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05/11/2001 | FRANCE | N°230040

France | France, Conseil d'État, 8 / 3 ssr, 05 novembre 2001, 230040


Vu la requête, enregistrée le 7 février 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Stéphane X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) de désigner un expert indépendant pour se prononcer sur la compatibilité de sa vision avec les normes exigées pour la délivrance des certificats médicaux de classe 1 et 2 pour les personnels navigants techniques ;
2°) d'annuler les décisions 27720 du 12 juillet 2000 et 28378 du 6 décembre 2000 prises par le Conseil médical de l'aéronautique civile en ce qu'elles le déclarent inapte pour la classe 1 (n

avigant professionnel) et en ce qu'elles lui imposent le port de verres c...

Vu la requête, enregistrée le 7 février 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Stéphane X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) de désigner un expert indépendant pour se prononcer sur la compatibilité de sa vision avec les normes exigées pour la délivrance des certificats médicaux de classe 1 et 2 pour les personnels navigants techniques ;
2°) d'annuler les décisions 27720 du 12 juillet 2000 et 28378 du 6 décembre 2000 prises par le Conseil médical de l'aéronautique civile en ce qu'elles le déclarent inapte pour la classe 1 (navigant professionnel) et en ce qu'elles lui imposent le port de verres correcteurs pour la classe 2 (navigant non professionnel) ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu l'article 6 bis de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
Vu le code de l'aviation civile ;
Vu le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 ;
Vu l'arrêté du 2 décembre 1988 modifié, relatif à l'aptitude physique et mentale du personnel navigant technique de l'aviation civile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X... demande l'annulation d'une part de la décision en date du 12 juillet 2000 par laquelle le conseil médical de l'aéronautique civile, saisi par un recours administratif à l'encontre d'une décision du centre d'expertise médical du personnel navigant, en date du 14 mars 2000, le déclarant inapte à la classe 1 (pilotes professionnels) du personnel navigant technique, l'a déclaré "inapte à la classe 1, et apte à la classe 2 (pilotes non professionnels) sous réserve du port de verres correcteurs en vol et d'une paire de lunettes de secours en cabine" et, d'autre part, de la décision en date du 6 décembre 2000 notifiée le 7 décembre 2000 par laquelle le conseil médical de l'aéronautique civile a rejeté son recours gracieux dirigé contre la décision du 12 juillet 2000 ;
Sur la décision du 12 juillet 2000 :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil médical de l'aéronautique civile était régulièrement composé lorsqu'il a siégé en vue de procéder à l'examen de la demande de M. X... ;
Considérant que la décision attaquée a été prise par le conseil médical de l'aéronautique civile dans le cadre d'attributions lui imposant, selon les dispositions des articles 4 et 104 du décret du 6 septembre 1995, pris en application de l'article L. 366 du code de la santé publique, de ne fournir "à l'administration ou à l'organisme" employeur que "ses conclusions sur le plan administratif sans indiquer les raisons médicales qui les motivent" ; qu'ainsi, et conformément au deuxième alinéa de l'article 4 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, aux termes duquel "les dispositions de la présente loi ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret", la décision attaquée concernant M. X..., n'avait pas à être motivée en la forme ; que cet état du droit ne fait pas obstacle à ce que le requérant demande communication des informations à caractère médical le concernant par l'intermédiaire d'un médecin qu'il désigne à cet effet ainsi que le prévoit l'article 6 bis ajouté à la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 par l'article 9 de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant que les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas applicables au conseil médical de l'aéronautique civile dont les décisions ne présentent pas un caractère juridictionnel ;
Considérant que l'omission de l'indication des voies et délais de recours par la décision du 12 juillet 2000 a, eu égard aux dispositions de l'article 1er du décret du 11 janvier 1965 modifié, reprises à l'article R. 421-5 du code de justice administrative, pour effet qu'aucune forclusion ne peut être opposée aux conclusions de la requête dirigées contre cette décision ; qu'en revanche, cette omission est sans influence sur sa légalité ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions du 2 et du 4 a), b) et d) de l'article D 424-2 du code de l'aviation civile qu'il appartient au conseil médical de l'aéronautique civile de se prononcer sur l'aptitude physique et mentale du personnel navigant professionnel et non professionnel en fonction des normes d'aptitude réglementairement définies et de son pouvoir d'appréciation sur les demandes de dérogation dont il est saisi ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 2 décembre 1988 relatif à l'aptitude physique et mentale du personnel navigant technique de l'aviation civile : "La délivrance et le renouvellement ... d'une carte de stagiaire ou d'une licence sont subordonnés à des conditions d'aptitude physique et mentale appréciée lors d'une consultation effectuée par une autorité médicale agréée" ; qu'aux termes de l'article 9 de cet arrêté, lorsqu'un candidat saisit le conseil médical de son dossier, celui-ci "se prononce sur l'aptitude de l'intéressé et peut accorder une dérogation si elle ne nuit pas à la sécurité aérienne. Il peut assortir sa décision de conditions et de restrictions ..." ; qu'ainsi, alors même que M. X... n'avait saisi le conseil médical que de la décision du centre d'expertise médicale du personnel navigant de la déclarer inapte à la classe 1, le conseil avait compétence pour examiner également l'aptitude de l'intéressé à la classe 2 et pour assortir cette aptitude de conditions jugées nécessaires à la sécurité aérienne ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que le conseil aurait excédé sa compétence en soumettant son aptitude à la classe 2 à certaines conditions, aptitude pour laquelle il avait antérieurement été déclaré apte sans exigences particulières ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les affections ophtalmologiques dont souffre M. X..., sont de celles qui, en vertu des dispositions de l'arrêté du 2 décembre 1988 modifié et, du paragraphe 1-2 de son annexe I et du paragraphe 2-2 de son annexe 2, font obstacle à ce que soit reconnue l'aptitude d'un pilote à l'exercice du pilotage aérien professionnel et autorisent le conseil médical de l'aéronautique civile à assortir l'aptitude au pilotage non-professionnel de conditions particulières ; qu'ainsi, la décision du 12 juillet 2000 contestée prononçant "l'inaptitude classe 1 et l'aptitude classe 2 par dérogation avec port de verres correcteurs obligatoire en vol plus une paire de lunettes de secours en cabine" de M. X... est légalement justifiée ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'expertise sollicitée par le requérant ;
Considérant que le détournement de procédure allégué n'est pas établi ;
Sur la décision du 6 décembre 2000 :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article D 424-4 du code de l'aviation civile, "Les membres du conseil ne peuvent prendre part aux délibérations portant sur l'examen des cas individuels dont ils ont déjà eu à connaître à l'occasion de leur activité extérieure au conseil" ; qu'aux termes de l'article D. 424-4 précité "Les délibérations ont lieu à huit clos" ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de la feuille de présence signée par les participants à la séance du 6 décembre 2000 du conseil médical de l'aéronautique civile, que le signataire de la décision du centre d'expertise médicale du personnel navigant en date du 14 mars 2000 déclarant le requérant inapte à la classe 1, figurait parmi les participants à la séance ; qu'ainsi, il est réputé avoir pris part aux délibérations relatives au cas individuel de M. X... ; que, par suite, la décision attaquée du 6 décembre 2000, prise en méconnaissance des dispositions du code de l'aviation civile, a été rendue selon une procédure irrégulière ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à demander l'annulation de la seule décision du 6 décembre 2000 du conseil médical de l'aéronautique civile écartant son recours gracieux contre la décision prise par cette instance le 12 juillet 2000 ;
Article 1er : La décision du conseil médical de l'aéronautique civile du 6 décembre 2000 concernant M. X... est annulée.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Stéphane X... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Formation : 8 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 230040
Date de la décision : 05/11/2001
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

01-03-01-02-01-03 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCEDURE - QUESTIONS GENERALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - ABSENCE -CADécision du conseil médical de l'aéronautique civile déclarant un pilote inapte au vol - Interdiction de divulgation de faits couverts par le secret médical.

01-03-01-02-01-03 Décision relative à l'aptitude au vol d'un pilote, prise par le conseil médical de l'aéronautique civile dans le cadre d'attributions lui imposant, selon les dispositions des articles 4 et 104 du décret du 6 septembre 1995, pris en application de l'article L. 366 du code de la santé publique, de ne fournir "à l'administration ou à l'organisme" employeur que "ses conclusions sur le plan administratif sans indiquer les raisons médicales qui les motivent" . Ainsi, et conformément au deuxième alinéa de l'article 4 de la loi du 11 juillet 1979, aux termes duquel "les dispositions de la présente loi ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret", cette décision n'avait pas à être motivée en la forme. Cet état du droit ne fait pas obstacle à ce que le requérant demande communication des informations à caractère médical le concernant par l'intermédiaire d'un médecin qu'il désigne à cet effet ainsi que le prévoit l'article 6 bis ajouté à la loi du 17 juillet 1978 par l'article 9 de la loi du 11 juillet 1979.


Références :

Arrêté du 02 décembre 1988 art. 1, art. 9, annexe I
Code de justice administrative R421-5
Code de l'aviation civile D424-2, D424-4
Code de la santé publique L366
Décret 65-29 du 11 janvier 1965 art. 1
Décret 95-1000 du 06 septembre 1995 art. 4, art. 104
Loi 78-753 du 17 juillet 1978 art. 6 bis
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 4, art. 9, art. 6


Publications
Proposition de citation : CE, 05 nov. 2001, n° 230040
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Sauron
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:230040.20011105
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