Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le SYNDICAT GENERAL DE L'EDUCATION NATIONALE (SGEN-CFDT) DE LA SAVOIE, ayant son siège ..., représenté par son secrétaire général en exercice ; le SYNDICAT GENERAL DE L'EDUCATION NATIONALE (SGEN-CFDT) DE LA SAVOIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite résultant du silence gardé par le ministre de l'éducation nationale sur sa demande présentée le 8 août 1996 tendant à l'abrogation du 2ème alinéa du II-3° de la circulaire n° 93-202 du 5 mai 1993 relative au paiement des intérêts de retard, ensemble d'annuler ladite disposition ;
2°) d'enjoindre au ministre de remplacer la disposition attaquée par une disposition juridiquement appropriée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 modifiée notamment par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Picard, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat du SYNDICAT GENERAL DE L'EDUCATION NATIONALE (SGEN-CFDT) DE LA SAVOIE,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus d'abrogation :
Considérant que les conclusions de la requête du SYNDICAT GENERAL DE L'EDUCATION NATIONALE (SGEN-CFDT) DE LA SAVOIE sont dirigées contre la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur sa demande tendant à l'abrogation du paragraphe constituant le 2ème alinéa du II-3° de la circulaire n° 93-202 du 5 mai 1993 ; que le paragraphe contesté est ainsi rédigé : "Cependant, il ne peut y avoir droit au paiement d'intérêts de retard lorsque le droit au paiement des sommes susceptibles de porter intérêts n'est pas acquis : le droit à la créance principale doit être certain. C'est ainsi qu'un arrêté de promotion qui a un effet rétroactif ne peut ouvrir droit, du seul fait de sa rétroactivité, au paiement d'intérêts de retard ; en effet, jusqu'à la notification de l'arrêté, il n'y avait pas de droit certain à la créance principale" ;
Considérant que la promotion d'un agent public à l'ancienneté crée, dès la date d'acquisition de celle-ci, un droit à supplément de rémunération ; qu'au cas où l'arrêté portant promotion intervient avec retard, les intérêts sur les rappels de traitement courent à compter de la demande de règlement, qui peut être antérieure à la notification de l'arrêté de promotion ; que, dès lors, en prévoyant qu'un arrêté portant promotion ne peut ouvrir droit au paiement d'intérêts de retard, dès lors que jusqu'à la notification de cet arrêté il n'y avait pas de droit certain à la créance principale, la circulaire attaquée a édicté une règle générale méconnaissant les dispositions de l'article 1153 du code civil relatives à la détermination des intérêts ; que le syndicat requérant est, par suite, recevable et fondé à demander l'annulation des dispositions contestées ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6-1 de la loi du 16 juillet 1980 modifiée : "Lorsqu'il règle un litige au fond par une décision qui implique nécessairement une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le Conseil d'Etat saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure et peut assortir sa décision d'une astreinte à compter de la date qu'il détermine" ;
Considérant que l'exécution de la présente décision n'implique pas, comme le réclame le syndicat requérant, que le ministre de l'éducation nationale remplace la disposition entachée d'illégalité par une nouvelle disposition ; qu'il lui appartient seulement en conséquence de l'annulation prononcée par la présente décision de procéder à une abrogation des dispositions susanalysées de la circulaire du 5 mai 1993 dans le délai de deux mois à compter de la notification de ladite décision ;
Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loidu 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, par application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de condamner l'Etat à payer au syndicat requérant la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Est annulée la décision implicite par laquelle le ministre de l'éducation nationale a refusé d'abroger les dispositions de la dernière phrase du 2ème alinéa du II-3° de la circulaire n° 93-202 du 5 mai 1993.
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie d'abroger les dispositions de la dernière phrase du 2ème alinéa du II-3° de la circulaire n° 93-202 du 5 mai 1993 dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser au SYNDICAT GENERAL DE L'EDUCATION NATIONALE (SGEN-CFDT) DE LA SAVOIE la somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT GENERAL DE L'EDUCATION NATIONALE (SGEN-CFDT) DE LA SAVOIE et au ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.