Vu la requête enregistrée le 21 mai 1993 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat présentée par le préfet de la Marne ; le préfet de la Marne demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 2 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande dirigée contre les marchés d'appel d'offres passés le 5 septembre 1991 par le maire de Francheville en vue de la construction de locaux de secours et d'incendie ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Lagumina, Auditeur,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne les marchés correspondants aux lots 1, 2, 3,4 et 11 :
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête :
Considérant que M. Antoine X... a siégé en qualité de conseiller municipal à la commission d'appel d'offres du 29 juillet 1991 au cours de laquelle ont été examinées les offres relatives aux marchés que la commune de Francheville se proposait de passer en vue de la construction de locaux de secours et d'incendie ; que M. Marcel X..., entrepreneur, père de M. Antoine X... et son employeur, avait soumissionné pour les lots 1, 2, 3, 4 et 11 ; que dans ces conditions, et alors même que seul le lot n° 1 a été attribué à l'entreprise de M. Marcel X..., la présence de M. Antoine X... au sein de la commission d'appel d'offres lorsque celle-ci a examiné les offres relatives aux lots 1, 2, 3, 4 et 11 a vicié la procédure relative à ces lots ; que, par suite, le préfet de la Marne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté son déféré tendant à l'annulation des marchés signés le 5 septembre 1991 par le maire de Francheville pour les lots 1, 2, 3, 4 et 11 ;
En ce qui concerne les marchés correspondant aux lots 5, 6, 7, 8, 9, 10, 12 :
Considérant qu'aux termes de l'article 254 du code des marchés publics dans sa rédaction alors en vigueur : "Les marchés font l'objet d'un acte d'engagement établi en un seul original. La soumission, dans les marchés par adjudication, l'offre, dans les marchés sur appel d'offres, sur appel d'offres avec concours et dans les marchés négociés, sont établies sous la forme d'un acte d'engagement souscrit par les candidats au marché" ; qu'aux termes de l'article 256 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur : "Les soumissions ou offres doivent être signées par les entrepreneurs ou les fournisseurs qui les présentent ..." ; qu'aux termes de l'article 299 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur : "Seuls peuvent être ouverts les plis qui ont été reçus dans les conditions fixées à l'article 298, au plus tard à la date limite qui a été fixée pour la réception des offres" ;
Considérant que pour l'appel d'offres lancé par la commune de Francheville pour la construction de locaux de secours et d'incendie, la date limite de réception des offres prévue par l'article 299 précité était fixée au 27 juillet 1991 à 8 h 00 ; qu'en application des dispositions précitées, les entrepreneurs devaient déposer avant cette date un dossier complet comprenant un acte d'engagement dûment signé par eux ; qu'à défaut, la commission d'appel d'offres était tenue de rejeter l'offre dont elle se trouvait irrégulièrement saisie ;
Considérant que le préfet de la Marne soutient que les actes d'engagement relatifs aux lots 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 12 ont été signés postérieurement à la date limite de présentation des offres ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que pour les lots 5, 7, 8, 9, 10 et 12 les actes d'engagements ont été souscrits par les entrepreneurs antérieurement au 27 juillet 1991 ; que, par suite, le préfet de la Marne qui, s'agissant de ces marchés, n'a pas présenté d'autres moyens au soutien de son déféré, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté son déféré tendant à l'annulation des marchés signés pour les lots 5, 7, 8, 9, 10 et 12 ;
Mais, considérant, que pour le lot 6, l'acte d'engagement n'a été signé par l'entrepreneur que le 19 août 1991 ; que, par suite, le préfet de la Marne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté son déféré tendant à l'annulation du marché signé pour le lot 6 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne du 2 mars 1993 est annulé en tant qu'il a rejeté le déféré du préfet portant sur les marchés correspondant aux lots 1, 2, 3, 4, 6 et 11. Les marchés portant sur les lots précités et signés le 5 septembre 1991 par le maire de Francheville sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions du préfet de la Marne est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au préfet de la Marne, au maire de Francheville, aux entreprises X..., Castagna, Weber, Technitoitures, Rollet, Collat, Dalla Libera, Pierre, Solemur, Brun et au ministre de l'intérieur.