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31/05/2000 | FRANCE | N°198438

France | France, Conseil d'État, 9 / 10 ssr, 31 mai 2000, 198438


Vu, enregistrés le 7 août 1998 et le 8 décembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, le recours sommaire et le mémoire complémentaire, présentés par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 14 mai 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, d'une part, a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 30 avril 1997 du tribunal administratif de Paris accordant à M. X... la décharge de la taxe locale d'équipement à laquelle il a été assujetti au titre d'un permis

de construire délivré le 26 juin 1992 par le maire de Sceaux, d'...

Vu, enregistrés le 7 août 1998 et le 8 décembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, le recours sommaire et le mémoire complémentaire, présentés par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 14 mai 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, d'une part, a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 30 avril 1997 du tribunal administratif de Paris accordant à M. X... la décharge de la taxe locale d'équipement à laquelle il a été assujetti au titre d'un permis de construire délivré le 26 juin 1992 par le maire de Sceaux, d'autre part, l'a condamné à verser à M. X... une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Froment, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT se pourvoit contre l'arrêt du 14 mai 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un jugement du 30 avril 1997 du tribunal administratif de Paris accordant à M. Gérard X... la décharge de la taxe locale d'équipement à laquelle il avait été assujetti au titre d'un permis de construire délivré le 26 juin 1992 par le maire de Sceaux (Hauts-de-Seine) en vue de la construction d'une résidence médicalisée pour personnes âgées ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1585 A du code général des impôts : "Une taxe locale d'équipement, établie sur la construction, la reconstruction et l'agrandissement des bâtiments de toute nature, est instituée : 1° de plein droit : a. Dans les communes de 10.000 habitants et au-dessus" ; qu'aux termes de l'article 1723 quater du code général des impôts applicable aux impositions litigieuses : "I. La taxe locale d'équipement visée à l'article 1585 A est due par le bénéficiaire de l'autorisation de construire. - Elle doit être versée au comptable du Trésor de la situation des biens en deux fractions égales ou en un versement unique lorsque le montant dû n'excède pas 2 000 F. - Le premier versement ou le versement unique est exigible à l'expiration d'un délai de dix-huit mois à compter de la date de délivrance du permis de construire ou de la date à laquelle l'autorisation de construire est réputée avoir été tacitement accordée. Le second versement est exigible à l'expiration d'un délai de trente-six mois à compter de la même date ..." ; qu'aux termes de l'article 317 septies A de l'annexe II au code général des impôts : "La détermination de l'assiette et la liquidation des impositions dont la délivrance du permis de construire constitue le fait générateur sont effectués par le responsable du service de l'Etat, chargé de l'urbanisme ..." ; qu'aux termes de l'article 198 octies de l'annexe IV au code général des impôts : "La fiche de liquidation des impositions dont la délivrance du permis de construire constitue le fait générateur est transmise par l'autorité administrative au trésorier-payeur général et au titulaire du permis de construire" ; qu'aux termes de l'article 118 de la loi n° 89-935 du 29 décembre 1989, dans sa version applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi n° 94-112 du 9 février 1994 : "I - Les taxes, versements et participations prévus aux articles 1585 A, 1599 OB, 1599 B, 1599 octies, 1635 quater et 1723 octies du code général des impôts et à l'article L. 142-2 du code de l'urbanisme, dont le fait générateur est postérieur au 31 décembre 1989, seront recouvrés par les comptables du Trésor. II - Les sommes correspondantes seront recouvrées en vertu d'un titre rendu exécutoire par le préfet" ; qu'à compter de l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 14 de la loi n° 94-112 du 9 février 1994, les taxes, versements et participations susmentionnés sont recouvrés "en vertu d'un titre délivré par l'autorité compétente pour procéder à leur liquidation" ; que le titre émis pour avoir recouvrement de la taxe locale d'équipement demandée à M. X... a été rendu exécutoire postérieurement à l'entrée en vigueur de cette dernière disposition ;

Considérant qu'il découle des modalités d'établissement et de recouvrement de la taxe locale d'équipement que s'il incombe au responsable du service de l'Etat dans le département, chargé de l'urbanisme, de procéder, en application des dispositions de l'article 317 septies A de l'annexe II au code général des impôts, à la liquidation de cette imposition et de communiquer au redevable, en vertu des dispositions de l'article 198 octies de l'annexe IV audit code, un exemplaire de la fiche de liquidation, cette autorité ne prend pas, ce faisant, une décision d'assujettissement, laquelle est constituée, en matière fiscale, par la mise en recouvrement de l'impôt ; que la cour administrative d'appel de Paris a, par suite, commis une erreur de droit en jugeant que le directeur départemental de l'équipement, en arrêtant le montant de la taxe locale d'équipement en application des dispositions de l'article 317 septies A del'annexe II au code général des impôts, prenait une décision d'assujettissement à cette taxe authentifiant la créance de l'Etat et des collectivités attributaires et en accordant au pétitionnaire la décharge de l'imposition contestée au motif que la liquidation de l'impôt, qui se confondait selon elle, en l'absence de tout autre document signé par l'autorité compétente, avec la notification au redevable du montant de la taxe due, avait été effectuée par un fonctionnaire de la direction départementale de l'équipement n'ayant pas reçu délégation du directeur ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'aux termes de l'article 50 de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998 portant loi de finances rectificative pour 1998 : " ...II. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont réputées régulières les impositions mentionnées à l'article L. 255 A du livre des procédures fiscales, assises et liquidées avant la publication de la présente loi au Journal officiel de la République française, en tant qu'elles seraient contestées pour un motif tiré de l'absence de signature ou de l'incompétence du signataire de l'avis d'imposition ou de l'incompétence du signataire du titre de recette" ; qu'il en résulte que la circonstance que le courrier par lequel les services de l'équipement ont, en application des dispositions précitées de l'article 198 octies de l'annexe IV au code général des impôts, adressé au redevable un exemplaire de la fiche de liquidation en vue de l'informer du montant de la taxe dont il était redevable portait la signature d'un ingénieur divisionnaire des travaux publics de l'Etat qui n'avait pas reçu délégation du directeur départemental de l'équipement à cet effet est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce que la taxe locale d'équipement avait été liquidée par une autorité incompétente pour accorder à M. X... la décharge qu'il sollicitait ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris à l'appui de sa demande en décharge ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées du II de l'article 50 de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998 portant loi de finances rectificative pour 1998 qu'est inopérant le moyen tiré de ce que le titre de recette émis en vue du recouvrement de la taxe litigieuse n'aurait pas été rendu exécutoire par l'autorité compétente ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'arrêté du 18 février 1982 du préfet des Hauts-de-Seine portant, à la demande de la commune de Sceaux, de 3 % à 5 % le taux de la taxe locale d'équipement perçue au profit de cette commune a été régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département ; que si l'article 3 de cet arrêté prévoyait qu'il ferait en outre l'objet d'un affichage à la mairie de Sceaux et d'une insertion dans deux au moins des journaux mis en vente dans le département, la parution dudit arrêté au recueil des actes administratifs du département constituait, à elle seule, une mesure de publicité suffisante à son entrée en vigueur ; que M. X... n'est par suite et en tout état de cause pas fondé à soutenir que le taux de 5 % ne lui était pas opposable faute pour les mesures de publicité subsidiaires prévues par l'arrêté d'avoir été mises en oeuvre ; que le moyen tiré de ce que la précédente fixation à 3 % du taux de la taxe locale d'équipement en vigueur sur le territoire de la commune de Sceaux serait intervenue, en 1970, dans des conditions irrégulières est inopérant à l'appui de la demande en décharge de M. X... ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 1585 D ducode général des impôts : "I - L'assiette de la taxe est constituée par la valeur de l'ensemble immobilier comprenant les terrains nécessaires à la construction et les bâtiments dont l'édification doit faire l'objet de l'autorisation de construire. Cette valeur est déterminée forfaitairement en appliquant à la surface de plancher développée hors oeuvre une valeur au mètre carré variable selon la catégorie des immeubles. A compter du 15 juillet 1991, cette valeur est la suivante : ...6° Parties des bâtiments hôteliers destinés à l'hébergement des clients : 2140 ...9° Autres constructions soumises à la réglementation des permis de construire ...2910" ; que pour l'application de ces dispositions, une résidence médicalisée pour personnes âgées ne saurait être assimilée à un bâtiment hôtelier ; que M. X... n'est par suite pas fondé à soutenir que la taxe locale d'équipement à laquelle il a été assujetti aurait dû être calculée sur la base de la valeur au mètre carré fixée au 6° précité du I de l'article 1585 D ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à M. X... la décharge de la taxe locale d'équipement à laquelle il avait été assujetti ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui devant la cour administrative d'appel et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt du 14 mai 1998 de la cour administrative d'appel de Paris et le jugement du 30 avril 1997 du tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 2 : La taxe locale d'équipement résultant du permis de construire délivré à M. X... le 26 juin 1992 est remise à la charge de celui-ci.
Article 3 : Les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'équipement, des transports et du logement et à M. Gérard X....


Synthèse
Formation : 9 / 10 ssr
Numéro d'arrêt : 198438
Date de la décision : 31/05/2000
Sens de l'arrêt : Annulation droits maintenus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

68-024-03,RJ1 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - CONTRIBUTIONS DES CONSTRUCTEURS AUX DEPENSES D'EQUIPEMENT PUBLIC - TAXE LOCALE D'EQUIPEMENT ET PARTICIPATION FORFAITAIRE REPRESENTATIVE -a) Décision d'assujettissement - Liquidation de l'imposition par le responsable du service de l'Etat dans le département, chargé de l'urbanisme - Absence (1) - b) Assiette - Résidence pour personnes âgées - Bâtiment hôtelier - Absence.

68-024-03 a) Il découle des modalités d'établissement et de recouvrement de la taxe locale d'équipement que s'il incombe au responsable du service de l'Etat dans le département, chargé de l'urbanisme, de procéder à la liquidation de cette imposition et de communiquer au redevable un exemplaire de la fiche de liquidation, cette autorité ne prend pas, ce faisant, une décision d'assujettissement, laquelle est constituée, en matière fiscale, par la mise en recouvrement de l'impôt. Erreur de droit de la cour administrative d'appel qui a confirmé la décharge de la taxe locale d'équipement sur le fondement de l'illégalité de la décision d'assujettissement, la liquidation de l'impôt ayant été effectuée par un fonctionnaire de la direction départementale de l'équipement n'ayant pas reçu délégation. b) Pour l'application des dispositions de l'article 1585 D du code général des impôts, relatif à l'assiette de la taxe locale d'équipement, une résidence pour personnes âgées ne saurait être assimilée à un bâtiment hôtelier.


Références :

Arrêté du 18 février 1982 art. 3
CGI 1585 A, 1723 quater, 1585 D
CGIAN2 317 septies A
CGIAN4 198 octies
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 89-935 du 29 décembre 1989 art. 118
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Loi 94-112 du 09 février 1994 art. 14
Loi 98-1267 du 30 décembre 1998 art. 50 Finances rectificative pour 1998

1. Voir, pour le versement pour dépassement du plafond légal de densité, décision du même jour, Ministre de l'équipement, des transports et du logement c/ Crépin, n° 198437


Publications
Proposition de citation : CE, 31 mai. 2000, n° 198438
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Fouquet
Rapporteur ?: M. de Froment
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:198438.20000531
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