Vu la requête, enregistrée le 17 août 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 novembre 1994 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il rejette sa demande dirigée contre la décision du 22 juillet 1992 par laquelle le préfet de la Dordogne lui a enjoint de procéder à l'abattage et à l'élagage d'arbres plantés sur sa propriété sise sur le territoire de la commune de Boulazac ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la voirie routière, ensemble la loi n° 89-413 du 22 juin 1989 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Maïa, Auditeur,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6.7 de l'arrêté du 10 décembre 1985 du préfet de la Dordogne, relatif au domaine public routier national : "Les arbres, les branches et les racines qui avancent sur le sol du domaine public routier national doivent être coupés à l'aplomb des limites de ce domaine à la diligence des propriétaires ou fermiers ... A défaut de leur exécution par les propriétaires riverains ou leurs représentants, les opérations d'élagage des arbres, branches, haies ou racines peuvent être effectuées d'office par la direction départementale de l'équipement après une mise en demeure, par lettre recommandée, non suivie d'effet et aux frais des propriétaires" ;
Considérant que la requête de M. X... est dirigée contre le jugement du 29 novembre 1994 du tribunal administratif de Bordeaux, en tant qu'il rejette ses conclusions aux fins d'annulation de la décision du 22 juillet 1992 par laquelle, se fondant sur les dispositions précitées, le préfet de la Dordogne, d'une part, lui a enjoint de procéder à l'abattage et à l'élagage d'arbres plantés sur sa propriété, située en bordure de la route nationale n° 89 sur le territoire de la commune de Boulazac, au motif que leur état d'entretien faisait peser un risque de chute de branches ou d'arbres sur le domaine public routier national, et, d'autre part, lui a précisé que s'il n'accomplissait pas ces travaux, les frais de leur exécution d'office seraient mis à sa charge par l'administration ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, la mise en demeure ainsi adressée à M. X... présente le caractère d'une mesure susceptible de recours ;
Considérant que si M. X... soulève un moyen tiré de ce que la mise en demeure qui lui a été adressée serait illégale, faute qu'ait été préalablement établi l'arrêté d'alignement individuel qu'il avait demandé, aucune disposition législative ou réglementaire ne faisait obligation au préfet de ne prendre la mesure contestée qu'après l'édiction dudit arrêté ;
Considérant que M. X... ne saurait utilement invoquer, à l'appui de sa requête, le bénéfice des dispositions de l'article L. 114-8 du code de la voirie routière, applicables à des opérations de débroussaillement aux abords des voies publiques ;
Considérant que si M. X... se prévaut par voie d'exception de ce que les dispositions précitées de l'arrêté du 10 décembre 1985 du préfet de la Dordogne seraient privées de base légale du fait de l'abrogation, par la loi susvisée du 22 juin 1989, de l'ordonnance du 27 décembre 1958 relative à la conservation du domaine public national, ce moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté, dès lors que l'ordonnance susmentionnée ne constitue pas la base légale dudit arrêté ;
Considérant que le préfet de la Dordogne a pu légalement prévoir, dans l'exercice de ses pouvoirs de police, qu'il incombait aux riverains des routes nationales de procéder à l'élagage ou à l'abattage des arbres de leurs propriétés menaçant de tomber sur les dépendances du domaine public routier national ; qu'en revanche, M. X... est fondé à soutenir que les dispositions précitées de l'article 6.7 de l'arrêté du 10 décembre 1985 sont entachées d'illégalité en ce qu'elles prévoient, sans fondement législatif, qu'à défaut de leur exécution par les propriétaires riverains ou leurs représentants, les frais de l'exécution d'office, par l'administration, des opérations d'élagage des arbres, branches, haies ou racines seront misà la charge des propriétaires ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision attaquée qu'en tant que celle-ci indique que, faute de procéder à l'élagage et à l'abattage d'arbres de sa propriété, le requérant devrait assumer la charge des frais d'exécution d'office de ces travaux par l'administration ;
Article 1er : Le jugement du 29 novembre 1994 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. X... dirigées contre la décision du 22 juillet 1992 du préfet de la Dordogne en ce qu'elle indique que, faute de procéder à l'élagage et à l'abattage d'arbres de sa propriété menaçant de tomber sur le domaine public routier national, le requérant devra assumer la charge des frais d'exécution d'office de ces travaux par l'administration.
Article 2 : La décision du 22 juillet 1992 du préfet de la Dordogne est annulée en tant qu'elle indique que, faute de procéder à l'élagage et à l'abattage d'arbres de sa propriété menaçant de tomber sur le domaine public routier national, M. X... devra assumer la charge des frais d'exécution de ces travaux par l'administration.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean X... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.