans d'autres dispositions législatives ou réglementaires ;
Mais considérant que, d'une part, il ne résulte ni de l'édit royal du 16 décembre 1607 en vigueur à la date à laquelle la créance litigieuse a été mise à la charge de la société ni du décret n° 64-262 du 14 mars 1964 que la COMMUNE DE MONTROUGE était légalement fondée à établir ces droits ; que, d'autre part, l'article 1er, 7° de la loi du 13 août 1926, en vertu duquel toute commune peut établir une taxe sur les balcons et les constructions en saillie, doit être regardé comme abrogé par l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959, entrée en vigueur avec effet du 1er janvier 1974, conformément à l'article 1er de la loi du 31 décembre 1973 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE de MONTROUGE n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué en date du 5 janvier 1987, le tribunal administratif de Paris l'a condamnée à rembourser à la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) la somme de 11 275,40 F, plus les intérêts de cette somme ;
Article ler : La requête de la COMMUNE de MONTROUGE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE de MONTROUGE, à la société pour la construction en accession et location (S.O.C.A.L.) et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 86666
Date de la décision : 05/05/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - LOI - VIOLATION - Code des communes - Article L - 231-6 - Droits de voirie réclamés par une commune.

01-04-02-02, 16-04-01-02-01-03, 71-02 Droits de voirie réclamés par une commune à une société de construction pour les façades, baies et balcons d'un immeuble. L'article 1er, 7° de la loi du 13 août 1926, en vertu duquel toute commune peut établir une taxe sur les balcons et les constructions en saillie, doit être regardé comme abrogé par l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959, entrée en vigueur avec effet du 1er janvier 1974, conformément à l'article 1er de la loi du 31 décembre 1973, et ne saurait constituer la base légale de ces droits. Le seul fondement légal est l'article L.231-6 du code des communes, selon lequel les recettes non fiscales de la section de fonctionnement du budget des communes peuvent comprendre le produit des permis de stationnement et de location sur la voie publique et le produit des droits de voirie et autres droits légalement établis. Cependant, les façades et baies de l'immeuble n'empiètent pas sur la voie publique et, en admettant que les balcons forment saillie sur celle-ci, ils ne sauraient être regardés comme constituant un stationnement, un dépôt temporaire ou une location sur la voie publique, au sens de l'article L.231-6 du code. Illégalité de la délibération instituant les droits litigieux.

COMMUNE - FINANCES - BIENS - CONTRATS ET MARCHES - FINANCES COMMUNALES - RECETTES - TAXES - REDEVANCES ET CONTRIBUTIONS - CONTRIBUTIONS - Droits de voirie réclamés par une commune - Base légale - a) Absence - Article 1er - 7°) de la loi du 13 août 1926 - Abrogation par l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 - entrée en vigueur le 1er janvier 1974 - b) Existence - Article L - 231-6 du code des communes.

17-03-01-02-03, 17-03-02-01-02 Les droits de voirie réclamés par la commune à une société se fondent sur les dispositions de l'article L.231-6 du code des communes, relatif aux recettes non fiscales de la section de fonctionnement du budget communal. Ces droits ne sauraient être assimilés à des contributions indirectes mais se rattachent à des actes et opérations de la puissance publique, relevant à ce titre de la compétence de la juridiction administrative. Compétence de la juridiction administrative pour connaître de la demande de la société tendant à obtenir le remboursement des sommes payées de ce chef à la commune.

- RJ1 COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR DES TEXTES SPECIAUX - ATTRIBUTIONS LEGALES DE COMPETENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - COMPETENCE DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES EN MATIERE FISCALE ET PARAFISCALE - Droits de voirie - Droits ne pouvant être assimilés à des contributions indirectes (1).

- RJ1 COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - PRELEVEMENTS OBLIGATOIRES - CREANCES ET DETTES DES COLLECTIVITES PUBLIQUES - CREANCES - Compétence de la juridiction administrative - Divers - Droits de voirie réclamés par une commune - Droits ne pouvant être assimilés à des contributions indirectes mais se rattachant à des actes et opérations de la puissance publique (1).

VOIRIE - REGIME JURIDIQUE DE LA VOIRIE - Voies communales - Droits de voirie réclamés par une commune - Base légale - a) Absence - Article 1er - 7°) de la loi du 13 août 1926 - Abrogation par l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 - entrée en vigueur le 1er janvier 1974 - b) Existence - Article L - 231-6 du code des communes.


Références :

Code des communes L231-6, L131-5
Décret 64-262 du 14 mars 1964
Edit royal du 16 décembre 1607
Loi du 13 août 1926
Loi 73-1229 du 31 décembre 1973 art. 1
Ordonnance 59-108 du 07 janvier 1959 art. 1

1.

Cf. TC. 1956-07-10, Société Bourgogne-Blois c/ Etat, p. 586


Publications
Proposition de citation : CE, 05 mai. 1993, n° 86666
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. Lerche
Rapporteur public ?: M. du Marais

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:86666.19930505
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