Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 25 octobre 1995, présentée par M. François X..., demeurant ... et M. Jacques Y..., demeurant ... ; MM. X... et Y... demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 19 septembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur protestation contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 11 juin 1995 dans la commune de Bullion (Yvelines) ;
2°) annule ces opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le nouveau code de procédure civile ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de L'Hermite, Auditeur,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 119 du code électoral : "Les réclamations contre les opérations électorales doivent être consignées au procès-verbal sinon être déposées, à peine de nullité, dans les cinq jours qui suivent le jour de l'élection, au secrétariat de la mairie, ou à la sous-préfecture, ou à la préfecture. Elles sont immédiatement adressées au préfet qui les fait enregistrer au greffe du tribunal administratif. Elles peuvent également être déposées au bureau central du greffe du tribunal administratif" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les résultats des opérations électorales qui ont eu lieu le dimanche 11 juin 1995 dans la commune de Bullion ont été proclamés dans la nuit du dimanche au lundi, au-delà de minuit ; qu'ainsi c'est le lundi 12 juin qui doit être retenu comme point de départ du délai prévu par l'article R. 119 précité ; que la protestation présentée par les requérants contre lesdites opérations électorales a été enregistrée à la sous-préfecture de Rambouillet le lundi 19 juin ; qu'à cette date, et par application des dispositions de l'article 642 du nouveau code de procédure civile, le délai prévu par l'article R. 119 du code électoral précité, qui court à compter de la date de la proclamation des résultats du scrutin, n'était pas expiré ; qu'il en résulte que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté comme tardive ladite protestation ; qu'ainsi le jugement attaqué doit être annulé ;
Considérant que le délai imparti au tribunal adminitratif par l'article R. 120 du code électoral pour statuer sur la proclamation est expiré ; que, dès lors, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de statuer immédiatement sur la protestation présentée par MM. X... et Y... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Considérant que le tract diffusé par la liste "Bullion, un nouveau contrat, un nouvel élan", n'excédait ni par son ton, ni par son contenu les limites de la polémique électorale ; qu'ainsi sa diffusion n'a pas revêtu le caractère d'une manoeuvre de nature à vicier la sincérité des résultats du scrutin ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MM. X... et Y... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur protestation dirigée contre les élections du 11 juin 1995 dans la commune de Bullion ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 19 septembre 1995 est annulé.
Article 2 : La protestation de MM. X... et Y... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. François X..., à M. Jacques Y..., au maire de Bullion et au ministre de l'intérieur.