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05/12/2001 | FRANCE | N°77478

France | France, Conseil d'État, 9 / 10 ssr, 05 décembre 2001, 77478


Vu la requête, enregistrée le 8 avril 1986 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Lucien X..., représenté par Maître Delaby, syndic à la liquidation des biens de M. X..., élisant domicile au cabinet de conseils juridiques sis ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1977 dans les rôles de la commune de Soissons ;

2°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué ;
3°) de lui ac...

Vu la requête, enregistrée le 8 avril 1986 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Lucien X..., représenté par Maître Delaby, syndic à la liquidation des biens de M. X..., élisant domicile au cabinet de conseils juridiques sis ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1977 dans les rôles de la commune de Soissons ;
2°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué ;
3°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu l'ordonnance n° 67-837 du 28 septembre 1967 et la loi n° 72-651 du 11 juillet 1972 ;
Vu la loi n° 76-660 du 19 juillet 1976, la loi n° 77-1467 du 30 décembre 1977, notamment son article 68 et la loi n° 78-688 du 5 juillet 1978 ;
Vu la loi n° 82-1126 du 29 décembre 1982 ;
Vu le décret n° 76-1240 du 29 décembre 1976 et le décret n° 78-851 du 10 août 1978 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mahé, Auditeur,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le groupement d'intérêt économique (G.I.E.) "La Pointe", soumis aux termes de ses statuts à la loi du 11 juillet 1972 relative aux magasins collectifs de commerçants indépendants, a été constitué en vue de la conception et de la réalisation, à Soissons, d'une unité commerciale de grande surface comportant un hypermarché, une galerie marchande et des installations annexes ; que M. X... a revendu le 30 décembre 1977 pour 573 250 F les parts qu'il avait souscrites dans ce G.I.E. le 28 octobre 1972 pour 3 000 F et le 30 novembre 1976 pour 20 250 F ; qu'il a été assujetti à raison des profits ainsi réalisés à une cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1977, sur la base, d'une part, de l'article 35 A du code général des impôts, pour la fraction de la plus-value afférente aux parts acquises en 1972, et d'autre part, de l'article 150 A du même code, pour la fraction afférente aux parts acquises en 1976 ; que M. Delaby, syndic à la liquidation des biens de M. X..., relève appel du jugement du 28 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande en décharge de cette imposition présentée par M. X... ;
Considérant que le I de l'article 239 quater du code général des impôts, qui exempte les G.I.E. de l'impôt sur les sociétés, prévoit que chacun de leurs membres est personnellement passible, pour la part des bénéfices correspondant à ses droits dans le groupement, soit de l'impôt sur le revenu, soit de l'impôt sur les sociétés s'il s'agit de personnes morales relevant de cet impôt ;
Considérant, en premier lieu, que l'article 35 A du code général des impôts alors en vigueur, dans sa rédaction issue de l'article 4 de la loi du 19 décembre 1963 et de l'article 8 de la loi du 31 décembre 1973, soumettait à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux les profits réalisés par des personnes cédant des immeubles ou des fractions d'immeubles qu'elles avaient acquis ou fait construire dans une intention spéculative depuis moins de dix ans ; qu'il appliquait également ce régime aux profits réalisés à l'occasion de la cession de "droits immobiliers ou mobiliers se rapportant" à des immeubles ; qu'aux termes du I de l'article 4 de la loi du 19 juillet 1976, entré en vigueur le 1er janvier 1977 : "Les plus-values réalisées plus de deux ans et moins de dix ans après une acquisition à titre onéreux et imposables en application de l'article 35 A du code général des impôts restent déterminées suivant les dispositions de cet article" ;

Considérant que la loi du 11 juillet 1972 s'applique, selon son article premier, aux "personnes physiques ou morales réunies dans une même enceinte, sous une même dénomination, pour exploiter, selon des règles communes, leurs fonds de commerce ou leur entreprise immatriculée au répertoire des métiers sans en aliéner la propriété, créant ainsi un magasin collectif de commerçants indépendants" ; que l'article 2 de cette loi précise que ces personnes constituent, notamment lorsqu'elles sont organisées sous la forme d'un G.I.E., "une personne morale qui a la propriété ( ...) des bâtiments et aires annexes du magasin collectif" ; qu'aux termes de l'article 4 de la même loi : "Chaque membre du groupement d'intérêt économique ( ...) est titulaire de parts ( ...) non dissociables de l'utilisation d'un emplacement déterminé par le contrat constitutif ou les statuts" ; que lorsque un G.I.E. soumis à la loi du 11 juillet 1972 a pour seul élément de patrimoine un bien immobilier composé d'un magasin de grande surface réparti en lots dont l'usage est attribué à ses membres à raison de leurs parts dans ce groupement, ces parts doivent être regardées comme des droits mobiliers se rapportant à des immeubles ; que c'est donc à bon droit que l'administration a soumis à l'imposition prévue par l'article 35 A la plus-value réalisée par M. X... sur la fraction des parts du G.I.E. "La Pointe" qu'il a détenues pendant plus de deux ans à l'occasion d'une opération dont le caractère spéculatif n'est pas contesté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 150 A du code général des impôts, issu de l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 : "Les plus-values effectivement réalisées par des personnes physiques ou des sociétés de personnes lors de la cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature sont passibles : 1° De l'impôt sur le revenu, lorsque ces plus-values proviennent de biens immobiliers cédés moins de deux ans après l'acquisition ou de biens mobiliers cédés moins d'un an après celle-ci ; 2° De l'impôt sur le revenu suivant les règles particulières définies aux articles 150 B à 150 T, selon que ces plus-values proviennent : a. De biens immobiliers cédés plus de deux ans et moins de dix ans après l'acquisition ; b. De biens mobiliers cédés plus d'un an et moins de dix ans après l'acquisition ( ...)" ; qu'il résulte de la combinaison de cet article et du I de l'article 4 de la loi du 19 juillet 1976, éclairés par leurs travaux préparatoires, qu'en soumettant au régime de l'article 150 A les plus-values immobilières réalisées dans un délai de moins de deux ans tout en maintenant le régime de l'article 35 A pour les plus-values immobilières à caractère spéculatif réalisées dans un délai de plus de deux ans, le législateur n'a pas entendu renoncer à assimiler à des plus-values immobilières les plus-values spéculatives réalisées moins de deux ans après l'acquisition d'un bien qui, antérieurement à la loi du 19 juillet 1976, auraient été soumises au régime de l'article 35 A du code général des impôts ; que c'est donc également à bon droit que l'administration a soumis à l'imposition prévue par le 1° de l'article 150 A du code général des impôts la plus-value réalisée sur la fraction des parts du G.I.E. "La Pointe" détenue pendant moins de deux ans par le requérant ;

Considérant, enfin, que s'il est soutenu que l'augmentation de la valeur des parts que détenait M. X... dans le G.I.E. "La Pointe" est en partie attribuable à l'autorisation d'ouvrir un centre commercial reçue le 21 février 1974 par ce G.I.E., cette circonstance ne retire pas au gain qu'il a réalisé son caractère de plus-value immobilière ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le syndic à la liquidation des biens de M. X... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande dont il était saisi, tendant à la décharge du supplément d'impôt sur le revenu auquel M. X... a été assujetti au titre de l'année 1977 ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer au requérant la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du syndic à la liquidation des biens de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Maître Delaby et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 9 / 10 ssr
Numéro d'arrêt : 77478
Date de la décision : 05/12/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-08-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - PLUS-VALUES DES PARTICULIERS - PLUS-VALUES IMMOBILIERES - Existence - Plus-values spéculatives réalisées moins de deux ans après l'acquisition d'un bien qui, antérieurement à la loi du 19 juillet 1976, auraient été soumises au régime de l'article 35 A du CGI.

19-04-02-08-02 Aux termes de l'article 150 A du code général des impôts, issu de l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 : "Les plus-values effectivement réalisées par des personnes physiques ou des sociétés de personnes lors de la cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature sont passibles : 1° De l'impôt sur le revenu, lorsque ces plus-values proviennent de biens immobiliers cédés moins de deux ans après l'acquisition ou de biens mobiliers cédés moins d'un an après celle-ci ; 2° De l'impôt sur le revenu suivant les règles particulières définies aux articles 150 B à 150 T, selon que ces plus-values proviennent : a. De biens immobiliers cédés plus de deux ans et moins de dix ans après l'acquisition ; b. De biens mobiliers cédés plus d'un an et moins de dix ans après l'acquisition (...)". Il résulte de la combinaison de cet article et du I de l'article 4 de la loi du 19 juillet 1976, éclairés par leurs travaux préparatoires, qu'en soumettant au régime de l'article 150 A les plus-values immobilières réalisées dans un délai de moins de deux ans tout en maintenant le régime de l'article 35 A pour les plus-values immobilières à caractère spéculatif réalisées dans un délai de plus de deux ans, le législateur n'a pas entendu renoncer à assimiler à des plus-values immobilières les plus-values spéculatives réalisées moins de deux ans après l'acquisition d'un bien qui, antérieurement à la loi du 19 juillet 1976, auraient été soumises au régime de l'article 35 A du code général des impôts.


Références :

CGI 35 A, 150, 239 quater, 150 A
Code de justice administrative L761-1
Loi du 31 décembre 1973 art. 8
Loi 63-1241 du 19 décembre 1963 art. 4
Loi 72-651 du 11 juillet 1972 art. 2, art. 4
Loi 76-660 du 19 juillet 1976 art. 4, art. 1


Publications
Proposition de citation : CE, 05 déc. 2001, n° 77478
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. Mahé
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:77478.20011205
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