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06/11/2000 | FRANCE | N°198653

France | France, Conseil d'État, 06 novembre 2000, 198653


Vu la requête, enregistrée le 13 août 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. NGUON X..., demeurant 2, square Paul Valéry à Stains (93240) ; M. NGUON X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 24 mars 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 10 novembre 1994 condamnant La Poste à lui verser la somme de 25 774,27 F avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 1998 et a rejeté ses conclusions de première instance ;
Vu les autres pièces du dossie

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Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribun...

Vu la requête, enregistrée le 13 août 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. NGUON X..., demeurant 2, square Paul Valéry à Stains (93240) ; M. NGUON X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 24 mars 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 10 novembre 1994 condamnant La Poste à lui verser la somme de 25 774,27 F avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 1998 et a rejeté ses conclusions de première instance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de M. NGUON X... et de la SCP Defrénois, Lévis, avocat de La Poste,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. NGUON X... a été victime d'un vol, à la suite de l'ouverture dans un bureau de poste d'un livret d'épargne à son nom par un inconnu, lequel a ainsi pu retirer de ce livret, au moyen d'une pièce d'identité falsifiée, le montant de deux lettres-chèques qu'il avait au préalable dérobées à M. NGUON X... ; que celui-ci se pourvoit contre un arrêt en date du 24 mars 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, estimant que La Poste n'avait commis aucune faute et n'avait pas à indemniser le préjudice subi par M. NGUON X... a, en conséquence, annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 10 novembre 1994 ;
Sur la recevabilité du pourvoi :
Considérant que si, par une lettre adressée le 26 octobre 1995 à la cour administrative d'appel de Paris, M. NGUON X... a estimé que le jugement du tribunal administratif qui faisait droit à sa demande, réglait définitivement le litige, La Poste n'est pas fondée à soutenir qu'il aurait ainsi renoncé aux moyens qu'il invoquait en première instance et qu'il ne pourrait, par suite, utilement les faire valoir devant le juge de cassation ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que les deux lettres-chèques d'un montant total de 25 744,27 F, dont M. NGUON X... était destinataire, ont été versées sur le livret indûment ouvert au nom de M. NGUON X... les 30 juin et 15 juillet 1988 ; qu'entre le 15 et le 30 juillet 1988, cinq remboursements ont été opérés sur ledit livret, ramenant le solde de celui-ci à une somme minime ; qu'alors pourtant que ces demandes de remboursement sont intervenues dans ce bref laps de temps, La Poste n'a pas procédé à une vérification approfondie de l'identité de l'auteur des retraits ; que dans les circonstances de l'espèce, cette négligence est, quelles qu'aient été à l'époque les formalités prévues dans l'instruction générale de La Poste, constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'exploitant public ; qu'en rejetant toute responsabilité de ce dernier, la cour a inexactement qualifié les faits ; que, par suite, M. NGUON X... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que La Poste doit être condamnée à réparer le préjudice subi par M. NGUON X... ;

Considérant que si La Poste soutient qu'en modifiant les modalités de versement des indemnités de chômage à M. NGUON X... sans recueillir son accord et en invoquant un simple retard pour expliquer à M. NGUON X... que les indemnités qu'il attendait ne lui avaient pas encore été payées, l'Assedic de la Seine-Saint-Denis a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, le comportement de cet organisme, qui a la qualité de tiers par rapport au présent litige, n'est pas de nature à exonérer, en tout ou en partie, La Poste de sa responsabilité ; que, dès lors, La Poste n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris l'a condamnée à verser à M. NGUON X... une indemnité de 25 774,27 F assortie d'intérêt au taux légal à compter du 6 septembre 1988 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. NGUON X..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à La Poste la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 43 de la loi susvisée du 10 juillet 1991:
Considérant que l'article 43 de la même loi autorise le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle à demander au juge, dans les conditions prévues à l'article 75-I précité, de condamner la partie perdante au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés ; qu'en l'espèce, en l'absence de frais exposés par M. NGUON X... autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été accordée, la demande de M. NGUON X... tendant à ce que La Poste soit condamnée à lui payer la somme de 15 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, doit être rejetée ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 24 mars 1998 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par La Poste devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de La Poste au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de M. NGUON X... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Dara Y...
X..., à La Poste et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 198653
Date de la décision : 06/11/2000
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

60-02-04-02 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS - SERVICE POSTAL.


Références :

Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75, art. 43


Publications
Proposition de citation : CE, 06 nov. 2000, n° 198653
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme de Margerie
Rapporteur public ?: Mme de Silva

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:198653.20001106
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