La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/1993 | FRANCE | N°66031

France | France, Conseil d'État, 8 ss, 28 juin 1993, 66031


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 11 février 1985, présentée par M. Gilbert Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 20 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la contestation qu'il a formée à la suite des commandements des 24 octobre 1978, 29 mai 1980 et 22 juin 1982 décernés à son encontre par le trésorier principal d' Argenteuil (Val-d'Oise) pour avoir paiement de redevances pour distribution d'eau, de redevances d'assainissement et de taxes

diverses dues au receveur-percepteur d' Elne (Pyrénées-Oriental...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 11 février 1985, présentée par M. Gilbert Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 20 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la contestation qu'il a formée à la suite des commandements des 24 octobre 1978, 29 mai 1980 et 22 juin 1982 décernés à son encontre par le trésorier principal d' Argenteuil (Val-d'Oise) pour avoir paiement de redevances pour distribution d'eau, de redevances d'assainissement et de taxes diverses dues au receveur-percepteur d' Elne (Pyrénées-Orientales) et de la décision du 19 octobre 1984 du receveur-percepteur d'Elne de lui restituer une somme de 9 929,51 F correspondant à un excédent de versement des taxes foncières concernant les propriétés qu'il possède sur le territoire de cette commune ;
2°) annule pour excès de pouvoir ces décisions et en outre les opérations du 26 décembre 1984 effectuées sur son compte courant postal et la décision du 3 janvier 1985 du chef du centre des chèques postaux de Paris rejetant son opposition à ces opérations ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des postes et télécommunications ;
Vu le code du domaine de l'Etat ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bachelier, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure devant le Conseil d'Etat :
Considérant que, par arrêté du 14 février 1985 publié au Journal Officiel le 21 février suivant, le ministre de l'économie, des finances et du budget a délégué sa signature, en cas d'absence ou d'empêchement du directeur de la comptabilité publique et du chef de service, à M. Jean-Louis X..., sous-directeur, à l'effet de signer dans la limite de ses attributions tous actes, arrêtés, décisions ou conventions à l'exclusion des décrets ; qu'il s'en suit que M. X... était compétent pour signer par délégation du ministre le mémoire enregistré le 3 juillet 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ledit mémoire aurait été signé par une personne non habilitée à le faire ne peut qu'être rejeté ;
Sur l'opposition à l'obligation de payer dont procèdent les commandements des 24 octobre 1978, 29 mai 1980 et 22 juin 1982 :
Considérant qu'en exécution de contraintes extérieures délivrées par le receveur-percepteur d' Elne (Pyrénées-Orientales), le trésorier principal d' Argenteuil (Val-d'Oise) a décerné à l'encontre de M. Y..., qui a sa résidence dans cette ville, trois commandements en date des 24 octobre 1978, 29 mai 1980 et 22 juin 1982 pour avoir paiement de redevances pour distribution d'eau, de redevances d'assainissement et de taxes dont il est redevable en raison des propriétés qu'il possède à Elne ;
En ce qui concerne le commandement du 24 octobre 1978 :
Considérant que les réclamations formées par les abonnés des services communaux de distribution d'eau et relatives au prix de leur consommation d'eau ainsi que celles relatives aux redevances d'assainissement qui leur sont réclamées relèvent de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire ; qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier s'est reconnu compétent pour statuer sur l'opposition formée par M. Y... à l'obligation de payer dont procède le commandement émis à son encontre le 24 octobre 1978 pour avoir paiement des redevances pour distribution d'eau et des redevances d'assainissement dues à la commune d' Elne au titre de l'année 1976 ; qu'ainsi et alors même que ce commandement a été annulé par le trésorier-payeur général du Val-d'Oise le 5 décembre 1978, antérieurement à la date à laquelle le requérant a saisi le tribunal administratif, la décision des premiers juges doit, sur ce premier chef des conclusions du requérant, être annulée ; qu'il y a lieu d'évoquer la demande présentée devant ce tribunal et de la rejeter comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
En ce qui concerne le commandement du 29 mai 1980 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'ainsi que le reconnaît M. Y... les services du Trésor ont annulé après l'introduction de sa demande le commandement qui a été émis à son encontre le 29 mai 1980 ;
Considérant, d'une part, qu'en tant que ce commandement tendait au recouvrement des sommes dont l'intéressé était redevable à la commune d'Elne en paiement de sa consommation d'eau et des redevances d'assainissement, il n'appartenait pas, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, à la juridiction administrative de statuer sur la contestation soulevée par M. Y... ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif a regardé comme irrecevable cette partie des conclusions de la demande ; qu'il y a lieu, par suite, d'évoquer celles-ci et de les rejeter comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Considérant, d'autre part, qu'en tant que ce commandement tendait au recouvrement des taxes syndicales dues par le requérant à trois associations syndicales au titre des années 1978 et 1979, le tribunal administratif s'est à tort fondé sur le fait que ce commandement avait été retiré pour regarder comme irrecevable cette partie des conclusions de la demande ; qu'il y a lieu, par suite, d'évoquer celles-ci et de constater qu'il n'y a lieu d'y statuer ;
En ce qui concerne le commandement du 22 juin 1982 :
Considérant qu'il ne résulte d'aucune pièce du dossier que le commandement en date du 22 juin 1982 ait été retiré ; que dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur cette circonstance pour rejeter comme irrecevable la contestation du requérant ; qu'ainsi le jugement attaqué doit, dans cette mesure, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer cette partie de la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Montpellier et d'y statuer immédiatement ;
Considérant qu'en se bornant à soutenir que les sommes qui lui sont réclamées sont dépourvues de base légale et entachées d'excès de pouvoir, M. Y... conteste seulement leur bien-fondé ; que ces moyens qui ne concernent ni l'existence de la dette fiscale, ni son montant, ni son exigibilité, seuls susceptibles d'être contestés à l'occasion d'un contentieux concernant, comme en l'espèce, le recouvrement, ne peuvent être accueillis ; que, par suite, la demande du requérant doit être rejetée ;
Sur les conclusions dirigées contre la lettre du 19 octobre 1984 du receveur-percepteur d' Elne :
Considérant, en premier lieu, que le tribunal administratif a répondu à ces conclusions présentées dans un mémoire enregistré au greffe le jour même de l'audience ; que la circonstance que les premiers juges auraient, dans les visas du jugement, insuffisamment analysé ce mémoire n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la décision attaquée ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune des questions que le tribunal administratif a tranchées pour répondre aux moyens de la demande dont il était saisi n'a de lien direct ou indirect avec la notion de domanialité publique ; que dès lors, et en tout état de cause, le requérant n'est pas fondé à prétendre qu'avant de statuer sur sa demande, le tribunal aurait dû, en vertu de l'article R.159 du code du domaine de l'Etat, mettre en cause le service des domaines ;

Considérant enfin, que la décision du receveur-percepteur d' Elne du 19 octobre 1984 a pour seul objet d'allouer à M. Y... le remboursement de sommes que celui-ci avait versées à tort au Trésor et non, comme il le soutient, de lui opposer la prescription quadriennale ; que, par suite, cette décision ne faisait pas grief au requérant qui était, dans ces conditions, sans intérêt à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions dirigées contre l'inscription de diverses sommes au crédit du compte courant postal de M. Y... :
Considérant que les opérations qui ont eu pour effet de porter diverses sommes au crédit du compte postal de M. Y... correspondent aux ordres de virement des sommes dont le receveur-percepteur d' Elne annonçait à l'intéressé le remboursement le 19 octobre 1984 ; que ces opérations ne font pas grief à leur bénéficiaire ; qu'ainsi le requérant n'a pas intérêt à poursuivre l'annulation tant de ces opérations que de la décision du 3 janvier 1985 par laquelle le chef du centre de chèques postaux de Paris a rejeté son opposition à l'inscription de ces sommes au crédit de son compte ;
Sur l'amende pour recours abusif :
Considérant qu'aux termes de l'article 57-2 du décret du 30 juillet 1963 dans sa rédaction applicable en l'espèce : "Dans le cas de requête jugée abusive, son auteur encourt une amende qui ne peut excéder 10 000 F" ; qu'en l'espèce, la requête de M. Y... présente un caractère abusif ; qu'il y a lieu de condamner M. Y... à payer une amende de 5 000 F ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 novembre 1984 est annulé en tant qu'il a statué sur les oppositions aux obligations de payer dont procèdent les commandements émis à l'encontre de M. Y... le 24 octobre 1978, le 29 mai 1980 et le 22 juin 1982.
Article 2 : Les contestations de M. Y... formées devant le tribunal administratif de Montpellier à la suite, d'une part, du commandement émis à son encontre le 24 octobre 1978 et, d'autre part du commandement en date du 29 mai 1980 en tant qu'il portait sur le paiement de la consommation d'eau et des redevances d'assainissement au titre des années 1977 et 1978 sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 3 : Il n'y a lieu de statuer sur la contestation de M. Y... formée devant le tribunal administratif de Montpellier à la suite du commandement en date du 29 mai 1980 en tant qu'il avait été émis pour avoir paiement de taxes syndicales dues au titre des années 1978 et 1979.
Article 4 : La contestation de M. Y... présentée devant le tribunal administratif de Montpellier à la suite du commandement du 22 juin 1982 et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 5 : M. Y... est condamné à payer une amende de 5 000F.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Gilbert Y... et au ministre du budget.


Synthèse
Formation : 8 ss
Numéro d'arrêt : 66031
Date de la décision : 28/06/1993
Sens de l'arrêt : Rejet incompétence non-lieu à statuer
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

54-06-055 PROCEDURE - JUGEMENTS - AMENDE POUR RECOURS ABUSIF -Champ d'application - Amende infligée à un requérant dont les conclusions sont partiellement accueillies.

54-06-055 Une amende pour recours abusif peut être infligée à un requérant dont les conclusions sont partiellement accueillies (sol. impl.). En l'espèce, une amende est infligée à un requérant qui obtient l'annulation partielle du jugement attaqué mais dont les conclusions de première instance sont rejetées par le Conseil d'Etat après évocation.


Références :

Code du domaine de l'Etat R159
Décret 63-766 du 30 juillet 1963 art. 57-2


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 1993, n° 66031
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Leclerc
Rapporteur ?: M. Bachelier
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:66031.19930628
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award