Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire du ministre du budget, enregistrés les 29 mai 1992 et 3 juillet 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre du budget demande au Conseil d'Etat d'annuler sans renvoi l'arrêt en date du 11 décembre 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du tribunal administratif de Caen en date du 3 novembre 1988 et accordé à la société coopérative des artisans et professionnels de l'automobile de la Manche (S.O.C.A.P.A.M.) la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1984 dans les rôles de la commune de Coutances ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 ;
Vu la loi n° 83-657 du 20 juillet 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hourdin, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'article 1454 du code général des impôts exonère de la taxe professionnelle : "les sociétés coopératives et unions de sociétés coopératives d'artisans ... lorsque ces ... organismes sont constitués et fonctionnent conformément aux dispositions législatives et réglementaires qui les régissent" ;
Considérant qu'en vertu de l'article 4 de la loi n° 83-657 du 20 juillet 1983, relative au développement de certains activités d'économie sociale, les société coopératives artisanales sont régies par les dispositions du titre Ier de cette loi et, en ce qu'elles ne sont pas contraires à celles-ci, par les dispositions de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération et de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966, modifiée, sur les sociétés commerciales ; que la loi du 20 juillet 1983, énonce, en particulier, en son article 1er, premier alinéa, que "les sociétés coopératives artisanales ont pour objet la réalisation de toutes opérations et la prestation de tous services susceptibles de contribuer, directement ou indirectement, au développement des activités artisanales de leurs associés, ainsi que l'exercice en commun de ces activités", et, en son article 6, que peuvent seuls être associés d'une société coopérative artisanale, participer à ses opérations et bénéficier de ses services, d'une part, les artisans immatriculés au répertoire des métiers, n'employant pas plus de dix salariés et exerçant à titre principal ou secondaire, l'une des activités professionnelles indépendantes de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services limitativement fixées par arrêté ministériel, d'autre part, dans la limite du quart du nombre total des associés de la société et à condition, notamment, que l'effectif permanent de salariés qu'elles emploient n'excède pas cinquante, les personnes qui, après avoir été admises comme associés en qualité d'artisans immatriculés au répertoire des métiers, ont cessé de remplir les conditions auxquelles cette immatriculation est subordonnée par suite de l'expansion de leur entreprise, ainsi que les personnes dont l'activité est identique ou complémentaire à celle des artisans figurant au répertoire des métiers ;
Considérant que, ni les dispositions de la loi du 20 juillet 1983, ni celles de la loi du 10 septembre 1947, dont l'article 1er prévoit que l'un des "objets essentiels" des sociétés coopératives est "de réduire, au bénéfice de leurs membres ..., le prix de revient ... de certains produits ou de certains services en assumant les fonctions des entrepreneurs ou intermédiaires dont la rémunération grèverait ce prix de revient", ne font obstacle à ce qu'une société coopérative artisanale soit regardée comme fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires qui la régissent, lorsqu'elle procure à ses associés des produits, objets ou marchandises destinés à être revendus par ceux-ci en l'état, à la condition que ces opérations commerciales n'aient qu'un caractère accessoire et, par suite, que les services effectivement rendus à ses membres par la coopérative, avec, si besoin est, le concours d'un personnel salarié, gardent pour principal objet de contribuer, directement ou indirectement, au développement de leurs activités proprement artisanales de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ;
Considérant que, pour juger que la société coopérative des artisans et professionnels de l'automobile de la Manche (S.O.C.A.P.A.M.) devait être regardée comme fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires qui la régissent, et qu'étant, dès lors, en droit de bénéficier du régime d'exonération prévu par l'article 1454 du code général des impôts, elle était fondée à demander la décharge de la taxe professionnelle qui lui avait été assignée au titre de l'année 1984, la cour administrative d'appel de Nantes a retenu, d'une part, en procédant à une appréciation souveraine des faits qui lui étaient soumis, que la vente aux adhérents de fournitures destinées à être revendues par eux en l'état ne constituait qu'une activité accessoire de la société, d'autre part, que l'utilisation, par cette dernière, de personnel salarié était, en l'espèce, nécessaire à la réalisation de son objet ; qu'en statuant ainsi, la cour a légalement justifié sa décision ; que, par suite, le ministre du budget n'est pas fondé à demander l'annulation de son arrêt ;
Article 1er : Le recours du ministre du budget est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre du budget et à la société coopérative des artisans et professionnels de l'automobile de la Manche.