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27/06/2001 | FRANCE | N°226261

France | France, Conseil d'État, 1 / 2 ssr, 27 juin 2001, 226261


Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SYNDICAT SUD TRAVAIL, dont le siège est ..., représenté par M. Luc Ferrand, mandaté à cet effet ; le SYNDICAT SUD TRAVAIL demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation pour excès de pouvoir de la circulaire n° 2000-16 du 26 juin 2000 du ministre de l'emploi et de la solidarité relative au pilotage national de l'expérimentation "couveuses d'activités ou d'entreprises" en tant qu'elle autorise des dérogations au droit commun ;
2°) la condamnation de l'Etat à l

ui verser la somme de 1 000 F au titre des frais exposés et non compris ...

Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SYNDICAT SUD TRAVAIL, dont le siège est ..., représenté par M. Luc Ferrand, mandaté à cet effet ; le SYNDICAT SUD TRAVAIL demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation pour excès de pouvoir de la circulaire n° 2000-16 du 26 juin 2000 du ministre de l'emploi et de la solidarité relative au pilotage national de l'expérimentation "couveuses d'activités ou d'entreprises" en tant qu'elle autorise des dérogations au droit commun ;
2°) la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Donnat, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Sur la qualité pour agir du signataire de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 30 des statuts du syndicat requérant : "Seul le conseil national peut mandater le (la) secrétaire national(e) ou tout autre membre du syndicat aux fins d'agir, au nom du syndicat, devant toute juridiction tant en demande qu'en défense" ; que la requête du SYNDICAT SUD TRAVAIL a été présentée et signée par M. Ferrand agissant, aux termes d'une attestation figurant au dossier signée par le secrétaire national du SYNDICAT SUD TRAVAIL, en vertu d'une délibération du 15 septembre 2000 du conseil national de ce syndicat ; que la circonstance invoquée par le ministre de l'emploi et de la solidarité que M. Ferrand ne serait pas membre du conseil national du syndicat requérant est, en tout état de cause, sans influence sur sa capacité à représenter le syndicat en justice au regard de l'article 30 précité de ses statuts ; que si le ministre de l'emploi et de la solidarité soutient également que la validité de l'attestation fournie par le secrétaire national du SYNDICAT SUD TRAVAIL n'est pas démontrée, il ressort toutefois des pièces du dossier que M. Ferrand avait qualité pour former, au nom de ce syndicat, un recours pour excès de pouvoir contre la circulaire du 26 juin 2000 ;
Sur l'intérêt à agir du syndicat requérant :
Considérant qu'il ressort des termes mêmes de la circulaire attaquée du ministre de l'emploi et de la solidarité, adressée aux préfets de région ou de département, qu'elle entend autoriser des pratiques "dérogatoires au droit commun" en ouvrant, à cette fin, un "droit à l'expérimentation sur une durée de 18 mois", au profit des "couveuses d'activités ou d'entreprises", devant aboutir notamment au recensement, par un comité de pilotage national, des "dérogations au droit commun qui peuvent être tolérées" ; que le SYNDICAT SUD TRAVAIL a pour objet la défense des intérêts collectifs des agents du ministère de l'emploi et de la solidarité ; que les dispositions de la circulaire attaquée sont de nature à porter atteinte à l'application régulière du droit du travail à laquelle les inspecteurs du travail doivent veiller ; que, par suite, le SYNDICAT SUD TRAVAIL justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation pour excès de pouvoir de cette circulaire ;
Sur la légalité de la circulaire :
Considérant qu'en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires autorisant, dans les limites et aux conditions qu'elles définissent, les dérogations temporaires à l'état du droit en vigueur qu'implique la mise en oeuvre d'une expérimentation destinée à préparer la modification ultérieure de cet état de droit, l'autorité ministérielle ne saurait légalement autoriser les services déconcentrés de l'Etat à tolérer des dérogations à des règles qui ne relèvent pas de sa compétence ;

Considérant que la circulaire attaquée, et notamment certaines des dispositions de ses paragraphes 3.2.1. et 4.2., autorise des dérogations au droit commun en méconnaissance des exigences du principe de légalité rappelées ci-dessus ; qu'elle est dans cette mesure entachée d'illégalité ; qu'ainsi, le SYNDICAT SUD TRAVAIL est recevable et fondé à en demander l'annulation pour excès de pouvoir en tant qu'elle autorise de telles dérogations ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 reprises par celles de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer au SYNDICAT SUD TRAVAIL la somme de 1 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La circulaire du ministre de l'emploi et de la solidarité du 26 juin 2000 relative au pilotage national de l'expérimentation "couveuses d'activités ou d'entreprises" est annulée en tant qu'elle autorise des dérogations au droit commun.
Article 2 : L'Etat versera au SYNDICAT SUD TRAVAIL la somme de 1 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT SUD TRAVAIL et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 226261
Date de la décision : 27/06/2001
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - MINISTRES - MINISTRE CHARGE DU TRAVAIL - Limites du pouvoir réglementaire - Autorisation donnée aux services de tolérer des dérogations à des règles qui ne relèvent pas de la compétence du ministre - Illégalité.

01-02-02-01-03-16 En l'absence de dispositions législatives ou réglementaires autorisant, dans les limites et aux conditions qu'elles définissent, les dérogations temporaires à l'état du droit en vigueur qu'implique la mise en oeuvre d'une expérimentation destinée à préparer la modification ultérieure de cet état du droit, l'autorité ministérielle ne saurait légalement autoriser les services déconcentrés de l'Etat à tolérer des dérogations à des règles qui ne relèvent pas de sa compétence. Illégalité d'une circulaire du ministre de l'emploi et de la solidarité, adressée aux préfets de région et de département, autorisant des "pratiques dérogatoires au droit commun" en ouvrant, à cette fin, un "droit à l'expérimentation sur une durée de 18 mois", au profit des "couveuses d'activités ou d'entreprises", devant aboutir notamment au recensement, par un comité de pilotage national, des "dérogations au droit commun qui peuvent être tolérées".

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - INTERET POUR AGIR - EXISTENCE D'UN INTERET - INTERET LIE A UNE QUALITE PARTICULIERE - Inspecteurs du travail - Décisions de nature à porter atteinte à l'application régulière du droit du travail.

54-01-04-02-01 Circulaire du ministre de l'emploi et de la solidarité, adressée aux préfets de région et de département, autorisant des "pratiques dérogatoires au droit commun" en ouvrant, à cette fin, un "droit à l'expérimentation sur une durée de 18 mois", au profit des "couveuses d'activités ou d'entreprises", devant aboutir notamment au recensement, par un comité de pilotage national, des "dérogations au doit commun qui peuvent être tolérées". Syndicat requérant ayant pour objet la défense des intérêts collectifs des agents du ministère de l'emploi et de la solidarité. Les dispositions de la circulaire sont de nature à porter atteinte à l'application régulière du droit du travail à laquelle les inspecteurs du travail doivent veiller. Syndicat justifiant par suite d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de cette circulaire.


Références :

Circulaire du 26 juin 2000 emploi et solidarité décision attaquée annulation partielle
Code de justice administrative L761-1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2001, n° 226261
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Donnat
Rapporteur public ?: Mme Boissard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:226261.20010627
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