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11/01/1995 | FRANCE | N°129717

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 11 janvier 1995, 129717


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 24 septembre 1991 et le 20 janvier 1992, présentés pour la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE, dont le siège social est situé ..., et représentée par son président-directeur-général en exercice, domicilié audit siège ; la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE demande que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 27 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision en date du 18 mai 1989 par laquelle l'inspecteur du travail des transports du département de l'Isère l'a autorisée à licenc

ier Mlle X... pour faute, ensemble la décision implicite du ministre...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 24 septembre 1991 et le 20 janvier 1992, présentés pour la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE, dont le siège social est situé ..., et représentée par son président-directeur-général en exercice, domicilié audit siège ; la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE demande que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 27 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision en date du 18 mai 1989 par laquelle l'inspecteur du travail des transports du département de l'Isère l'a autorisée à licencier Mlle X... pour faute, ensemble la décision implicite du ministre de l'équipement, du logement, des transports et la mer rejetant le recours hiérarchique formé contre ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Struillou, Auditeur,
- les observations de Me Choucroy, avocat de la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à Mlle X... :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L.436-1 du code du travail, le licenciement des membres du comité d'entreprise "ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" ; qu'en vertu de ces dispositions, les représentants du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'autorité compétente de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les frais reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;
Considérant que pour annuler la décision en date du 18 mai 1989 de l'inspecteur du travail des transports du département de l'Isère et la décision implicite, née du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer, saisi sur recours hiérarchique, autorisant la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE à licencier Mlle X..., membre du comité d'entreprise, le tribunal administratif de Grenoble a estimé, d'une part, que le refus opposé par l'intéressée aux modifications de ses attributions, qui revêtait le caractère d'une modification substantielle de son contrat de travail, ne pouvait avoir pour effet d'autoriser son licenciement pour faute, et, d'autre part, que les critiques formulées par Mlle X... à l'encontre des membres de la direction, qui se rapportaient à la modification de ses fonctions professionnelles et à l'exercice de ses mandats, ne pouvaient être regardées comme constitutives d'une faute présentant un degré de gravité suffisant pour justifier son licenciement ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les attributions confiées à Mlle X..., employée en qualité de secrétaire de direction, ont été modifiées successivement et de manière substantielle par divers notes ou courriers émanant de la direction de l'entreprise ; que ces modifications aboutissaient à un déclassement de l'intéressée par rapport à ses fonctions précédentes ; que, dans ces conditions, les protestations de Mlle X... contre les changements opérés dans ses attributions ne pouvaient être regardées comme dénuées de toute justification et comme constituant une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

Considérant, en second lieu, que les critiques exprimées par Mlle X..., tant dans ses divers courriers que lors de la réunion tenue par le comité d'entreprise le 8 février 1989 et se rapportant, d'une part, aux modifications introduites dans ses fonctions et, d'autre part, au fonctionnement et à la gestion du comité d'entreprise ne comportaient aucun terme injurieux ou diffamatoire à l'encontre des membres de la direction ou du personnel ; que les appréciations de l'intéressée relatives à la gestion de la société et à l'activité du comité d'entreprise peuvent être regardées comme se rattachant à un exercice normal des fonctions représentatives dont elle était investie ; que, par suite, les critiques formulées par Mlle X... ne sont pas constitutives d'unefaute de gravité suffisante pour justifier son licenciement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions susanalysées ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DES TRANSPORTS MUTTE, à Mlle X... et au ministre de l'équipement, des transports et du tourisme.


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 129717
Date de la décision : 11/01/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES.


Références :

Code du travail L436-1


Publications
Proposition de citation : CE, 11 jan. 1995, n° 129717
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Struillou
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:129717.19950111
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