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11/03/1994 | FRANCE | N°115999

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 11 mars 1994, 115999


Vu la requête enregistrée le 9 avril 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ; le MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 30 janvier 1990 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé sa décision du 4 juillet 1989 par laquelle il a rejeté le recours hiérarchique présenté par la société Secométal contre la décision du 7 février 1989 par laquelle l'inspecteur du travail a

refusé d'autoriser le licenciement pour faute grave de M. X..., sal...

Vu la requête enregistrée le 9 avril 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ; le MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 30 janvier 1990 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé sa décision du 4 juillet 1989 par laquelle il a rejeté le recours hiérarchique présenté par la société Secométal contre la décision du 7 février 1989 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement pour faute grave de M. X..., salarié protégé ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société Secométal devant ce tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Debat, Auditeur,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.436-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise (...) est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" ; qu'en vertu des articles L.412-18, L.425-1, L.514-2 du code du travail, les mêmes dispositions sont applicables respectivement aux délégués syndicaux, aux délégués du personnel et aux conseillers prud'hommaux ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement compte-tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un des intérêts en présence ;

Considérant que si M. X... a procédé le 23 décembre 1988 à l'enlèvement sur un chantier de la société Baecheler, client de son employeur, de trois tubes métalliques, sans respecter la procédure prescrite par les règlements de la société Secométal, il ne résulte pas des pièces du dossier que ces agissements, qui ont eu lieu en présence et sans l'opposition des salariés de la société Baecheler, aient été inspirés par une intention frauduleuse ; qu'eu égard aux pratiques et tolérances en usage dans l'entreprise, le comportement de M. X... n'a pas eu, dans les circonstances de l'espèce, le caractère d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ; que dès lors c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé, pour annuler les décisions en date des 7 février 1989 et 4 juillet 1989 de l'inspecteur du travail de la Moselle refusant à la société Secométal l'autorisation de le licencier, sur la gravité de la faute reprochée au salarié ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Secométal devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'autorité administrative était tenue de rejeter la demande d'autorisation de licenciement présentée par la société Secométal ; que, par suite, les autres moyens soulevés par ladite société devant le tribunal administratif à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du refus d'autorisation et du rejet de son recourshiérarchique sont inopérants ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé sa décision en date du 4 juillet 1989 rejetant le recours hiérarchique de la société Secométal et la décision en date du 7 février 1989 de l'inspecteur du travail de la Moselle refusant l'autorisation de licencier M. X... ;
Sur les conclusions de M. X... tendant au remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions susvisées de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner la société Secométal à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourgen date du 30 janvier 1990 est annulé.
Article 2 : La demande de la société Secométal présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. X... devant le tribunal administratif de Strasbourg et tendant à la condamnation de la société Secométal à lui verser 4 000 F au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Secométal, à M. X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 115999
Date de la décision : 11/03/1994
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-02-02 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR FAUTE - ABSENCE DE FAUTE D'UNE GRAVITE SUFFISANTE


Références :

Code du travail L436-1, L412-18, L425-1, L514-2
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 11 mar. 1994, n° 115999
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Debat
Rapporteur public ?: Bonichot

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1994:115999.19940311
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