Vu la requête enregistrée le 25 février 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE DE PARIS ; le PREFET DE POLICE DE PARIS demande au Président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 décembre 1993 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté préfectoral du 30 novembre 1993 décidant la reconduite à la frontière de M. Y...
X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de M. Y...
X...,
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité du pourvoi du PREFET DE POLICE DE PARIS :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le jugement attaqué ait été notifié au PREFET DE POLICE DE PARIS avant la date du 2 février 1994, mentionnée sur le procès-verbal de notification retourné au greffe du tribunal administratif ; qu'ainsi le recours du préfet de police enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 25 février 1994 n'était pas tardif ;
Sur la recevabilité de la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris :
Considérant qu'aux termes de l'article 22 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée, "I. L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière peut, dans les vingt-quatre heures suivant sa notification, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif ..." ; qu'aux termes de l'article R. 241-6 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, relatif au contentieux des arrêtés de reconduite des étrangers à la frontière : "la requête doit être enregistrée au greffe du tribunal administratif dans les vingt-quatre heures suivant la notification de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière. Toutefois, si, au moment de la notification de l'arrêté, l'étranger est retenu par l'autorité administrative, sa requête peut valablement être déposée dans ce même délai de vingt-quatre heures soit auprès de ladite autorité administrative, soit au greffe du tribunal devant lequel il comparaît en vue de la prorogation de sa rétention administrative. Dans le cas prévu à l'alinéa précédent, mention du dépôt est faite sur un registre ouvert à cet effet. Un récépissé indiquant la date et l'heure du dépôt est délivré au requérant. L'autorité qui a reçu la requête la transmet sans délai et par tous moyens au président du tribunal administratif" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du PREFET DE POLICE DE PARIS en date du 30 novembre 1993 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... lui a été notifié le 30 novembre 1993 à 17 heures 15 alors qu'il était retenu par l'autorité administrative ; que la fiche de notification de cet arrêté, signée par M. X..., comportait l'indication des voies et délais de recours ouverts contre cette décision ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X... ait déposé dans le délai et les conditions fixés par l'article R. 241-6, susrappelé, une requête auprès de l'autorité administrative ; que lacirconstance qu'il n'aurait pas été mis en mesure de téléphoner à sa famille ou que sa demande de désignation d'un avocat commis d'office n'aurait pas été immédiatement satisfaite ne fait pas obstacle à ce que le délai de recours contentieux ait commencé à courir dès la notification de l'arrêté ; que, par suite, sa requête présentée par l'intermédiaire de son avocat et qui n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris que le 1er décembre 1993 à 18 heures 57, soit après l'expiration du délai de 24 heures prévu à l'article 22 bis de l'ordonnance susmentionnée, lequel se décompte d'heure à heure, était tardive ; qu'ainsi, le préfet de police de Paris est fondé à soutenir que le délai de recours contentieux était expiré lorsque le tribunal administratif de Paris a été saisi de la requête de M. X... ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'annuler le jugement en date du 3 décembre 1993 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a prononcé l'annulation dudit arrêté et de rejeter comme tardive, et, par suite, irrecevable la demande de M. X... dirigée contre cet arrêté ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente affaire la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... les sommes qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 3 décembre 1993 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE DE PARIS, à M. Y...
X... et au ministre de l'intérieur.