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15/03/1999 | FRANCE | N°192130

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 15 mars 1999, 192130


Vu la requête, enregistrée le 11 décembre 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Nathalie X..., demeurant ..., agissant en exécution d'un jugement du tribunal d'instance du 1er arrondissement de Paris en date du 28 janvier 1997 ; Mme X... demande au Conseil d'Etat d'apprécier la légalité de l'article 36 de l'arrêté du 20 avril 1972 modifié portant statuts de la caisse nationale des barreaux français et de déclarer que ces dispositions sont entachées d'illégalité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;


Vu la loi n° 48-50 du 12 janvier 1948 relative aux droits de plaidoirie ...

Vu la requête, enregistrée le 11 décembre 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Nathalie X..., demeurant ..., agissant en exécution d'un jugement du tribunal d'instance du 1er arrondissement de Paris en date du 28 janvier 1997 ; Mme X... demande au Conseil d'Etat d'apprécier la légalité de l'article 36 de l'arrêté du 20 avril 1972 modifié portant statuts de la caisse nationale des barreaux français et de déclarer que ces dispositions sont entachées d'illégalité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 48-50 du 12 janvier 1948 relative aux droits de plaidoirie des avocats ;
Vu le décret n° 54-1253 du 22 décembre 1954 relatif à la caisse nationale des barreaux français ;
Vu le décret n° 55-413 du 2 avril 1955 portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi n° 48-50 du 12 janvier 1948 et du décret n° 54-1253 du 2 avril 1955 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Donnat, Auditeur,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de la caisse nationale des barreaux français,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le tribunal d'instance du 1er arrondissement de Paris a, par un jugement du 28 janvier 1997, sursis à statuer sur la demande dont l'avait saisi Mme X... dans le cadre d'un litige relatif aux cotisations mises à sa charge au titre de l'année 1994, jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur la légalité de l'article 36 des statuts de la caisse nationale des barreaux français approuvés par l'arrêté interministériel du 20 avril 1972 ; que cet article prévoit que l'exonération ou la réduction de cotisation au régime d'assurance vieillesse des avocats est décidée par une commission de trois membres désignée par le conseil d'administration de la caisse et dispose, dans son troisième alinéa, que : "L'exonération peut être accordée, à tout moment, aux avocats dont l'état de maladie, dûment constaté au besoin par expert, aura été d'une durée supérieure à six mois. Cette commission est également compétente pour accorder des exonérations ou réductions en cas d'insuffisance justifiée des ressources communes de l'avocat et de son conjoint et pour accorder des exonérations ou réductions des intérêts de retard" ;
Considérant que la juridiction compétente pour statuer sur l'exception tirée de l'illégalité d'un règlement doit rechercher si ce dernier a été légalement pris en fonction des textes en vigueur à la date de son intervention ; qu'en outre, si elle y est invitée, il lui incombe de rechercher également si ce règlement était demeuré en vigueur à la date à laquelle il en a été fait application ;
En ce qui concerne l'appréciation de la légalité de l'article 36 des statuts à la date de leur approbation :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 12 janvier 1948 relative aux droits de plaidoirie des avocats, dans sa rédaction issue du décret du 22 décembre 1954 pris sur le fondement de la loi du 17 août 1948 et relatif à la caisse nationale des barreaux français, celle-ci perçoit : "Outre le montant des droits de plaidoirie ( ...) : "1°) Une cotisation annuelle obligatoire pour tous les avocats à l'exception de ceux exonérés par le règlement d'administration publique prévu à l'article 8 ci-après ( ...)" ; que, sur le fondement de ces dernières dispositions, le décret du 2 avril 1955 a fixé, dans son article 4, la procédure suivant laquelle est déterminé le montant de la cotisation et énoncé dans son article 5 que : "Sous réserve des exonérations accordées en vertu des dispositions de l'article 48 ( ...), la cotisation est due par tous les avocats inscrits au tableau et admis au stage. Elle peut être graduée suivant l'ancienneté de l'intéressé depuis sa prestation de serment. Elle peut être réduite pour les avocats ayant dépassé l'âge de soixante-cinq ans" ; que selon l'article 48 du même décret : "L'exonération de payement des cotisations, au profit des avocats dont, au cours d'un exercice annuel, l'état de maladie, dûment constaté par expert désigné par le bureau, aura été d'une duréesupérieure à six mois ainsi que l'exonération de payement ou la réduction, soit des cotisations en cas d'insuffisance justifiée de ressources, soit des intérêts de retard, peuvent être prononcées par une commission spéciale de trois membres pris par le conseil d'administration dans son sein. Cette commission statue par voie gracieuse et discrétionnairement" ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si la cotisation instituée par l'article 4 (1°) de la loi du 12 janvier 1948 modifiée est fixée exclusivement en fonction de critères liés à l'âge de l'avocat et à son ancienneté dans la profession, la cause d'exonération ou de réduction tenant à l'"insuffisance justifiée des ressources" doit s'entendre, dans le cas d'un avocat marié et eu égard aux dispositions de l'article 212 du code civil, comme permettant à la commission compétente pour statuer "par voie gracieuse" sur les demandes d'exonération ou de réduction de prendre en compte les revenus du conjoint de l'avocat ;
Considérant qu'il suit de là que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que les dispositions susanalysées des statuts de la caisse nationale des barreaux français auraient, à la date de leur approbation par l'arrêté interministériel du 20 avril 1972, méconnu les dispositions législatives et réglementaires applicables au régime d'assurance vieillesse de la profession d'avocat ou contrevenu au principe d'égalité applicable aux membres de la profession d'avocat ;
En ce qui concerne la question de savoir si l'article 36 des statuts était légalement applicable en 1994 :
Considérant que la requérante soutient que les dispositions de l'article 36 des statuts ont pour effet de traiter de façon plus rigoureuse l'avocat marié que l'avocat qui vit en concubinage ; que, toutefois, compte tenu du changement dans les circonstances de fait survenu depuis leur approbation, les dispositions de l'article 36 des statuts doivent être interprétées comme imposant à l'autorité compétente de prendre en compte pour l'application des mesures de réduction ou d'exonération de cotisation, les ressources de la personne avec laquelle un avocat vit en concubinage de manière stable et continue ; qu'il suit de là que le changement de circonstances dont s'agit ne saurait affecter la légalité des dispositions réglementaires dont il a été fait application à Mme X... lorsque lui a été réclamée une cotisation pour l'année 1994 ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Nathalie X..., à la caisse nationale des barreaux français et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 192130
Date de la décision : 15/03/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Appréciation de la légalité

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DISPARITION DE L'ACTE - ABROGATION - ABROGATION DES ACTES REGLEMENTAIRES - Changement de circonstances de nature à rendre illégal un acte réglementaire - Absence - Possibilité d'exonérations ou de réductions de cotisations au régime d'assurance vieillesse des avocats en cas d'insuffisance des ressources de l'avocat et de son conjoint - Dispositions imposant la prise en compte des ressources du concubin.

01-09-02-01, 62-01-02-04-02 Compte tenu du changement dans les circonstances de fait survenu depuis leur approbation par arrêté du 20 avril 1972, les dispositions de l'article 36 des statuts de la caisse nationale des barreaux français prévoyant la possibilité d'exonérations ou de réductions de cotisations au régime d'assurance vieillesse des avocats "en cas d'insuffisance justifiée des ressources communes de l'avocat et de son conjoint" doivent être interprétées comme imposant à l'autorité compétente de prendre en compte les ressources de la personne avec laquelle un avocat vit en concubinage de manière stable et continue. Par suite, l'article 36 des statuts était légalement applicable en 1994, en dépit du changement de circonstances.

SECURITE SOCIALE - ORGANISATION DE LA SECURITE SOCIALE - REGIMES DE NON-SALARIES - REGIMES DIVERS DE NON-SALARIES - REGIME DES AVOCATS (ASSURANCE VIEILLESSE ET INVALIDITE-DECES) - Assurance vieillesse - Possibilité d'exonérations ou de réductions de cotisations en cas d'insuffisance des ressources de l'avocat et de son conjoint - Illégalité du fait du changement de circonstances - Absence - Dispositions imposant la prise en compte des ressources du concubin.


Références :

Arrêté du 20 avril 1972 art. 36, art. 8, art. 48
Code civil 212
Décret 54-1253 du 22 décembre 1954
Loi du 17 août 1948
Loi 48-50 du 12 janvier 1948 art. 4


Publications
Proposition de citation : CE, 15 mar. 1999, n° 192130
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. Donnat
Rapporteur public ?: M. Bonichot

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:192130.19990315
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