La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/11/1993 | FRANCE | N°112222

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 26 novembre 1993, 112222


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 décembre 1989 et 18 avril 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 17 octobre 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa demande dirigée contre le jugement en date du 13 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité de licenciement et des dommages-intérêts d'

un montant global de 440 000 F augmentés des intérêts à compter du 1e...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 décembre 1989 et 18 avril 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 17 octobre 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa demande dirigée contre le jugement en date du 13 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité de licenciement et des dommages-intérêts d'un montant global de 440 000 F augmentés des intérêts à compter du 1er janvier 1988, ainsi qu'une indemnité mensuelle de pré-retraite de 16 500 F ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser : a) une indemnité de licenciement de 130 576,87 F ; b) une indemnité de 578 027 F en réparation du préjudice financier que lui a causé son éviction de l'I.U.T. de Paris V ; c) les intérêts de droit de ces sommes à compter du 15 septembre 1987 et la capitalisation de ces intérêts ; d) enfin 30 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 69-543 du 6 juin 1969 ;
Vu le décret n° 78-284 du 8 mars 1978 ;
Vu le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Labarre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Delaporte, Briard, avocat de M. Jean X...,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : "Par dérogation au principe posé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des emplois permanents à temps complet d'enseignants-chercheurs des établissements d'enseignement supérieur et de recherche peuvent être occupés par des personnels associés ou invités n'ayant pas le statut de fonctionnaire" ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi du 11 janvier 1984 : "Les dispositions du présent décret s'appliquent aux agents non titulaires de droit public de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif ou à caractère scientifique, culturel et professionnel, recrutés ou employés dans les conditions définies aux articles 3 (2ème, 3ème et 6ème alinéa), 4, 5, 6 et 82 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, à l'exception des agents en servce à l'étranger et des agents engagés pour exécuter un acte déterminé (...)" ; qu'enfin, aux termes de l'article 8 du même décret, qui s'applique notamment aux agents recrutés dans les conditions définies à l'article 5 de la loi du 11 janvier 1984 : "(...) Le contrat ou l'engagement peut être à durée indéterminée, sauf dans les situations suivantes : sous réserve de l'alinéa ci-dessous, lorsque la réglementation applicable aux agents non titulaires qui ont refusé leur titularisation ou les stipulations du contrat qu'ils avaient souscrit avant ce refus prévoient leur recrutement à durée déterminée. Dans ce cas, lorsque le contrat ou l'engagement de ces agents a été renouvelé au moins une fois depuis le contrat ou l'engagement initial, les intéressés sont réputés être employés pour une durée indéterminée ; lorsque le poste confié à un agent non titulaire en application des articles 3 (...) et 5 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée présente, de par sa nature, un caractère temporaire. Dans ce cas, le contrat ou l'engagement prévoit la date à laquelle il prendra fin. Si à cette date, le contrat ou l'engagement est renouvelé, il est réputé être à durée indéterminée, sauf stipulation ou disposition contraire expresse" ;

Considérant que, par un arrêté du 22 octobre 1970, M. X... a été nommé à compter du 1er octobre 1970 et pour une période d'un an en qualité de maître-assistant associé à l'IUT de Paris relevant de l'Université de Paris V ; que cet engagement a ensuite été renouvelé chaque année et, pour la dernière fois, pour une période d'un an expirant le 30 septembre 1987, par un arrêté du 31 octobre 1986 ; qu'eu égard à la nature des fonctions exercées par M. X..., celui-ci doit être regardé comme ayant été, jusqu'à l'expiration de son dernier engagement, employé dans les conditions définies à l'article 5 précité de la loi du 11 janvier 1984 ; que le décret susmentionné du 17 janvier 1986 et notamment les dispositions de son article 8 lui étaient en conséquence applicables ; que, dans ces conditions, son engagement, bien que décidé initialement pour une période déterminée, est devenu du fait de ses renouvellements successifs un engagement à durée indéterminée ;
Considérant qu'aux termes de l'article 51 du décret du 17 janvier 1986 : "En cas de licenciement n'intervenant pas à titre de sanction disciplinaire, une indemnité de licenciement est versée : 1° Aux agents recrutés pour une durée indéterminée (...)" ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'en rejetant la demande d'indemnité de licenciement présentée par M. X... au motif que le décret du 17 janvier 1986 ne lui était pas applicable, la cour administrative d'appel de Paris a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que l'arrêt du 17 octobre 1989 doit, dès lors, être annulé et qu'il y a lieu de renvoyer M. X... devant la cour administrative d'appel de Paris afin qu'il soit statué sur les conclusions de sa demande ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée ..." ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 20 000 F au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris, en date du 17 octobre 1989, est annulé.
Article 2 : M. X... est renvoyé devant la cour administrative d'appel de Paris afin qu'il soit statué sur les conclusions de sa demande.
Article 3 : L'Etat versera à M. X... une somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 112222
Date de la décision : 26/11/1993
Sens de l'arrêt : Annulation renvoi
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

- RJ1 ENSEIGNEMENT - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFERENTES CATEGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET GRANDES ECOLES - UNIVERSITES - GESTION DES UNIVERSITES - GESTION DU PERSONNEL - GESTION DES AGENTS CONTRACTUELS - Enseignants associés - Engagement à durée déterminée renouvelé plusieurs fois - Engagement devant être regardé comme devenu à durée indéterminée (1).

30-02-05-01-06-01-06, 36-12-01, 36-12-03-01 Maître-assistant associé ayant été nommé pour une période d'un an et dont l'engagement a par la suite été renouvelé chaque année. Eu égard à la nature des fonctions exercées, l'intéressé doit être regardé comme ayant été, jusqu'à l'expiration de son dernier engagement, employé dans les conditions de l'article 5 de la loi du 11 janvier 1984. Dans ces conditions, son engagement, bien que décidé initialement pour une période déterminée, est devenu du fait de ses renouvellements successifs un engagement à durée indéterminée. Droit à l'indemnité de licenciement prévue à l'article 51 du décret du 17 janvier 1986.

- RJ1 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - AGENTS CONTRACTUELS ET TEMPORAIRES - NATURE DU CONTRAT - Enseignants-chercheurs - Personnels associés (article 5 de la loi du 11 janvier 1984) - Engagement à durée déterminée renouvelé plusieurs fois - Engagement devant être regardé comme devenu à durée indéterminée (1).

- RJ1 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - AGENTS CONTRACTUELS ET TEMPORAIRES - FIN DU CONTRAT - LICENCIEMENT - Droit à indemnité - Existence - Licenciement d'un enseignant associé - Engagement à durée déterminée renouvelé plusieurs fois - Engagement devant être regardé comme devenu à durée indéterminée (1).


Références :

Décret 86-83 du 17 janvier 1986 art. 1, art. 8, art. 51
Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 5, art. 7
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

1. Inf. CAA de Paris, 1989-10-17, Lacombe, T. p. 718


Publications
Proposition de citation : CE, 26 nov. 1993, n° 112222
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Labarre
Rapporteur public ?: M. Toutée

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:112222.19931126
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award