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13/10/1999 | FRANCE | N°181720

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 13 octobre 1999, 181720


Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 6 août et 2 décembre 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 4 juillet 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 5 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a accordé à la société civile immobilière Guérin la décharge des compléments de taxe sur la valeur a

joutée ainsi que des pénalités y afférentes auxquels elle a été as...

Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 6 août et 2 décembre 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 4 juillet 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 5 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a accordé à la société civile immobilière Guérin la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1989 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la sixième directive du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 (77/388/CEE), notamment son article 17 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Vallée, Auditeur,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le ministre se pourvoit contre l'arrêt du 4 juillet 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 5 octobre 1994 du tribunal administratif de Poitiers accordant à la société civile immobilière Guérin la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1989 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 210 de l'annexe II au code général des impôts dans sa rédaction applicable à la période d'imposition : "I- Lorsque des immeubles sont cédés ou apportés avant le commencement de la neuvième année qui suit celle de leur acquisition ou de leur achèvement et que la cession ou l'apport ne sont pas soumis à la taxe sur le prix total ou la valeur totale de l'immeuble, l'assujetti est redevable d'une fraction de la taxe antérieurement déduite. Cette fraction est égale au montant de la déduction diminuée d'un dixième par année civile ou fraction d'année civile écoulée depuis la date à laquelle l'immeuble a été acquis ou achevé" ; qu'aux termes de l'article 257 du même code dans sa rédaction applicable à la période d'imposition : "sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée : ... 7° Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles ... 1. Sont notamment visés : a) Les ventes et les apports en société de terrains à bâtir ... 2. Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables : aux opérations portant sur des immeubles ou parties d'immeubles qui sont achevés depuis plus de cinq ans ou qui, dans les cinq ans de leur achèvement, ont déjà fait l'objet d'une cession à titre onéreux à une personne n'intervenant pas en qualité de marchand de biens ;" qu'aux termes de l'article 691 du même code dans sa rédaction applicable à la période d'imposition : "A- I. Sont exonérées de taxe de publicité foncière ou de droit d'enregistrement lorsqu'elles donnent lieu au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, les acquisitions : 1° De terrains nus ou recouverts de bâtiments destinés à être démolis" ; qu'enfin, aux termes de l'article 285 du même code alors applicable : "Pour les opérations visées au 7° de l'article 257 la taxe sur la valeur ajoutée est due ... 3. par l'acquéreur ... lorsque la mutation ... porte sur un immeuble qui, antérieurement à ladite mutation ... n'était pas placé dans le champ d'application du 7° de l'article 257" ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société civile immobilière Guérin, qui n'était pas un marchand de biens, a cédé le 18 décembre 1989 un immeuble à usage de magasin et d'entrepôt achevé le 16 mai 1983 et acquis par elle le 9 décembre 1986 ; que cette cession a ainsi porté sur un immeuble qui, achevé depuis plus de cinq ans, n'était plus placé dans le champ d'application du 7°) de l'article 257 du code général des impôts ; que, cependant, le nouvel acquéreur s'étant dans l'acte d'acquisition engagé à démolir le bâtiment existant en vue d'utiliser le terrain d'assiette comme terrain à bâtir, cet engagement a eu pour effet d'entraîner son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée dans le cadre du régime spécifique des terrains à bâtir prévu par l'article 285 du code précité ; qu'en déduisant de cet assujettissement du nouvel acquéreur que l'administration n'était pas en droit, au titre des dispositions précitées de l'article 210-I de l'annexe II au même code, deréclamer à la société civile immobilière Guérin le reversement d'une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée antérieurement déduite par elle, alors même que la cession par celle-ci de l'immeuble bâti dont elle était propriétaire n'avait pas été soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que l'arrêt attaqué doit, dès lors, être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit que la cession de l'immeuble en cause le 18 décembre 1989 par la société civile immobilière Guérin est intervenue avant le commencement de la 9ème année ayant suivi son acquisition par celle-ci et ne pouvait plus être soumise à la taxe sur la valeur ajoutée due par le vendeur ; que, par suite, et sans qu'y fasse obstacle l'assujettissement de l'acquéreur à la taxe sur la valeur ajoutée sur les terrains à bâtir, l'administration était fondée à réclamer à la société civile immobilière Guérin le reversement d'une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le prix d'acquisition de l'immeuble en 1986 et ultérieurement déduite par elle à l'occasion de son activité de location de locaux nus à usage industriel et commercial ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a accordé à la société civile immobilière Guérin la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie, par un avis de mise en recouvrement du 14 octobre 1991, au titre de la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1989 ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux de 4 juillet 1996 est annulé.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 5 octobre 1994 est annulé.
Article 3 : la demande en décharge présentée par la société civile immobilière Guérin devant le tribunal administratif de Poitiers est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière Guérin et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 181720
Date de la décision : 13/10/1999
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-06-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE -Régime des régularisations - Cession d'un immeuble achevé depuis plus de cinq ans, mais antérieurement au commencement de la neuvième année qui suit l'acquisition - Obligation de reverser une fraction de la taxe ayant grevé l'acquisition et ayant été déduite alors même que l'acquéreur est lui-même assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée spécifique des terrains à bâtir - Existence.

19-06-02 La cession par une société qui n'était pas un marchand de biens d'un immeuble achevé depuis plus de cinq ans et qui, n'entrant pas dans le champ d'application du 7° de l'article 257 du code général des impôts, n'est plus soumise à la taxe sur la valeur ajoutée due par le vendeur, mais qui intervient avant le commencement de la neuvième année ayant suivi son acquisition, entraîne pour la société, en application de l'article 210 de l'annexe II au code général des impôts, le reversement d'une fraction de la taxe ayant grevé le prix d'acquisition de l'immeuble et ayant été déduite par la société à l'occasion de son activité, alors même que le nouvel acquéreur de l'immeuble était lui-même assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de cette acquisition, dès lors qu'il s'était engagé à démolir le bâtiment en vue d'utiliser le terrain d'assiette comme terrain à bâtir en application du régime spécifique de TVA des terrains à bâtir prévu par l'article 285 du code.


Références :

CGI 257, 691, 285
CGIAN2 210
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11


Publications
Proposition de citation : CE, 13 oct. 1999, n° 181720
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Vallée
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:181720.19991013
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